Actualité santé psychiatrie


Évaluation des psychothérapies psychodynamiques
Que trouve-t-on dans la littérature ?

Dr Jean-Michel THURIN ©

Cette présentation est issue d'un travail collectif sur l'évaluation des psychothérapies, dans lequel j'étais plus particulièrement chargé des études portant sur les psychothérapies psychodynamiques chez l'adulte. Le résultat de cette lecture m'amène à proposer une information et une discussion sur les données existantes qui ne manquent vraiment pas d'intérêt.

Chaque jour, je présenterai des extraits d'articles qui s'organiseront peu à peu et susciteront questions, commentaires et pourquoi pas projets de recherche et d'articles.

Avant-propos de la presentation 2

La sélection complète qui nous a été confiée comprend 121 articles concernant la psychothérapie psychodynamique (PPD). En comparaison, le paquet "thérapie cognitivo-comportementale", thérapie structurée dont l'apparition est beaucoup plus récente que celle de la psychothérapie psychanalytique en comprenait 275. Cette différence apporte une indication quantitative sur la façon dont chaque approche s'est saisie de l'évaluation.
La répartition des questions traitées dans les publications relatives aux psychothérapie psychodynamiques montre également que l'efficacité "brute", qui paraît pourtant la plus simple à aborder a été plutôt négligée dans ce champ par rapport à ce qu'il est convenu de nommer "approche qualitative" ou "approche des facteurs de changements". Autrement dit, une part importante des articles est consacrée à tout ce qui concerne la compréhension des mécanismes, des modes d'action des psychothérapies se rattachant à la théorie psychanalytique et de leurs conditions, plutôt qu'à la question de leur efficacité générale dont la réponse semble aller de soi. Ou plutôt, cette question serait beaucoup trop complexe pour pouvoir être résolue par des méthodes statistiques qui complèteraient l'évaluation qui peut être faite conjointement par la psychothérapeute et son patient de leur travail et de ses résultats. D'une façon générale, l'évaluation du résultat d'une psychothérapie psychodynamique se situe dans une perspective beaucoup plus globale que celle de la guérison des symptômes initiaux qui ont été à l'origine de la mise en place du protocole psychothérapique. Les symptômes ont une importance relativement secondaire par rapport à des troubles moins tangibles qui affectent la personnalité dans son ensemble (Alexander, 1937). De plus, les cas traités sont généralement complexes, s'exprimant sous la forme d'une combinaison de différentes catégories de troubles, dont l'intensité peut, en outre, être plus ou moins sévère. Déjà difficile dans un cadre interindividuel, la tâche semble quasi impossible quand on entre dans une perspective de généralisation : il faudrait dans ce cas neutraliser de nombreuses variables personnelles et en particulier le caractère relativement non standardisé de la procédure psychothérapique. De nombreux psychanalystes ont recherché des solutions à ces différents problèmes, ou du moins la façon de les contourner. Par exemple, si les objectifs ne se limitent pas à la résolution des symptômes , peut-on les préciser (Knight, 1941) et évaluer s'ils ont été atteints ? Dans quelles conditions ? On constate ainsi que, depuis plusieurs années, des études répondant aux standards méthodologiques et présentant non seulement des résultats concernant une évaluation de la réduction des symptômes dans différentes catégories nosologiques, mais également des modifications de la structure psychodynamique qui sous-tend le désordre lui-même commencent à apparaître. Ces études ont également l'intérêt de préciser le modèle théorique particulier sur lequel s'appuie la psychothérapie (la psychanalyse prend en compte les aspects développementaux et conflictuels des différentes instances psychiques dont l'immaturité ou la désorganisation se répercutent sur le fonctionnement et s'expriment finalement sous la forme de troubles), les objectifs poursuivis, les modalités techniques utilisées et divers paramètres susceptibles d'intervenir dans les résultats. Répondant ainsi à une question de départ, très réduite : est-ce que la psychothérapie psychodynamique donne des résultats dans telle pathologie, ces études "débordent" de fait cette réduction et apportent finalement de nombreuses indications sur les modifications de variables psychodynamiques (par exemple, la qualité des relations d'objet) et les modalités pratiques de la cure. Les instruments validés propres à évaluer les aspects psychodynamiques sont encore sans doute trop peu nombreux, mais ils ont le mérite de commencer à exister (Hoglend et al., 1999, 2000).

-- Parmi les 121 articles, 22 traitent de questions générales comme l'historique, la possibilité et la nécessité de l'évaluation des psychothérapies psychodynamiques, leurs définitions d'un point de vue général (psychanalyse et psychothérapies psychanalytiques) et particulier (les différentes psychothérapies brèves ainsi que les différentes modalités psychothérapiques (en relation avec des modèles un peu différents) des psychothérapies longues utilisées en particulier dans les troubles de la personnalité. Ces différents aspects sont réunis dans la première partie de cette présentation.

-- D'autres concernent l'approche évaluative de résultats proprement dite, c'est à dire qui concerne les résultats obtenus dans les différentes pathologies psychiatriques (42) et leurs conditions.
On peut ainsi distinguer dans ce second groupe d'études quatre grandes questions :

1 - l'analyse des résultats généraux (et très globaux) des psychothérapies à partir de publications dans lesquelles les psychothérapies psychodynamiques sont incluses. Ces résultats sont comparées à ceux d'autres traitements (psychothérapiques ou médicamenteux) ou à l'absence de traitement ; (Andrews et Harvey, 1981)

2 - l'analyse des résultats généraux obtenus avec un type particulier de psychothérapie psychodynamique, celui des psychothérapies brèves (comparées aux autres psychothérapies brèves, traitements médicamenteux isolés ou associés, absence de traitement) (Anderson et Lambert, 1995 ; Crits-Christoph, 1992 ; Svartberg et Stiles, 1991 ; Ursano et Hales, 1986).

Ces deux premiers aspects sont traités sous la forme de méta-analyses et de revues systématiques ;

3 - la présentation et l'analyse de recherches menées à propos d'une pathologie particulière (par exemple, troubles psychotiques, dépression, troubles anxieux, troubles de la personnalité, troubles des conduites alimentaires). On trouve dans cette catégorie une méta-analyse portant sur la schizophrénie ( Malmberg et Fenton, 2001) et quatre revues systématiques portant respectivement sur les troubles de la personnalité (Bateman et Fonagy, 2000 ; Adler, 1989), le trouble panique (Milrod et Shear, 1991), la dépression (Robinson, Berman et Neimeyer, 1990). Ces résultats sont complétés par ceux issus de recherches qui peuvent être "contrôlées" (avec groupe de contrôle) (9 études), ou non. Ce dernier lot comprend 6 études.

4 - l'analyse des facteurs de changements est l'objet de X études.

Elle a des implications pratiques importantes (par exemple, on considérera que la première tâche avec un patient souffrant de troubles de la personnalité est de lui offrir un cadre stable, qu'une autre étape sera de lui permettre d'accepter la coexistence de bonnes et mauvaises qualités de l'objet ; que l'interprétation ne doit pas être systématique et que le moment où elle peut lui être proposée doit être précisément évalué ; en revanche, dans des pathologies moins lourdes où l'origine des symptômes est attribuée à un conflit focal qu'il faut découvrir et traiter directement, elle sera d'emblée utilisée).

Ses implications théoriques sont également majeures, dans la mesure où le choix technique est souvent mis en relation avec un modèle particulier s'inscrivant dans celui, plus général, de la psychanalyse. Ce modèle se trouve ainsi testé par les résultats obtenus.

De façon parallèle, elle conduit également à préciser les objectifs de changement et donc finalement les critères sur lesquels va porter l'évaluation. Il s'agit là aussi d'une question centrale. Nous avons déjà souligné que l'objectif d'une psychothérapie psychodynamique ne se limite pas à la disparition des symptômes cibles. Cette disparition (importante) ne fait que refléter des transformations plus profondes comme la réduction de conflits, la prise de conscience, voire une véritable transformation des relations d'objet et une construction du moi qui offrent de nouvelles aptitudes pour la personne et réduisent le risque de récidive de ses troubles. Ces aspects, qui sont souvent complémentaires, ne se situent pas tous au même plan de fonctionnement psychique et font l'objet d'interventions spécifiques. Si l'on veut essayer d'atteindre le coeur même du processus qui conduit à un résultat, les modalités d'usage de ces différentes interventions en fonction des cas devraient pouvoir être prises en compte dans l'évaluation des résultats. Elles le sont effectivement dans un certain nombre d'études, notamment celles portant sur des psychothérapies brèves appliquant un protocole spécifique pour un problème psychopathologique spécifique, mais sont également facilement déductibles de travaux préliminaires portant sur les psychothérapies longues dans les troubles de la personnalité borderline.

Bien que l'axe 4 de la deuxième partie apparaisse comme le plus prometteur en termes de recherche et de pratique professionnelle, nous avons été conduits compte tenu de l'organisation de l'expertise (très préoccupée par la délivrance de résultats de base) à adopter le plan de présentation suivant :

- une fois (I) posée la problèmatique générale de l'évaluation des psychothérapies psychodynamiques, rappelé son historique, et introduit un certain nombre de définitions indispensables (il faut savoir de quoi on parle si on veut mettre en oeuvre et évaluer quoi que ce soit),

- nous présentons (II.1 et 2) les résultats les plus généraux et quantitatifs, puis les résultats concernant différentes pathologies (II.3). Les aspects plus précis et qualitatifs, à savoir les conditions générales et les facteurs spécifiques qui interviennent dans l'efficience de la psychothérapie psychodynamique (cadre et facteurs de changement) sont abordés dans un quatrième sous-chapitre (II.4).

Nous venons de signaler plus haut l'importance scientifique et pratique de cette dernière approche. Elle est également posée par un aspect beaucoup plus trivial introduit par les études générales. En effet, de façon surprenante, ces revues et méta-analyses ont fait apparaître que des psychothérapies a priori très différentes, telles que la psychothérapie comportementale, puis comportementale et cognitive et la psychothérapie psychodynamique avaient, pour différentes pathologies, des résultats analogues, meilleurs que l'absence de psychothérapie ou que la psychothérapie de soutien.

Ce résultat paradoxal, qui défie la cohérence, appelle d'abord une attention particulière aux définitions précises des cas traités (en particulier leur sévérité, mais aussi les critères sur lesquels s'opère leur distinction (par exemple en terme de nosologie ou de mode de fonctionnement)). Il est indispensable de considérer également les critères de leur inclusion dans les études et les modalités précises de leur recrutement (au sein d'une population clinique ou par publicité), l'importance et le statut donné aux sorties de traitement (résultat non pris en compte ou considéré comme un échec), l'évolution des résultats à court et moyen terme après la fin de la thérapie. Cette non différence de résultats pose ensuite la question de savoir si les différents thérapies ont été mises en oeuvre de façon satisfaisante (adhésion à une technique, formation des thérapeutes, supervision), si elles sont véritablement différentes. Une autre question majeure est celle de la distinction précise des facteurs spécifiques et non spécifiques qui ont pu contribuer à ce résultat (Robinson et al., 1990 ; Andrews et Harvey, 1981).
Il est intéressant de noter que les résultats des méta-analyses peuvent ainsi varier suivant les critères que nous venons de présenter. Il faut leur ajouter l'allégeance scientifique des chercheurs qui est une conséquence de leur adhésion à un courant théorique particulier [Robinson, Luborsky].

De façon générale, ces définition des différents facteurs potentiels susceptibles d'intervenir sur les résultats et de les biaiser sont apparus et pris en compte progressivement. On peut se demander quelle est la valeur réelle des méta-analyses quand on voit qu'ne bonne part d'entre eux ont été largement ignorés. Quels auraient été ces résultats si l'on avait pris en compte l'approche du thérapeute et ses qualités personnelles (capacité d'empathie, ...) , les attentes du patient d'une amélioration, son acceptation du cadre du traitement et la qualité de la relation thérapeutique, ses représentations, la qualité de ses relations d'objet, les traits de sa personnalité et de son caractère, ...). Comment sont intervenus dans tous ces résultats l'utilisation pas le psychothérapeute de ses "outils techniques" (reformulation, interprétation, soutien, explication, présentation d'objectifs, ...), de ses objectifs (expression affective, prise de conscience, élaboration cognitives des problèmes [Winston & Laikin, 1994]) et l'interaction thérapeute - patient (alliance thérapeutique, transfert et contre transfert, ...) ? En outre, comme le fait remarquer Robinson, il est d'ailleurs probable que ces différents facteurs n'ont pas le même poids dans les différentes pathologies, la dépression apparaissant dans le contexte comme celle où les facteurs non spécifiques seraient les plus actifs.

Malgré la complexité de leur approche - qui n'est pas infranchissable comme le montrent de nombreuses études -, tous ces élements ont une réelle signification clinique et pratique pour les psychothérapeutes qui se réfèrent à la psychanalyse et sans doute pour la majorité des autres.
Il ne serait pas étonnant dans ce cas que le long détour par "l'efficacité générale" des psychothérapies et la comparaison des principales méthodes conduise à "redécouvrir" que la psychothérapie doit se construire à partir du patient, de ses problèmes spécifiques et de ses modalités de fonctionnement [Winston & Laikin, 1994], et de son évolution dans l'interaction avec le thérapeute. Cette singularité toujours renouvelée n'empêchera pas que le clinicien puisse - doive - utiliser en toute connaissance de cause une approche et un levier adaptés selon les pathologies et les différents moments ou étapes du traitement, plutôt que de s'en remettre à l'application de protocoles figés ou à son intuition. C'est la tendance qui s'exprime dans les conclusions de nombreuses études.

I. Problèmatique générale actuelle de l'évaluation des psychothérapies psychodynamiques, historique, définitions

I.1. Problématique générale et historique

La question de l'évaluation scientifique de la psychothérapie et des problèmes qu'elle pose est déjà ancienne. Deux textes, le premier issu de la conclusion de P. Janet de ses trois ouvrages sur "Les médications psychologiques" (1919) et le second, issu de la conclusion de S. Freud de son "Introduction à la psychanalyse" (1916) semblent anticiper parfaitement le projet et les difficultés de cette expertise.

"En un mot, la psychothérapie est une application de la science psychologique au traitement des maladies.

Une pareille psychothérapie existe-t-elle ? Son premier caractère devrait être de nous fournir des médications nombreuses et précises en nous indiquant exactement leurs effets, les modifications bien déterminées morales ou physiques qui suivent leur emploi. C'est ce que font assez bien les formulaires de la thérapeutique physique, quand ils nous parlent des médicaments calmants, soporifiques, purgatifs, altérants, etc. : le médecin peut choisir suivant les cas et les besoins. Il n'existe rien de tel en psychothérapie et certains prétendent même que toute classification de ce genre est impossible "parce que les traitements sont personnels et varient simplement avec chaque individu qui les applique." Cela est fort exagéré, l'originalité de chaque psychothérapeute n'est le plus souvent qu'apparente et il ne faut pas croire que son traitement est nouveau, parce qu'il le désigne par un mot nouveau. Mais il est certain que ces traitement étant connus et décrits d'une manière très vague, on voit difficilement les relations qu'ils ont les uns avec les autres.

Une thérapeutique fondée sur des lois doit surtout nous indiquer les conditions dans lesquelles telle ou telle médication doit être employée, nous montrer en un mot les indications de chaque traitement. Des indications de ce genre existent encore moins dans la psychothérapie. Chaque spécialiste vante son procédé qu'il prétend original et veut l'appliquer à tout, puisqu'il guérit tout. L'un moralise, l'autre hypnotise tout le monde ; celui-ci repose et engraisse et celui-là psycho-analyse à tort et à travers. Que penserait-on d'un médecin qui se vanterait de donner de la digitale à tous ses malades, tandis que son confrère aurait la spécialité de donner de l'arsenic ?
"

P. Janet. Les médications psychologiques. 1919

“ Des amis de la psychanalyse m'avaient engagé à opposer une statistique de succès à la collection des insuccès qui nous sont reprochés. Je n'ai pas accepté leur conseil. J'ai fait valoir, à l'appui de mon refus, qu'une statistique est sans valeur, lorsque les unités juxtaposées dont elle se compose ne sont pas assez ressemblantes, et les cas d'affections névrotiques qui avaient été soumis au traitement psychanalytique différaient en effet entre eux sous les rapports les plus variés. En outre, l'intervalle dont on pourrait tenir compte était trop bref pour qu'on pût affirmer qu'il s'agissait de guérisons durables, et dans beaucoup de cas on ne pouvait même hasarder aucune affirmation sur ce point. Ces derniers cas étaient ceux de personnes qui cachaient aussi bien leur maladie que leur traitement et dont il fallait également tenir secrète la guérison. Mais ce qui m'a, plus que toute autre considération, fait décliner ce conseil, c'est l'expérience que j'avais de la manière irrationnelle dont les hommes se comportent dans les choses de la thérapeutique et du peu de possibilités de les convaincre à l'aide d'arguments logiques, même tirés de l'expérience et de l'observation. ”. .

S. Freud, Introduction à la psychanalyse, 1916/1971, p 439

Deux articles permettent de faire un tour de la question. Le premier se situe plutôt dans une perspective d'actualité des enjeux ; le second apporte une approche très complète des nombreux travaux qui ont été déjà réalisés et des perspectives actuelles qui se dessinent

- L'article de Aiden CORVIN et Michael FITZGERALD "Evidence-based medicine, psychoanalysis and psychotherapy". Psychoanalytic Psychotherapy. 14, 2000:143-151, souligne d'abord qu’il existe une bien plus grande base scientifique pour les principes et la pratique de la psychanalyse et des thérapies psychanalytiques qu'on ne le pense généralement. L'accent de la recherche qui portait sur des cas uniques, s'est modifié au profit d'études formelles et systématiques. La recherche portant sur des thérapies formalisées a permis de confirmer que la réduction de symptome dans le court terme précède les changements dans les dimensions interpersonnelles ou de traits de personnalité. Elle a également démontré (Pipper, 1991 et d’autres) qu’un usage excessif de l’interprétation pouvait être anti-thérapeutique, les patients ressentant cette approche comme une critique et les thérapeutes utilisant cette approche pouvant se trouver conduits à une impasse thérapeutique. D'autres facteurs ont pu être étudiés comme la prise de conscience, l'alliance thérapeutique, le thème relationnel conflictuel central, la typologie du patient (introspective ou expressive). Un certain nombre de concepts psychanalytiques ont pu être validés. Cette validité s'est constituée pour une part à partir de la clinique ( notamment pour ce qui concerne les concepts de transfert, d’inconscient, l’importance du conflit inconscient dans le développement de la psychopathologie, les mécanismes de défense, les formulations paranoïdes/dépressives, les formulations oedipiennes, certaines typologies de caractères. Elle a également trouvé un appui dans les développements modernes dans les neurosciences cognitives qui offrent une possibilité croissante de comprendre les mécanismes psychanalytiques en termes biologiques (notamment les relations entre mémoires explicite et implicite, les travaux du groupe de Boston sur les changements en psychothérapie et de Solms sur le rêve).

La conclusion concerne l'avenir. Elle préconise le développement de recherches multicentriques permettant d'utiliser l'évaluation pour tester les hypothèses cliniques contenues dans les différents branches de la pratique psychodynamique et psychanalytique. Des progrès restent à faire pour construire des outils susceptibles de tester les résultats tels qu'ils sont attendus en relation avec la théorie (prise de conscience, relations d'objet, changements de "personnalité", c'est à dire aussi de mécanismes de défense).

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- L'article de Stephen BARBER et Robert C. LANE. Efficacy research in psychodynamic therapy : a critical review of the literature. Psychotherapy in private practice, 14(3), 1995:43-69, permet d'entrer dans une perspective historique très documentée de présentation des travaux qui se sont succédés depuis plus de 85 ans.

Il présente successivement les tendances générales de la recherche sur les résultats, l'articulation entre recherche sur les processus et recherche sur les résultats, la distinction entre recherches théoriques (portant sur les concepts et leur application) et recherches empiriques (comment cette application se retrouve dans les résultats), la distinction entre approche pragmatique (quelle type de thérapie pour quels patients ?) et heuristique (quelles caractéristiques particulières des patients prédisent-elles des effets particuliers ?), la différence entre approches par corrélations (qui tentent de prédire les résultats en fonction des patients, sans prise en considération de la thérapie), expérimentales (qui comparent l'efficience moyenne de différentes psychothérapies) et interactionnelles (impliquant les caractéristiques des patients et des types de thérapies). Une partie importante concerne la description des différents projets qui se sont déroulés dans les principales universités américaines et les instituts de psychanalyse concernant les résultats de traitements psychodynamiques.

Selon ces auteurs cinq stades ont structuré l'évolution de la recherche sur l'efficacité :

1. Au départ, il y eut des milliers d’études peu élaborées issues de cas uniques. Le consensus fut alors que, bien qu’elles apparaissent comme quelque chose de grand intérêt pour la thérapie, la méthodologie qui était alors disponible ne permettait pas un examen précis des mécanismes de changement. Les résultats étaient souvent mesurés en termes globaux, non spécifiques, basés sur les simples mesures des impressions du thérapeute.

2. Au cours de la phase suivante, il y eut des tentatives de réaliser une revue quantitative générale des analyses de résultat. De nouveau, ces études manquaient de spécificité et rapportaient des résultats d’une façon qui les invalidait et laissait la question de l’efficacité de la psychothérapie psychodynamique sans réponse.

3. Comme la psychothérapie n’avait pas clairement prouvé son efficience, elle était vulnérable à une critique sévère. Le résultat fut qu'il y eut un certain nombre d’études qui la comparèrent simplement à une absence de thérapie. En d’autres termes, c’était mieux que rien. Bien que les chercheurs aient été capables de prouver que la thérapie était plus efficace que l’absence de thérapie, ces études ne spécifiaient pas les limites d’applicabilité des techniques ou même la nature exacte du traitement.

4. Finalement, il y eut des tentatives d’examiner le processus de la psychothérapie en détail. Plutôt que de faire une investigation des concepts de base et des techniques, un certain nombre d’études furent conduites entre des “marques” de psychothérapie. Plutôt que d’examiner les effets de techniques spécifiques, ces études cherchèrent surtout à démontrer la supériorité d’une école par rapport à une autre, en partant du principe d’une population homogène. Cette approche comparative s’est finalement faite au détriment de la psychothérapie, à partir du moment où il est apparu qu’aucune psychothérapie n’était supérieure à une autre, une idée qui fut largement acceptée.

