Conséquences des maltraitances sexuelles. Les reconnaître, les soigner, les prévenir

Conférence de consensus qui s'est tenue à Paris les 6 et 7 novembre 2003 organisée par

Fédération Française de Psychiatrie
selon la méthodologie de l’ANAES
avec le soutien de la Direction Générale de la Santé

Sociétés Partenaires : Sociétés Francophone de Médecine d'Urgence, INAVEM, Société Française de Pédiatrie, Collège National des Généralistes Enseignants



Quelles sont les données épidémiologiques concernant la maltraitance sexuelle et ses conséquences sur la santé ?

Andé CIAVALDINI*, Marie CHOQUET**

* Dr en Psychopathologie Clinique, Psychanalyste (SPP), PARI, Centre de traitements et de recherches psychanalytiques du CH de Saint-Égrève Grenoble. Université Grenoble 2.
** Epidémiologiste, Directeur de Recherche INSERM U 472, Villejuif

Résumé

Après avoir défini la spécificité des maltraitances sexuelles, le premier auteur expose les chiffres actuellement disponibles. Après avoir constaté l’augmentation des maltraitances sexuelles, il considère quelques cas particuliers des maltraitances sexuelles : celles entre mineurs en milieu scolaire, puis celles en milieu familial et enfin celles dans les institutions. L’auteur présente ensuite les données anamnéstiques recueillies en population adulte sur les violences sexuelles subies dans l’enfance. Ensuite il envisage l’ensemble des conséquences pour la santé de ces maltraitances. Conséquences à court, moyen et long terme : psychiques, somatiques et transgénérationnelle.
Cet aperçu des données disponibles est suivi d’une note méthodologique, évoquant les biais méthodologiques et les manques épidémiologiques.

Mots clés
Maltraitances, maltraitances sexuelles, violences sexuelles, épidémiologie, enfant.


PARTIE 1. LES MALTRAITANCES SEXUELLES DANS L’ENFANCE ET LEURS CONSEQUENCES

André CIAVALDINI

1 - Définition du champ d’étude : qu’est-ce qu’une « maltraitance sexuelle » ?
Les maltraitances

La maltraitance désigne généralement « tout acte accompli, ou à l’opposé non réalisé par des individus, des institutions ou la société dans son ensemble, et tout état qui découle de ces actes ou de leur absence et privent les enfants de leurs libertés ou de leurs droits et/ou entravent leur développement constituent par définition de mauvais traitements » (Gil, 1970). La maltraitance est devenu particulièrement objet d’étude en France depuis la création en 1990 de l’ODAS : Office Décentralisé de l’Action Sociale. En 1993 cette dernière définissait l’enfant maltraité « comme celui qui est victime de violences physiques, cruauté mentale, abus sexuels, négligence lourde ayant des conséquences graves sur son développement physique et psychologique ». Actuellement elle regroupe sous le terme d’ « enfants en danger », les enfants à risque et les « enfants maltraités ». Cette distinction est commandée par un soucis préventif certain. Il s’agit de différencier les enfants en risque de maltraitance de ceux effectivement maltraités. Distinction nécessaire pour faire jouer les divers niveaux de la prévention et en améliorer son efficacité.
Sous l’influence anglo-saxonne de la notion de « child abuse and neglect », la notion de maltraitance s’est étendue à tous les abus de pouvoir et de confiance à l’égard des enfants et recouvre différentes formes : physiques, sexuelles, psychologiques et institutionnelles.

