Editorial : Pr Jean-François Allilaire
Devant le développement de plus en plus technique de la Psychiatrie avec ses avancées dans les Neurosciences et la Neuropharmacologie d'une part, et avec l'utilisation croissante des systèmes de diagnostic fondés sur des critères de description, la tentation est grande chez de nombreux psychiatres de négliger voire d'oublier l'importance des facteurs d'environnement culturel dans lesquels s'expriment et se façonnent les anomalies du fonctionnement mental.
Or il nous semble que dans nos sociétés de plus en plus traversées par les flux migratoires et les phénomènes multiculturels, le poids de ces facteurs culturels devient de plus en plus grand et en tout état de cause ne peut être purement et simplement laissé pour compte.
La psychiatrie reste en effet ancrée à la fois dans les sciences de la vie et de la santé et dans les Sciences Humaines et Sociales et ce double ancrage justifie un rééquilibrage permanent à travers une réflexion spécifique.
De son côté la psychologie avait pour objectif d'expliquer les capacités mentales humaines à travers leurs manifestations individuelles. Ribot proposera la méthode pathologique comme un moyen de mieux comprendre les lois psychologiques sous-jacentes au fonctionnement normal grâce à l'observation de la psychologie des malades.
Par ailleurs, l'Anthropologie cherchait à préciser ce qui caractérise en propre les humains à travers leurs diversités à la fois physiques et culturelles. On sait que l'Anthropologie culturelle deviendra de plus en plus ethnographique au lieu de dégager des lois générales pour tenter d'expliquer la variabilité des représentations culturelles humaines.
C'est pour apprendre à reconnaître et à prendre en compte la part des représentations culturelles dans l'expression de la pathologie qu'il est essentiel de conjuguer la perspective de la psychopathologie et celle de l'anthropologie.
Il s'agit de déplacer le regard du clinicien et de lui imposer un décentrage et une distanciation porteuses d'objectivation scientifique vis-à-vis des anomalies qu'il observe chez les patients sans pour autant renoncer à l'observation participante qui fonde la démarche anthropologique comme la démarche psychiatrique.
Convoquer dans l'enquête diagnostique les données de l'identité culturelle du sujet ainsi que les systèmes explicatifs culturellement déterminés par lesquels il se représente ses troubles nous semble indispensable à côté des critères diagnostiques. De plus on évitera de redoutables contresens grâce à une meilleure connaissance des normes culturelles de comportement des deux protagonistes de la situation d'observation clinique.
Loin de s'opposer à l'approche scientifique de l'objet de la psychiatrie, tel qu'il se développe remarquablement au travers des recherches biologiques et cognitives, cette démarche doit la compléter nécessairement afin de lui donner sa vrai dimension.
Les origines de l'anthropologie médicale
L'anthropologie médicale connaît son plein essor aux États-Unis à partir du milieu des années 1960, alors que depuis plusieurs années déjà, la biomédecine comme les médecines non occidentales suscitent un intérêt croissant parmi les ethnologues. Le terme d'anthropologie médicale apparaît pour la première fois dans la littérature anglo-saxonne en 1963 sous la plume de Scotch (1963). Cette première mention du terme d'anthropologie médicale prolonge une étude publiée dix ans plus tôt par Caudill (1953) dans laquelle l'auteur analysait les possibilités d'appliquer le savoir et la démarche anthropologiques au domaine de la santé. A partir de 1963, le développement de cette branche de l'anthropologie se fera de façon progressivement croissante aux Etats Unis, avec l'apparition d'Écoles et de tendances théoriques distinctes, mais se proposant toutes d'investir l'ensemble des domaines se rapportant à la santé et de réunir dans une même approche l'ensemble des contraintes culturelles, sociales, religieuses, politiques, économiques, etc., sans aucune exclusive qu'il s'agisse de la biomédecine ou des médecines non-occidentales savantes ou "traditionnelles" (Foster & Anderson, 1978).
La naissance de l'anthropologie médicale correspond donc à un changement de paradigme qui s'organise autour de la construction d'un nouvel objet intellectuel : la Santé en remplacement du couple médecine/maladie. Historiquement, c'est le développement des Politiques Internationales de Santé qui a cristallisé autour de l'anthropologie médicale trois grandes traditions intellectuelles de l'ethnologie contemporaine déjà traversées par des questions médicales et/ou psychiatriques comme l'anthropologie physique, l'ethnomédecine et le culturalisme de l'Ecole Culture et Personnalité.