5. Plus récemment, la recherche sur l’efficacité est devenue beaucoup plus sophistiquée, pas seulement en terme de méthodologie, mais aussi de clarté du projet. Le résultat en est une meilleure reconnaissance de l’interaction complexe entre le processus de la psychothérapie et son résultat. Au lieu de comparaisons générales entre des types déterminés de psychothérapie, il existe une tendance à examiner de façon plus spécifique les composants de la psychothérapie et les caractéristiques des patients qui permettent de prédire un bon résultat. Il existe une meilleure reconnaissance de la valeur à la fois de l’approche heuristique et de l’approche pragmatique à propos des questions de recherche. Finalement, il existe une prise de conscience croissante que, si la validité prédictive est importante - notamment au sujet de la sélection du traitement, il existe aussi un réel besoin de valider les modèles de base qui décrivent le processus de changement en psychothérapie.

Sur ces bases, les propositions de Knight en 1941 concernant les critères d'évaluation sont toujours actuels. Ils portent sur :
1) la résolution de symptômes
2) de véritables progrès dans le fonctionnement interne
3) une amélioration de la relation à la réalité.

Cette approche, construite sur les questions scientifiques et pratiques que les cliniciens et les chercheurs ont tenté de résoudre doit être complétée par une évolution importante qui concerne le développement de psychothérapies psychodynamiques brèves dans les années 75, liée à une augmentation de la demande et des coûts accrus qu'elle occasionnait (Ursano, 1986). La propension à étudier des thérapies intensives courtes a conduit des auteurs tels que Bachrach (1991) à favoriser de brèves interventions psychodynamiques par rapport à la psychanalyse formelle. Cependant, une telle recherche est tronquée par la durée courte de l’étude, et ignore l’évidence existante de l’efficacité associée à des thérapies plus longues. Par exemple, Howard (1996) a trouvé une relation dose-effet positive pour la thérapie psychodynamique durant 6 mois, Kopta (1994) a montré que la durée de la cure était plus longue que celle de la réduction symptomatique, et Gelso & Johnson (1983) ont montré une réduction du taux de rechute associée avec davantage de séances de thérapie. Ces trois auteurs ont soutenu le bénéfices de thérapies psychodynamiques plus longues, mais d’autres questions ont besoin d’être considérées. Ces auteurs et d’autres (par exemple Steenbarger, 1994) ont conclu, à partir de l’évidence existante, que différents changements peuvent se produire à différentes échelles de temps, la réduction des symptômes étant la plus précoce, mais pas nécessairement le seul bénéfice du traitement. (Corvin & Fizgerald, 2000)

Les psychothérapies brèves posent un autre problème qui est celui de la définition précise de leur champ d'application. En effet, elles introduisent un changement majeur de perspective dans la mesure où ce n'est plus le psychothérapeute qui doit (plus ou moins consciemment) s'adapter à la pathologie du patient du point de vue de ses références théoriques et techniques (dans la pratique, la multiplicité des modèles internes à la psychanalyse et l'expérience psychiatrique ont permis cet accordage), mais que c'est le patient qui va "recevoir" un traitement standardisé dont l'indication correspond à un cadre nosologique strictement défini. De fait, si cette systématisation peut avoir un certain intérêt pour des troubles limités et "mineurs" (non en terme de souffrance mais d'envahissement des principales fonctions mentales et relationnelles de la personne), elle devient irréalisable dans le cas des troubles majeurs ou plus simplement d'une grande partie des consultations marquées à la fois par l'intensité des troubles de la personnalité et la multiplicité des comorbidités.

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Tableau récapitulatif. Histoire de la recherche évaluative sur les psychothérapies psychodynamiques : quelques repères.
1917. Coriat : Quelques résultats statistiques concernant le traitement psychanalytique des névroses

1930. Fenichel : Berlin Psychanalytic Institute - revue quantitative des résultats de psychanalyses menées dans cette clinique sur une période de 10 ans.

1941. Knight : Première synthèse des données, à partir de 952 cas. 55,9%, de “guéris” et “très améliorés”

1952. Eysenck : Publication d'une revue critique des travaux menés jusque là, à un moment où l’Association Américaine de Psychanalyse montre une forte résistance à aborder la question de ce qui constitue la psychanalyse. Sa conclusion est qu’il n’y a pas de preuve solide que la psychothérapie, de quelque type qu’elle soit, psychodynamique ou autre, fasse quelque bien que ce soit.

1945-1961. Université de Columbia. 250 patients. Il existe une corrélation entre durée du traitement et bénéfice.

1959-1966. Institut psychanalytique de Boston. Introduction de tests avant et après psychanalyse, à 5 et 10 ans de suivi. Effets positifs du traitement, en particulier développement de capacités d’auto-analyse

1959-1975. Projet de recherche Menninger sur la psychothérapie. Kernberg, Wallerstein, ... .Etude prospective. 42 patients borderline. Plus grands changements chez patients avec force du moi haute et avec des thérapeutes expérimentés. Travail considérable, mais un certain nombre de biais.

1967- .... Université de Pennsylvanie. Luborsky et al. 73 patients initialement. Étude des facteurs de changement. Construction de mesures pour définir et quantifier des concepts centraux de la théorie psychodynamique (alliance thérapeutique, pattern relationnel central, interprétation, ...)

1970. Fiske et al. : commencent à mettre en oeuvre les premiers guides de recherche et insistent sur la nécessité de contrôler la façon dont chaque patient est adressé en psychothérapie et les objectifs initiaux du traitement pour le thérapeute et le patient

1970- 1983. Introduction des méta-analyses (Smith et Glass, 1977 ; Smith, Glass et Miller, 1980, Andrews et Harvey, 1981, ...)

1971. A partir d'une revue transversale concernant les études de résultat des thérapies durant la période 1953 - 1969, Bergin et Lambert notent que :

a - les études ne spécifient pas la nature précise du traitement ou les limites de son applicabilité, mais considérent plutôt si la thérapie a des résultats dans son ensemble ;
b - leur conclusion générale est que la psychothérapie a au moins des effets positifs modestes ;
c - il existe une légère tendance que des études mieux construites produisent des résultats un peu plus positifs ;
d - quelque chose de puissant intervient dans la thérapie ;
e - la relation entre le résultat et la durée du traitement; n'est pas prouvée
f - des thérapeutes expérimentés font mieux que des thérapeutes inexpérimentés ;

1975. Luborsky, Singer et Luborsky lancent une nouvelle controverse à partir d’une revue comparative des résultats de recherche qui conclue que toutes les psychothérapies ont des résultat relativement équivalents (confirmé en 1993)

1986-1988 . Nombre important de revues de recherches (Lambert, Shapiro et Bergin, 1986 ; Luborsky, Crits-Christoph, Mintz et Auerbach, 1988) : la psychothérapie est bien efficace

1975-1990. Approfondissements conceptuels et méthodologiques
- Intérêt convergent des études à propos de la relation entre processus et résultat.
- Les principaux concepts deviennent des variables pour la recherche : alliance thérapeutique, transfert, interprétations, pertinence des interprétations
- Distinctions : a) entre la recherche pragmatique (quels types de patients peuvent bénéficier le mieux des différentes thérapies pour obtenir la meilleure efficacité du traitement) et la recherche heuristique (identification des caractéristiques des patients qui prédisent des effets particuliers). b) des approches - par corrélations, expérimentales, par interaction entre caractéristiques patients / Type de psychothérapie.

1990. Centre psychothérapique d'Alberta. Avec essentiellement des patients ambulatoires. Examen des relations prédictrices de résultat, incluant les interactions entre les caractéristiques des patients et les variables du traitement. Recherche des relations entre qualités du patient et résultat des psychothérapies brèves, qualité de la relation d’objet, processus et scores de résultat (Piper et al.)

1991. Colloque deLyon (Hôpital St Jean de Dieu) "Recherches cliniques "planifiées" sur les psychothérapies", organisé par P. Gerin et A. Dazord avec la Society for Psychotherapy Research et l'Inserm.

1993. Université de Vanderbildt. Strupp étudie le rôle des facteurs spécifiques (technique) et non spécifiques(interpersonnels) dans la thérapie. Concept de complémentarité négative. Approche guidée par manuel.

1994. Luborsky spécule et propose pour le futur

- Davantage de thérapies taillées pour des types spécifiques de patients.
- Renforcement de l’utilisation des psychothérapies brèves.
- Davantage de comparaisons entre la psychothérapie à long terme et à court terme.
- Davantage d’études de thérapies combinées (psychothérapie et pharmacothérapie).
- Davantage de connaissance à propos des facteurs qui influencent les résultats.
- Davantage de ponts avec les sciences les plus établies.
- Une plus grande attention à l’application de la recherche dans la pratique

1995. Étude par le groupe de Boston des processus de changement s'inscrivant dans la compréhension émergente de la fonction neurocognitive (cf Kandel)

2000. L’Association Psychanalytique Internationale (IPA) a engagé une importante réflexion et un état des lieux à ce sujet. Ils sont publiés et accessibles par Internet à l’adresse suivante. http://www.ipa.org.uk/research/R-outcome.htm
Traduction partielle

Conclusion générale : La recherche a adopté une forme de plus en plus rigoureuse qui a progressivement structuré ses bases méthodologiques. La forme la plus accomplie se trouverait dans la ligne de recherche prescrite par Blatt et Ford (1994). Il existe un retard considérable de la France dans ce domaine.


Références complémentaires

D'autres références concernant l'historique de l'évaluation des psychothérapies complèteront (notamment dans une perspective plus francophone) les aspects développés dans les article de Barber et Lane, et de Corvin et Fitzgerald :

- Knight R. Evaluation of the results of psychoanalytic therapy. Results. of. Psychoanalytic. Therapy. 1941:434-446.
- Tignol J, Martin C. L'évaluation des psychothérapies in Evaluation des soins en psychiatrie. Congrès de psychiatrie ert de neurologie de langue française (St Etienne 1992). Paris, Masson, 1992, 117-130.
- Rappard E. Evaluation des psychothérapies. In Psychanalyse et psychotherapies, Widlöcher D. et Braconnier A. ed. 245-247.
- Villamaux M. La recherche sur l'efficacité des psychothérapies au 20ème siècle ? Une histoire mouvementée. Pour la recherche 25, 2000:3-4. (texte complet)

I.2. Les définitions

Nous reprenons différentes définitions glanées au fil des articles. Ces définitions sont conçues dans une perspective pratique qui permette de situer au moins de façon approximative quel est le cadre de la psychothérapie, la théorie à laquelle elle se réfère et les objectifs visés. En effet, durant toute la première période de la recherche évaluative, cet aspect était souvent négligé. Cela conduisait à des conclusions du type "la psychothérapie marche" sans que l'on ait finalement aucune idée de ce que recouvrait dans la réalité ce terme. Or dans le cadre de la psychothérapie psychodynamique, qui est le sujet de cette rubrique, on comprendra aisément que la technique utilisée dans le traitement d'une hystérie n'est pas forcément la même que celle qui est adaptée à un patient borderline. A moins, évidemment, que l'action de la psychothérapie dépende essentiellement de facteurs non spécifiques, comme la capacité d'empathie du thérapeute ou l'engagement du patient ... Dans cette perspective, la théorie et la technique n'auraient valeur que de mythe efficient. Vouloir aborder la question de l'efficacité de la psychothérapie implique donc déjà de la définir.

D'autre part, de nombreux articles comparent les psychothérapies entre elles, et là encore il est important de passer d'une comparaison générale "de marque ou de logo" à une approche beaucoup plus technique qui est de savoir quel est le cadre et quelles sont les interventions les mieux adaptées, avec un patient donné, et même au cours des différentes phases de la psychothérapie. Bien entendu, il faudrait aussi faire la différence entre ce qui relève de la déclaration "je pratique la psychothérapie psychodynamique" et ce qu'il en est réellement, en fonction de patients très différents. Plusieurs recherches ont essayé de répondre à ce problème.

En outre, tout un débat a eu lieu sur la question de la durée. Comme on le verra, il ne s'agit pas là encore de savoir si l'on est pour ou contre les psychothérapies longues ou brèves, mais à qui elles peuvent être proposées avec une certaine chance d'obtenir un résultat favorable.

° La psychanalyse peut être définie comme une méthode d'investigation consistant dans la mise en évidence de la signification inconsciente des paroles, des actions, des productions imaginaires (rêves, fantasmes, délires) d'un sujet (Voc. de psychanalyse). Elle est décrite par le groupe Cochrane [4] comme un ensemble de séances régulières avec un psychanalyste entrainé, d’une durée d’au moins 30 minutes, 3 à 5 fois par semaine. La psychanalyse doit avoir été planifiée pour durer au moins un an.

° Les approches d’orientation psychodynamique s’étendent de la psychanalyse traditionnelle aux formes brèves de psychothérapie. Elles se définissent par un certain nombre de critères :

- La théorie sous-jacente de l'approche est psychodynamique ou psychanalytique
- L'objectif établi du traitement est l'acquisition d'une prise de conscience (insight) ou l'obtention d'un changement de personnalité,
- Les techniques spécifiques appliquées mettent l'accent sur le travail d'interprétation et d'analyse du transfert (Svartberg & Stiles, 1991). C'est ainsi que : 1) les conflits, les défenses, l’anxiété et les impulsions sont activement abordés, clarifiés et interprétés ; 2) la psychothérapie se concentre sur la confrontation du comportement défensif et de l’affect qui se manifeste dans un contexte interpersonnel, de telle façon que les souvenirs réprimés et les idées qui les accompagnent puissent être pleinement vécues dans un cadre de travail intégré affectif et cognitif.

-Selon le groupe Cochrane [4], la psychothérapie psychodynamique se définit comme un ensemble de séances régulières de psychothérapie avec un psychothérapeute entrainé ou sous supervision. Les séances de psychothérapie sont définies suivant un modèle psychodynamique ou psychanalytique. Les séances peuvent s’appuyer sur un ensemble de stratégies, parmi lesquelles l’exploration avec prise de conscience, l’activité de soutien ou de direction, une flexibilité appliquée. Cependant les psychothérapeutes peuvent utiliser une technique moins stricte que la psychanalyse. Pour être considérée comme une psychothérapie psychodynamique bien définie, le travail doit inclure celui du transfert.

Les psychothérapies psychodynamique réunissent les psychothérapies longues (Long-term psychodynamic psychotherapy et les psychothérapies brèves (Short-term psychodynamic psychotherapy . L'analyse des études montre que cette distinction par la durée est aussi associée de fait à une distinction des populations traitées.

- Les psychothérapies longues concernent de fait des pathologies complexes, telles que par exemple les névroses chroniques et les troubles graves de la personnalité (en particulier, les patients borderline (Adler, 1989) ...). Dans ce second cas, la psychothérapie est particulièrement attentive aux déficits qui ont marqué les premières phases de développement (séparation, individuation ; intégration des qualités et défauts de l'objet). Ces déficits se traduisent par des troubles de l'identité et de la relation, qui se répètent dans les situations courantes de la vie et dans la psychothérapie. Celle-ci a dès lors clairement une orientation développementale.

La technique est “expressive”, “analytique modifiée”, “exploratoire”. Elle fait intervenir l'expression chez le patient et différentes modalités techniques du thérapeute : contenir, confronter, interpréter et soutenir quand c’est nécessaire. Un consensus se dégage sur l'importance de la stabilité du cadre thérapeutique qui conditionne la possibilité du traitement, ainsi que sur l'importance des manifestations intenses de transfert et de contre transfert, que thérapeute doit être capable de supporter et de manier.
Le degré de “soutien” ou de “prise en main” que ces patients requièrent, ainsi que l'usage de la confrontation et de l’interprétation sont très soigneusement discutés à partir de principes généraux (une psychothérapie psychodynamique ne se limite pas au soutien), théoriques (l'intervention sera centrée sur le clivage, la relation d'attachement ou le narcissisme) et pratiques suivant le type de pathologie et le moment de la thérapie. Ainsi, pour Kernberg, le soutien est réservé à des patients qui ont de sévères problèmes antisociaux, ou qui sont sérieusement désorganisés par les circonstances de la vie, qui ont une pauvreté des relations dans leur vie réelle ou une fragilité du moi évidente ; cela correspond à un manque de capacité de tolérer l’anxiété ou de contrôler les impulsions. L'interprétation peut-être contrindiquée initialement (vécu persécutif, sorties du traitement) et efficace ultérieurement. Des limites doivent être posées par le psychothérapeute par rapport au passage à l'acte externe. Les actes internes à la thérapie doivent être soulignés et le processus de leur déclenchement soigneusement analysé.

- Les psychothérapies brèves sont très peu utilisées en France. Il serait difficile néanmoins de ne pas les définir brièvement car une grande partie des études se réfèrent précisément à leur pratique. Elles varient des formes les plus directives et centrées sur l'événement (Bellak & Small, Horowitz, Marmar), jusqu'à celles qui sont le plus typiquement interprétatives et centrée sur la personnalité (Davanloo, Sifneos)

On distingue ainsi parmi les psychothérapies psychodynamiques brèves :

- la psychothérapie focale (David Malan, élève de Balint, Tavistock Group)

Objectifs :
Le début du traitement est précédé d'une phase d'évaluation très importante. Celle-ci concerne notamment la congruence entre le conflit actuel et le “noyau” ou le conflit de l’enfance. L’identification des facteurs précipitants, des expériences traumatiques précoces ou de patterns répétitifs conduisent à la définition d'un conflit interne présent depuis l’enfance et qui doit être le point focal du traitement. Plus grande est la probabilité que l'aire de conflit se manifeste au cours du transfert, plus le résultat sera positif. Le “triangle du transfert” (le transfert, la relation actuelle et la relation passée) conduit à la restauration de la santé du patient.

Critères d'exclusion :
Ils concernent différents troubles : tentatives de suicide sérieuse, toxicomanie, hospitalisation à long terme, plus d’une série d’ECT, alcoolisme chronique, symptômes obsessionnels sévères chroniques avec incapacité, symptomes phobiques sévères, importants passages à l’acte d’auto destruction ou de violence.

Le patient est également exclu de la psychothérapie focale si le thérapeute anticipe certaines aires de problèmes telles que :
1. incapacité de contact avec le patient
2. nécessité de travail prolongé pour générer la motivation du patient
3. nécessité de travail prolongé pour pénétrer des défenses rigides
4. inévitable implication dans des questions complexes ou situées profondément
5. dépendance sévère ou autre forme de transfert non favorable intense
6. intensification anticipée de troubles dépressifs ou psychotiques.

Nombre de séances : généralement de 30, et même de 20 pour les patients avec un résultat favorable. Dans quelques cas publiés, la thérapie a été étendue à un an.

- la psychothérapie brève par provocation d’anxiété (Peter Sifneos, Massachussets general hospital, Boston)

Objectifs : La psychothérapie se concentre sur le conflit oedipien et n’attend pas de bon résultat en s’occupant d’autres conflits.
Durant la phase initiale du traitement, le thérapeute doit établir un bon rapport avec le patient afin de créer une bonne alliance thérapeutique. Le thérapeute utilise des confrontations provoquant l’anxiété pour clarifier les questions qui concernent le patient à propos de la situation de sa vie précoce et le conflit actuel. L’utilisation de confrontations provoquant de l’anxiété dans une perspective d’attaque directe des défenses du patient distingue cette catégorie de psychothérapie des autres psychothérapies à court terme.

Critères d'inclusion et d'exclusion :
Le patient doit avoir une intelligence au dessus de la moyenne et avoir eu au moins une relation significative avec une autre personne durant sa vie. Ce critère tend à exclure les patients présentant des troubles narcissiques. De plus le patient doit être très motivé pour changer, pas seulement pour une réduction des symptômes. Le patient doit avoir une plainte principale spécifique.

Durant l’évaluation, le patient doit se montrer capable d’interaction avec le psychiatre qui l’évalue, d’exprimer ses sentiments et de monter une certaine flexibilité. La “motivation” est définie comme la capacité du patient de reconnaître la nature psychologique de ses symptômes, une tendance à l’introspection et une honnêteté par rapport aux difficultés émotionnelles, ainsi qu’une volonté de participer à la situation de traitement. En plus, la motivation inclut la curiosité, une volonté de changer, une volonté de faire des sacrifices raisonnables et une attente réaliste des résultats de la psychothérapie.

Nombre et durée des séances : Les traitements, dans leur vaste majorité, comportent de 12 à 16 séances, et ne vont jamais au delà de 20 séances. Les séances durent 45 minutes.

- la psychothérapie en temps limité de Mann

Dans cette psychothérapie, il y a habituellement deux à quatre séances d’évaluation avant de commencer la psychothérapie.
Mann décrit en détail la façon de formuler au patient la question centrale. Dans cette formulation, le contrat thérapeutique et le but de la thérapie sont spécifiés.
Il emploie les techniques de psychothérapie psychanalytiques classiques : analyse des défenses, interprétation du transfert, et reconstruction génétique.
Critères d’exclusion :
Ce sont la dépression sérieuse, la psychose aigue, une organisation de la personnalité border-line et l'incapacité d’identifier une question centrale.
Ultérieurement, Mann a ajouté à ces critères la force du moi. Les patients qui ont de la difficulté à s’engager et à se désengager rapidement du traitement sont exclus. Cela concerne les patients schizoïdes, certains patients obsessionnels, certains patients narcissiques et certains patients dépressifs qui ne sont pas capables de former une alliance thérapeutique rapide, ainsi que des patients avec des troubles psychosomatiques qui ne tolèrent pas facilement la perte.


Nombre et durée des séances :
La psychothérapie est limitée à un total de 12 heures de traitement, distribuées suivant les besoins du patient. Cela peut se dérouler sous la forme de séances hebdomadaires d’une demi-heure pendant 24 semaines ou de séances d’une heure deux fois par semaine pendant 6 semaines.

- La psychothérapie dynamique à court terme et à large focus de Danvanloo

Critères d'inclusion
Cette psychothrapie s'adresse aux patients avec point central oedipien, de perte ou multiple. En particulier, aux patients souffrant de névroses obsessionnelles à long terme et de névroses. Ses données indiquent que 30 à 35% de la population ambulatoire souffrant de troubles psychiatriques peut bénéficier de ce mode de traitement.