LA MALTRAITANCE SEXUELLE

La maltraitance sexuelle est un des registres de la maltraitance. L’OMS, utilisant le terme d’exploitation sexuelle pour désigner la maltraitance sexuelle, en donne la définition suivante :
« L’exploitation sexuelle d’un enfant implique que celui-ci est victime d’un adulte ou d’une personne sensiblement plus âgée que lui aux fins de satisfaction sexuelle de celle-ci. Le délit peut prendre différentes formes : appels téléphoniques obscènes, outrage à la pudeur et voyeurisme, images pornographiques, rapports ou tentatives de rapports sexuels, viol, inceste ou prostitution des mineurs. » (cité par Gabel, 1992)
Cette exploitation s’appuie sur la notion d’abus et comprend un certain nombre d’attitudes :
- abus sans toucher : exhibitionnisme, voyeurisme, propos obscènes, utilisation de médias pornographiques en présence d’un enfant,...
- abus avec toucher sans violence : toucher sur les parties génitales ou les zones érogènes (caresses, masturbations, attouchements avec pénétration, les relations sexuelles complètes,...)
- abus avec violences : entraînant des lésions de gravité variable (viol, exploitation sexuelle à des fins de prostitution ou de pornographie,...
- attitudes de types malsaines : conduites sexualisées, climats à tonalité sexuelle, actes, gestes incitant l’enfant à avoir des conduites sexuelles avec un adulte.
Dans les maltraitances sexuelles (comme dans l’étude des maltraitances en générale) on distingue les mauvais traitements actifs des maltraitances passives

MODALITES DES MALTRAITANCES SEXUELLES (d’après Haesevoets, 2003) Maltraitances passives
- Absence de protection, de règles, de lois, d’écoute, d’éducation et d’informations relatives à la sexualité
- promiscuité sexuelle

Mauvais traitements actifs
- Attouchements divers
- Manipulations génitales
- Abus, inceste, viol
- Exploitation
- Prostitution, pornographie

Dans les classifications des maltraitances sexuelles la très grande majorité des chercheurs différencient les maltraitances intra-familiales de celles exercées par un étranger à la famille (Hayez, De Becker, 1997). Il semble que ce ne soit pas le choix de l’ODAS, lorsqu’il évoque l’enfant en danger. Cette réserve semble justifiée, dans la mesure où il est question pour lui de mettre l’accent sur la maltraitance dans sa réalité clinique spécifique. Pour cela il n’a pas été pris en compte le statut de l’agresseur (par exemple, adulte ou enfant, ayant ou non autorité sur l’enfant) ou la notion d’intentionnalité.
Pour l’étude qui suivra ces distinctions seront prises en compte. Une distinction sera faite entre abus sexuel intra-familial, définissant la situation d’inceste et celle d’abus sexuel effectué par un étranger à la famille

2 – Les chiffres de la maltraitance

Deux types de données sont à disposition : les études anamnèstiques et rétrospectives qui évaluent les taux d'agressions sexuelles dans l'enfance (ce sont les études effectuées sur une population adolescente ou adulte) et les données actuelles prenant en compte, pendant un temps déterminé les agressions sexuelles sur les enfants dans une population spécifiée. Ces dernières permettent aussi de dégager des taux d'incidence.

MALTRAITANCE SEXUELLE SUR L'ENFANT

En France, les sources fiables sont celles de l'ODAS (Observatoire National de l'Enfance en Danger) et du Service National d'Accueil Téléphonique pour l'Enfance Maltraitée (SNATEM). Ce sont les seules à offrir un panorama national du problème. Les signalements pour abus sexuels sur enfants après avoir connus une régression faible (1995=5500, 1999=4800, soit une baisse d'un peu plus de 13%) connaissent actuellement de nouveau une progression (2000 = 5500 ; 2001 = 5900)

Évolution des situations d’abus sexuels entre 1995 et 2001 (source ODAS 2002)


1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001
Abus sexuels 5 500 6 500 6 800 5 000 4 800 5 500 5 900
Total des enfants maltraités 20 000 21 000 21 000 19 000 18 500 18 300 18 000


Les abus sexuels sur enfants représentent aujourd’hui un tiers des situations de maltraitances, alors qu’il y a 8 ans elle n’en représentait qu’un peu plus d’un quart ( 27,5%).


C’est la seule maltraitance, comparée aux autres, qui ne connaît pas de véritable baisse dans le temps. Bien au contraire, alors que jusqu’en 1998 la tendance est à la baisse pour l’ensemble des maltraitances infantiles, depuis 1999 on assiste à une inversion de cette tendance pour les maltraitances sexuelles. L’abus sexuel, depuis cette date, devient la seule maltraitance qui croit.
La SNATEM, sur la base de son "numéro vert 119", enregistre le même constat : après une baisse sensible des appels pour abus sexuels (30% en 1997, 17% en 1999) de nouveau on assiste à une légère croissance des appels (20,1% en 2001), mais avec toujours la même répartition des situations d'abus:

Répartition des mauvais traitements sexuels (source SNATEM)