C'est dire que l'anthropologie médicale s'est située au carrefour de la médecine et de l'anthropologie. Elle a affirmé sa volonté d'être enseignée aussi bien dans les Facultés de Sciences Humaines que dans les Facultés de Médecine, dans la mesure où elle a suscité l'intérêt conjoint de professionnels d'horizons variés qui ont vu dans l'utilisation des méthodes de recherche de l'anthropologie un moyen d'améliorer la qualité et la diffusion des politiques de santé à travers le monde. Toutefois, la dimension de science appliquée intrinsèque à la démarche de l'anthropologie médicale suscite encore aujourd'hui de violentes controverses parmi les anthropologues médicaux scindant la discipline en deux grandes tendances opposées. L'anthropologie médicale clinique, représentée par l'École de Harvard d'Arthur Kleinman, place la compréhension anthropologique au coeur d'une investigation biomédicale. Son objectif est d'assurer un meilleur développement des aspects les plus performants de la biomédecine, tout en relativisant ses visées hégémoniques et universalisantes afin d'améliorer la qualité des soins et la relation médecin/malade (Kleinman, 1988). De façon sensiblement différente, l'anthropologie médicale critique, représentée par l'Ecole de Berkeley autour de Nancy Scheper-Hugues, se veut purement ethnologique et récuse toute "compromission" avec la biomédecine. L'application du savoir anthropologique repose ici sur une déconstruction du savoir biomédical et sur la dénonciation de son caractère oppressif au profit des savoirs locaux (Scheper-Hugues, 1990)
Anthropologie médicale et psychiatrie :
une double perspective
Dans une perspective anthropologique, la psychiatrie constitue un objet d'étude que l'anthropologie médicale va investir selon deux grandes tendances. Dans la première, l'anthropologie tente d'analyser les processus culturels et politiques qui contribuent à l'élaboration du savoir psychiatrique et les modalités de la construction de son efficacité. Dans la deuxième, c'est un « partenariat » entre l'anthropologie et la psychiatrie qui est privilégié dans le but de fonder tantôt une ethnopsychiatrie, tantôt une psychiatrie transculturelle.
1 - La critique anthropologique du savoir psychiatrique
La réorientation de l'anthropologie sur des objets du monde moderne s'est accompagnée du développement d'un vaste champ de recherche sur la médecine occidentale et sur la psychiatrie. Êtres de culture, comme tous les autres savoirs, les discours médicaux et psychiatriques pouvaient être investis par les anthropologues, tout comme l'analyse des parcours thérapeutiques en Occident ou la cohabitation de différents systèmes thérapeutiques à côté de la biomédecine comme les médecines parallèles (Zimmermann, 1995). S'agissant de la psychiatrie, les études anthropologiques contemporaines demeurent au moins partiellement inspirés par les travaux de Foucault et restent fidèles à une lecture critique de la construction du savoir psychiatrique.
Parmi les travaux les plus importants dans ce domaine, citons l'excellente analyse anthropologique et politique réalisée par Young (1995) sur les conditions d'émergence de la catégorie « État de Stress Post Traumatique » (PTSD) dans le DSM, l'étude du Trouble des Personnalités Multiples (MPD) par Mulhern (1991 & 1995), ou les travaux plus historiques de Hacking (voir à ce propos infra l'article de S. Mulhern).
2 - le « partenariat » anthropologie/psychiatrie
L'histoire des rapports entre l'anthropologie, la psychiatrie et la psychanalyse remonte à l'aube du XX ème siècle. Elle est contemporaine de la constitution de ces différents champs de recherche en disciplines institutionnalisées. Souvent polémiques, les débats qui ont agité la communauté scientifique se sont régulièrement heurtés à la délimitation d'un champ commun entre l'inconscient et la culture. Alors que les différents paradigmes théoriques de l'anthropologie offraient une perméabilité plus ou moins grande à la pénétration de la psychanalyse comme mode d'explication du psychisme, la psychiatrie s'est régulièrement vue interpellée sur ses prétentions à construire une connaissance universelle de la pathologie mentale. Reproduisant la classique opposition entre l'universalisme et le relativisme, la question de l'influence de la culture sur la genèse, l'expression, la gestion et le devenir des maladies mentales a donné lieu à une imposante littérature internationale qu'il serait impossible de détailler ici (Rechtman & Raveau, 1993). De nos jours, c'est le paradigme de l'ethnomédecine qui prédomine, même si récemment Bibeau (1997) en annonçait le déclin. Le partenariat anthropologie / psychiatrie est régulièrement envisagé sous l'angle de l'influence qu'exercent les systèmes autochtones de représentation de la maladie sur l'expression et le traitement des troubles mentaux selon deux grands modèles méthodologiques.
Les différents modèles méthodologiques
en anthropologie psychiatrique
1 - Le modèle nosologique
La démarche est avant tout classificatrice et repose sur l'analyse des variations cliniques dans l'expression de la pathologie mentale. L'enquête est centrée sur les maladies, leurs expressions et leur évolution au sein d'un univers culturel précis. L'approche est donc essentiellement nosologique. Les catégories sont soit les catégories de la nosologie occidentale dans le modèle épidémiologique, soit les catégories autochtones de la maladie dans le modèle ethnomédical. Mais dans les deux, le fondement de la démarche repose sur les systèmes de classifications et délaisse l'étude anthropologique de l'ensemble du système culturel lorsque prime la volonté d'application.
1a- Le modèle épidémiologique
La plupart des grandes enquêtes internationales réalisées par l'OMS reposent sur ce modèle. La démarche part des critères et des syndromes de la psychiatrie occidentale et vérifie leur présence ou leur absence dans des populations non-occidentales. L'objectif est donc de valider à l'échelle internationale les classifications actuelles tout en y incorporant les variations propres à certaines aires culturelles. Cette approche se double généralement d'enquêtes épidémiologiques qui étudient la prévalence et l'incidence de ces différents troubles. L'option transculturelle est manifeste mais ne repose pas sur un authentique partenariat théorique entre l'anthropologie et la psychiatrie. Plus exactement c'est essentiellement l'accumulation de données empiriques qui permet de dresser un panorama transculturel de la pathologie mentale (Murphy, 1994). L'intérêt de ces études est incontestable puisqu'elles permettent de mieux documenter la répartition de la pathologie mentale à travers le monde et de proposer des programmes de santé mentale dans des pays médicalement sous-dotés qui cependant tiennent compte des particularités propres à ces régions. Les célèbres études sur la schizophrénie, comme les études de psychiatrie comparative (Murphy, 1992), ou encore l'élaboration de la CIM 10 et du DSM IV, s'inscrivent dans ce modèle.