Durée et nombre des séances
Le traitement comprend 5 à 40 séances, selon l’aire de conflit du patient (oedipienne versus multiples focus). En général, les traitements durent de 15 à 25 séances. Il n'est pas recommandé de situer une date de terminaison spécifique, mais plutôt de dire clairement au patient que le traitment sera court. Des périodes de temps plus courtes (5 à 15 séances) sont choisies pour des patients avec un conflit essentiellement oedipien, des durées plus longues (de 20 à 40 séances) pour des patients plus sérieusement atteints.

- la psychothérapie adaptative brève

Objectifs
Thérapie plus cognitive qui se concentre sur l’identification du pattern le plus inadapté et son élucidation dans les relations passées et actuelles, et tout particulièrement dans la relation entre le patient et le thérapeute. Le but est de rendre le patient capable de développer une prise de conscience sur les origines et les déterminants de ce pattern, de façon à produire des relations interpersonnelles mieux adaptées.

Accès définitions

II. Résultats des psychothérapie psychodynamiques par pathologies et premières implications de leurs conditions et de leurs facteurs

II.1. Résultats généraux des psychothérapies psychodynamiques sur des troubles définis par de grands cadres nosologiques (névroses - psychoses)

II.1.A - Les psychothérapies bénéficient-elles aux patients névrotiques ? (méta-analyse)

Telle est la question que traitent G. ANDREWS et R. HARVEY. Does psychotherapy benefit neurotic patients ? Arch. Gen. Psychiatry. 38 (11), 1981 : 1203-1208, en reprenant la méta-analyse de SMITH, GLASS et MILLER réalisée l'année précédente (1980) et qui pose un certain nombre de problèmes liés à des biais méthodologiques.

Outre les résultats qu'il présente, cet article est intéressant pour découvrir la méthode de la méta-analyse, terme qui doit devenir familier quand on s'intéresse à l'évaluation des psychothérapies, car il a permis de mettre initialement en relation des données très éparpillées.
L'idée générale est que chaque étude peut avoir évalué des résultats chez des patients différents et avec des instruments différents. L'objectif est de regrouper ces résultats a priori disparates en considérant la "taille d'effet" par catégories, de façon à pouvoir les apprécier et les comparer.

La méta-analyse de G. ANDREWS et R. HARVEY porte sur 292 tailles d'effet issues de 81 études contrôlées publiées entre 1941 et 1976, concernant 2202 patients exprimant des plaintes névrotiques. 88% avaient des névroses ou de vraies phobies, et 12% des troubles émotionnels somatiques. Elle ne concerne que de patients qui ont recherché eux-mêmes une psychothérapie ou qui ont été adressés par un référent pour le faire. La moyenne d'âge des patients était de 30 ans, de genre masculin et féminin répartis de façon équivalente.

La moyenne des tailles d'effet est de .72, ce qui indique une amélioration moyenne de 76% plus importante que celle du sujet moyen d'un groupe de contrôle. Les psychothérapies psychodynamiques obtiennent une taille d'effet moyenne de .74, les psychothérapies "de développement " de .35. La taille d'effet moyenne pour le placebo était de .55.

Cette méta-analyse démontre l'efficacité générale des psychothérapies psychodynamiques et comportementales chez les patients "névrotiques" : "Chez des patients avec des névroses, des courtes périodes de psychothérapie verbale ou comportementale peuvent produire une amélioration significative qui persiste pendant au moins une année. Ce résultat est rassurant aussi bien pour les patients que pour les professionnels soumis à la scrutation des agences gouvernementales et des assureurs".

Les psychothérapies de "conseil" et de "développement" n'obtiennent pas ce résultat. Elles sont différenciées des autres psychothérapies par le fait notamment qu'elles apportent soutien et confort, mais qu'elles ne produisent pas de changements profonds, au moins de nouveaux outils, qui permettront à la personne de se situer ultérieurement de façon différente quand elles rencontreront de nouvelles difficultés.

En même temps, force est de constater que cette méta-analyse conduit à un résultat scientifique que l'on peut qualifier de négligeable dans la mesure où la plupart des facteurs spécifiques et non spécifiques qui ont contribué à ce résultat ne sont pas pris en compte. La nature des bénéfices obtenus reste assez vague, du fait même de la dispersion des outils de mesure utilisés. Comme le soulignent les auteurs, on regrette l'absence du questionnaire général de santé (GHQ) qui aurait permis une véritable évaluation clinique du résultat.

Au passage, cette étude fait bien apparaître comment un biais méthodologique majeur peut se glisser dans une étude contrôlée et réapparaître dans une méta-analyse, à savoir le recrutement des patients participant à l'étude : ce n'est pas du tout la même chose d'obtenir des résultats concernant le symptôme isolé d'un étudiant recruté par annonce et de traiter ce symptôme au sein de troubles plus généraux chez quelqu'un qui vient consulter dans une centre de santé mentale ou un hôpital. Les auteurs soulignent l'absence de données concernant la sévérité du diagnostic. Une psychothérapie peut très bien avoir des résultats dans un certain intervalle de sévérité et pas dans un autre, y compris de sévérité moindre.

Un acquis non négligeable de cette étude est que les résultats des "vraies psychothérapies" se manifestent d'autant plus que la pathologie est importante. Une réponse aux discours sur son utilité "de confort".

On remarquera que les résultats sont stables pendant plusieurs mois, puis déclinent ensuite lentement. La question de la durée du traitement est abordée. Elle représente potentiellement un biais important si elle est prise dans l'absolu, c'est à dire en ne situant pas précisément les pathologies et les objectifs qui sont recherchés. Cet aspect va réapparaître dans les méta-analyses sur les résultats des psychothérapies "courtes ou brèves".

Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractMeta ConclusAnalyse
(1. Meta-analyse)
ANDREWS G. HARVEY R.
Does psychotherapy benefit neurotic patients ?
Arch. Gen. Psychiatry. 1981 Vol 38 p 1203-1208
(161…) Tr névrotiques
Critères inclusion : - 88% névroses ou de vraies phobies
- 12% des plaintes somatiques émotionnelles.
Aucune étude ne concernait seulement des dépressifs.
- sollicitation du traitement par la personne elle-même

Critères exclusion : pseudo phobies, psychotiques, délinquants, criminels, toxicomanes, handicapés, personnes normales
Nbre Etudes : 81 essais contrôlés publiés entre 1941 et 1976 et portant sur 2202 personnes présentant des plaintes névrotiques et ayant sollicité un traitement. 292 TE. T.E PPD. = .74
AgeMoyen : 30 ans (7-52)
DuréeTrait : moyenne 18 h / 15 semaines
Therapeutes : expérimentés
- absence de données sur sévérité du diagnostic qui conditionne en fait le choix de la thérapie et la durée du traitement
- amélioration stable dans le temps, puis lent déclin des effets
- forte tendance thérapies plus longues associées à plus grande amélioration
- peu de recherche sur les thérapies plus longues. Il est naïf de penser que les psychothérapies brèves puissent répondre au traitement des troubles de la personnalité et des névroses chroniques. Certains de ces états requièrent un traitement prolongé et intensif. Il est essentiel que de tels traitements puissent être un axe central de la recherche évaluative

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II.1.B - Les psychothérapies psychodynamiques individuelles et la psychanalyse sont-elles efficaces la schizophrénie et les troubles mentaux sévères ? (méta-analyse)



La méta-analyse de MALMBERG L. FENTON M. Individual psychodynamic psychotherapy and psychoanalysis for schizophrenia and severe mental illness. [Revue Cochrane], Avril 2001 est écrite dans un style particulièrement synthétique et souvent difficile à saisir. Elle fait surtout apparaître l'incroyable manque de données dans ce domaine. Une fois mises de côté les études qui pour une raison ou une autre ne répondent pas aux critères de Cochrane, il ne reste pratiquement que deux recherches, et même une seule offrant les données permettant de répondre aux quatre questions principales (comparaison d'efficacité psychothérapie psychodynamique versus médicament, PPD associée à médicament versus médicament seul, PPD versus thérapie cognitive, PPD individuelle versus PPD de groupe). L'échantillon est ainsi composé de 92 à 160 patients, ce qui est évidemment infiniment peu par rapport au nombre de patients souffrant de schizophrénie et de troubles mentaux sévères ayant bénéficié d'une psychothérapie psychodynamique. En outre l'étude de référence principale date de 1976. Il s'agit de patients hospitalisés. Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis !. Concernant la thérapie psychanalytique proprement dite, aucun essai n’a été identifié ayant étudié la valeur d’une approche psychanalytique pour les personnes souffrant de schizophrénie ! Les données sur les effets de la psychothérapie chez les patients ambulatoires manquent.

Les auteurs concluent sur la nécessité de développer la recherche dans ce domaine en veillant particulièrement à la qualité de l'étude, ce qui suppose l'obtention de fonds qu'il est toujours difficile à trouver. Un des problèmes peut être les plus aigus de la recherche sur les psychothérapies psychodynamiques.

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II.2 Résultats généraux obtenus suivant des modalités particulières des psychothérapies psychodynamiques

II.2.A - Effets comparatifs de la psychothérapie dynamique brève

Après cette première délimitation générale entre patients "névrotiques" et "psychotiques" vient la question de l'efficacité des différents types de psychothérapie psychodynamiques, et en particulier de celle des psychothérapies brèves. Cette question est apparue tout à fait cruciale aux Etats Unis dans les années 70 du double fait de l'augmentation de la demande liée au succès de la psychanalyse et du coût croissant du soin en psychiatrie. Ces facteurs ont stimulé les efforts pour trouver des formes de psychothérapie plus brèves. Ils se sont exprimés notamment dans une définition assez précise des objectifs de la psychothérapie, en relation avec les bases théoriques et techniques de la psychanalyse concernant le trouble concerné. Au départ, les troubles qui pouvaient bénéficier de ce type de psychothérapie n'étaient pas bien précisés et cela se retrouve dans l'irrégularité des résultats obtenus dans les méta-analyses (les troubles addictifs aux opiacés avoisinent les troubles dépressifs majeurs, les troubles psychosomatiques et anxieux ...). D'autre part, on a pu oublier que le travail psychothérapique ne pouvait commencer réellement, dans de nombreux cas, qu'après l'amélioration symptomatique. Que signifie alors s'arrêter à ce stade ? Ultérieurement, les psychothérapies cognitivo-comportementales sont apparues et s'est posée la question de leur propre efficacité, notamment comparativement avec celle des psychothérapies dynamiques brèves. Dans son article, A review of brief individual psychotherapies, R.J. Ursano et R. Hales (1986) décrivent chacune des psychothérapies brèves et font apparaître à quel point les psychothérapies cognitives et interpersonnelles, issues du modèle psychodynamique, ont un haut degré de recouvrement dans les aires de problèmes identifiées chez un patient donné. C'est dans ce contexte que trois méta-analyses : celles de Svartberg et Stiles (1991), de Crits-Christoph (1992) et d'Anderson et Lambert) vont leur être consacrées en 4 ans. Leurs résultats ne sont pas superposables et leurs différences font apparaître l'importance des éléments qui sont pris en compte comme critères d'inclusion dans une méta-analyse.

II.2.A.1 - Effets comparatifs de la psychothérapie dynamique brève : une méta-analyse

Les objectifs de la méta-analyse de M. SVARTBERG et T.C. STILES. Comparative effects of short-term psychodynamic psychotherapy: a meta-analysis. J. Consult. Clin. Psychol. Vol 59, Num 5, 1991, pp: 704-714 étaient (a) d'examiner les effets généraux de la psychothérapie dynamique brève (PDB) par rapport à l'absence de traitement et à un traitement alternatif ; (b) d'examiner l'effet différentiel de la PDB pour certains patients, thérapeutes, et caractéristiques de traitement ; et (c) de décrire les variables conduisant à une augmentation ou à une réduction de l'efficience relative de la PDB. Dix-neuf études cliniques de comparaison de résultats publiées entre 1978 et 1988 ont été sélectionnées, en précisant la population concernée (dépression, anxiété, névroses, troubles somatiques, addiction opiacée), les caractéristiques de la PDB (type de focalisation, durée, style et activité du thérapeute), le groupe de comparaison (7 TCC, 12 divers et absence de traitement). Les populations étant très différentes, ainsi que les techniques, il est difficile de tirer de véritables conclusions générales. Les points suivants semblent cependant pouvoir être soulignés : efficacité supérieure de la TCC dans le traitement de la dépression majeure, équivalence dans les troubles névrotiques. La technique d'interprétation du transfert est plus efficace que la technique directive et interprétative. Des différences entre les caractéristiques principales des psychothérapies conduisent à des résultats différents. Les auteurs insistent sur les biais d'échantillonnage qui peuvent expliquer la signification générale des résultats. En dépit de ces limitations, ils espèrent que les résultats de cette méta-analyse stimuleront des recherches ultérieures sur la façon dont les caractéristiques des différentes PDB peuvent être appliquées, par qui et pour quels problèmes des patients.

II.2.A.2 - Efficacité de la psychothérapie dynamique brève : une méta-analyse

La métanalyse de P. CRITS-CHRISTOPH. The efficacy of brief dynamic psychotherapy: a meta-analysis. Am. J. Psychiatry. Vol. 149, Num 2, 1992, pp 151-158 aboutit à des résultats très différents de celle de Svartberg & Stiles (1991). Crits-Cristoph (1992) examine 11 études récentes bien contrôlées concernant l’efficacité des thérapies dynamiques brèves et qui recommandaient l’usage de guidelines ou de manuels de traitement spécifiques. Il était également obligatoire que les thérapeutes en charge soient très expérimentés. Les conclusions sont que les PDB sont exactement aussi efficaces que les autres formes de psychothérapie. On remarquera toutefois que ces conclusions ne prennent pas en compte les diagnostics des patients inclus dans les études et qui bénéficient d'une psychothérapie.

La méta-analyse a inclus à la fois des études publiées, trouvées à partir d'une recherche informatique à portant sur les journaux de psychiatrie et de psychologie, et des études rapportées au cours de conférences. Les critères d’inclusion sont les suivants : usage d’une forme spécifique de psychothérapie dynamique à court terme, telle qu’elle est formulée dans un manuel de traitement ou l’équivalent ; comparaison de la psychothérapie dynamique brève avec une situation de liste d’attente, de non traitement psychiatrique, de psychothérapie alternative, de pharmacothérapie ou d’autres formes de thérapie dynamique ; existence de l’information nécessaire pour le calcul des tailles d’effet ; au moins douze séances de thérapie ; thérapeutes formés et expérimentés dans la thérapie dynamique brève. Elles réunit ainsi 863 patients qui appartiennent à diverses populations (mélangées (2), dépression (3), addiction aux opiacés (3), ESPT(1), deuil pathologique (1) et troubles de la personnalité (1). Les mesures de résultat comparées portent sur les symptomes cibles, les symptomes psychiatriques généraux et le fonctionnement social. Le nombre de séances varie de 12 à 20.
Les résultats montrent que la psychothérapie dynamique brève obtient de larges effets relativement à la liste d’attente, mais seulement une légère supériorité par rapport aux traitement non psychiatriques. Son effet est sensiblement identique à celui des autres psychothérapies et des médicaments.
P. CRITS-CHRISTOPH en conclut que les données confirment les indications antérieures selon lesquelles les différentes psychothérapies ne diffèrent pas en efficience, bien que ce résultat ne doive pas être généralisé à toutes les populations de patients, mesures de résultats et types de traitements. D’autre part, les conditions hautement contrôlées de ces études limitent leurs conclusions concernant la pratique quotidienne. Les études futures devraient considérer les différentes durées de traitement, les évaluations de suivi et les mesures spécifiques concernant les traitements, les groupes de patients, et le résultat.

Le désaccord au niveau des conclusions va faire l'objet d'un échange de lettres entre Svarberg & Stiles et Crits-Christoph qui seront publiées dans l'Am J psychiatry. Cet échange fait clairement apparaître l'importance des critères d'inclusion dans une étude et le fait que les études ne devraient pas être plus ou moins taillées pour l'obtention d'un résultat, mais représenter le plus possible les conditions de la clinique. Dans ce cas, il ne s'agit pas seulement des critères d'inclusion des patients dans les études, mais de l'adéquation entre la technique utilisée par les thérapeutes et leur formation. On apprend ainsi que, dans beaucoup des études incluses dans la meta-analyse de Svartberg (et exclues par Crits-Cristoph), les thérapeutes qui testaient l'efficacité de la psychothérapie dynamique brève étaient des étudiants ou des thérapeutes qui n'avaient aucune formation pour cette technique. Cette situation se retrouve dans des études retenues par Crits-Cristoph (et que conteste Svartberg) où des thérapeutes testent la thérapie interpersonnelle (avec succès d'ailleurs), alors que leur formation générale se situe au niveau de la psychothérapie dynamique. On arrive alors à des exigences de suivi strict d'une méthode thérapeutique particulière (suivant un manuel et/ou en référence à une supervision) qui sont a priori peu applicables dans la pratique. Le désaccord le plus fort dans la réponse de Crits-Chritoph se situe lorsqu'il contredit formellement l'assertion de Svartberg & Stiles suivant laquelle la thérapie cognitive serait supérieure à la psychothérapie dynamique dans le traitement de la dépression, en se référant à l'étude de Thompson (qui concerne les sujets déprimés âgés).

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C'est dans ce contexte qu'une troisième méta-analyse est réalisée, celle d'Anderson et Lambert.

II.2.A.3. - La psychothérapie brève d’orientation psychodynamique (PBOD) est-elle efficace ? : une revue et une méta-analyse.

La méta-analyse de E.M ANDERSON et M.J. LAMBERT. Short-term dynamically oriented psychotherapy : a review and meta-analysis. Clin. Psychol. Rev. 15(6), 1995, confirme l'efficacité de la psychothérapie dynamique brève (PDB), à partir de trois comparaisons de résultats réunis à partir de 26 études : PDB versus absence de traitement, PDB versus traitement minimal et PDB versus traitement alternatif. Les résultats issus du suivi plusieurs mois après la fin du traitement sont également contrôlés. Nous avons vu qu'Andrews et Harvey avaient trouvé que la TBOD produisait une taille d’effet modérée, relativement à l’absence de traitement (d=.71), une petite TE par rapport aux traitements minimaux (d=.34), et pas d’efficience différentielle par rapport aux traitements alternatifs. Ces résultats sont retrouvés dans des troubles tels que le deuil, la dépression, les troubles des conduites alimentaires, les addictions et l'anxiété. En revanche, les résultats sont moins significatifs avec les patients souffrant d'affections somatiques (bronchite et ulcère). Il existe une influence (positive) de l'usage de manuels et de l'expérience des thérapeutes entraînés à la PDB. Les résultats montrent par ailleurs que les PDB tendent à être plus efficaces que les autres formes de psychothérapie quand on prenait en compte des évaluations de suivi au moins après 6 mois de terminaison de la psychothérapie. Cette découverte fait apparaître la souvent postulée “incubation d’effet“ des psychothérapies d’orientation psychodynamique.

Les résultats de cette méta-analyse suggèrent que la recherche future sur la PDB devrait obligatoirement inclure des thérapeutes qui sont formés à partir d’un manuel spécifique et qui ont une expérience de ce traitement.

La dernière conclusion des auteurs est qu'à ce stade, il semble raisonnable de conclure que ce mode d’intervention est un traitement efficace pour un large spectre de patients ambulatoires.

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Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractMeta ConclusAnalyse
(1. Meta-analyse)
ANDERSON E.M. LAMBERT M.J.
Short-term dynamically oriented psychotherapy : a review and meta-analysis
Clin. Psychol. Rev. 1995 Vol 15 p 503-214
Patients non psychotiques
Comprend aussi patients difficiles à traiter : addictions, maladies psychosomatiques, TCA
Critères inclusion : Psychothérapie brève
a) au moins un groupe de traitement désigné par auteurs de l’étude comme de nature psychodynamique ou psychanalytique
b) comparaison avec soit un groupe de non traitement, soit une forme alternative de psychothérapie
c) traitement ayant duré 40 semaines ou moins
d) patients non psychotiques
e) nombre de données requises pour effectuer calcul de taille d’effet

Critères exclusion : patients psychotiques
Nbre Etudes : 26 études, T.E. / Absence traitement = .71, /traitement minimaux = .34, / traitements alternatifs = 0
AgeMoyen : ?
DuréeTrait : oui < 40 semaines
Therapeutes : Expérimentés ou inexpérimentés (TE plus faibles)
La PDB produit des tailles d’effet supérieures à absence de traitement, comparables à celles obtenues par d’autres formes de thérapie.
Les thérapeutes formés ont de meilleurs résultats que les thérapeutes inexpérimentés.
La PDB dépasse marginalement les traitements alternatifs à post-suivi de 6 mois ou plus
Cette méta-analyse a inclus des patients difficiles (maladies psychosomatiques, addictions à drogue, TCA).

Ce mode d’intervention est un traitement efficace pour un large spectre de patients ambulatoires.
(1. Meta-analyse)
CRITS-CHRISTOPH P.
The efficacy of brief dynamic psychotherapy: a meta-analysis
Am. J. Psychiatry. 1992 Vol 149 p 151-158

Critères inclusion : - Psychothérapie dynamique brève
- Usage de manuels de traitement ou guides
- Choix de mesures particulières
- Thérapeutes très expérimentés

Populations variées (mélangées (2), dépression (3), addiction aux opiacés (3), ESPT(1), deuil pathologique (1) et troubles de la personnalité (1).
Critères exclusion :
Nbre Etudes : 11 études comprenant 863 patients, T.E. = 1.10 sur symptômes cibles, .82 sur symptômes généraux et .81 sur adaptation sociale.
AgeMoyen : ?
DuréeTrait : 12 à 20 séances
Therapeutes :
- Les PDB sont exactement aussi efficaces que les autres formes de psychothérapie.
- Les études utilisées comprennent des limitations : manque d’information sur certains traitements, groupes de patients, durées de traitement variées, évaluations de suivi.
- Cette méta-analyse intègre des catégories de patients difficiles à traiter (addictions opiacés et cocaine, troubles de la personnalité. la TE serait sans doute supérieure avec une catégorie de patients “idéals”.
- Les échelles d’évaluation (SCL-90 et SAS ne prenent pas en compte les domaines spécifiques de la PDB (conflits, thèmes de transfert, modes de relations).
- Dans la PDB, le travail thérapeutique important a tendance à apparaître après la réduction symptomatique initiale, et une période adéquate pour un tel travail est probablement nécessaire pour que le changement dynamique apparaisse.
- Peu d’études de suivi sont disponibles
- Les variables d’interaction concernant le patient (qualité des relations d’objet, par ex.) et sa typologie générale (introspective ou dans l’action) ne sont pas prises en compte.
(1. Meta-analyse)
SVARTBERG M. STILES T.C.
Comparative effects of short-term psychodynamic psychotherapy: a meta-analysis
J. Consult. Clin. Psychol. 1991 Vol 59 p 704-714

Critères inclusion : Théorie sous-jacente psychodynamique ou psychanalytique.
But du traitement acquisition de prise de conscience ou changement de la personnalité.
Techniques spécifiques aplliquées portant l’accentsur l’interprétation et le travail de transfert.
Durée brève du Š 40 séances
Critères exclusion : patients psychotiques
Nbre Etudes : 19
AgeMoyen : 41 ans (20-67)
DuréeTrait :
Therapeutes : Formés et expérimentés
PDB supérieure à un groupe de contrôle composé d’une liste d’attente.
Efficacité supérieure de TCC dans le traitement de la dépression majeure, équivalence dans les troubles névrotiques.
La technique d'interprétation du transfert est plus efficace que la technique directive et interprétative. Des différences entre les caractéristiques principales des psychothérapies conduisent à des résultats différents.
Des biais d'échantillonnage peuvent expliquer la signification générale des résultats. En dépit de ces limitations, attente que les résultats de cette méta-analyse stimulent des recherches ultérieures sur la façon dont les caractéristiques des différentes PDB peuvent être appliquées, par qui et pour quels problèmes des patients.

