Pour la Recherche n° 14, Septembre 1997 : Economie et Santé mentale
Editorial - Dr Claude Veil -
Dès ses premières réunions, le comité de rédaction de PLR a formé le projet de consacrer un numéro à l'interface entre économie et psychiatrie. Si la maturation de ce projet a été relativement longue, c'est parce que l'exercice n'avait pas, pour trois ordres de motifs, beaucoup de précédents.
D'une part en effet, comme Th. Lecomte et H. Péquignot l'ont naguère fort bien montré, le champ psychiatrique pose aux sciences économiques des problèmes méthodologiques d'une exceptionnelle complexité. Il est certes communément admis que le savoir sur la pathologie mentale appartient à la famille des sciences médicales, mais les entités en cause ne sont que rarement modélisables selon les caractères morphologiques de la pathologie somatique. Loin de là, la pathologie mentale s'inscrit souvent dans une position transversale par rapport à cette dernière ; et, qui plus est, face à la dichotomie traditionnelle entre "le sanitaire" et "le social" , le fait psychiatrique n'est réductible ni à l'un ni à l'autre.
D'autre part, les représentations sociales respectives des deux disciplines concourent, généralement à l'insu des intéressés, à décourager les tentatives de rapprochement. Il est inutile ici d'insister sur les aspects caricaturaux de l'image de la psychiatrie et des psychiatres. Mais on doit évoquer une forme courante de méconnaissance, propre à bloquer le dialogue. La plupart des auteurs de dictionnaires reconnaissent à l'entrée "économie" pour principal sens celui de l'ensemble de la production et de l'utilisation des richesses ; mais cette signification ouverte est brouillée par le halo sémantique qui interpose le spectre de l'économie comme inverse de la prodigalité, voire comme le voile pudique de quelque ladrerie bureaucratique.
Enfin, la comparaison avec les sciences juridiques est éclairante : qu'il s'agisse de préparer des décisions ad litem ou qu'on entre dans la voie d'une nouvelle construction théorique, un grand nombre de juristes et un grand nombre de psychiatres possèdent l'expérience concrète de rencontres au cours desquelles ils se familiarisent avec une conceptualisation différente de la leur - par exemple en matière de responsabilité. Tandis qu'il est de fait que les itinéraires personnels des économistes et des psychiatres leur offrent peu d'occasions de se connaître.
Néanmoins, il est incontestable qu'une aspiration se fait jour.
Chez les uns comme chez les autres des demandes sont exprimées : demandes d'information générale surtout, et puis, de plus en plus clairement, énoncé d'un besoin de coopération au cours d'une recherche.
Pour ce qui concerne l'initiation aux connaissances en économie de la santé, il existe d'excellents manuels universitaires, dont l'accessibilité est satisfaisante. Malheureusement ils nous instruisent vraiment peu sur l'économie de la psychiatrie. Cette carence est vraisemblablement imputable aux motifs évoqués plus haut. Toujours est-il que, quitte à devoir surmonter cette sorte de frustration, il est loisible à tout psychiatre de remonter aux sources, et de prendre connaissance dans le texte de comptes rendus de travaux originaux. Nous avons suggéré à quelques uns une telle lecture. La plupart y ont pris grand intérêt, et plusieurs l'ont ressentie comme une découverte. L'analyse économique leur est apparue comme remueuse d'idées, et le chercheur en économie comme créateur d'hypothèses éventuellement fécondes jusque dans leur propre domaine de compétence.
Les collaborateurs de ce numéro de PLR ont souhaité s'inscrire dans ce mouvement, en présentant le maximum d'information commentée sur ce qui se fait, se pense et s'écrit à l'interface de la psychiatrie et de l'économie, y compris l'apport d'autres disciplines (telle la sociologie) et les retombées concrètes (telle l'aide à la décision).
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Adresses utiles et note aux lecteurs
u Le CREDES
(Centre de Recherche d'Etude et Documentation en Economie de la Santé)
1, rue Paul Cézanne - 75008 - Paris - tel 01 53 93 43 35
Une consultation du fonds documentaire est possible sur rendez-vous (espace insuffisant pour recevoir un grand nombre de personnes à la fois)
( 01 53 93 43 00
u Le CERMES
(Centre de Recherche Médecine Maladie et Sciences Sociales) est un organisme conjoint : CNRS/INSERM/EHESS
182 Bd de la Villette - 75019 - ( 01 53 72 80 25
u Le SESI
(Service des Statistiques, des Etudes et des Systèmes d'Information)
Ministère des Affaires Sociales et de l'Intégration - Ministère de la Santé et de l'Action Humanitaire. - 7-11 Place des cinq Martyrs du Lycée Buffon - 75507 Paris cedex 15 - ( 01 44 36 91 23
Note aux lecteurs :
u Comme chaque fois que nous présentons un dossier, nous rappelons que les données apportées ne sont pas exhaustives et peuvent être complétées par les lecteurs de PLR qui les publiera dans un de ses numéros ultérieurs. De même, PLR accueillera volontiers les réactions de ses lecteurs.
Remerciements
À D. Antoine (Statisticienne - SESI), M. Bungener (économiste - Cermes) et T. Lecomte (Directeur de recherche - CREDES) pour avoir non seulement participé à la rédaction de ce numéro mais également pour avoir répondu, lors d'un entretien, aux questions des membres du Comité de rédaction de PLR. Ce travail préparatoire a été très précieux pour l'oganisation du numéro.
Et à O. Boulte (documentaliste U 357 INSERM), Ph. Bertin (documentaliste MIRE) et C. Polge (documentaliste INSERM) pour la recherche et l'envoi d'une documentation abondante.
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