Toutefois, l'orientation biomédicale qui prévaut dans ces études laisse nécessairement de côté toutes les manifestations psychologiques et les désordres «sociaux» qui n'entrent pas dans les catégories préétablies. A l'exception, certes, de la récente adjonction des troubles de transe et de possession dans le DSM IV et du retour des syndrome liés à la culture (Culture Bound Syndroms), force est de reconnaître, comme le souligne Kleinman (1998), que tout ce qui fait la spécificité de l'expression culturelle de la pathologie mentale, ou plus exactement de la souffrance psychique, est évacué dans ces vastes systèmes de classification (Mezzich & al., 1996). C'est précisément en cela que le modèle épidémiologique n'est pas anthropologique, même si légitimement il mérite de figurer dans le groupe des approches transculturelles.
1b - le modèle ethnomédical
Il répond au modèle précédent en inversant le point de départ. C'est à partir des catégories autochtones et des systèmes de classifications traditionnels que le comparatisme est envisagé. L'enquête part des phénomènes ou des événements à partir desquels les indigènes classent et traitent les différents types de désordres pour étudier les procédures diagnostiques et thérapeutiques mises en oeuvre. Ce modèle s'inspire directement de l'ethnomédecine puisqu'il repose essentiellement sur l'étude des systèmes symboliques de gestion sociale de la maladie, mais il s'en écarte également dans sa volonté de rendre cette connaissance anthropologique applicable au champ de la psychiatrie. Ainsi, la plupart des études s'appuient sur les systèmes explicatifs de la maladie mentale pour inférer l'existence d'une expression différente de la souffrance psychique, laquelle serait directement façonnée par les systèmes de représentations. Certains vont jusqu'à proposer l'utilisation de techniques diagnostiques et thérapeutiques proches de celles des thérapeutes traditionnels au nom d'une stricte détermination culturelle du psychisme (Nathan, 1993). Dans une perspective moins radicale, d'autres auteurs proposent d'inclure au sein des classifications occidentales certaines catégories ou idiom of distress propres à tel ou tel groupe culturel (Eiseinbruch, 1992) tout en invitant les praticiens à négocier avec leurs patients une thérapeutique qui soit compatible avec leur système thérapeutique (Kleinman, 1980) (Kirmayer, 1993).
Ici encore, les avancées scientifiques sont importantes. Toutefois, cette approche qui représente l'exact contrepoint de la démarche épidémiologique reproduit également certains de ses biais. En effet, en instrumentalisant dans la clinique les découvertes ethnomédicales ce modèle se focalise exclusivement sur les systèmes explicatifs de la maladie et délaisse l'ensemble des facteurs socioculturels et environnementaux qui non seulement sont susceptibles d'intervenir dans le déroulement des maladies mentales, mais plus fondamentalement définissent le champ propre de l'anthropologie (Rechtman, 1995).
Ces deux sous modèles de type nosologique envisagent diversement leur rapport à l'anthropologie. Mais les deux s'en écartent dans la mesure où toute théorie générale de la culture, seule susceptible de définir un champ anthropologique, en est régulièrement absente.
2 - le modèle anthropologique général
Contrairement aux deux précédents, ce dernier modèle repose sur une définition préalable de la culture comme un système de signification. La maladie et les systèmes explicatifs qui tentent d'en rendre compte sont bien évidement présents comme dans l'approche ethnomédicale, mais ils ne résument pas l'ensemble de la démarche. En fait, c'est la maladie en tant qu'expérience culturelle et subjective (Illness) qui est au coeur de l'enquête et non la catégorie médicale ou traditionnelle (Disease). L'opposition entre Illness et Disease permet de rendre compte de la perception culturelle mais également pragmatique de la souffrance psychique telle qu'elle est perçue par les malades, leurs proches, et les thérapeutes. La perception culturelle de la maladie correspond à l'évidence aux catégories autochtones, tandis que l'approche pragmatique, laquelle domine la plupart des stratégies thérapeutiques des patients quelle que soit leur culture, fait intervenir l'ensemble des facteurs relationnels et environnementaux qui constituent le sens commun et conditionnent la vie quotidienne. Cette démarche extrait la souffrance psychique du seul cadre explicatif, généralement magico-religieux, pour lui redonner son sens banal et quotidien, lequel est également culturellement déterminé. Mais cette détermination ne relève pas des seules catégories de la maladie, elle prend sa source dans l'ensemble des autres systèmes symboliques qui permettent de penser l'univers quotidien. A ce titre, l'analyse du contexte médical global dans lequel les patients évoluent devient fondamental. Les différentes stratégies utilisées par les patients et leur familles, les itinéraires thérapeutiques, et surtout les récits de maladie (illness narratives) des patients eux-mêmes, constituent le ressort de l'approche anthropologique (Kleinman, 1988 & 1995).