II.2.A.4. - Effets de la psychothérapie brève pour les troubles névrotiques, somatoformes et de la personnalité : une étude prospective avec suivi à un an.

JUNKERT-TRESS B, SCHNIERDA U, SCMITZ N, TRESS W.
Effects of short-term dynamic psychotherapy for neurotic, somatoform, and personality disorders: a prospective 1-year follow-up study
Psychother. Res., Vol 11, num 2, 2001:187-200

Cette étude, qui porte sur 75 patients recrutés en clinique ambulatoire concerne l'effet d'un PDB sur des patients souffrant de troubles névrotiques, somatoformes et de la personnalité. Il s'agit d'une étude naturaliste sans groupe de contrôle. Son principal intérêt est d'avoir étudié à fois les changements symptomatiques et les modifications structurales, en particulier au niveau des images de soi et des comportements de soi et des autres qui y sont associés. La méthode de PDB utilisée est celle de Strupp et Binder. Elle est focalisée sur l'analyse des manifestations du transfert à la fois dans la relation actuelle thérapeute-patient et dans les relations conflictuelles se déroulant en dehors de la dyade thérapeutique. Elle s'appuie sur un modèle théorique suivant lequel la détresse psychologique et les problèmes d’interaction sont renforcés par des comportements maladaptés interpersonnels ayant leur origine dans les relations avec les objets primaires de la petite enfance. Ces conduites s’auto-perpétuant peuvent être également identifiées chez les patients avec des troubles somatoformes ; les symptômes sont souvent considérés comme un résultat de leur caractère interpersonnel signficatif. Cette étude s'appuie sur tout un ensemble de mesures, auto-questionnaires et inventaires utilisés par les thérapeutes.

Les résultats montrent que la détresse psychologique était considérable au départ, avec aucune différence significative entre les groupes diagnostics. Une réduction de la détresse symptomatique a été trouvée à la terminaison de la thérapie, tant pour l’échantillon entier que pour chaque groupe diagnostique. Elle n'a été que partiellement retrouvée à 6 mois. Concernant la représentation de soi, cette étude a utilisé l’introjection comme une partie de la structure de la personnalité et essayé d’évaluer les changements dans cette structure en mesurant l’affiliation des patients envers eux-mêmes (du côté du pire ou du meilleur) et en la mettant en relation avec les changements au niveau de symptômes. L’association d’une amélioration symptomatique et de changements dans l’introjection diffère suivant les groupes diagnostiques. Dans le groupe somatoforme, un comportement auto-directif plus affilé a été rapporté à la fin de la thérapie et durant la période des 6 mois de suivi, et cela parallèlement à l’amélioration symptomatique.

Dans le groupe des troubles de la personnalité , les symptômes cliniques ont difficilement changé. Ce résultat était cohérent avec l’effet positif plutôt faible sur le changement de l’introjection du côté du meilleur. En même temps, l’attitude affilée envers soi même au pire s’est réduite depuis le début jusqu’à la fin de la thérapie, avec une taille d’effet moyenne dans ce groupe.
la conclusion des auteurs est que la présente étude montre l'approche "Strupp et Binder" de la BDP est très efficace pour les patients avec troubles somatoformes. De façon convergente avec d’autres résultats empiriques, les patients avec des troubles névrotiques en ont également bien tiré profit, tandis que ceux qui présentaient des troubles de la personnalité n’ont présenté qu’un effet positif faible.

II.2.A.5 - La psychothérapie psychodynamique de groupe est-elle efficiente pour les troubles psychiatriques mineurs ?

Une étude contrôlée de S.L. BLAY et al. [ BLAY S.L., VEL FUCKS J.S., BARRUZI M., DI PIETRO M.C., GASTAL F.L., NETO A.M., de SOUZA M.P., GLAUSIUSZ L.R. DEWEY M. Effectiveness of time-limited psychotherapy for minor psychiatric disorders. Randomized controlled trial evaluating immediate v.long-term effects. Br. J. Psychiatry. Vol 180 num 5, 2002:416-422] a également cherché à étudier les résultats dans le long terme de la psychothérapie dynamique brève de groupe (PDBG) chez des patients présentant des troubles psychiatriques mineurs (troubles affectifs (moyen à modéré), anxiété, troubles somatoformes, problèmes d’adaptation et sexuels). Les critères d'inclusion étaient ceux du DSM-IV et la durée &des troubles devait être inférieure ou égale à 5 ans , en comparaison avec une approche clinique standard. Cette évaluation a été réalisée à deux périodes : rapidement après la fin du traitement et à deux ans de suivi.
La psychothérapie d'orientation psychodynamique reposait sur les principes de Sifneos (1987), avec l'objectif d'aider le patient à identifier et à élaborer des problématiques telles que l'anxiété ou les conflits interpersonnels. Les techniques de groupe incluaient le questionnement, des confrontations limitées, l'expression de sentiments intenses issus de la discussion, la recherche des conduites répétitives, l'analyse du transfert et des modes de résistance. Tous les patients inclus dans ce groupe participaient à huit séances de psychothérapie, deux fois par semaine pendant un mois.
Pour faciliter l'adaptation et la participation des membres du groupe, chaque séance commençait par la projection d'une video de 20 à 30 minutes. Ces videos abordaient les thèmes suivants : relations personnelles, travail, religion, alcoolisme, relations familiales, sexualité, violence et honnêteté.
Les patients ont été répartis de façon randomisée entre un groupe expérimental et un groupe de contrôle. Une première mesure de résultat a été réalisée à partir du Questionnaire de santé générale (QSG).
Sur la base de l’amélioration du QSG, à la fin du traitement le groupe PDBG montrait une amélioration significative chez 23 des 42 patients (54,8%) comparés avec 11 des 41 (26,8%) du groupe "approche clinique standard". La différence du taux total d’amélioration était de 28% (95% CI 8-48) (chi(2)=6.7; d.f.=1; P=0.009). Par contre, aucun effet différentiel au suivi n’a été trouvé entre le groupe PDBG et le groupe de gestion clinique standard.
Les conclusions des auteurs sont donc que la psychothérapie apparait avoir des effets positifs à la fin du traitement mais que les changements obtenus ne sont pas stables.

II.2.B - Ce qui manque de façon évidente dans ces études !

On ne peut être que déçu de la faiblesse de l'information fournie par ces études générales qui témoignent surtout des limites des approches globales où des données à la fois réduites et très hétérogènes sont sensées apporter des résultats probants. On s'aperçoit aussi que la recherche a évidemment tendance à se concentrer sur ce qu'elle peut le plus facilement appréhender, par exemple les psychothérapies brèves, alors que la question de la proportion des patients des files actives de psychiatrie qui relèvent de leurs critères d'inclusion demeure essentielle.

Dans ce premier tableau, rien ne concerne de façoin précise l'évaluation des psychothérapies longues, ni celle des psychothérapies pratiquées en ambulatoire.

II.3. Etudes d'efficacité par pathologies

Nous présenterons pour chaque pathologie en premier lieu les revues systématiques et les études contrôlées, puis les autres études.

II.3.1. Troubles psychotiques

La recherche bibliographique ne comprenait aucune étude sur ce sujet !

II.3.2. Troubles de l'humeur

II.3.2.A - Psychothérapie de la dépression : une revue commentée de la recherche contrôlée sur les résultats (revue systématique)

La revue systématique de L.A. ROBINSON, J.S. BERMAN et R.A. NEIMEYER. Psychotherapy for the treatment of depression : a comprehensive review of controlled outcome research. Psychol. Bull. 108, 1990:30-49, est centrée sur l’efficience de la psychothérapie dans le traitement de la dépression et son efficacité relative par rapport à d’autres formes de traitement. Sont également abordés le rôle de la préférence théorique de l’investigateur dans les résultats, le fait que la psychothérapie soit individuelle ou de groupe, l’importance des procédures de screening diagnostique, l’influence d’autres variables telles que l’entrainement du thérapeute, la durée du traitement et les caractéristiques du patient.

Cette étude fait ressortir deux grands biais possibles qui peuvent entacher la valeur des résultats. D'abord le recrutement des patients à partir desquels l'efficacité d'un traitement va être évaluée. Cet aspect a déjà été signalé par Andrews et Harvey pour leur méta-analyse. Dans ce cas, les proportions sont impressionnantes et il est difficile de considérer que la population des patients "déprimés" sera identique si elle est recrutée par voie de presse (48% des études), parmi les étudiants d'une université (24% des études), ou parmi la file active d'un service de psychiatrie, hospitalier ou ambulatoire (16% des études). Ensuite, les auteurs font apparaître que l'allégeance du chercheur (préférence du chercheur pour une théorie et la pratique qui en est dérivée), se révéle être hautement corrélée avec les résultats des comparaisons directes entre traitements.

Concernant les résultats, la psychothérapie obtient des résultats significatifs, si on la compare au placebo (l'effet est trois fois supérieur). Les résultats obtenus restent acquis dans la durée. Ces résultats ne sont pas surprenants. Le fait que, pour un patient, être inscrit sur une liste d'attente ait déjà un effet psychothérapique important l'est davantage.
Existe-t-il une différence d'efficacité parmi les différentes psychothérapies ? A première vue, la psychothérapie cognitivo-comportementale serait plus efficace que la psychothérapie psychodynamique. Mais une analyse plus approfondie fait apparaître qu'un facteur au moins intervient dans ce résultat, celui de l'allégeance théorique du chercheur. Celle-ci prise en compte, la différence s'estompe. Autre point souligné, les données ne donnent pas d’indication que leur usage accroisse l’efficacité thérapeutique ou permette une différenciation plus fine de l’efficience relative des traitements.
L'aspect le plus intéressant est peut être celui qui concerne la signification clinique des effets de la psychothérapie. Bien que la psychothérapie obtienne de véritables résultats, peut-on dire pour autant que les déprimés atteignent une humeur comparable à celle d'un échantillon de personnes "non dépressives" ? Cette revue systématique fait apparaître que "guéris" les dépressifs n'atteignent qu'un état de leur humeur qui correspond à celui d'une population normée dont l'humeur n'est de toute façon jamais vraiment stable et qui est susceptible de vivre des "moments dépressifs.

On sera surpris d'apprendre que la psychothérapie de groupe peut conduire à des résultats comparables à ceux de la psychothérapie individuelle. C'est en tout cas ce que démontre cette revue.

Sur les raisons propre de l'efficacité, l'article se termine par une question très provocante : l’attente du patient d’une amélioration, son acceptation du cadre du traitement ou la qualité de la relation thérapeutique ne constitueraient-ils pas les mécanismes centraux à partir desquels le changement thérapeutique se produit ?
La conclusion de cet article passionnant et très formateur au niveau de la réflexion méthodologique est que "si les chercheurs veulent progresser dans leur compréhension de la façon dont la psychothérapie bénéficie aux patients, les facteurs communs [aux différentes psychothérapies] devraient devenir un axe beaucoup plus central des futurs efforts de recherche.

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractMeta ConclusAnalyse
(2. Revue systématique)
ROBINSON L.A., BERMAN J.S. NEIMEYER R.A.
Psychotherapy for the treatment of depression : a comprehensive review of controlled outcome research
Psychol. Bull. 1990 Vol 108 p 30-49
(161) Troubles humeur
Critères inclusion : Psychothérapie
- sujets identifés comme souffant en premier lieu de dépression
- comparaison entre le traitement et le non traitement ou entre différents de types ou modes de thérapie
- traitements ayant un composant verbal prédominant
- dans 48% des études, les patients étaient sollicités dans la communauté à partir d’annonces par l’intermédiaire des medias. Quatorze autres investigations (24%) reposaient sur des étudiants sollicités dans un cadre universitaire, et 9 études (16%) utilisaient des patients ambulatoires adressés traditionnellement.
- seules 35% des études utilisent des critères de diagnostic exigeants
Critères exclusion :
Nbre Etudes : 58 : comparaison entre € psychoth et / liste d’attente
dont15 études comparant psychoth, pharmacoth ou combinaison (4 études PPD).
AgeMoyen : 45
DuréeTrait : brève, 1 fois/semaine
Therapeutes : 19 études où les thérapeutes étaient des étudiants
2 études où les thérapeutes étaient des professionnels parfaitement formés
Difficulté de comparer les € types de traitement car les études ne précisent pas la gravité de l’état des patients et donc leur accessibilité à la psychothérapie. Les variations peuvent être dues aux caractéristiques de l’échantillon. Les données ne donnent pas d’indication que l’usage de manuels accroisse efficacité thérapeutique ou permette différenciation plus fine de l’efficience relative des traitements. Tailles d’effet pour thérapies individuelles et de groupe quasi similaires. Mesures par auto-questionnaires et évaluateurs indépendants quasi similaires. Peu d’intervention des variables démographiques ni d’intensité de la dépression sur le résultat. La taille d’effet varie peu selon la source du recrutement. Psychothérapie semble plus efficace que pharmacothérapie mais artefact allégeance du chercheur, approche combinée pas plus efficace que chaque traitement seul.
En dépit de leur amélioration relative, les patients déprimés restent plus déprimés que contrôles dans population générale. Pas de différence de T.E. avec traitements placebo. il se peut que la dépression réponde particulièrement aux facteurs curatifs communs à la fois dans psychothérapie et traitements placebo.Pas de différence résultats fin de traitement et de suivi. Les instruments spécialement conçus pour évaluer la dépression ont tendu à produire des effets plus importants que les mesures évaluant d’autres aspects. Les études avec moins de patients présentent des résultats plus importants que celles avec beaucoup de patients (biais de publication ?). Pas de différence résultats des différents types de psychothérapie à partir de diagnostic univoque (dépression).
Importance des variables d’arrière plan.

Si les chercheurs veulent progresser dans leur compréhension de la façon dont la psychothérapie bénéficie aux patients, ces facteurs communs devraient devenir un axe beaucoup plus central des futurs efforts de recherche.

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II.3.2.B - Psychothérapie psychodynamique et Clomipramine dans le traitement de la depression majeure (étude contrôlée)

L'article de Y. BURNAND, A. ANDREOLI, E. KOLATTE, A. VENTURINI et N. ROSSET. Psychodynamic psychotherapy and clomipramine in the treatment of major depression.Psychiatr. Serv., Vol 53 num 5, 2002, 585-590, très intéressant pour au moins trois raisons :
1 - il évalue les effets de la psychothérapie dynamique associée à un antidépresseur (clomipramine) dans le traitement de la dépression majeure, par rapport à cet antidépresseur utilisé seul chez des patients ambulatoires. L'efficacité de la psychothérapie est prouvée, non seulement au niveau quantitatif sur l'échelle de dépression, mais surtout par rapport aux échecs de traitement. La psychothérapie dynamique a ainsi non seulement une action antidépressive générale, mais aussi une action particulière sur cette fameuses tranche de patients dits "résistants". Cette étude est donc à mettre en relation avec la revue de Robinson, Berman et Neimeyer qui aboutissait à une conclusion contraire sur le premier point (pas d'effet de l'association psychothérapie - antidépresseur / antidépresseur ou psychothérapie seul), du moins à partir de la population qu'il étudiait (dépression moyenne), et n'abordait pas le second qui est pourtant sans doute le cas le plus fréquent de demande psychothérapique chez les patients dépressifs.
2 - il prend en compte la dimension économique, en démontrant que la psychothérapie associée permet aussi de faire des économies, ce qui n'est évidemment pas négligeable. L'origine de ces économies se situe dans un taux d’hospitalisation plus faible, un nombre moins élevé de jours d’hospitalisation, et dans une réduction du nombre des jours de travail perdus durant le traitement.
3 - l'approche "quantitative" est complétée par une approche "qualitative". Celle-ci explicite d'abord l'approche psychodynamique en situant (a) ses ingrédients, (b) ses interventions et (c) les étapes correspondantes: "(a) Les ingrédients effectifs désignés de la psychothérapie psychodynamique sont : un cadre pour la relation thérapeutique, l’empathie et l’expression émotionnelle, la prise de conscience, l’éveil, la facilitation et le renforcement de nouveaux liens interpersonnels. (b) Les interventions appropriées correspondantes pour obtenir ces ingrédients sont : l’accent porté sur la valeur des relations thérapeutiques et leur évolution ; la facilitation de la catharsis affective à travers une écoute empathique de l’expérience personnelle unique du patient et la désignation active (l’expression en termes verbaux) des sentiments majeurs sous tendant sa détresse ; la reprise des crises de vie présente et passées, qui offre une prise de conscience dans la mise en oeuvre de modes de relations interpersonnelles maladaptées et de conflits psychologiques facilitant l’interruption du lien ; la focalisation sur l’idéalisation compulsive des différents styles d’attachement, les objets aimés, les images de soi grandioses et l’ignorance active du caractère déplaisant de tels processus ; la mise à distance d’une importance excessive attribuée à la séparation, à la déception et la perte pour renforcer un meilleur soin de soi ; la recherche d’aide et de nouveaux investissements. (c) Les étapes correspondantes du traitement sont le processus d’alliance et la psycho-éducation, la prise de conscience, la focalisation, l’éveil, le deuil et le réinvestissement de la réalité. Il est alors logique que l'évaluation porte également sur ces éléments (travail d’alliance, insight, focalisation, éveil, deuil et réinvestissement de la réalité).
Par ailleurs, il est précisé que la psychothérapie est menée par des infirmier(e)s "bien outillé(e)s, bien formé(e)s, et sous supervision étroite". Une attention particulière est attribuée aux "barrières au traitement", conçues comme une forme de transfert (l’impasse narcissique travaillant à travers le processus de deuil). L'alliance thérapeutique, qui en est le pôle opposé, est définie comme "un processus intersubjectif qui dépend de traits de la personnalité et de la gestion de la résistance, de l'impasse et de la rupture". Un élément non négligeable qui pourrait participer à ce succès est que la psychothérapie a été menée par des professionnels "de l'intérieur" bien formés et non par des psychothérapeutes extérieurs à l'institution.
Le traitement combiné a été associé à une réduction des échecs de traitement, une meilleure adaptation à 10 semaines, un meilleur fonctionnement global et une réduction du taux d’hospitalisation à l’issue du traitement. Une réduction du coût de 3 311 $ par patient a été observée dans le groupe de traitement combiné, associée avec un taux de réhospitalisation réduit et moins de journées de perte de travail ; cette réduction était supérieure au coût lié à la psychothérapie.

Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractEtude ConclusAnalyse
(3. Etude contrôlée)
BURNAND Y., ANDREOLI A., KOLATTE E., VENTURINI A. ROSSET N.
Psychodynamic psychotherapy and clomipramine in the treatment of major depression
Psychiatr. Serv. 2002 Vol 53 p 585-590
(161) Troubles humeur
Critères inclusion : Psychothérapie psychodynamique

diagnostic d’épisode de dépression modérée à sévère (DSM-IV) et score HDRS > 20
Critères exclusion : Troubles bipolaires, symptomes psychotiques, addictions sévères, troubles organiques, intolérance antérieure à la clomipramine, retard mental.
Design : Etude de l’association clomipramine-PPD vs clomipramine-soutien. PPD centrée sur dépassement “barrière au traitement”
Taille Echant : 74 P
Age Moyen : 20-65
Durée Trait : 10 semaines ambulatoire intensif
Therapeutes : Infirmiers bien outillés, bien formés et sous supervision étroite
La médication antidépressive combinée avec la psychothérapie psychodynamique est supérieure à la médication antidépressive seule dans le traitement de patients ambulatoires souffrant de dépression majeure (moins d’échec, meilleure adpatation à 10 semaines, meilleur fonctionnement global, réduction du taux d’hospitalisation et du coût global utilisation de services).
Taux + haut de rupture de traitement chez patients ne recevant pas PPD.
La psychothérapie psychodynamique peut être un facteur de coût efficacité du traitement de la dépression majeure

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II.3.2.C - Essai randomisé contrôlé d'une intervention psychologique brève après un acte d'empoisonnement délibéré

GUTHRIE E., KAPUR N., MACKWAY-JONES K., CHEW-GRAHAM C., MOOREY J., MENDEL E., MARINO-FRANCIS F., SANDERSON S., TURPIN C., BODDY G. TOMENSON B.
Randomised controlled trial of brief psychological intervention after deliberate self poisoning
Bmj, 2001, vol 323 n° 7305:135-138

Les objectifs de l'étude de GUTHRIE E., KAPUR N., MACKWAY-JONES K., CHEW-GRAHAM C., MOOREY J., MENDEL E., MARINO-FRANCIS F., SANDERSON S., TURPIN C., BODDY G. TOMENSON B, Randomised controlled trial of brief psychological intervention after deliberate self poisoning.Bmj, 2001, vol 323 n° 7305:135-138, étaient de déterminer les effets d’une intervention psychologique brève (la thérapie interpersonnelle psychodynamique brève) pour des patients après auto-empoisonnement délibéré et de comparer son effet avec celui d'un traitement habituel. Il visait également à comparer l’impact de l’intervention active et du traitement habituel sur la satisfaction du patient par rapport au soin. Il s'agit d'une étude randomisé contrôlé, dont les participants étaient 119 adultes qui s’étaient délibéremment empoisonnés et s’étaient présentés dans le département d’urgence d’un hôpital universitaire.
L'intervention psychothérapique (réalisée dans la communauté) a consisté en quatre séances de thérapie délivrées au domicile du patient. Les patients contrôles ont reçu un “traitement comme d’habitude”, qui dans la plupart des cas consistait à être adressés chez leur médecin généraliste. Les mesures de résultat ont porté sur la sévérité des idées de suicide six mois après traitement (mesurée par l’échelle de Beck pour l’idéation suicidaire), sur les symptomes dépressifs (par l’échelle de Beck de la dépression), la satisfaction du patient vis-à-vis du traitement, et les tentatives d’autolyse rapportées par le patient.