1998 1999 2000 2001
Climat équivoque 26% 27% 23,6 25,4%
Attouchement 49% 48% 50,3% 49,6%
Viol 25% 25% 26,1% 25%
Total 100% 100% 100% 100%
Les violences sexuelles concernent plus souvent les enfants de moins de 9 ans (45%), avec une proportion plus marqués pour les 3 – 6 ans qui sont désignés dans 22% des cas. La proportion de ces derniers est elle aussi en augmentation 22% en 2000, 23,4% en 2001.
Les très jeunes enfants et les bébés sont aussi des victimes potentielles. La consultation pédiatrique de Lille remarque qu'en 1980, sur les 800 admissions de nourrissons aucune agression sexuelle n'était diagnostiquée et en 1988, les premiers diagnostics d'agressions sexuelles étaient posés pour quatre bébés, depuis, ce chiffre ne cesse de croître (Hochart et Roussel, 1997).
Enfin il ne faut pas oublier qu'un certain nombre, très faible au demeurant, d'agressions sexuelles d'enfants se termine par un infanticide (Hargrave et Warner, 1992).

MALTRAITANCE SEXUELLE ENTRE MINEURS EN MILIEU SCOLAIRE

La violence sexuelle en milieu scolaire par des auteurs mineurs semble connaître actuellement une progression régulière. L’étude de la SNATEM indique que, sur la base de leurs appels, elle enregistre les modalités suivantes de violences sexuelles en fonction de l’âge des enfants (SNATEM, 2001).

Maternelle Primaire Collège Lycée
Climat équivoque 3% 6% 1,5% 0%
Attouchements 19,4% 23,9% 14,9% 3%
Viols 11,90% 7,5% 7,5% 1,5%

MALTRAITANCE SEXUELLE EN MILIEU FAMILIAL : L'INCESTE

L'inceste n'étant pas cité par le Code Pénal, il est difficile statistiquement d'en différencier les chiffres des autres agressions, quoique la mention "par ascendant" puisse donner quelques indications. L'étude nationale américaine de prévalence d'agressions sexuelles intra-familiales sur les enfants entre 0 et 17 ans, évalue celle-ci à un taux 1,9% sur un an et de 5,7% sur l'ensemble (Finkelhor et col., 1997). L'enquête finlandaise rapporte des taux pour les filles, de 2% avec le père et de 3,7% avec un beau-père (Sariola et Uutela, 1996)
En France, les cas d'inceste constituent 20% des procès d'Assises, ils représentent 75% des situations d'agressions sexuelles sur enfants (Source SNATEM, 1999) et plus de 57% des viols sur mineurs (Source CFCV).
L'étude canadienne de Fisher montre qu'en cas d'agression intra-familiale, la première agression se déroule à un âge plus précoce que dans le cas d'une agression extra-familiale, la durée est plus longue avec un fort niveau de traumatisme. Cependant on y enregistre moins d'usage de force physique mais plus d'injonction fermes à ne pas révéler l'agression (Fisher et Mc Donald, 1998).
Enfin, il est nécessaire d'évoquer les "agressions sexuelles muettes", celles invisibles induites par un climat familial "incestuel" et qui sont plus particulièrement le fait des mères. Il s'agit le plus fréquemment de vérifications, pouvant prendre la forme d'exploration, sous couvert d'hygiène des orifices anaux, génitaux; de très grandes proximité physique; de pénétration régulières des espaces d'intimité; d'exhibitionnisme parental; de confidences érotiques mais aussi de dévalorisation morales ou physiques de l'enfant (Manciaux et col., 1997).

LE CAS PARTICULIER DES AGRESSIONS SEXUELLES EN INSTITUTION

L'institution est un lieu d'agressions sexuelles, particulièrement pour les enfants présentant un handicap mental. Sur 18 viols sur mineurs enregistrés en l'an 2000, 10 victimes étaient des filles et 4 des garçons, soit respectivement 55,5% et 22% de l'ensemble. En dehors des viols ce sont plus fréquemment les garçons qui sont les victimes (52%) (DGAS, 2000). Il faut cependant noter un léger repli de ce phénomène (DGAS, 2000).