Appliqué à la clinique transculturelle, ce modèle montre, toutefois, certaines limites. Les propositions se résument parfois à une simple adaptation de la situation clinique en favorisant l'amélioration de la relation médecin / malade. La complémentarité des modèles biomédicaux et traditionnels soulèvent encore de nombreuses interrogations épistémologiques que le seul recours aux modèles d'explication (explanatory models) d'A. Kleinman ne dissipe pas (Young, 1990). De même, la subjectivité de la narrativité ignore l'aspect processuel de la maladie mentale pour des motifs plus anthropologiques que psychologiques, réduisant la dimension psychopathologique à la seule expression culturelle de la souffrance.
*Psychiatre et anthropologue, Médecin Chef de l'Institut Marcel Rivière, CHS la Verrière, 78321 Le Mesnil Saint Denis
La Bibliothèque médicale
de la Verrière
(01 39 38 78 09)
La Bibliothèque Médiclae H. EY à l'Hôpital Ste Anne
(01 45 65 89 66)
Le Fonds documentaire du CREDA à la Bibliothèque
bio-médicale des St Pères
(01 42 86 20 49 )
* Psychopathologie Africaine
* Sud/Nord. Folies et cultures
* Migrations Santé
* Cahiers Intersignes
* La Nouvelle Revue d'Ethnopsychiatrie
* Transcultural Psychiatry (Canada, Mc Gill University)
* Culture, Medicine and Psychiatry (USA, Harvard)
* Medical Anthropology Quartery (USA)
* Social Sciences and Medicine (Grande-Bretagne, USA)
* Anthropology and Medicine (Grande-Bretagne, University College London)
* ethnopsychiatry / ethnopsychiatrie
* transultural AND psychiatry / psychiatrie transculturelle
* crosscultural psychiatry
* migrants AND psychiatry / psychiatrie ET migration
* refugees AND psychiatry / psychiatrie ET réfugiés
* migrants (réfugiés) et tel ou tel troubles psychiatriques
* medicine AND anthropology
* psychiatry AND anthropology
Depuis quelques décennies, la compréhension de la composante biologique des maladies mentales est devenue une préoccupation majeure de la psychiatrie. Les troubles mentaux ayant fait l'objet de nouvelles spécifications sont de plus en plus fréquemment décrits comme les équivalents psychologiques de pathologies physiques ; à savoir, des ensembles stables de symptômes transculturels et intemporels ayant pu être décelés grâce à l'enregistrement, à la collecte et à la comparaison d'études de cas (par ex.Young, 1995). Toutefois, les efforts actuels visant à confirmer la psychiatrie en tant que discipline biomédicale et à promouvoir l'application de catégories occidentales des maladies mentales à des populations culturellement diverses, ont soulevé nombre de critiques, notamment de la part de certains philosophes des sciences et d'anthropologues. Ces derniers ont largement démontré la forte détermination des facteurs sociaux, même dans le cas des maladies d'étiologie biologique.
Les critères permettant d'appréhender et de définir les troubles psychiatriques sont ancrés dans le comportement social. Contrairement aux indicateurs de la médecine générale qui, de manière typique, font référence aux attributs corporels impersonnels et/ou techniques, les principaux indicateurs de la psychopathologie se réfèrent à des composantes extrêmement personnelles del'être : croyances, intentions, modes de pensée et sentiments (Fabrega, 1989). Le trouble mental entraîne généralement un ensemble de comportements dramatiques ou inhabituels qui, à leur tour, sont définis et renforcés par une élite culturelle, comme l'expression visible d'une maladie (Lipsedge &Littlewood, 1997, 1993). Au-delà de leur signification locale, ces "techno-phénomènes" socialement négociés fonctionnent souvent comme des véhicules au travers desquels une cohorte limitée d'individus peut communiquer une souffrance subjective et atténuer les problèmes et tensions interpersonnels qui sont exclus des voies( Mulhern, 1997).
Bien que les théoriciens de la psychiatrie biomédicale reconnaissent la prépondérance de la composante sociale des comportements "maladifs" organisés dans les sociétés non-européennes, qu'ils classent habituellement dans la rubrique des syndromes culturels (culture bound syndroms), ils soutiennent cependant que l'ensemble des troubles psychologiques peut être expliqués de manière adéquate par les seuls mécanismes biologiques et psychologiques universels, dans la mesure où ils se veulent des spécialistes de phénomènes naturels, a-culturels. Les spécialistes d'ethnomédecine leur rétorquent généralement que la "connaissance" est la seule réalité à laquelle les êtres humains ont accès (Young, 1995) et que, à l'instar de la psychopathologie, la théorie psychiatrique est ancrée dans des processus historiques.
La justesse de cette perspective a été soulignée par une série d'études anthropologiques et socio-historiques portant sur les nouveaux troubles mentaux récemment spécifiés dans les manuels diagnostiques américains (DSM). Ainsi, les troubles fondés sur des souvenirs pathogènes ont fait l'objet de plusieurs recherches anthropologiques comme l'état de stress post-traumatiques et les troubles dissociatifs de plus en plus controversés : le trouble dissociatif de l'identité (personnalité multiple) et l'amnésie dissociative (psychogène). Ces études soulignent que les modèles théoriques, apparemment scientifiques, de la psychopathologie peuvent être, et sont effectivement souvent, déterminés plus par des impératifs sociaux et politiques que par des données cliniques fiables (Mulhern, 1998). En outre, ces études montrent que, à l'instar des guérisseurs dans les sociétés pré-industrielles, les praticiens occidentaux fonctionnent à la fois comme adjudicateur et médiateur (Fabrega, 1989 ; Young, 1993, 1995; Lipsedge & Littlewood, 1996, 1997 ; Hacking, 1997 ; Mulhern, 1998).