Les résultats de cette étude fait apparaître que les participants randomisés dans le groupe d’intervention avaient une réduction significativement plus grande de l’idéation suicidaire à six mois de suivi, comparés avec ceux du groupe de contrôle (réduction dans la moyenne de l’échelle de Beck de 8.0 vs 1.5). Ils étaient plus satisfaits de leur traitement et étaient moins enclins à rapporter des tentatives répétées de se mettre en danger au moment du suivi (proportion de répétition de 9% vs 28% dans le groupe de contrôle ; différence 19%, 95% d’intervalle de confiance de 9% à 30%, P=0.009).
En conclusion, la psychothérapie interpersonnelle brève peut être un traitement efficace pour les personnes qui ont délibérément tenté de s’empoisonner.

Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractEtude ConclusAnalyse
(3. Etude contrôlée)
GUTHRIE E., KAPUR N., MACKWAY-JONES K., CHEW-GRAHAM C., MOOREY J., MENDEL E., MARINO-FRANCIS F., SANDERSON S., TURPIN C., BODDY G. TOMENSON B.
Randomised controlled trial of brief psychological intervention after deliberate self poisoning
Bmj 2001 Vol 323 p 135-138
(161) Troubles humeur
Critères inclusion : Tentative délibérée de suicide par empoisonnement ;
lire et parler anglais ;
vivre dans le secteur de l’hôpital ;
être enregistré chez un médecin généraliste ;
ne pas nécessiter un traitement hospitalisé
Critères exclusion :
Design : Etude de l’effet de 4 séances de PIPD au domicile du patient sur idéation suicidaire et TS. Intervention centrée essentiellement sur problèmes interpersonnels
Taille Echant : 119
Age Moyen : 18-65 (moyenne 31,2
Durée Trait : 4 séances de psychothérapie psychodynamique hebdomadaires (50mn) à domicile.
Therapeutes : Thérapeutes infirmiers.
Supervision hebdodmadaire, enregistrement des entretiens et usage d’une échelle standardisée d’évaluation.
Chez patients groupe psychothérapie/ groupe de contrôle
- Réduction significativement plus grande de l’idéation suicidaire à six mois de suivi (réduction dans moyenne de l’échelle de Beck de 8.0 à 1.5)
- Meilleure satisfaction pa rapport à leur traitement
- Réduction des tentatives répétées de se mettre en danger au moment du suivi (proportion de répétition de 9% vs 28%) .
Conclusion : la psychothérapie interpersonnelle psychodynamique brève peut être un traitement efficace pour les personnes qui ont délibérément tenté de s’empoisonner.

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II.3.2.D - Interventions psychodynamiques brèves et dépression en milieu hospitalier
L. LESOURGUES, Ph. BIRMES, G. STERCK, E. GILLIERON et L. SCHMITT
Ann. Med. Psychol., Vol 158, num 8, 2000:648-655

Présentation prochaine sur le site.

II.3.3. Troubles anxieux

II.3.3.A. Trouble panique

II.3.3.A.1 - Traitement psychodynamique du trouble panique : une revue

Le trouble panique est une entité diagnostique particulière qui n’a été reconnue universellement que depuis la publication du DSM-III, en dépit du fait que la publication de Freud publiée en 1894 et intitulée “A partir de la distinction d’un syndrome particulier de la neurasthénie, description de la névrose d’angoisse” (Freud, 1894), présente un tableau de symptômes sensiblement identique. B. MILROD et M.K. SHEAR, Dynamic treatment of panic disorder: a review, J. Nerv. Ment. Dis., Vol. 179, num 12, 1991:741-743, ont conduit une revue à partir de la littérature psychanalytique et psychodynamique afin d’identifier des patients avec trouble panique qui ont bénéficié d’un traitement psychodynamique. Trente-cinq cas ont été identifiés qui répondent la à la description du trouble panique. Leurs caractéristiques ont été comparées avec celles d’une population actuelle de troubles paniques et anxieux. L’information sur la durée du traitement était disponible pour 17 des 35 patients. Pour treize des dix-sept la durée du traitement avait été inférieure à 4 mois. Pour deux d’entre eux, elle était décrite comme “à long terme”, ce qui impliquait plusieurs années de traitement. Pour les deux autres, elle était décrite comme “brève”. Un des intérêts de cette revue est qu'elle a recensé un protocole en trois phases, émergeant de la description de la prise en charge dans dix cas de trouble panique. A la fin de la phase initiale du traitement, les buts suivants devaient être accomplis : a) les symptômes de panique étaient plus maniables. Les symptômes étaient souvent moins sévères, mais même s’ils ne l’étaient pas, les patients étaient capables de décrire fidèlement leurs symptômes sous une forme plus organisée qu’antérieurement. b) les intenses inquiétudes des familles avaient été calmées par la connaissance que le patient était en train d’entreprendre un traitement pour sa pathologie et que les résultats ne seraient pas immédiats. Certaines familles recevaient des suggestions concrètes de ces thérapeutes, telles que le fait de ne pas stresser le patient durant la phase initale du traitement et de continuer à poursuivre leur propre vies. c) une relation thérapeutique avait été établie qui permettait au patient de commencer à reconnaitre et à discuter les sensations naissantes qui semblaient avoir contribué au démarrage des symptômes de panique.
La phase moyenne de traitement était marquée par une amélioration symptomatique. Les conflits centraux des patients étaient identifiés et explorés. Dans chacun des traitements identifiés, un lien était établi entre les éléments précipitants ou les fantasmes et l’épisode de panique. Quelques fois un lien était fait à partir de l’exploration d’un événement externe, quelques fois la connection était faite à travers l’exploration du transfert. Une expérience centrale terrorisante pour ces patients était leur sentiment de perte de contrôle sur leurs sentiments ; cette série d’interventions concernait spécifiquement ces questions.
La phase de terminaison n’était pas régulièrement rapportée. Cependant, dans trois cas, ce fut l’occasion d’une analyse du transfert ambivalent à propos d’une résurgence des symptômes, au moment où la fin du traitement causait chez ces patients une brève réémergence de leurs symptômes originaux d’anxiété. Dans chaque cas, cette approche eut comme résultat la disparition de la panique et le sentiment d’une plus grande stabilité psychologique générale.
En résumé, la plupart des cas trouvés s’étaient améliorés de façon importante avec la thérapie, souvent en une période de temps relativement brève, pas plus longue que la moyenne d’un essai médicamenteux.

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II.3.3.A.2 - La psychothérapie psychodynamique brève réduit-elle le taux de rechute du trouble panique ?

WIBORG I.M. DAHL A.A.
Does brief dynamic psychotherapy reduce the relapse rate of panic disorder?
Arch. Gen. Psychiatry, 1996, vol 53, num 8: 689-694

Bien que le trouble panique puisse être effectivement allégé par un traitement médicamenteux, le taux de rechute est élevé. En associant une psychothérapie dynamique brève centrée sur la vulnérabilité psychosociale de patients présentant un trouble panique à un traitement médicamenteux établi, les auteurs ont fait l’hypothèse que le taux de rechute après pharmacothérapie serait réduit.
Les patients avec trouble panique (défini par le DSM-III-R) ont été recrutés en médecine générale, en psychiatrie ambulatoire et par demande directe. Il est important de préciser ici qu'ils ne présentaient pas de comorbidités telles que troubles de la personnalité, psychose, addictions, dépression majeure primaire, etc. Ces patients ont été répartis de façon aléatoire en deux groupes. Le premier était un protocole de traitement par clomipramine pendant 9 mois (n = 20), le second associait à un traitement par clomipramine pendant 9 mois 15 séances hebdomadaires de psychothérapie dynamique brève (n = 20).
L’hypothèse était que la psychothérapie psychodynamique brève (PDB) pourrait rendre les patients souffrant de trouble panique moins vulnérables aux facteurs psychosociaux qui déclenchent la récurrence de TP après la fin du traitement. L'hypothèse psychopathologique était que les patients avec TP se soumettent pratiquement aux autres. Ils n’expriment pas leur comportement d’affirmation ou les sentiments négatifs de peur de ne pas être appréciés, aimés ou acceptés. Ces patterns interpersonnels sont des répétitions de patterns comportementaux précoces avec l’entourage auquel ils attribuaient de l’importance et ont servi originellement de fonction auto-protectrice. Ils interfèrent maintenant avec le fonctionnnement adulte autonome et causent du stress dans les relations interpersonnelles. Le but de la psychothérapie était alors d’aider le patient à développer une prise de conscience des origines et des déterminants des conduites dysfonctionnelles. Cette prise de conscience est nécessaire pour acquérir des conduites plus adaptées de relation interpersonnelle.
Les mesures d’anxiété et de dépression ont été réunies au départ et à intervalles réguliers. Les patients avaient des entretiens aveugles de suivi à 6, 12 et 18 mois après le début du traitement.

Les résultats ont été les suivants ; tous les patients dans les deux groupes ne présentaient plus d’attaques de panique à 26 semaines après le début du traitement. A la fin du traitement médicamenteux, le taux de rechute était significativement plus élevé dans le groupe traité uniquement par la clomipramine durant la période de suivi. Il existait des scores significativement plus bas pour la plupart des mesures d’anxiété dans le groupe clomipramine plus psychothérapie au moment du suivi à 9 mois.
En conclusion, cette étude démontre que l’addition de psychothérapie psychodynamique brève au traitement avec clomipramine réduit significativement le taux de rechute du trouble panique en comparaison avec le traitement par clomipramine seule.

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II.3.3.A.3 - Essai ouvert pilote de psychothérapie psychodynamique brève pour trouble panique

MILROD B., BUSCH F., LEON A.C., ARONSON A., ROIPHE J., RUDDEN M., SINGER M., SHAPIRO T., GOLDMAN H., RICHTER D. SHEAR M.K.
A pilot open trial of brief psychodynamic psychotherapy for panic disorder
J. Psychother. Pract. Res., 2001, Vol 10, num 4: 239-245

Nous avons vu que les rapports réunis dans la revue de Milrod et Shear suggèrent que le traitement psychodynamique seul peut apporter un soulagement symptomatique, souvent aussi rapidement que les interventions psychopharmacologiques ou cognitivo-comportementales. De plus, Wiborg et al. ont démontré dans l'étude pilote randomisée précédente qu'une psychothérapie psychodynamique hebdomadaire avec manuel de 3 mois, menée en association avec de la clomipramine, réduisait de façon significative la rechute sur 18 mois chez des patients avec trouble panique, en comparaison avec des patients sous clomipramine seule.

En dépit de cette évidence suggestive, il n'y a pratiquement pas eu d'étude systématique de psychothérapie psychodynamique comme monothérapie du trouble panique. Etant donné l'usage prévalent et la large disponibilité de ce type de traitement, il existe un besoin urgent de telles études. Celle de B. MILROD, F. BUSCH est la première de ce genre.

Il s’agit de la présentation complète d’un essai ouvert de psychothérapie psychodynamique avec manuel pour le traitement du trouble panique, la Psychothérapie Psychodynamique Centrée sur la Panique (PPCP). La PFPP comprend trois phases : traitement de la panique aiguë, traitement de la vulnérabilité à la panique et terminaison, qui sont présentées en de façon générale, avec la précision que comme avec toutes les formes de psychothérapie, jusqu'à ce que des études de processus pertinentes soient accomplies, il est difficile de préciser lesquelles parmi la myriade d'interventions qui interviennent sont les premières responsables des changements thérapeutiques observés.

Vingt et un patients avec TP ont été inclus dans un essai de traitement constitué de 24 séances, au rythme de 2 par semaine. Les thérapeutes de l'étude qui ont participé à cet essai thérapeutique étaient des cliniciens séniors, bien formés et solidement expérimentés. Seize des vingt et un ont bénéficié d’une rémission de la panique et de l’agoraphobie. Les participants au traitement avec dépression ont également vécu une rémission de la dépression. Les améliorations dans les symptômes et dans la qualité de vie étaient substantiels et consistants dans les différents domaines. Les gains symptomatiques se sont maintenus plus de 6 mois. Cette présentation a été préparée spécifiquement pour décrire le suivi à 6 mois de ces patients. La psychothérapie psychodynamique apparait être un traitement non pharmacologique prometteur pour le trouble panique.

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Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractEtude ConclusAnalyse
(2. Revue systématique)
MILROD B., SHEAR M.K.
Dynamic treatment of panic disorder: a review
J. Nerv. Ment. Dis. 1991 Vol 179 p 741-743
(199) Troubles anxieux
Critères inclusion : Psychothérapie psychodynamique

Patients souffrant de trouble panique: Comorbidité retrouvée dans 83% des cas (trouble anxieux ou somatisation).

Critères exclusion : insuffisance d’information
Design : Cas issus de revue de la littérature psychanalytique et psychodynamique comparés à cas dans population clinique de l’anxiété.
Taille Echant : 35 cas (21 cas crières DSMIII et 14 certifiés par les auteurs)
Age Moyen : 32
Durée Trait : <4mois (17), “brève” (2), “longue” (2), non précisée (14)
Therapeutes :
A partir des 35 cas étudiés, distinction de trois phases principales du traitement :
1) Phase initiale : établir une relation entre le patient et le clinicien . - symptômes de panique plus maniables, souvent moins sévères et sinon pouvant être exprimés avec un certain recul. - familles rassurées et souvent coopérantes. - relation thérapeutique établie
2) Phase moyenne : amélioration symptomatique. identification des conflits centraux, mise en relation d’un événement ou d’un fantasme précipitant de l’épisode de panique, à partir de l’exploration de la situation externe ou du transfert 3) Phase de terminaison. Les interventions curatives incluent l’établissement d’une relation de transfert et la démontration pour le patient que les crises de panique correspondent à des sentiments de colère.
(3. Etude contrôlée)
WIBORG I.M, DAHL A.A.
Does brief dynamic psychotherapy reduce the relapse rate of panic disorder?
Arch. Gen. Psychiatry. 1996 Vol 53 p 689-694
(199) Troubles anxieux
Critères inclusion : Trouble panique (DSM III R) avec ou sans agoraphobie.
Au moins une attaque de panique par semaine durant les 3 semaines précédant l’étude.
Critères exclusion : Troubles de la personnalité, psychose, addiction à l’alcool ou aux substances, troubles du comportement alimentaire, dépression majeure primaire, agoraphobie avec ou sans attaques de panique, grossesse, allaitement, ou maladie mentale significative au moment de l’évaluation.
Design : Compraraison association d’une PDB à traitement médicamenteux (clomipramine) / traitement médicamenteux prescrit par MG. Mesures d’anxiété et dépression à début, durant et 6, 12 et 18 mois. Recrutement : MG, psychiatrie ambulatoire, demande directe
Taille Echant : 40 patients
Age Moyen : 21-49 (moyenne 25-28)
Durée Trait : - 1 visite hebdomadaire pendant 15 semaines.
- 2 séances de BDP avant début traitement médicamenteux
Therapeutes : Psychologue clinicien bien formé à la méthode psychothérapique.
Manuel technique suivant concepts de Davanloo, Malan et Strupp et Binder.
- Addition de BDP au traitment par clomipramine réduit significativement taux de rechute du trouble panique / traitement par clomipramine seule.
- Amélioration globale à 18 mois plus importante.
- Légère amélioration des troubles comorbides / pas d’amélioration dans groupe clomipramine seule.
le groupe avec PDB a des résultats significativement meilleurs sur plupart des mesures 9 mois après fin du traitement médicamenteux.
Pas d’argument supériorité du PDB /autres modalités Psychothérapies dans réduction taux de rechutes après tt médicam., mais hypothèse réduction de vulnérabilité sociale
(4. Autres études)
MILROD B., BUSCH F., LEON A.C., ARONSON A., ROIPHE J., RUDDEN M., SINGER M., SHAPIRO T., GOLDMAN H., RICHTER D. SHEAR M.K.
A pilot open trial of brief psychodynamic psychotherapy for panic disorder
J. Psychother. Pract. Res. 2001 Vol 10 p 239-245
(202) Troubles anxieux (TP)

Troubles paniques
Critères inclusion : Trouble panique (DSM-IV), avec (76%) ou sans (24%) agoraphobie. Age entre 18 et 50 ans. Au moins une attaque de panique par semaine durant le mois précédent. Absence de traitement médicamenteux pendant au moins 4 semaines avant début de phase de pré-traitement
Critères exclusion : Prise de médicaments, usage de substances, dépression majeure avec mélancolie, antécédents de manie, schizophrénie, delirium, demence.
Design : - Utilisation de la psychothérapie dynamique comme monothérapie. Les patients ne sont pas autorisés à utiliser une autre forme de traitement. - technique psychothérapique PFPP, suivant manuel.
Taille Echant : 21 patients
Age Moyen : 32 ans
Durée Trait : 24 séances, 2/semaine, séances de 45 mn
Therapeutes : - Six thérapeutes seniors, diplômés d’instituts de psychothérapie, ayant entrepris formation spécifique à cette thérapie. Adhésion aux standards vérifiée et au protocole d’étude.
- Rémission de la panique et de l’agoraphobie ches 16 des 17 patients ayant terminé le traitement.
- Rémission de la dépression (chez patients avec dépression, soit près de la moitié de la population traitée) . Le17ème patient avait une comorbidité TOC.
- Améliorations substantielles dans les symptômes psychiatriques primaires, la phobie et de la qualité de vie.
- Gains symptomatiques maintenus plus de 6 mois.
- Pas de groupe de comparaison
- La psychothérapie psychodynamique apparait être un traitement non pharmacologique prometteur pour le trouble panique, y compris accompagné de comorbidités (dépression et dysthymie).

II.3.3.B. Etat de stress post-traumatique

II.3.3.B.1 - Psychothérapie brève dans le traitement de l’état de stress post traumatique (étude contrôlée)

BROM D., KLEBER R.J. DEFARES P.B.
Brief psychotherapy for posttraumatic stress disorders
J. Consult. Clin. Psychol., Vol 57, num 5, 1989, pp 607-612

Il s’agit d’une étude à large échelle de l’efficience des méthodes psychothérapiques de traitement des troubles post-traumatiques. L’échantillon était constitué de 112 personnes souffrant de troubles sérieux consécutifs à des événements traumatiques (deuil, acte de violence et accidents de la route) s’étant produits moins de cinq ans auparavant. Trois méthodes ont été testées au niveau de leur efficience : la désensibilisation traumatique, l’hypnothérapie et la thérapie psychodynamique brève d'Horowitz (cette psychothérapie est explicitement dirigée sur l’interruption des symptômes actuels et n’est pas destinées à apporter un changement de la personnalité). Leurs résultats ont été comparés avec ceux d’un groupe de contrôle en liste d’attente. Les résultats indiquent que les cas traités présentaient un taux significativement plus bas de symptômes liés au traumatisme que le groupe de contrôle.

Entrons plus en détail dans les différences entre les trois thérapies. Il est frappant que, dans la thérapie psychodynamique, les effets sur la dimension de l’évitement sont nettement plus importants que ceux qui concernent la dimension de l’intrusion mesurée avec l’Impact of Event Scale. C’est exactement l’opposé des deux autres conditions de psychothérapie ; les effets sur l’intrusion de la désensibilisation au trauma et de l’hypnothérapie sont les plus grands. Peut-être ce résultat, de même que les effets d’après-coup établis de la thérapie psychodynamique, sont ils spécifiquement liés à la méthode de traitement.

Comment expliquer cette similarité-différence ? Ces résultats montrent clairement l’importance d’instruments spécifiques de recherche. Pour continuer dans cette voie :
- il faudrait des instruments d’analyse qui puissent intégrer des questions cliniques associées, telles que celles qui concernent les mécanismes dans les différents types d’approche.
- Il doit être clair que le processus de la psychothérapie doit être pris en considération si l’on veut établir un lien plus explicite entre la théorie, la thérapie, les méthodes de recherche et les troubles.

Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractEtude ConclusAnalyse
(3. Etude contrôlée)
BROM D., KLEBER R.J. DEFARES P.B.
Brief psychotherapy for posttraumatic stress disorders
J. Consult. Clin. Psychol. 1989 Vol 57 p 607-612
(201) Troubles anxieux (ESPT)
Critères inclusion : Etat de stress post-traumatique (DSM III)
existant moins de cinq ans après l’événement déclenchant.

Critères exclusion : non spécifiés
Design : Résultats et comparaison avec groupe contrôle liste d’attente + traitement de trois méthodes psychothérapiques menées durant 15 à 20 séances : désensibilisation , hypnose, thérapie psychodynamique brève d’Horowitz sur l’ESPT chez population névrotiqu’e avec symptômes de crise. Mesures pré, post, 3 mois de suivi
Taille Echant : 112
Age Moyen : 18 à 73 (M= 42, SD=14,3)
Durée Trait : 15 à 19 séances
Therapeutes : formés et expérimentés (>10 ans) dans la méthode spécifique qu’ils utilisaient.
Supervision par consultants experts des psychothérapies
- Efficience générale de P Psychodynamique comparable à celui des deux autres P (désensibilisation trauma - hypnothér.) nettement supérieure à l’ absence de traitement (60% vs 26%). Cet effet est plus important concernant dimension évitement, moins important concernant celle de intrusion. Quelques changements statistiquement significatifs concernant la personnalité (moins de détresse, une meilleure estime de soi).
- Expliquer cette similarité-différence alors que considérations théoriques quasi complètement différentes -> Rechercher instruments d’analyse pouvant intégrer questions cliniques (notamment, mécanismes dans différents types d’approche). Le processus de la psychothérapie doit être pris en considération si l’on veut établir un lien plus explicite entre la théorie, la thérapie, les méthodes de recherche et les troubles.