MALTRAITANCES SEXUELLES PENDANT L'ENFANCE

L'ensemble de ces études définissent, en Europe, pour les filles des taux qui s'étagent de 6,8% (Pedersen, 1995 ) à 33,8% (Bouvier, Halperin et al., 1999) et pour les garçons de 4,6% (Jaspard et al., 2000) à 10,9% (Bouvier et al., 1999). Les études nord-américaines et canadiennes corroborent peu ou prou ces chiffres, avec souvent des taux moyens plus élevés que les nôtres. Pour exemple, celle de Mac Millan rapporte des taux moyens de 12,8% pour les filles et de 4,3% pour les garçons (Mac Millan et al. 1997).
Le taux d'incidence calculé, en population générale, sur un an semble être compris, si l'on considère les cas avérés et suspectés, entre 1 et 1,2 enfant agressé pour mille. Pour exemple, l'étude d'incidence sur l'Irlande du Nord indique un taux de 1,16 / 1 000 (Mac Kenzie et al., 1993)
Les enquêtes en milieu étudiant présentent des chiffres identiques. L'étude parisienne montre que 8% des étudiantes et 7% des étudiants ont connu une situation d'agression sexuelle dans l’enfance . Ces chiffres sont plus élevés dans l'enquête grenobloise (9% des garçons et 11% des filles) . Ces résultats sont corroborés par la récente enquête suédoise, représentative de la population étudiante et des jeunes de 17 ans. Avant 18 ans, 11,2% des jeunes femmes étudiantes et 3,1% des garçons ont connu une situation d'agression sexuelle. Si l'on exclue les situations d'atteintes exhibitionnistes, les taux baissent respectivement à 7,2% pour les filles et 2,3% pour les garçons. L'âge moyen de l'atteinte étant de 9,1 ans pour les filles et 9 ans pour les garçons (Edgardh et Ormstad, 2000).

Répartition par sexe des viols sur mineur (chiffres CFCV)

s

1991 1995 1996 1997 1998

F --- M F --- M F --- M F --- M F --- M
Viols sur mineur 599 --- 36 1127 --- 67 980 --- 58 1019 --- 90 783 --- 82
Intra-familial 358 --- 21 805 609 --- 30 606 --- 35 452 --- 29
Extra-familial 241 --- 15 322 --- 67 371 --- 28 413 --- 55 331 --- 53

Pour la France, l'enquête nationale sur les violences envers les femmes donne, avant 18 ans, un taux de 6% de femmes ayant subi une agression sexuelle (hors viol) et 3,7% ayant été victime d'un viol ou d'une tentative de viol avant le même âge. Ainsi, 9,7% des femmes françaises avant 18 ans connaissent un abus sexuel de quelque nature qu'il soit. Quant aux hommes, ils semblent que 4,6% de leur ensemble aient connus des abus de ce type avant l'âge de 18 ans (Bouhet et al., 1992; HCSP, 1997).

DESCRIPTION GENERALE DES ABUS SEXUELS AVEC CONTACT

Quand l’attouchement est fait par l’abuseur, les filles, cinq fois plus souvent que les garçons, sont victimes de ces attouchements. En revanche quand il y a un attouchement sur l’abuseur, ce sont encore les filles qui en sont le plus victime mais dans un rapport de un à deux. Lorsqu’il y a viol, ce seront encore les filles les principales victimes dans une proportion qui varie toujours de un à cinq (Gabel,1999).

LES FACTEURS DE RISQUES DES MALTRAITANCES SEXUELLES INTRA-FAMILIALES SUR ENFANTS

Par "facteurs de risques" j'entends les situations personnelles ou sociales ou les éléments d'histoires individuelles qui peuvent déclencher ou activer ou encore susciter l'agression sexuelle.
Lorsqu'il s'agit de maltraitances sexuelles intra-familiales deux grands indicateurs sont identifiés : les difficultés relationnelles familiales (73%) ainsi que les situations de séparation ou de divorce (43%). Les indicateurs secondaires majorant la situation à risque étant la précarité (7%) et l'alcoolisme (11%) (SNATEM, 1999). Un autre risque identifié est l'âge de la mère. Plus une jeune fille devient mère jeune et ce au-dessous de 18 ans, plus le risque d'agression sexuelle augmente. (Stier et col., 1993) Il semble cependant important de préciser que le développement du dépistage précoce des situations d'abus, la vigilance des équipes de soins et des travailleurs sociaux occupe une grande place dans cette augmentation (Leventhal et col., 1993). Plus classiquement on retrouve aussi parmi les facteurs de risque une mère présentant une pathologie mentale. La maltraitance physique doit aussi fonctionner comme un indicateur pertinent d'une potentialité d'agression sexuelle dans la famille (Fleming et col., 1997). Un dernier facteur de risque ne doit pas être négligé, c'est lorsque un des parents (ou les deux) fut lui même victime d'une agression sexuelle dans l'enfance.