La théorie psychiatrique décrit actuellement les souvenirs traumatiques comme les empreintes mentales dissociées d'éléments sensoriels et affectifs provenant d'expériences fortuites accablantes. Ces expériences sont initialement perçues comme des événements psycho-physiologiques visuels, olfactifs, affectifs, auditifs et kinésthésiques importuns et émotionnellement pénibles (Van der Kolk, 1994). Bien que certains individus fassent l'expérience de ces phénomènes avant d'entrer en thérapie, d'autres semblent les développer à la suite du traitement. Les interventions thérapeutiques appliquées dans ces cas consistent, dans une large mesure, à faciliter la transformation en récits personnels cohérents des souvenirs traumatiques épars qui resurgissent chez les individus ayant fait l'objet d'un diagnostic correspondant. Malheureusement, il n'existe aucun moyen, en dehors de preuves indépendantes qui viendraient corroborer ces souvenirs, de garantir l'authenticité des expériences ainsi relatées (Mulhern, 1998). Pour autant, ces souvenirs n'en sont pas moins considérés comme constituant la "mémoire explicite". Par ailleurs, la construction de ce type de récits encourage les individus souffrant d'une détresse subjective à appréhender leurs symptômes, jusqu'alors confus, comme étant la preuve qu'ils ont effectivement été les victimes de graves injustices et, à ce titre, qu'ils peuvent revendiquer une indemnisation qui, à son tour, devra être socialement négociée.
Depuis le début des années 1980, l'élaboration dans le milieu clinique et l'application des théories des souvenirs pathogènes post-traumatiques et des divers troubles dissociatifs, a eu des conséquences sociales, politiques et juridiques profondes et souvent imprévisibles, amplifiées par le fait que ces diagnostics sont soutenus par des mouvement sociaux organisés. Vis-à-vis de la société globale, ces réseaux représentent les intérêts et l'identité de leurs membres y compris les cliniciens et leurs clients (Young, 1995). Paradoxalement, bien que revendiquant explicitement leur engagement en faveur d'une large reconnaissance publique et professionnelle de la validité scientifique et interculturelle de ces troubles mentaux, ces mouvements ne font que souligner et renforcer, un peu plus encore, leur caractère politique et social.
Ainsi, en Amérique du Nord, au cours des quinze dernières années, la prise de conscience de plus en plus nette de la question des abus sexuels sur les enfants a créé un climat social très particulier, au sein duquel les individus diagnostiqués comme souffrant des séquelles psychologiques de souvenirs traumatiques, dissociés et inconscients, relatifs à des sévices subis pendant l'enfance, étaient simultanément promus au rang de héros de la société. Bien que le diagnostic porté fasse état de graves troubles de la mémoire, les récits développés en cours des thérapies étaient souvent traités comme des éléments faisant indubitablement autorité. De surcroît, dans certains Etats, des lois nouvelles furent promulguées, permettant à ces individus de présenter comme des preuves, devant une juridiction officielle, les souvenirs qu'ils avaient recouvrés en cours de thérapie. Malheureusement, dans un certain nombre de cas, en dépit de l'aspect émotionnellement convaincant des témoignages présentés par ces individus, ceux-ci se révélèrent faux (Mulhern, 1995). Inévitablement, ces cas allaient bientôt soulever un certain nombre de questions quant à l'intégrité des victimes supposées de crimes effroyables et du milieu clinique dans lequel elles étaient traitées. Or, ces aspects ne pouvaient être expliqués en évoquant simplement des mécanismes biologiques et psychologiques. Afin d'être élucidé, il convenait de les replacer dans un contexte adéquat par le biais d'analyses anthropologiques scrupuleuses.
* Anthropologue, Université Paris VII
Anthropologie : d'après Gresle et al. (1990, p. 21), "l'anthropologie est la discipline qui, à partir des données de l'ethnographie, vise à établir les lois générales de la vie en société, aussi bien chez nous que dans les populations (...) traditionnelles. C'est Lévi-Strauss (...) qui a fait le plus pour (l') introduire dans la tradition intellectuelle française". Une branche de l'anthopologie s'intéresse aux modalités de penser la maladie et de la soigner, c'est l'anthropologie médicale.
Ethnologie : d'après Gresle et al. (1990, p. 111-112)1, dans son sens restreint actuel de plus en plus communément admis, l'ethnologie étudie à partir de documents de terrain (écrits, productions, récits oraux, mythes, contes...) les problèmes de diffusion, de contacts, d'origine et de reconstitution du passé d'un groupe culturel. Elle constitue une étape de l'anthropologie.
Culture : les anthropologues ont proposé de nombreuses définitions de la culture, de la culture "du dehors", celle qui constitue l'univers dans lequel nous vivons. En 1871, Tylor2 donna la première définition de la culture. Depuis nombre d'auteurs ont proposé une définition de ce concept de base de l'ethnologie, mais aucune n'a pu recueillir l'assentiment général. Un point nodal est cependant généralement admis : "Il n'existe pas d'homme sans culture". Roheim l'avait souligné dès 1943 : "(...)culture signifie humanité, car même les manifestations les plus élémentaires de l'existence humaine (...) peuvent être considérées comme les commencements de la culture" Roheim3 (1943, p.31). L'idée d'un homme à l'état de nature ou d'un homme universel existant en dehors de toute culture correspond à des hypothèses théoriques maintenant réfutées (Gresle, 1990).