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II.3.3.B.2 - Lettres de José A. Sasporta et Eric M. Placun & Edward R Shapiro aux auteurs des recommandations d'experts concernant le traitement de l'Etat de Stress Post-Traumatique

J. Clin. Psychiatry. 61:10, October 2000.

Deux lettres, l'une de José Saporta, l'autre de Eric Plakun et Edward Shapiro ont été adressées aux auteurs des recommandations de consensus d’experts concernant le traitement de l’Etat de stress post-traumatique à l’occasion de leur parution . En effet, dans ces recommandations, la psychothérapie psychodynamique n’apparaît qu’au détour d’une phrase, avec l’hypnothérapie et l’EMDR.

J. Saporta rappelle que les psychanalystes ont beaucoup contribué à l’élaboration de l’Etat de stress post traumatique et écrit plusieurs ouvrages célèbres sur son traitement. Aucune donnée comparative de recherche ne montre la supériorité de l’efficacité d’un traitement de l’ESPT. De plus, les effets du trauma sont si varés et complexes qu’une approche éclectique et flexible est plus concevable que l’adhésion à des concepts théoriques rigides.

E. Plakun et E. Shapiro rappellent que leur centre de traitement est considéré comme un centre de référence et qu’ils utilisent la psychothérapie psychodynamique comme une des parties d’un plan de traitement interdisciplinaire organisé et intégré par une formulation générale psychodynamique. Les recommandations d’experts dépendent du choix des experts. La psychiatrie et particulièrement la psychiatrie universitaire ont tendu depuis 10 à 15 ans à mettre à l’écart l’approche psychodynamique en allant vers la gestion de symptomes. E.P et E.S rappellent qu’ils réalisent une étude naturaliste longitudinale depuis 7 ans en collaboration avec C. Perry, concernant les changements de mesures fiables. Les données préliminaires montrant une amélioration significative des symptômes, défenses et conflits ont déjà été présentées au congrès de l’APA, de la Sociey for Psychotherapy Research et de la Société pour l’étude des troubles de la personnalité.

Le Dr Foa et ses collègues répondent que la sélection des experts a été aussi large que possible. Il s'avère toutefois que cette sélection a introduit un biais en faveur des cliniciens qui sont actifs dans la recherche. Le rôle historique des Drs Saporta, Plakun et Shapiro dans le traitement de l'ESPT n'est pas remis en cause. Mais les experts choisis l'ont été en fonction de leur expérience personnelle, de leur recherche et de leur compréhension de la littérature. Les recommandations finales ne reflètent ainsi pas les opinions personnelles des promoteurs des recommandations, et même dans certains cas, peuvent être en désaccord avec elles.

II.3.4. Troubles des conduites alimentaires

Durée du traitement et résultat du traitement psychodynamique en hospitalisation plein temps en Allemagne : données issues d'une étude muticentrique (étude contrôlée)

KACHELE H., KORDY H., RICHARD M. RESEARCH GROUPE T.R.-.E.A.T.
Therapy amount and outcome of inpatient psychodynamic treatment of eating disorders in Germany: data from a multicenter study
Psychother. Res. vol 11, num 3, 2001:239-257

Cette étude multicentrique est le type même de l’étude inintéressante et inutile. Beaucoup de moyens réunis puisqu’elle a impliqué 43 hôpitaux et 1171 patients qui ont été observés pendant deux ans et demi. On apprend simplement qu’au bout des deux ans et demi, 33% des anorexiques et 25% des boulimiques ne présentaient plus de symptômes. La longueur du traitement (qui varie de fait d’une ou deux semaines autour d’une moyenne de 11 semaines) n’intervient que faiblement. A noter qu’il n’existe aucune description de ce qui est entendu par traitement psychothérapique psychodynamique chez ces patients hospitalisés. La fin de l’article constate qu’il aurait sans doute été nécessaire de se soucier du relais ambulatoire à la sortie de ces patients et que l’on ne sait rien des facteurs latéraux qui ont pu intervenir sur les effets à plus long terme. Les recommandations sont que de nouvelles études pourraient être basées sur des cas individuels ainsi que sur le processus de l’amélioration. Des méthodes nouvelles et spécifiées devraient être développées.

II.3.5. Troubles de la personnalité

Les troubles de la personnalité recouvrent plusieurs types de patients a priori très différents regroupés en 3 catégories dans le DSM (A, B et C). Dans la catégorie A, on trouve les personnalités paranoïaque, schizoïde et schizotypique ; dans la catégorie B, les personnalités antisociale, borderline, histrionique et narcissique ; dans la catégorie C, les personnalités évitante, dépendante, obsessionnelle compulsive et non spécifiée. Il s'agit donc finalement d'un ensemble de troubles disparates qui ont en commun d'être primaires par rapport à la survenue d'autres troubles tels que la dépression, d'apparaître au cours du développement, dans l'enfance et l'adolescence et de se poursuivre à l'âge adulte. Il serait évidemment un peu articifiel de rechercher des modalités d'approche psychothérapique identiques lorqu'il s'il s'agit, par exemple, de patients borderline, psychopathes, évitants ou hystériques. Les études qui existent portent à la fois sur des patients hospitalisés à temps plein, en hôpital de jour ou ambulatoires. Par ailleurs, les problèmes de ces patients sont multiples et susceptibles de varier dans le temps. L'évaluation va donc porter sur des aspects différents (réduction du nombre de tentatives de suicide et des comportements d'auto-destruction, qualité des relations d'objet, ...) et qui peuvent même sembler contradictoires (par exemple, l'augmentation de la fréquentation des services de santé sera un signe d'amélioration en début de traitement, alors que cela sera la réduction qui sera attendue en fin de traitement ; dans ce même cadre, on différenciera le recours à l'hospitalisation et l'adhésion au traitement psychothérapique). Les aspects techniques sont très liés à la fois au stade du processus thérapeutique et aux considérations théoriques. Dans ce cadre, il n'est pas étonnant que l'on puisse à la fois se référer aux thérapies de groupe ou aux thérapies individuelles.
Il s'agit d'autre part de pathologies souvent à long terme dont les résultats peuvent être difficiles à interpréter parce que des événements, d'autres thérapies, etc. ou simplement l'âge sont intervenus.

II.3.5.A.1 - Quelle est l'efficience du traitement psychothérapique des troubles de la personnalité ? (revue systématique)

La revue critique contrôlée de A.W. BATEMAN et P. FONAGY, Effectiveness of psychotherapeutic treatment of personality disorder, Br. J. Psychiatry., 177, 2000:138-143, porte sur une trentaine d'études. Elle est constitué de deux grandes parties : la première concerne l'étude des résultats du traitement psychothérapique des troubles de la personnalité ; la seconde traite des problèmes de recherche.
L'analyse des résultats de traitement a été menée en fonction du contexte de prise en charge (hospitalisation complète, de jour, traitement ambulatoire).
- les traitements hospitaliers plein-temps concernent essentiellement les patients borderline (une étude porte sur le traitement de psychopathes). Ils incluent à la fois des psychothérapies individuelles, de groupe et institutionnelles. Principaux critères d'évaluation sont l'amélioration du fonctionnement global, la réduction du comportement auto-destructeur et des tentatives de suicide, la réduction du recours à l’hospitalisation, ainsi que le développement de relations plus constructives ont tous été retrouvés. Bien que "la réelle valeur à long terme du traitement hospitalier n’est pas encore très claire, l'analyse de la littérature montre que les patients les plus à même d'en tirer bénéfice sont ceux qui montrent : a) un mauvais usage des substances psychotropes ; b) un risque suicidaire sévère ; c) une histoire médico-légale ; d) des difficultés transitoires dans la relation à la réalité ; e) un manque de réponse à des hospitalisations répétées à court terme et à des interventions ambulatoires ; et f) l’évidence qu’une vie destructive et sans espoir a été incorporée dans la personnalité.
- En ce qui concerne le recours à l'hôpital de jour , Fonagy ajoute sur la base de son expérience que seuls des programmes intégrés, impliquant des cliniciens travaillant aux mêmes buts stratégiques avec des tâches et des fonctions variées, ont permis à ces patients souffrant de sévères problèmes dans la compréhension des motifs humains de se sentir suffisamment en sécurité pour s’engager effectivement dans le traitement. Ce point nous semble très important à souligner. Il fait ressortir à quel point la prise en charge thérapeutique n'est pas pour ces patients une simple technique "externe" ; elle représente chez eux un véritable "monde" dans lequel ils peuvent trouver une représentation cohérente et sécurisante de la réalité et d'eux même.
- les études portant sur les traitements ambulatoires sont très réduites (alors que ces traitements sont certainement très développés en France). Elles ont porté initialement sur des cas uniques, ce qui rend difficile la généralisation des résultats. Les seules études citées concernant spécifiquement la psychothérapie dynamique sont celle de Meares et Stevenson (cohorte), de Clarkin et al. (étude contrôlée) et de Krawitz. Les deux premières portent exclusivement sur des patients borderline, la troisième sur des patients anxieux-évitants et borderline. Elles sont présentées en détail plus loin.

Cette revue analyse également de nombreux problèmes de recherche qui devront être pris en compte dans le futur.
Ces problèmes sont au moins de cinq ordres : 1) l'identification des cas se fait soit suivant les catégories basées sur le DSM-IV et l’ICD-10 (OMS, 1992), soit par une méthode orientée par la théorie. Or ces deux méthodes présentent des problèmes, parce que d'une part les premières sont loin d'être validées quant à leur stabilité et que d'autre part les secondes ne présentent pas actuellement un caractère généralisable. La question de l'articulation entre une approche dimensionnelle (exagération de certains traits normaux de la personnalité) et catégorielle (il existe des traits carréments anormaux comme l'auto-mutilation qui définissent l'existence d'une véritable pathologie) est loin d'être résolue. 2) les comorbidités. Que soigne-t-on finalement ? La personnalité où les troubles (en particulier dépressifs et sociaux) qui l'accompagnent ? En général, les études confondent les effets du traitement associés au changement de la personnalité et l’amélioration des symptômes. Cette amélioration peut n'être d'ailleurs qu'apparente, sous la forme de symptômes moins manifestes (comme l'évitement des relations à la place de leur échec et des manifestations violentes qui peuvent l'accompagner) 3) la randomisation des études. Les taux d’attrition se sont révélés hauts dans de nombreuses études, dus au caractère chaotique des styles de vie des sujets et à leur mobilité sociale. Mais l’investissement du thérapeute au moment du contrat initial de traitement et le maintien de l’alliance thérapeutique améliorent la compliance, de même que la prise en compte des attentes des patients. La randomisation peut ainsi conduire à des distributions incongrues, surtout chez des patients dont le manque de flexibilité est déjà un symptôme. 4) la spécificité des psychothérapies. Il existe de telles variations à l’intérieur d’un traitement et de tels chevauchements entre traitements que les effets différentiels des traitements ont toutes les chances d’être masqués. 5) la comparabilité des mesures de résultat. Ces mesures peuvent porter sur des éléments très différents. La plupart mesurent les symptômes, le comportement, l’adaptation sociale et l’état psychiatrique, mais rarement les changements actuels dans les syndromes et le développement. Il serait nécessaire de se mettre d’accord sur des mesures de base de résultats, ce qui en soi supposerait un consensus sur les objectifs du traitement. Il est possible qu'un abord plus processuel des troubles de la personnalité, intégrant des facteurs innés, familiaux et environnementaux, prenant en compte les mécanismes de défense et d'adaptation dans l'expression des troubles, puisse permettre une approche plus logique de l'évaluation à différents moments et dans différentes circonstances. Un instrument tel que celui qui mesure la relation d'attachement chez l'adulte pourrait être utile dans le futur.

Les conclusions des auteurs portent sur le caractère encore rudimentaire des études dans ce domaine. Elles permettent néamoins de définir quelques ingrédients d'efficacité du traitement : a) bien le structurer ; b) développer des efforts considérables pour renforcer la compliance ; c) avoir un objectif clair, que cet axe soit un problème de comportement tel que l’auto-mutilation ou un aspect des modalités de relations interpersonnelles ; d) avoir une grande cohérence théorique concernant à la fois le thérapeute et le patient ; e) concevoir le traitement à relativement long terme ; f) encourager une puissante relation d’attachement entre le thérapeute et le patient, permettant au thérapeute d’adopter une attitude relativement active plutôt que passive; et g) être bien intégré avec les autres services disponibles pour le patient.

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II.3.5.B - Psychothérapie des patients borderline

Les aspects généraux des thérapies psychodynamiques du trouble de la personnalité borderline sont présentés de façon particulièrement claire et intéressante par G. ADLER (Psychodynamic Therapies in Borderline Personality Disorder. In: American Psychiatric Press Review of Psychiatry. TASMAN RE, HALES MD FRANCES AJ. Eds, American Psychiatric Press). Cette publication pose les bases d'une évaluation des résultats des psychothérapies longues en relation avec le processus du changement qui les sous-tend. Dans une première partie, G. Adler présente quelques uns des principaux modèles de compréhension des patients borderline (ceux de Waldinger et Gunderson (1987), de Kernberg (1975-1984), de Masterson et Rinsley (1976-1982), d'Adler et Buie (1979-1982), de Gunderson (1984) et de Searles (1986). Ces modèles apportent un cadre de compréhension des difficultés centrales des patients borderline, précisent les implications psychodynamiques de ces formulations et leurs implications techniques. Les troubles de la personnalité borderline sont ainsi appréhendés comme une "pathologie des phases précoces de l'individuation dans le rapport à l'autre", qui va s'exprimer sur différents modes de manifestations de transfert et de contre-transfert. On voit se dégager ainsi la base d'un manuel, où sont abordées les différentes alternatives (soutien, expression, interprétation, contention des passages à l'acte...) et surtout les différents phases qui ponctuent la psychothérapie.

Le travail psychothérapique avec ces patients est difficile. Certaines qualités particulières du thérapeute sont requises pour travailler de la façon la plus efficace avec ces patients : être capable d’être actif au niveau où le patient en a besoin, être en relation avec les sentiments inévitables de contre-transfert et savoir les utiliser pour formuler la signification du matériel actuel, avoir la capacité de définir des liens, d’interpréter et de contenir quand c’est nécessaire. G. Adler tente également de préciser les probabilités de succès en fonction de certaines caractéristiques des patients et les indications - contre-indications qui en découlent

La littérature clinique, théorique et de recherche, en dépit de toutes ses limitations, conduit à un optimisme sur le fait que les patients borderline peuvent bénéficier d’une approche psychothérapique flexible psychodynamique. Bien que les résultats de la recherche soient méthodologiquement imparfaits, et que la littérature clinique et théorique ne puisse être que suggestive, il existe le sentiment que beaucoup de ces difficiles patients peuvent être traités finalement par une approche psychothérapique flexible qui est susceptible d’utiliser aussi des formes annexes de traitement.

Le besoin d’études davantage contrôlées, systématiques et prospectives est évident. Cette recherche devrait en particulier aider à clarifier si certaines formulations sont plus utiles que d’autres pour comprendre et traiter les patients borderline. Un tel travail devrait également définir quelles sont les approches les plus efficaces à différents stades du traitement.

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De nombreux aspects du texte de ADLER sont repris sous une forme synthétique dans celui de OGRODNICZUK et PIPER centré sur l'usage de l'interprétation dans les troubles de la personnalité, et que nous présentons plus loin.

1) Il n'existait aucune étude dans la base bibliographique qui nous a été remise concernant l'efficacité de l'hopitalisation plein temps dans le traitement des troubles de la personnalité borderline.

2) L'efficacité de l'hopitalisation temps partiel a fait l'objet d'une étude contrôlée de A. BATEMAN et P. FONAGY. Effectiveness of partial hospitalization in the treatment of borderline personality disorder: a randomized controlled trial. Am. J. Psychiatry. Vol 156, n°10, 1999, pp 1563-1569. Cette étude considère les résultats que peut avoir la psychothérapie psychodynamique réalisée dans ce cadre chez des patients borderline. L’efficence de l’hospitalisation partielle d’orientation psychanalytique a été comparée avec celle du soin psychiatrique standard sur une durée de 18 mois maximum chez 28 patients.

Le protocole thérapeutique “orientation psychanalytique” comprenait les éléments suivants : une psychothérapie individuelle hebdomadaire ; trois séances de psychothérapies de groupe hebdomadaires (1 heure chacune) ; une thérapie expressive type psychodrame hebdomadaire (1 heure) ; une réunion communautaire hebdomadaire (1 heure). Il visait cinq buts principaux : 1) engager le patient dans le traitement ; 2) réduire les symptomes psychiatriques généraux, en particulier la dépression et l’anxiété ; 3) réduire le nombre d’actes auto-destructeurs et de tentatives de suicide ; 4) améliorer la fonction sociale et interpersonnelle ; et 5) prévenir le recours à des séjours hospitaliers prolongés. Les thérapies et le staff d’information étaient organisés en référence au modèle de la personnalité borderline comme trouble de l’attachement, de la tolérance à la séparation et de la mentalisation ( capacité de penser sur soi en relation aux autres et de comprendre l’état d’esprit des autres).
Le traitement psychothérapique a été réalisé par des infirmières formées à la psychiatrie sans qualification formelle à la psychothérapie. L’adhésion au protocole de la thérapie était suivie par supervision (2 fois par semaine avec l’ensemble de l’équipe), avec rapports verbatim et formulaire réunissant activités et informations des thérapeutes

Le protocole “soin psychiatrique standard” était constitué d’une réunion mensuelle avec l’administrateur du cas (1 heure) et d’un examen des médicaments par un sénior (1 par mois). Les médicaments comprenaient des antidépresseurs et des antipsychotiques.

En plus de nombreux outils d’évaluation concernant les symptômes, Bateman et Fonagy ont utilisé l'Inventory of Interpersonal problems - circumflex version
Les patients en hospitalisation partielle ont montré une réduction statistiquement significative de toutes les mesures par rapport au groupe de contrôle qui montrait des changements limités ou une détérioration durant la même période ; une amélioration dans symptomes dépressifs, une réduction actes suicidaires et d’auto-mutilation, une réduction des jours d’hospitalisation plein temps et meilleure fonction sociale et interpersonnelle commencée à 6 mois et poursuivie jusqu’à fin traitment à 18 mois. Une réplication est nécessaire avec des groupes plus larges, mais ces résultats suggèrent que l’hospitalisation partielle peut offrir une alternative au traitement en hospitalisation temps plein.

Cette étude a été complétée par un suivi à 18 mois (étude contrôlée). (BATEMAN A. FONAGY P. Treatment of borderline personality disorder with psychoanalytically oriented partial hospitalization: an 18-month follow-up. Am. J. Psychiatry 2001 Vol 158 p 36-42

- La supériorité de l’hospitalisation partielle d’orientation psychanalytique sur le traitement psychiatrique standard, qui avait été trouvée s’est maintenue durant une période de suivi de 18 mois. La poursuite de l’amélioration au niveau du fonctionnement social et interpersonnel suggère que des implications à plus long terme ont été stimulées par le traitement. Ces résultats ont des implications au niveau du rapport coût/efficacité. Reste la difficulté d'une définition précise des ingrédients actifs du résultat. Il est également possible que l’intervention psychothérapique aurait pu être aussi efficace si elle avait été délivrée sous une forme modifiée dans un cadre ambulatoire (étude en cours).

Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractEtude ConclusAnalyse
(3. Etude contrôlée)
BATEMAN A. FONAGY P.
Effectiveness of partial hospitalization in the treatment of borderline personality disorder: a randomized controlled trial
Am. J. Psychiatry. 1999 Vol 156 p 1563-1569
(279) Troubles personnalité
Critères inclusion : Structural Clinical Interview for DSM-III-R (SCID)
Diagnostic Interview for Borderline Patients > 7

Psychothérapie psychanalytique individuelle et de groupe ou traitement standard dans cadre d’hospitalisation partielle

Critères exclusion : Schizophrenie, trouble bipolaire, addiction, handicap mental, trouble cérébral organique
Design : Comparaison de l’efficence de l’hospitalisation partielle d’orientation psychanalytique (protocole défini) avec le soin psychiatrique standard pour des patients souffrant de trouble de la personnalité border line.
Taille Echant : 44 patients - 6 sorties
Age Moyen : 30,3
Durée Trait : 1,45 année
Therapeutes : infirmières formées à la psychiatrie sans qualification formelle à la psychothérapie. Adhésion à thérapie suivie par supervision (2 fois par semaine avec ensemble équipe) avec rapports verbatim et formulaire réunissant activités et informations des thérapeutes
- Patients en hospitalisation partielle ont montré réduction statistiquement significative de toutes les mesures par rapport groupe de contrôle qui montrait changements limités ou détérioration durant même période ; amélioration dans symptomes dépressifs, réduction actes suicidaires et d’auto-mutilation, réduction jours d’hospitalisation plein temps et meilleure fonction sociale et interpersonnelle commencée à 6 mois et poursuivie jusqu’à fin traitment à 18 mois.
- Hospitalisation partielle d’orientation psychanalytique supérieure soin psychiatrique standard pour patients avec trouble de la personnalité border line.
(3. Etude contrôlée)
BATEMAN A. FONAGY P.
Treatment of borderline personality disorder with psychoanalytically oriented partial hospitalization: an 18-month follow-up
Am. J. Psychiatry. 2001 Vol 158 p 36-42
(279) Troubles personnalité
Critères inclusion : Structural Clinical Interview for DSM-III-R (SCID)
Diagnostic Interview for Borderline Patients > 7

Suivi de patients traités par programme initial de 18 mois d’hospitalisation partielle d’orientation psychanalytique
Critères exclusion : Schizophrenie, trouble bipolaire, addiction, handicap mental, trouble cérébral organique
Design : Programme de suivi par thérapie analytique de groupe deux fois par semaine (180 h sur 18 mois)
Taille Echant : 44
Age Moyen : 32
Durée Trait : 18 mois suivi
Therapeutes : Non spécifié

- La supériorité de l’hospitalisation partielle d’orientation psychanalytique sur le traitement psychiatrique standard, qui avait été trouvée dans un essai contrôlé randomisé, s’est maintenue durant une période de suivi de 18 mois. La poursuite de l’amélioration au niveau du fonctionnement social et interpersonnel suggère que des implications à plus long terme ont été stimulés ;
- Ces résultats dont des implications au niveau du rapport coût/efficacité ;
- Difficulté définition précise ingrédients actifs du résultat
- Reste la difficulté d'une définition précise des ingrédients actifs du résultat
- Il est également possible que l’intervention psychothérapique aurait pu être aussi efficace si elle avait été délivrée sous une forme modifiée dans un cadre ambulatoire (étude en cours).