3 - Les conséquences des maltraitances sexuelles

On se heurte dans le domaine des conséquences des agressions sexuelles a une profusion de données. Ce qu'il convient de noter d'emblée c'est le polymorphisme des tableaux où l'on retrouve, dans l'anamnèse, soit des agressions sexuelles plus ou moins récentes, soit des plus anciennes, dans l'enfance. La question méthodologique que pose ce constat est de savoir si l'agression sexuelle récente ou ancienne présente un lien étiologique avec la pathologie constatée. Si un lien est avéré par corrélation statistique, le sens et la nature du lien n’en sont pas définis. En effet, ce n'est pas parce que l'on retrouve une agression sexuelle dans le passé d'un patient, qu'un lien étiologique (ou causale) existera entre celle-ci et la pathologie étudiée. Il conviendra donc d'être d'une grande prudence quant au maniement des données qui vont suivre, et ce d’autant plus que les chercheurs ne sont pas à l’abri (les chiffres étant laissé à l’interprétation de ceux qui les génèrent) des effets d’excitation du champ social, ce qui pourra influer sur leur lecture.

L'AGRESSION SEXUELLE ACTUELLE : DES SYMPTOMES TRAUMATIQUES IMMEDIATS : LE PTSD

La première des conséquences de la maltraitance sexuelle extra-familiale, lorsqu’elle se présente sous une modalité d’agression sexuelle, ce qui se rencontre aussi dans les abus sexuels intra-familiaux mais de manière moins marquée (Haesevoets, 2003) est d'ordre psychique s'apparentant aux symptômes du Post-Traumatic Stress Disorder (APA, 1994), le PTSD (Syndrome de Stress Post-Traumatique ou encore Syndrome Secondaire à un Stress Traumatique, traduction préférée par J.-M. Darves-Bornoz, 1996) .
Après une agression sexuelle, on peut isoler deux autres syndromes, le syndrome traumatique dissociatif et phobique incluant des troubles somatoformes, des phobies spécifiques (agoraphobie) et des troubles dissociatifs ainsi que le syndrome traumatique de type limite. Chez l’enfant, ce syndrome va se manifester par les symptômes suivants : souvenirs répétitifs avec éléments pseudo-hallucinatoires, comportements répétitifs, peurs associées (phobies), changement d’attitude envers autrui, évitements de situations en lien avec l’événement, failles dans la perception de la réalité, distorsion de la temporalité et des repères spatiaux et enfin compulsion des idées et des questions (Terr, 1990 ). Bien entendu tous les enfants abusés ne présentent pas l’ensemble de ce tableau, mais seulement quelques-uns ( Deblinger et al., 1989).
Les effets du PTSD interfèrent parfois avec le comportement scolaire qui perd de son efficience. Même si immédiatement aucun effet n’est enregistré, à long terme les capacités d’apprentissage des enfants est atteinte.