Gresle et coll. donnent cependant une définition générale de la culture : la culture est "(l') ensemble des connaissances et des comportements (techniques, économiques, rituels, religieux, sociaux, etc.) qui caractérisent une société humaine" (p.74).
La question culturelle :
plusieurs approches en psychiatrie
Le savoir de l'anthropologie médicale a incité les cliniciens à s'interroger sur les interactions réciproques entre le dehors (la culture au sens anthropologique) et le dedans (le fonctionnement psychique de l'individu). C'est de là que sont nés les liens entre psychiatrie et anthropologie.
Pourtant, même parmi ceux qui admettent les présupposés culturels de la relation thérapeutique en psychiatrie, on note deux positions épistémologiques différentes qui, on peut le déplorer, conduisent à des débats passionnés, plus idéologiques que cliniques ou scientifiques.
Les deux positions sont les suivantes :
1 - certains ont choisi une perspective essentiellement comparatiste : quels sont les invariants que l'on retrouve dans telle culture de nos patients et dans la nôtre ? Cette perspective conduit à construire des équivalences et des parallélismes entre des éléments culturels de mondes distincts mais aussi entre des éléments culturels d'un groupe et des conduites pathologiques d'individus appartenant à d'autres groupes. Cette option était présente dans certains textes de Freud4. Sur le plan clinique, ce choix conduit à introduire la langue du patient dans certains dispositifs, voire à apprendre à connaître les représentations culturelles du patient. Mais, tous ces éléments sont posés comme une coloration de la relation clinique, le noyau (la partie efficiente) étant le même que celui qu'on établirait en situation intraculturelle. L'approche peut alors être, psychologique, psychiatrique ou plus rarement psychanalytique.
2 - D'autres ont pris, à la suite de Devereux, une perspective complémentariste5, c'est-à-dire l'utilisation de manière obligatoire mais non simultanée de la psychanalyse et de l'anthropologie. Le complémentarisme s'oppose au comparatisme dans la mesure où les logiques culturelles sont explorées en tant que telles et servent de support aux associations. L'outil anthropologique permet de poser et d'explorer le cadre de la relation et de co-construire avec le patient des sens culturels sur lesquels viendront s'arrimer des sens individuels.
La classification de Devereux (1978)6 reconnaît trois types de thérapies qui prennent en compte la dimension culturelle du désordre psychique : "1. Intraculturelle : le thérapeute et le patient appartiennent à la même culture, mais le thérapeute tient compte des dimensions socio-culturelles (...).
2. Interculturelle : bien que le patient et le thérapeute n'appartiennent pas à la même culture, le thérapeute connaît bien la culture de l'ethnie du patient et l'utilise comme levier thérapeutique (...). 3. Métaculturelle : le thérapeute et le patient appartiennent à deux cultures différentes. Le thérapeute ne connaît pas la culture de l'ethnie du patient ; il comprend, en revanche, parfaitement le concept de "culture" et l'utilise dans l'établissement du diagnostic et dans la conduite du traitement" (p.11-12).
Définitions de l'ethnopsychanalyse
et de l'ethnopsychiatrie
Du point de vue de la terminologie, l'usage a parfois réservé le terme d'ethnopsychanalyse à la théorie et à la méthodologie, et le terme d'ethnopsychiatrie à la pratique. Parfois, on utilise le terme d'ethnopsychothérapie plus conforme à la réalité de cette pratique, l'ethnopsychiatrie étant une psychothérapie d'orientation psychanalytique. Le terme d'ethnopsychiatrie englobe l'ethnopsychanalyse et les autres courants, qui à partir de l'ethnopsychanalyse, élargissent ses intérêts à d'autres champs (autres psychothérapies, chimiothérapie...).
* Théorie et méthode
Définitions du complémentarisme
Par définition, l'ethnopsychiatrie est une pratique psychothérapique qui s'appuie de manière complémentariste sur deux corpus, celui de la psychanalyse et celui de l'anthropologie. L'ethnopsychiatrie a été construite à partir d'un principe méthodologique, c'est là une de ses originalités : "le complémentarisme n'est pas une "théorie", mais une généralisation méthodologique. Le complémentarisme n'exclut aucune méthode, aucune théorie valables - il les coordonne" (Devereux, 1972, p.27)8. Il est vain d'intégrer de force dans le champ de la psychanalyse ou dans celui de l'anthropologie exclusivement certains phénomènes humains. La spécificité de ces données réside justement dans le fait qu'elles nécessitent un double discours qui ne peut être tenu simultanément: "une pluridisciplinarité non fusionnante, et "non simultanée": celle du double discours obligatoire" (Ibid., p.14).
Ce double discours conditionne l'obtention de données : "ainsi, lorsque l'explication sociologique9 d'un fait est poussée au-delà de certaines limites de "rentabilité", ce qui survient n'est pas une "réduction" du psychologique au sociologique, mais une "disparition" de l'objet même du discours sociologique" (Ibid., p.25). Et il en va de même pour l'explication psychologique. Mais la question, posée ici, est comment prendre successivement deux places différentes par rapport à l'objet sans réduire l'une à l'autre et sans les confondre ? Un apprentissage de la décentration, au sens piagétien du terme, est ici nécessaire mais ardu. Il faut débusquer ces habitudes en sciences humaines qui tendent à ramener les données à soi ou à ce que l'on connaît déjà et à se méfier de l'altérité de l'objet d'étude. Car, si certains faits relèvent de deux discours complémentaires, ceci ne tient pas au fait lui-même mais à la démarche scientifique qui prétend l'expliquer.