3) En ambulatoire, l'étude de R. MEARES, J. STEVENSON et A. COMERFORD. (Psychotherapy with borderline patients: I. A comparison between treated and untreated cohorts. Aust. N. Z. J. Psychiatry, Vol 33, num 4, 1999: 467-47), compare les résultats obtenus au sein d'un groupe de patients traités par psychothérapie psychodynamique interpersonnelle (psychothérapie dérivée du Modèle Conversationnel de Hobson) avec ceux d'une liste d’attente contrôle constituée de patients “traités comme d’habitude” (thérapie de soutien, intervention de crise, thérapie cognitive, pharmacothérapie).

La présentation de la psychothérapie est associée à celle du modèle théorique sous-jacent. Les auteurs font remarquer que le catalogue des critères de TPB dans le DSM-III est constitué de trois facteurs qui concernent l’affect, l’impulsivité et le self, sans que soit précisée laquelle de ces constellatations d’expériences et de comportements est primaire. C'est pour eux le troisième facteur, qui inclut l’expérience du vide, qui est le plus fondamental. Le modèle est basé sur l’idée que le trouble de la personnalité borderline est une conséquence d’une interruption du développement du moi. La principale hypothèse est qu'un certain type d’activité mentale, se trouvant dans la rêverie et se situant en dessous du jeu symbolique, est nécessaire à la constitution du moi. Cette sorte d’activité mentale est non linéaire, associative et liée à l’affect. Dans la période précoce, sa présence dépend d’une relation de l'enfant avec l’entourage dont la réponse entre en résonnance avec ce qu'il communique, ou lui montre une reconnaissance de sa représentation et de son expérience centrale. En l'absence de cette possibilité de relation, l'enfant va se tourner vers l'extérieur. Sur cette base, qui s'incrit dans la perspective générale des cliniciens psychodynamistes des troubles borderline (cf, le résumé qu'en a fait Adler et Thurin, 1997), le but de la thérapie est maturatif. Spécifiquement, il est d’aider le patient à découvrir, élaborer et se représenter une réalité personnelle.

Pour y parvenir, le thérapeute va veiller à : 1) établir une atmosphère dans laquelle l’activité mentale de développement peut s’établir ; amplifier les éléments du monde personnel et interne qui apparaissent dans la conversation, particulièrement comme des sentiments ou des métaphores implicites. 2) identifer les moments où le souvenir traumatique surgit dans la conscience originaire, afin de travailler à l’intégration du système de mémoire traumatique dans le système du self.

Sur ces bases, les résultats de l'étude montrent que 1) Des 30 patients traités, 30% ne réunissaient plus les critères de diagnostic de TPB après une année de psychothérapie. Les 30 patients de la liste d’attente durant 1 an ou plus n’ont pas montré de changement dans le diagnostic. 2) Les scores DSM des individus dans le groupe de traitement ont décru en moyenne de 4.78 de plus que les sujets dans le groupe de contrôle, sur la période de 12 mois. 3) L’amélioration dans le groupe traité par psychothérapie s’est maintenue à la fois au suivi d’un an et de 5 ans. 4) Le traitement ambulatoire, d’une sorte spécifique, est au moins aussi efficient que ces traitements plus lourds.
Evidemment, ces éléments ne sont que partiels et n'abordent pas directement la question des changements de la structure de la personnalité. Autrement dit, ils ne "mesurent" pas l'évolution de la construction du soi, ni l'évolution de la relation à la réalité, à travers notamment les réactions affectives et de passage à l'acte que certaines situations sont susceptibles de produire.

Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractEtude ConclusAnalyse
(4. Autres études)
MEARES R., STEVENSON J. COMERFORD A.
Psychotherapy with borderline patients: I. A comparison between treated and untreated cohorts
Aust. N. Z. J. Psychiatry. 1999 Vol 33 p 467-472
(279) Troubles personnalité
Critères inclusion : - File active de psychiatrie comprenant notamment des échecs avec les autres tentatives thérapeutiques
- Diagnostic trouble de la personnalité borderline au DSM-III
Critères exclusion :
Design : Comparaison groupe de traitement (psychothérapie dérivée du Modèle Conversationnel de Hobson) et liste d’attente contrôle patients “traités comme d’habitude” (thérapie de soutien, intervention de crise, thérapie cognitive, pharmacothérapie).
Taille Echant : 40 patients
Age Moyen : 29,4 ans
Durée Trait : 2 fois par semaine pendant 1 an
Therapeutes : Psychiatres en formation + 2 infirmier(e)s séniors + 1 psychologue. Formation par cours + (surtout) supervision hebdomadaire à partir d’enregistrement de leurs séances
- Des 30 patients traités, 30% ne réunissaient plus les critères de diagnostic de TPB après une année de psychothérapie. Les 30 patients de la liste d’attente durant 1 an ou plus n’ont pas montré de changement dans le diagnostic.
- Les scores DSM des individus dans le groupe de traitement ont décru en moyenne de 4.78 de plus que les sujets dans le groupe de contrôle, sur la période de 12 mois.
- L’amélioration dans le groupe traité par psychothérapie s’est maintenue à la fois au suivi d’un an et de 5 ans
- Le traitement ambulatoire, d’une sorte spécifique, est au moins aussi efficient que ces traitements plus lourds

II.3.5.B.3.b - Développement d'un traitement psychodynamique chez des patients borderline : une étude préliminaire de changement comportemental.

JF CLARKIN et al. [CLARKIN JF, FOELSCH P.A, LEVY K.N, HULL J.W, DELANEY J.C, KERNBERG O.F. The development of a psychodynamic treatment for patients with borderline disorder : a premiminary study of behavioral change. Journ of Personality Disorders, vol 15, num 6, 2001:487-495] examinent l'efficience d'un traitement psychodynamique modifié nommé Psychothérapie focalisée sur le transfert (PFT) conçue spécifiquement pour les patients avec trouble de la personnalité borderline (TPB). Vingt-trois patientes diagnostiquées borderline avec le DSM-IV ont commencé une PFT bi-hebdomadaire. Les patients étaient évalués au début et à la fin de 12 mois de traitement avec des instruments diagnostiques, des mesures de suicidalité, de comportement d'auto-blessure, et des mesures d'utilisation des services médicaux et psychiatriques. Comparé avec celui de l'année précédant le traitement, le nombre de patients qui ont fait des tentatives de suicide a significativement décru, comme l'ont été le risque et la sévérité des répercussions médicales des comportements d'auto-agression. Les patients de l'étude ont été également significativement moins hospitalisés durant l'année de traitement, que l'on comptabilise les entrées ou les jours d'hospitalisation. Le taux de sortie de l'étude a été de 19,1%. Cette étude non contrôlée suggère fortement que ce traitement psychodynamique structuré et manualisé modifié pour les patients borderline est prometteur pour le traitement ambulatoire de ces patients et justifie des études ultérieures.

Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractEtude ConclusAnalyse
(4. Autres études)
CLARKIN J.F, FOELSCH P.A, LEVY K.L, HULL J.W., DELANEY J.C, KERNBERG O.F.
The development of a psychodynamic treatment for patients with borderline disorder : a premiminary study of behavioral change
Journ of Personality Disorders 2001 Vol 15 p 487-495
(279) Troubles personnalité
Critères inclusion : - Patientes (femmes) recrutées à partir des files actives de différents cadres thérapeutiques psychiatriques. Entretiens cliniques et semi-structurés
- 1) cinq critères ou plus DSM-IV de TPB évalués sur la SCI-II ; 2) au moins deux incidents de suicide ou de comportement d’auto-mutilsation dans les 5 années précédentes ; 3) entre les âges de 18 à 50 ans ; et 4) accord avec les conditons de l’étude, incluant la terminaison d’une autre psychothérapie individuelle.
Critères exclusion : - absence de critères DSM-IV de schizophrénie, de trouble bipolaire, de pathologie organique et/ou de retard mental évalué sur la SCI-I ;
Design : - Patients borderline traités dans une psychothérapie psychodynamique modifiée ambulatoire. Constituent leur propre contrôle par rapport à année précédente.
Taille Echant : 23 patientes
Age Moyen : 32,7 ans (19-48 ans)
Durée Trait : 12 mois
Therapeutes : - six individus expérimentés séniors ayant au moins dix ans d’expérience et six psychologues du staff et de la faculté post-doctoraux, les uns et les autres ayant au moins deux ans d’expérience du traitement.
- évaluations hebdomadaires de supervision indépendante.
- Réduction significative du nombre de patients ayant fait TS par rapport à année précédente (18% vs 53%)
- Moins d’hospitalisations psychiatriques et de jours d’hospitalisation plein temps
- La recherche future devrait examiner le rôle de l’interprétation du transfert plus directement comme l’un des mécanismes spécifiques de changement dans le TFP
- Une supervision étroite, une approche d’équipe, et un traitement structuré devraient être considérés comme des variables communes de succès du traitement des TPB.
- Nécessité dans future étude d’inclure un groupe de contrôle, ainsi qu’ne exploration du processus de traitement et des mécanismes d’action sous-jacents.

II.3.5.C - Psychothérapie des patients avec trouble de la personnalité évitante, dépendante, obsessionnelle-compulsive, non spécifique.

1) Il n'existait aucune étude dans la base bibliographique qui nous a été remise concernant l'efficacité de l'hopitalisation plein temps dans le traitement des troubles de la personnalité de la catégorie C.

2) L'efficacité de l'hopitalisation à temps partiel a été analysée dans une études : celle R. KRAWITZ.

L'étude prospective de R. KRAWITZ [ KRAWITZ R. A prospective psychotherapy outcome study. Aust. N. Z. J. Psychiatry. Vol 3&, num 4, 1997:465-473 considère les résultats de la psychothérapie psychodynamique de patients souffrant de troubles de la personnalité des catégories B et C. Elle a plusieurs aspects originaux :
- elle décrit assez précisément une méthode psychothérapique qui a été adaptée à la population prise en charge, afin de prendre en particulier en compte les dimensions féminine et socio-politique. Ces dimensions sont abordées en termes de statut, de rôle dans le travail, de pouvoir, de rémunération. La dimension intra psychique est explorée à partir de la violence, de l’abus sexuel, de l’appartenance à des groupes non dominants. Cet aspect a été abordé dans le transfert, à partir de la hiérarchisation des des rôles, de la démystification du thérapeute et de la thérapie, de l’utilisation d’un langage courant. L’aspect spiritualité est également abordé (population Maori). S’agissant d’une prise en charge institutionnelle, la situation des locaux, l’organisation ont leur importance et sont décrits.
- la population a été choisie en fonction du fait que c’étaient “les patients avec les troubles de la personnalité les plus sévères qui puissent être considérées comme traitables : histoire d’addiction à la drogue, prison, auto-aggression, enfants retirés ... Ces patients ne devaient pas être dans une phase aigue. On est loin d’études portant sur des populations de “bien portants”.
- une évaluation économique précise du coût a été faite, qui a été mise en parallèle avec le coût du traitement de pathologies somatiques
- il s’agit d’une étude prospective qui peut être réalisée en pratique courante avec de petits moyens et une “assez bonne méthodologie” : absence de groupe témoin, mais mesures ES à partir d’instruments validés pré et post ( SCL 90, Goal Attainment Scale (GAS)), patient comme son propre témoin, ligne de base suffisamment établie du fait qu’il s’agit de patients chroniques qui ont donc un profil d’évolution stable.
- les auteurs insistent sur le fait que “les psychothérapeutes doivent continuer à explorer pourquoi nous avons été généralement incapables ou avons refusé d’avoir notre travail évalué . Une telle évaluation devrait être considérée comme l’un des standards de bonne pratique psychothérapique, comme l’a suggéré le Projet d’assurance qualité”.

Les objectifs de cette étude étaient d'évaluer les résultats de 31 patients (81% de femmes et 19% d'hommes) traités dans un cadre psychothérapique résidentiel ou semi-résidentiel. Il s'agissait d'une population comprenant des patients souffrant des troubles de la personnalité les plus sévures considérés comme traitables. Ils incluaient des personnes avec un passé de dépendance aux opiacés, de vente illégale de drogue, d'emprisonnement, d'auto-mutilation et de retrait des enfants. Les patients présentaient des difficultés de personnalité modérées à sévères et ont été adressés quand la thérapie courante était insuffisante ou à cause de la sévérité de leurs problèmes. 81% présentaient un diagnostic de trouble de la personnalité de type C (Évitante, dépendante, obsessionnelle-compulsive et autres) et 19 % de type B (Borderline) au DSM-IIIR. La thérapie était psychodynamique et intégrait une dimension féminine et sociopolitique. Les échelles de mesure utilisées ont été la Symptom Check List 90, le Goal Attainment Scale, l’Echelle de fonctionnement Gobal et des mesures d’utilisation des ressources de santé (économiques). Elles ont été effectuées avant le traitement, ainsi qu’à 4, 12 et 24 mois après son terme.
La durée moyenne de thérapie était de 4 mois (68 jours de thérapie). Toutes les échelles cliniques ont montré des améliorations de l’usage des ressources de santé.
Ces résultats montrent l’efficacité clinique de la psychothérapie dans ce cadre, apportent un soutien à la philosophie de la pratique, et suggèrent que le résultat de la psychothérapie peut être évalué à un coût financier raisonnable dans des modalités pratiques très variées.

Tableau récapitulatif

AutTitreRef Inclus_Exclus CaractEtude ConclusAnalyse
(4. Autres études)
KRAWITZ R.
A prospective psychotherapy outcome study
Aust. N. Z. J. Psychiatry. 1997 Vol 31 p 465-473
(279) Troubles personnalité
Critères inclusion : Psychothérapie psychodynamique
troubles de la personnalité modérés à sévères (addictions, délinquance, auto-agression,
81% type C et 19% type B DSM-III-R
Critères exclusion : Age inférieur à 16 ans, schizophrénie, abus ou dépendance actuel de susbstances psychoactives, , trouble antisocial de la personnalité, prédominance symptomatique de pathologie de l’axe I.
Design : Evaluation des résultats du traitement psychothérapique psychodynamique (focus sur conflits cs/Ics, transfert, usage de l’interprétation, exploration des défenses et conduites inappropriées d’expression), avec abord socio-politique et féministe, et complément cognitivo-comportemental de 31 patientes traitées dans un cadre psychothérapique résidentiel ou semi-résidentiel. Mesures pré, post, et à 4-, 12- et 24 mois de suivi.. Pas de groupe contrôle. Patients propre contrôles. Activités psychothérapiques individuelles et de groupe.
Taille Echant : 31 patients
Age Moyen : 34 ans (17-54)
Durée Trait : 4 mois (68 jours)
Therapeutes : Approche très conviviale et démystifiée des thérapeutes. Infirmière qualifiée plein-temps et psychiatre mi-temps
Efficacité clinique de la psychothérapie psychodynamiqe adaptée au contexte social dans troubles personnalité (amélioration de toutes les échelles cliniques)
Le résultat de la psychothérapie peut être évalué à un coût financier raisonnable en utilisant des modalités pratiques très variées.
Intérêt d’un programme de jour de soin intensif associé à maintien (mi-temps hebdomadaire) dans la communauté

3) En ambulatoire, l'étude de A. WINSTON [WINSTON A., LAIKIN M., POLLACK J., SAMSTAG L.W., MCCULLOUGH L. MURAN J.C. Short-term psychotherapy of personality disorders. Am. J. Psychiatry. vol 151 n°2, 1994:190-194, a évalué les résultats de deux formes de psychothérapie dynamique brève chez les patients souffrant de trouble de la personnalité, en les comparant à ceux d'un groupe contrôle en liste d'attente. Ces deux psychothérapies utilisent beaucoup des techniques de Mann, Malan, Sifneos, et Davanloo (cf., la présentation plus haut de ces psychothérapies brèves). Les deux techniques variaient suivant le niveau d'activité et de confrontation. Dans la première, directement issue de la PDB de Davanloo, les défenses, l’anxiété et les impulsions sont activement abordées, clarifiées et interprétées. Cette psychothérapie se concentre sur la confrontation du patient au comportement défensif qu'il utilise et sur l’élucidation de la manifestation affective qui se manifeste dans un contexte interpersonnel. Les souvenirs réprimés et les idées qui les accompagnent peuvent être alors pleinement vécues dans un cadre de travail intégré affectif et cognitif. La seconde (adaptative brève) est une thérapie plus cognitive qui se concentre sur l’identificaton du pattern le plus inadapté et son élucidation dans les relations passées et actuelles, et tout particulièrement dans la relation entre le patient et le thérapeute. Le but est de rendre le patient capable de développer une prise de conscience sur les origines et les déterminants de ce pattern, de façon à produire des relations interpersonnelles mieux adaptées. Ces deux psychothérapies ont donc en commun la prise de conscience de la relation entre l'émergence des symptômes et les contextes interpersonnels passés et présents et un travail d'élaboration à partir de leur actualisation dans le transfert. Les patients présentaient une typologie de type C de la personnalité ou, pour quelques uns, des troubles de type B (trouble de la personnalité primaire, hystérique). L'évaluation des résultats a porté sur les plaintes principales, le fonctionnement global et l'adapation sociale. Les patients dans les deux conditions thérapeutiques se sont améliorés significativement sur toutes les mesures par rapport aux patients sur liste d’attente. L’amélioration s’est maintenue au delà de la période de suivi d’un an et demi. Il n’y avait pas de différence significative entre les résultats des deux types de thérapie. Pour l'expliquer, les auteurs considèrent que le manque d’homogénéité des patients est peut être le principal responsable de l’absence de différence que trouvée entre les thérapies. Il se peut qu’une thérapie soit meilleure avec certains patients et moins bonne avec d’autres, tandis que l’autre thérapie produit les résultats opposés. Ces résultats auraient tendance à s’annuler et à conduire à des résultats généraux similaires. On retrouve le même défaut de cette étude par rapport à l'écart qu'il y a entre une mesure des résultats qui concerne des données symptomatiques et une spécification de la technique dont les objectifs particuliers ne sont pas évalués. Les auteurs prennent en compte cette difficultés et considèrent que les prochaines études devraient tenter de développer des mesures de résultats qui soient à la fois individualisées et conduites par une théorie.

II.3.5.D - Spécificités, techniques et processus de changement dans la psychothérapie des troubles de la personnalité

II.3.5.D.1 - Usage des interprétations du transfert dans la psychothérapie individuelle d'orientation dynamique chez les patients présentant des troubles de la personnalité OGRODNICZUK J.S. PIPER W.E.
Use of transference interpretations in dynamically oriented individual psychotherapy for patients with personality disorders
J. Pers. Disord., vol 13, n 4, 1999, 297-311

demander accès article traduit

II.3.5.D.1 - Mécanismes de défense et troubles de la personnalité

LINGIARDI V., LONATI C., DELUCCHI F., FOSSATI A., VANZULLI L. MAFFEI C.
Defense mechanisms and personality disorders
J. Nerv. Ment. Dis. Vol 187, num 4, 1999:224-228

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II.4. Conditions générales et facteurs spécifiques qui interviennent dans l'efficience de la psychothérapie psychodynamique

Ces aspects sont traités à la fois :
- dans des articles centrés sur une pathologie et mettent en relation, en les explicitant, à la fois le modèle de compréhension de la pathologie et les opérateurs techniques correspondants employés (Burnand, Adreoli et al. 2002 ; ...) ;
- dans des articles qui explorent spécifiquement un ou plusieurs facteurs susceptibles d'intervenir dans les résultats (Joyce et Piper, 1998 ; Piper, Azim et al. 1990 ; Bogwald, Hoglend et Sorbye, 1999 ; ...).
Sont notamment abordés, l'attente du patient, ses qualités, la qualité des relations d'objet, la nature de ses mécanismes de défense, l'effet de l'interprétation du transfert, l'alliance thérapeutique, ...

Naturellement, se pose alors la question de la sélection des patients et de la mesure des interventions du psychothérapeute (par exemple, l'interprétation ; Bogwald, Hoglend, Sorbye, 1999) et de leur effet

II.4.A - Facteurs spécifiques de changement versus facteurs non spécifiques en psychothérapie

STRUPP H.H. HADLEY S.W.
Specific vs Nonspecific Factors in Psychotherapy
Arch. Gen. Psychiatry, Vol 36 num 10, 1979, 1125-1136

Quels sont les facteurs communs aux différentes psychothérapies (c'est à dire non spécifiques de chacune d'entre elles) qui peuvent être impliqués dans le changement constaté, qui dans nombres d'études sont finalement assez comparables quelque soit la technique utilisée ? Naturellement, on pense aux "qualités humaines" du thérapeute et à son implication personnelle dans le mouvement de la cure. Cette hypothèse est testée dans l'étude que nous présentons. Il faut tout de suite préciser que cet article a suscité différentes réponses à partir d'un réexamen de la méthodologie. Il ne faut donc pas prendre ses conclusions pour argent comptant !

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II.4.B - Adéquation du patient et résultats dans la psychothérapie brève

PIPER W.E., AZIM H.F., MCCALLUM M. JOYCE A.S.
Patient suitability and outcome in short-term individual psychotherapy
J. Consult. Clin. Psychol., vol 58 num 4, pp 475-481

Les auteurs ont voulu étudier comment la qualité des relations d’objet (QRO) du patient intervient dans les effets de la psychothérapie brève, individuelle d’orientation dynamique. Ce facteur a été étudié dans un essai clinique contrôlé impliquant 8 thérapeutes expérimentés et 144 patients ambulatoires. Une série de scores de résultats a été enregistrée à des intervalles de six mois incluant l’évaluation du suivi. L'effet important du traitement s’est maintenu durant le suivi. L’effet était évident en termes de signification statistique, de taille d’’effet, et de signification clinique. Les résultats ont également démontré un effet additif de la combinaison du traitement et de la qualité des relations d’objet. Les meilleurs résultats ont été atteints chez les patients ayant une QRO élevée, et les résultats les plus mauvais l’ont été avec les patients ayant une faible QRO. Ces résultats suggèrent qu’il existe une convergence optimale entre un type de patient et un type de thérapie.