Universalité psychique/codage culturel
Sur le plan théorique, il est un postulat sans lequel l'ethnopsychiatrie n'aurait pu se construire, c'est celui de l'universalité psychique, c'est-à-dire l'unité fondamentale du psychisme humain. De ce postulat découle la nécessité de donner le même statut (éthique, mais aussi scientifique) à tous les êtres humains, à leurs productions culturelles et psychiques, à leur manières de vivre et de penser, pour différentes et parfois déconcertantes qu'elles soient... (Devereux, 1970)10. Énoncer un tel principe peut paraître une évidence, les implicites de nombreuses recherches dites scientifiques menées hier et aujourd'hui sont là pour rappeler que ce principe théorique n'est pas toujours respecté. De même l'exclusion de fait de certains patients migrants des dispositifs de soins doit aussi nous interroger sur cette question.
Une autre caractéristique humaine universelle est bien entendu le fait que tout homme a une culture et que c'est peut-être cela qui fonde son humanité et son universalité (Nathan, 1990)11. Travailler sur le particulier sans spéculer sur un universel, non connaissable d'emblée mais trop souvent inféré sans le détour du particulier, telle est une des approches de l'ethnopsychiatrie. L'universel devient alors un point asymptotique de la connaissance en sciences humaines.
* Technique
C'est sur ce principe méthodologique du complémentarisme que s'est d'abord construite la théorie de l'ethnopsychiatrie puis sa technique. La technique, elle aussi nécessairement complémentariste, est actuellement en construction. Cependant certains paramètres semblent maintenant bien établis (Moro, 1994)12 : la nécessité d'un groupe de thérapeutes, l'importance de la langue maternelle du patient et surtout celle du passage d'une langue à l'autre, la nécessité de partir des représentations culturelles du patients.
*PH, Service du Pr Ph. Mazet, CHU Avicenne, Bobigny
La plupart des enseignements d'anthropologie médicale accordent une place plus ou moins grande à la psychiatrie.
Certains lui consacrent une série d'enseignements ; d'autres, plus modestement, lui réservent un cours. Nous avons donc sélectionné ici les lieux d'enseignements dans lesquels la part de l'anthropologie psychiatrique, de la psychiatrie transculturelle ou de l'ethnopsychiatrie était prépondérante.
Pour une liste plus détaillées de l'ensemble des enseignements d'anthropologie médicale en France on se reportera avec profit à l'article de S. Mulhern (1997) Courses in medical anthropology : France. Anthropology & Medicine, 4:2, 211-217, ou au numéro spécial sur l'ethnopsychiatrie du Carnet psy, n°33, février 1998, coordonné par M.R. Moro
* Diplômes et formations Universitaires :
* Anthropologie et psychopathologie, CHU Pitié Salpètrière J.F. Allilaire & R. Rechtman (01 39 38 78 01)
* Psychiatrie transculturelle, CHU Bobigny (Unversité Paris XIII), Ph. Mazet & M.R. Moro
et Séminaire d'ethnopsychiatrie de Bobigny (Unversité Paris XIII), M.R. Moro (01 48 38 77 35)
* DESS de Psychologie Interculturelle, Université Paris V, sous la direction de H. Stork
et de Y. Govindama (01 40 51 98 98)
* Séminaires de formation doctorale en anthropologie
* Médecine et subjectivité Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, F. Zimmermann & R. Rechtman
* Enseignement d'ethnopsychanalyse du Centre Georges Devereux (Université Paris VIII) T. Nathan
* Citons également le cycle de formation de psychiatrie transculturelle de l'Université Mc Gill à Montréal,
dirigé par Laurence Kirmayer, et qui organise des sessions estivales.
J. GUYOTAT - Etudes cliniques d'anthropologie psychiatrique. 1 vol. Masson Ed. 1991
* La démarche anthropologique en psychiatrie permet de changer de perspective devant une situation clinique donnée puisque l'anthropologie appréhende l'homme dans toutes ses dimensions. Essentiellement comparative et différentielle, elle s'attache à saisir les différences entre les représentations du trouble mental, les théories étiologiques, les institutions destinées à le référer et le classer ou à repérer les invariants. Six grands thèmes ont été choisis pour illustrer cette démarche : Institution en psychiatrie, liens de filiation, référence puerpérale et procréation, événements de vie, maladies mentales ou non, suggestion et influence ou l'espace magique de la psychothérapie.
La démarche anthropolgique est décrite à partir d'observations cliniques détaillées, d'inspiration psychanalytique, permettant d'aborder des problèmes concrets, par exemple :
- Troubles du lien de filiation dans les psychoses, à partir de la conception juridique et anthropologique de la filiation.
- Soins du patient en dehors de l'hôpital, institutions des secteurs et politique de santé mentale.
- Dépressions et psychoses du post-partum et nouvelles représentations et techniques en biologie de la reproduction. (J.G.)
SWAIN G. (1994) Dialogue avec l'insensé précédé de GAUCHET M. A la recherche d'une autre histoire de la folie. Paris, Gallimard.
* Les travaux de Gladys Swain et de Marcel Gauchet présentent la naissance de la psychiatrie au début du XIX° siècle comme le révélateur, l'effet, mais aussi une source d'une "mutation anthropologique". Il y a "rupture avec l'idée d'une folie complète, retranchant l'insensé dans l'imprenable et dérisoire forteresse de son délire" (p. XXXI). Désormais, "le fou est fou, mais il est en même temps mon pareil... Les leçons de cette ressemblance, deux siècles bientôt après, nous avons à peine commencé à les tirer, même si elles ont déjà bouleversé notre rapport avec nous mêmes" (p. XXXV). D'ailleurs, cette "révolution des mentalités" est "un aspect particulier d'un phénomène beaucoup plus large, qui a touché le statut des infirmes de la communication en général. Le fou, certes, mais aussi l'aveugle, mais aussi le sourd muet, mais aussi, le dernier, et avec le plus de résistance, l'idiot" (p.111). Entre 1770 et 1840, ils cessent d'être "symboliquement réputés exclus de l'humain de par leur impuissance à la réciprocité" (p.112). Lorsque le mouvement critique et en particulier Michel Foucault décrivent cette période comme un renforcement de l'exclusion, ils sont pris dans une "machine infernale de la méconnaissance" qui les conduit à ne pas voir que notre société "qui a la phobie de l'exclusion est une société de l'inclusion--mais qui tend à s'ignorer telle" et l'est devenue davantage au début du XIX° siècle. (F.C.)
Les lecteurs de PLR ont été informés de l'enquête de l'INSEE « Handicaps, Incapacités, Dépendance » qui a pour objectif d'étudier les incapacités, leurs causes et leurs conséquences. C'est la première grande enquête française sur le sujet : elle va fournir les données de cadrage auxquelles pourront se référer les professionnels, les chercheurs, les décideurs et les intéressés.
Notre Fédération a été associée à sa mise au point. Des informations détaillées sont disponibles sur Psydoc-France.
La première partie en établissements va avoir lieu en octobre 1998. Chaque psychiatre traitant reste libre de prononcer des contre-indications pour motif médical mais peut sans hésiter faire bon accueil aux enquêteurs de l'INSEE.
Les questions posées sont pertinentes, adéquates et non excessives au regard de la finalité de l'enquête.
(F. Chapireau)
"Aide à la préparation de projets de
recherche en réseaux"
L'INSERM souhaite aider à la préparation de projets de recherche associant chercheurs et cliniciens au sein de réseaux constitués à leur propre initiative ou à l'initiative des comités d'interface. L'aide financière est destinéee à initier un projet de recherche susceptible d'être présenté ultérieuremement aux divers appels d'offres dans le domaine de la recherche médicale en santé. Placés sous la responsabilité d'un coordinateur scientifique, les projets doivent associer au moins trois équipes distinctes dont l'une est située obligatoirement dans le cadre de l'INSERM. Les projets doivent prévoir d'aborder les problematiques de façon transversale en traitant à la fois les problèmes fondamentaux et des aspects appliqués à la clinique et/ou à la santé. Les chercheurs et cliniciens intéressés sont encouragés à entrer en contact avec le comité d'interface correspondant à leur domaine.
* Les demandes seront évaluées à l'automne 1998 par l'intercommission 3.Renseignements scientifiques : Lise Dray : Tel. : 01 44 23 61 41 ; Fax : 01 44 23 61 49
* Demandes à adresser à : INSERM, Bureau des Contrats, Département de l'Evaluation et du financement de la recherche, 101 rue de Tolbiac 75654 Paris, Cedex 13 ; Tel : 01 44 23 63 16/24/36 ; Fax : 01 44 23 63 74
* Date limite de dépot des dossiers : 1er septembre 1998 - Retrait des formulaires à partir du : 15 mai 1998
Un appel du Comité d'Interface FFP/INSERM aux Psychiatres :
Êtes vous intéressé à faire de la Recherche ? Sur quel domaine ?
Réponse à adresser à Dr J.M. Thurin - e.mail : jmthurin@internet-medical.com et Dr L. Dray - e.mail : dray@tolbiac.inserm.fr
ou par courrier à Dr Thurin - Fédération Française de Psychiatrie - 9 rue Brantôme - 75003 - Paris
Directeur de la Publication :
Rédacteur en chef :
Rédacteurs en chef adjoints :
Comité de Rédaction
Secrétaire de rédaction et maquette M.Thurin
PLR électronique
dont la subvention permet l'édition de ce bulletin.
Quelques définitions en ethnopsychiatrie
Marie Rose Moro*
Notes
Appel d'Offres INSERM 1998
Remerciements
Pr G. Darcourt
Dr J-M Thurin
Dr M. Horassius, Pr Ph. Mazet
Drs F. Chapireau, A. Gauvain-Piquard,
J. Garrabé, J-P Klein,
C.Veil
Comité Technique
Drs M. Botbol, L. Fineltain,
M. Grohens, M. Robin,
J.M. et M. Thurin
A la Direction Générale de la Santé
Au Laboratoire Lilly qui assure le budget de sa diffusion aux psychiatres français.
A l'A.F.P., l'A.F.P.P, la S.F.P.E.A. et au C.N.U.P., pour leur soutien actif à la diffusion des abonnements.
Tirage 4000 exemplaires - ISSN : 1252-7695
Commission Paritaire n° 1199 G 75389
Imprimeur : MURAY-PRINT - 4, rue Louis Armand 92600 - ASNIERES