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III. Discussion, conclusions et recommandations

1. La recherche sur les psychothérapies psychanalytiques est-elle possible ?

2. Quels sont aujourd'hui les critères d'une bonne recherche ?

Une conception adéquate de la recherche est prospective ; elle inclut des mesures de contrôle ; elle a une approche thérapeutique clairement décrite ; elle utilise des mesures de résultat qui sont clairement rapportées à la situation, plutôt que non spécifiques ; elle inclut une évaluation de résultat non seulement à l’arrêt du traitement, mais également à un moment ultérieur. (Meares et al., 1999).

3. Une "bonne recherche" garantit-elle le sérieux de ses résultats ?

Une importante question est l’usage d’une étude naturaliste et le manque de groupe de contrôle. En recherche psychothérapique, il existe indiscutablement un besoin pour des essais randomisés contrôlés, mais, comme Fonaggy (1999) l’a discuté dans son article sur le processus et les résultats en santé mentale, les études naturalistes de résultat jouent un rôle également important à cause de leur plus grande adéquation pour la pratique clinique et leur validité externe plus élevée. Cette question a déjà été abordée par Crits-Cristoph (1992) : “Ainsi, ce qui est gagné en connaissance à propos de l’usage de traitements spécifiques dans des conditions contrôlées peut être aussi une perte en terme de possibilité de généralisation à la pratique courante actuelle de la psychothérapie (p. 156)”(Junkert-Tress et al., 2001)

Une attitude de la recherche essentiellement orientée vers des critères formels peut être contre-productive, surtout dans un contexte de compétition entre techniques psychothérapiques. Certains biais ont été ainsi repérés. Le premier concerne le groupe de comparaison choisi pour déterminer l'efficacité d'une technique psychothérapique. Ce fut le cas avec la méta-analyse de Wampold et al, dans laquelle le groupe de comparaison faisant apparaître l'efficacité de la CBT par rapport aux autre psychothérapies intégrait des "psychothérapies de soutien". Celles-ci extraites du groupe de comparaison, la supériorité des CBT est apparue être un artefact d'inclusion de psychothérapies non sérieuses. Un autre biais est celui de l'allégeance du chercheur mis en évidence par Luborsky et al qui a conclu que 69% de la variabilité des tailles d'effet dans les comparaisons de traitement était dûe à l'allégeance du chercheur vis à vis d'une thérapie particulière. A partir du moment où la grande majorité de la recherche portant sur les thérapies validées de façon empirique est réalisée par des chercheurs d'orientation cognitivo-comportementale cognitivo-comportementale, les différences qui sont trouvées entre les CBT et les autres thérapies sont probablement davantage influencées par l'allégeance du chercheur que par des critères spécifiques. Un troisième biais concerne les critères d'inclusion (et d'exclusion). Cela fut mis en évidence par une méta-analyse de Westen et Morrison (2001) qui découvrirent que "deux tiers des patients qui se présentaient pour le traitement étaient exclus et que plus les critères d'exclusion étaient exigents, plus le traitement obtenait de succès. Par exemple, les patients avec des troubles comorbides (de l'axe I ou II du DSM étaient fréquemment exclus. Cette méta-analyse, comme celle de Robinson que nous avons largement présentée, montrait que le patient moyen gardait un niveau léger mais cliniquement significatif de symptômes à la fin du traitement.

Un autrepoint concerne ce qui peut être évalué en fonction des objectifs particuliers et de la durée du traitement. La thérapie psychodynamique est construite comme un processus dont les facteurs intermédiaires contribuent au résultat, sans qu'ils soient systématiquement assimilables à une réduction des symptômes, du moins au sens classique du terme. Ces facteurs sont, par exemple, la prise de conscience, la construction de l'identité et de la cohérence du soi, la capacité d'avoir une position moins régressive et plus active, de reconnaître les conflits, de situer sa relation fantasmatique aux autres, etc. Tous ces éléments contribuent et correspondent quelque fois à des phases du traitement, avec des améliorations spectaculaires qui peuvent être suivies de période d'angoisse quand une nouvelle phase d'évolution (et de résistance) est atteinte.

Évidemment également, la thérapie est un processus qui implique deux participants et la relation spécifique patient-thérapeute est cruciale, en particulier dans certains troubles, comme les troubles de la personnalité borderline. Cet aspect est l'un des plus difficiles à étudier. On peut citer les études de Yeomans et al, de ....

L'utilisation de manuels peut être considérée comme une façon de réduire les différences entre les thérapeutes

Il existe actuellement un manque d'instruments de mesure de résultats (Crits-Christoph, 1992 ; Fonagy, 1999 ; Paivio & Bahr, 1998).

La question des groupes de contrôle, et en particulier des listes d'attente

Annexes

- Principales mesures utilisées et leur éventuelle description.

- Glossaire

Complément du jour.

Facteurs liés aux sorties de traitement des patients borderline

YEOMANS, GOTFREUND, SELZER, CLARKIN, HULL, SMITH
Factors related to drop-outs by borderline patients
Journal of psychotherapy practive and research, Vol 3, num 1, 1994: 16-24

Un taux élevé de sortie de traitement crée des difficultés dans toute étude sur la psychothérapie. Du point de vue de la conception et de l’analyse statistique de l’étude, les sorties interfèrent avec la procédure de randomisation. Le taux de sortie pose également des questions à propos de la généralisation des résultats de traitement obtenus à partir de ceux qui restent en psychothérapie. D’un point de vue clinique, les patients qui sortent ne profitent pas du traitement, et la question subsiste de savoir comment le traitement lui-même peut être amélioré pour atteindre ces patients.

Les patients présentant des troubles de la personnalité borderline (TPB) sont caractérisés par un taux de sortie particulièrement élevé. Cela n’est pas surprenant quand on reprend les critères de ce trouble de l’axe II. Le patient borderline est instable dans ses relations interpersonnelles, phénomène qui est enclin à se répéter avec le thérapeute. Son humeur est coléreuse et labile.

Il est enclin à mettre en acte ses sentiments plutôt que de les explorer dans la thérapie, et a tendance à les décharger dans une action impulsive, qu’il s’agisse d’un passage à l’acte sexuel, d’un comportement alimentaire perturbé, d’une addiction, d’un comportement d’auto-mutilation, ou d’actions suicidaires. [Nous utilisons le pronom féminin du fait que la majorité des patients borderline sont des femmes [1], et que notre recherche a été limitée aux patientes borderline femmes].

En posant le problème de la sortie du traitement dans la population borderline, nous avons choisi de nous centrer sur le contrat thérapeutique, l’alliance thérapeutique, et la sévérité des caractéristiques du patient borderline. Notre intérêt dans le contrat thérapeutique s’appuie sur notre expérience clinique que la psychothérapie psychodynamique requiert l’établissement précoce d’un cadre qui puisse contenir les orages affectifs du patient durant le traitement [2]. Notre attention pour l’alliance thérapeutique est basée sur 1) son statut comme l’une des quelques variables thérapeutiques qui ont montré qu’elles étaient corrélées avec le résultat [3] et 2) notre conscience du problème impliqué dans la conceptualisation et l’entretien de l’alliance thérapeutique chez les patients borderline, qui souvent fait l’expérience d’un transfert fortement négatif durant la thérapie. Nous avons adopté la définition de Greenson de l’alliance thérapeutique : la capacité de maintenir le contact avec la réalité de la situation thérapeutique et de prendre le risque de la régression dans le fantasme [4].

Avec les patients borderlines, la régression peut être rapide : un transfert significativement négatif est probable au début de la thérapie, et il y a un risque que la régression soit accompagnée d’un passage à l’acte. Une alliance effective dans le cadre thérapeutique établi par le contrat devrait encourager et contenir l’expression libre du transfert négatif, qui pourrait s’exprimer sous la forme d’un passage à l’acte qui pourrait entraîner la fin du traitement. Avec le cadre thérapeutique en place, quelque orageux que soit le transfert (et le contretransfert), le patient et le thérapeute devraient continuer à communiquer verbalement dans la structure de la thérapie qu’ils ont établie dans le contrat.

Skodol et al [5] ont comparé les taux de sortie des borderline, des autres troubles de la personnalité ou névrosés, et des patients schizophrènes traités dans une clinique ambulatoire. Le taux de sortie était le plus élevé pour les patients borderline. Soixante sept pour cent de ce groupe diagnostique sortaient dans les 3 mois, tandis que 38% des autres troubles de la personnalité ou des groupes de névrosés sortaient, et seulement 14% du groupe schizophrénique interrompaient durant la même période de temps.

Waldinger et Gunderson [6] ont étudié 11 cliniciens qui menaient une thérapie d’orientation psychanalytique avec des patients qui réunissaient les critères soit du TPB DSM-III, soit d’une organisation de la personnalité borderline [7]. Quarante-six pour cent de ces patients sortaient durant les 6 premiers mois de traitement.

Gunderson et al [8] ont rapporté une étude prospective de la rupture de la psychothérapie parmi 60 patients borderline dont le traitement avait commencé dans un cadre hospitalier. Les patients quittaient l’hôpital pour continuer la psychothérapie comme patients ambulatoires quand c’était cliniquement indiqué. A partir de l’échantillon dans son ensemble, 43 % avaient quitté la psychothérapie dans les 6 mois. De ces patients qui avaient commencé le traitement ambulatoire à un moment donné durant les 6 mois, 66% étaient sortis au suivi de 6 mois.

Goldberg et al [9] ont mené une étude contrôlée de réponse à une faible dose de neuroleptique dans un groupe de 50 patients ambulatoires avec un trouble de la personnalité borderline ou schyzotypique. Dans leur échantillon, 42% des patients en placebo et 54% de ceux qui étaient sous médicaments sont sortis avant la fin de l’étude sur 3 mois.

Contrairement à la tendance générale des taux de sortie des études concernant les patients borderline, on doit considérer deux études récentes. La première, celle de Linehan et al [10] concerne une étude des patients parasuicidaires recevant une psychothérapie cognitivo-comportementale dans laquelle 16% des 22 patients étaient sortis durant la première année de traitement. Deux de ces patients étaient sortis durant les quatre semaines initiales de traitement (la phase d’induction), et les autres étaient sortis plus tard dans le traitement. Une hypothèse concernant le taux réduit du taux de sortie de Linehan est qu’elle se rapporte à une forme de traitement plus globalement soutenante qui offre au patient davantage de contacts durant la semaine.

Stevenson et Meares [11] on étudié 48 patients recevant une psychothérapie basée sur les concepts de la psychologie du soi. Ils ont rapporté un taux de sortie de 16% à la fin de l’étude à 1 an, avec la plupart des sorties durant les 3 premiers mois de traitement. Cependant, leur taux de sortie rapporté n’inclut pas 3 patients qui étaient sortis de l’étude du fait de l’échec de garder 3 évaluations consécutives ou 11 patients qui avaient terminé l’évaluation et qui soit n’avaient pas respecté les termes du traitement ou qui avaient accepté verbalement le traitement et en étaient ensuite sortis. En incluant ces patients, on arrive à un taux de sortie de 35%.

En résumé, certaines études trouvent que le taux de sortie des patients borderline est deux fois plus élevé que celui des patients névrosés ou présentant d’autres troubles de la personnalité et quatre fois le taux des patients schizophrènes, avec seulement 33% des patients restant en traitement à 3 mois [5]. D’autres études montrent qu’au point de 6 mois, seulement de 34 à 57% des patients ambulatoires restent en traitement [6,8]. L’échantillon relativement faible de Linehan montre un taux encourageant de 84% des patients poursuivant le traitement [10]. Des études étendues de leur traitement et de leur impact à long terme devraient s’avérer interessantes. Stevenson et Meares rapportent également un taux de sortie bas, bien que leur procédure de sélection exclut certains des sujets présentant le plus haut risque de sortie [11].

En étudiant le problème de la sortie, notre point de vue n’est pas de considérer le patient borderline comme un individu isolé qui soit reste ou qui termine prématurément le traitement. Le thérapie est un processus qui implique deux participants et la relation spécifique patient-thérapeute est cruciale. Nous avons étudié les aspects des contributions à la fois du patient et du thérapeute à l’interaction afin de déterminer 1) quelles sont les caractéristiques de l’interaction précoce qui sont corrélées avec le fait que le patient reste en traitement et 2) comment l’approche thérapeutique peut être modifiée pour soutenir la continuation du traitement. Notre compréhension clinique est, qu’en fin de compte, c’est l’interaction entre un patient borderline particulier, avec sa combinaison unique de pathologie et de collaboration, et un thérapeute et une technique particulière à un moment spécifique de l’histoire du patient qui détermine la continuation ou la sortie. Nous avons articulé trois hypothèses spécifiques pour l’étude.

1. Un contrat de traitement adéquat sera corrélé avec la continuation versus une fin prématurée dans la thérapie psychodynamique des patients borderline.

2. Une bonne alliance thérapeutique sera corrélée avec la continuation versus l’interuption prématurée de la psychothérapie psychodynamique chez les patients borderline

3. La sévérité de certains aspects de la pathologie borderline (un ou plusieurs critères clés) est corrélée à la probabilité d’une terminaison prématurée.

mardi 17 juin

METHODOLOGIE

Les données viennent de notre étude de la psychothérapie psychodynamique des patients borderline. Nous donnerons un bref résumé de cette étude qui a été décrite en détail ailleurs [12]

Sujets

Les sujets étaient 36 femmes dont l’âge se situait entre 18 et 45 ans, avec un diagnostic DSM-III R de trouble borderline (SCID) [13]. L’échantillon était limité à des femmes pour accroître l’homogénéité et également à cause de la représentation plus élevée de femmes dans la population des patients borderline [1]. Les sujets étaient recrutés à partir des unités de patients hospitalisés et ambulatoires de la division De l’Hôpital Westchester de NewYork et de la communauté. Les critères d’exclusion incluaient un abus de substance en cours, une maladie dépressive majeure en cours au moment de l’évaluation dans l’étude, une maladie bipolaire, une schizophrénie, des troubles schizoaffectifs, un syndrome cérébral organique, et une trouble de la personnalité antisociale. Tous les patients avaient donné leur consentement avant le début de l’étude. Les patients référés à partir d’unités hospitalières ont commencé le traitement après leur sortie.

Le traitement et les thérapeutes

Le traitement était une psychothérapie psychodynamique de patients borderline comme présenté dans le manuel du projet [14]. Un total de 31 thérapeutes ont traité les 36 patients de l’étude. Vingt-quatre thérapeutes étaient en formation (psychiatres résidents ou internes psychologues) avec au moins une année d’expérience de psychothérapie avant le début de l’étude. Sept des thérapeutes étaient membres de la faculté. Tous les thérapeutes étaient formés par l’usage du manuel de projet. Les thérapeutes en formation ont suivi un séminaire de formation de 12 séances et reçu une supervision hebdomadaire par les thérapeutes séniors.

Le traitement consistait en deux séances de psychothérapie par semaine sans que soit déterminée initialement la date de terminaison (on demandait aux patients de considérer qu’ils resteraient dans l’étude durant deux ans). Les séances de thérapie étaient enregistrées et transcrites. Les évaluations du contrat thérapeutique et de l’alliance thérapeutique étaient basées sur des reprises des enregistrements et des transcriptions.

Nous avons choisi le processus de mise en place du cadre du contrat et de l’alliance thérapeutique comme variables qui étaient probablement associées avec le maintien ou la sortie du patient. La responsabilité potentielle du cadre de contrat thérapeutique par rapport à la sortie est issue d’une revue des cas dans la phase pilote de notre projet psychothérapique de recherche. Les cas où les thérapeutes n’adhéraient pas strictement au manuel de thérapie en relation avec la phase de mise en place du contrat thérapeutique tendaient à se terminer en sortie. Nous avons développé une échelle d’évaluation (décrite ci-dessous) pour la mise en place du contrat afin d’étudier notre permière hypothèse.

Il a semblé logique d’investiguer également la corrélation de l’alliance par rapport à la sortie dans cette population. Il a aussi semblé que l’alliance thérapeutique pouvait être comprise comme émergeant du contrat thérapeutique : l’alliance est la mise en action du modèle de thérapie décrit dans le contrat. D’un autre point de vue, le contrat pourrait être considéré comme une sorte d’enveloppe corporelle qui sert à contenir le transfert orageux et le contretransfert quand l’alliance est sur le point de se former. En plus du contrat et de l’alliance, nous avons choisi de considérer certaines caractéristiques du patient. Du fait que le diagnostic de trouble borderline recouvre un large champ de pathologie, nous avons examiné le niveau de sévérité des symptômes qui produisent le tableau du trouble borderline.

Instruments

Echelle d’évaluation du contrat [Contract Rating Scale (CRS)] : La CRS a été développée par Selzer, Yeomans et Clarkin afin d’évaluer la fiabilité du processus de cadre contractuel dans le traitement dynamique des patients borderline, comme défini dans notre manuel de traitement [14]. D’un point de vue de recherche, comme de clinique, la période de mise en place du contrat thérapeutique dans le traitement dynamique fournit une excellente opportunité de réunir les données sur les patients, le thérapeute et l’interaction spécifique entre les deux individus. Le cadre contractuel est un temps de la thérapie où le thérapeute introduit des informations standardisées (les conditions du traitement, telles que la description des responsabilités du thérapeute et du patient durant le traitement) dans l’interaction, et où le patient a la possibilité de répondre à ces informations. A ce stade, on peut évaluer la réponse du patient au comportement du thérapeute comme on devrait évaluer la réponse à un test standardisé. Pour obtenir des données supplémentaires sur la dynamique du processus thérapeutique après avoir évalué la réponse du patient, nous avons évalué la prise en main du thérapeute de la réponse ; cette évaluation ultérieure fournit une mesure de l’adéquation et de l’habileté avec laquelle le thérapeute dépasse les difficultés et la résistance construite par le patient.

L’unité d’évaluation est la phase de mise en place du contrat dans son ensemble (qui consiste habituellement en deux séances ou davantage), telle qu’elle est enregistrée sous forme de séances transcrites. Les évaluateurs renseignaient 12 items, chacun utilisant une échelle de type Likert à 5 points. Chaque échelle est ancrée de telle façon que les scores 1 ou 2 signifient que le processus a été cliniquement insatisfaisant, 3 qu’il a été adéquat, 4 et 5 qu’il a été établi de façon très complète. Les évaluateurs étaient formés par l’utilisation d’un manuel décrivant les points d’ancrage individuels (M.A. Selzer, J.C. Clarkin et F.E. Yeomans : l’échelle d’évaluation du contrat [1989]). Ces 12 items sont organisés suivant quatre échelles principales : 1) la présentation du thérapeute des conditions du traitement (établissement du contrat thérapeutique), 2) la réponse du patient à ces conditions, 3) la prise en main du thérapeute, et 4) le degré de consensus atteint entre le patient et le thérapeute.

Pour l’analyse des données, la présentation du thérapeute du contrat et la prise en main de la réponse du patient sont combinés pour donner un score du thérapeute unique. Le score du thérapeute, le score du patient et le score de consensus sont combinés pour fournir le score contractuel total pour chaque cas. La fidélité interjuges pour ces sous échelles de la CRS (coefficient de corrélation intraclasse) était de 0.74 pour la cotation du score du thérapeute, de .87 pour celle du patient et de 0.92 pour le score de consensus.

CALPAS-R : Étant donnée la complexité du concept d’alliance thérapeutique dans le traitement des patients borderline comme discuté ci-dessus, nous avons choisi la CALPAS-R comme l’instrument d’évaluation de l’alliance le plus approprié (C.R. Marmar et L. Gaston : manuel des échelles californiennes des échelles d’alliance [Manual of California Psychotherapy Alliance Scales, non publié, 1989). Bien qu’il existe une bonne compréhension hypothétique de l’alliance avec les patients borderline, aucun instrument n’a été conçu spécifiquement pour cette population. Le CALPAS est le mieux adapté du fait que ses quatre dimensions traitent les réponses tant positives que négatives du patient. La version “R” (évaluateur externe) implique un évaluateur formé qui utilise un enregistrement audio d’une séance de thérapie pour évaluer 30 items sur une échelle à 7 points. Ces items sont ensuite organisés dans les quatre dimensions suivantes : 1) Capacité de travail du patient (à la fois sous la forme de contribution positive ou négative), 2) Accord du patient, 3) Stratégie consensuelle de travail, et 4) Compréhension et implication du thérapeute (Therapist Understanding and Involvement (TUI)). Notre évaluateur était formé par l’un des auteurs du CALPAS et évaluait ainsi les séances d’établissement du contrat.

Échelle de sévérité de la maladie : Pour explorer notre troisième hypothèse, nous avons inventé une échelle de Likert à 6 points pour mesurer la sévérité de chacun des huit critères de trouble de la personnalité borderline dans l’Axe II. Chaque échelle était ancrée de telle façon que les scores 1 et 2 soient les scores inférieurs pour le critère, un score de 3 était correspondait au critère défini dans le DSM-III-R, et les scores de 4 à 5 correspondaient aux troubles les plus sévères. L’accord interjuges, évalué par l’usage de coefficients de corrélation intraclasse, s’étendait de 0.99 à 0.89. Utilisant ces scores dimensionnels du trouble de la personnalité borderline, nous avons fait une analyse factorielle des 8 critères concernant un nombre important de patients borderline (n=76) [15]. Trois facteurs ont émergé : 1) un facteur Identité/Interpersonnel composé des critères de diffusion de l’identité, de vide/complétude, de peur de l’abandon, et des critères de relations instables ; 2) un facteur affectif composé des critères d’humeur labile, de colère, de comportement suicidaire et d’auto-destruction ; et 3) un facteur de comportement impulsif composé du critère d’impulsivité seul. Au moment de l’entrée de chaque sujet dans l’étude, un psychologue de faculté l’évaluait pour la sévérité des critères de trouble de la personnalité borderline ; ces évaluations étaient utilisées pour construire des scores factoriels ainsi qu’une évaluation de la sévérité générale constituée de la somme des huit scores de critères.

(A suivre)

La discussion est ouverte. Si vous avez des commentaires, des questions ... Envoyez vos mails à jmthurin@internet-medical.com


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Dernière mise à jour : mardi 17 juin 2003 17:16:32

Dr Jean-Michel Thurin


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