L'AGRESSION SEXUELLE DANS L'ENFANCE ENGENDRE DES EFFETS PSYCHIQUES A LONG TERME

Lorsqu'il y a eu une agression sexuelle dans l'enfance (en dessous de 16 ans), les symptômes prévalents pouvant apparaître au décours de la vie adulte seront principalement une forte anxiété et un risque dépressif important, auxquels s'adjoindront des difficultés d'ordre sexuelles et domestiques. Ces symptômes seront d'autant plus prégnants que l'agression sexuelle aura été violente (particulièrement en cas de viol) et prolongée (Cheasty et col., 1998; Lange et col., 1999; Molnar et col., 2001). La victimisation sexuelle dans l'enfance potentialise, chez les adultes masculins et féminins, à la suite d'un trauma de vie, les risques d'apparition des symptômes post-traumatiques. Par ailleurs, si ces agressions sexuelles subies dans l'enfance ne sont pas prises en compte et traités suffisamment tôt, elles fournissent un terreau ultérieur, tout au long de la vie de l'adulte, où pourront venir éclore des troubles psychiques, des pathologie psychiatriques et diverses difficultés d'intégration sociales (Roesler et Mc Kenzie, 1994; Nurcombe, 2000). Un autre symptôme, d'apparence plus banal, ne doit pas être sous estimé dans la population féminine, sur le plan de la souffrance psychique et des demandes de consultations spécialisées, ce sont les "difficultés affectives" de tous ordres (Hill et col., 2000).

Les conduites addictives
L'agression sexuelle dans l'enfance est souvent liée au risque de conduites addictives dans le devenir de l'adulte. Dans la population générale féminine suédoise, le taux de prévalence des maltraitances sexuelles dans la dépendance alcoolique est de 9,8% (Spak et col., 1998). Lorsque l'on considère une population d'alcoolique dépendant, on retrouve dans leur anamnèse une agression sexuelle dans l'enfance, avant l'âge de 16 ans, chez 54% des femmes et 24% des hommes (Moncrieff et col., 1996) Les taux sont à peu près identiques pour la consommation de drogue et les vécus incestueux, puisqu'on retrouve chez 29% d'hommes et 55% de femmes toxicomanes des antécédents incestueux (Glover et col., 1996) .
Les troubles du comportement alimentaire
La sphère des comportements alimentaires est particulièrement sensible aux maltraitances sexuelles dans l'enfance. Une récente recension des études sur le sujet, indique que l'on retrouve en moyenne une histoire d'agression sexuelle dans l'enfance dans plus de la moitié des cas de troubles du comportement alimentaire (Budniok, 2001) Dans les cas d'anorexie nerveuse, ce type d'agressioin est retrouvée au moins une fois sur quatre (de Groot et col., 1995). Quant à la boulimie nerveuse l'étude nationale sur les femmes aux USA montre que l'agression sexuelle contribue à son développement, ou pour le moins à son maintient, dans 26,6% (Dansky et col., 1997) .

L'auto mutilation
De manière assez fréquente, on rencontre des conduites auto-mutilatrices chez les femmes agressées dans leur enfance. Plus ces agressions auront été violentes et prolongées plus les actes auto-mutilateurs seront sévères (Roman et col, 1995).

La prise de risque non volontaire
Une étude récente du Centre Information Documentation Jeunesse menée auprès de 1500 jeunes indique que : les filles victimes d’abus sexuels dans l’enfance présenteraient plus de risque d’accident de la voie publique. Trois fois plus si l’abus a connu une reconnaissance, huit fois plus s’il n’a pas été révélé (Selly, Choquet, 2003).

La désafférentation sociale
Dans la population féminine présentant un trouble mental, plus que dans celle masculine, l'agression sexuelle dans l'enfance, lorsqu'elle est liée à des maltraitances physiques, constitue l'un des précurseurs de désafférentation sociale conduisant à la grande précarité (SDF) (Davies-Netzley et col., 1996)

Les conduites infractantes et infractantes sexuelles
Parmi les maltraitances dans l'enfance, ce sont les agressions sexuelles qui semblent être les inducteurs les plus puissants de conduites infractantes dans l'âge adulte. L'enfant agressé sexuellement présentera plus de risques de fugues à l'adolescence et de prostitution. Parvenu à l'âge adulte il sera plus fréquemment l'auteur de délits et de crimes sexuels sur les adultes et sur les enfants et ce d'autant plus que l'agression fut précoce et grave (Widom et Ames, 1994; Ciavaldini, 1999, Marshall et col., 2000)

Les effets transgénérationnels
Les "agresseurs-agressés" sont des situations fréquentes, les études avancent des taux peu concordants, si ce n'est qu'ils sont élevés et jamais inférieur à 35% avant 10 ans (Ciavaldini, 2000) et allant à presque 70% avant 14 ans (Shaw et col., 1993), mais les biais sont importants et rendent malaisés toutes comparaisons. Néanmoins, cela signe le processus de répétition du traumatisme. Répétition qui franchit le plus souvent la barrière des générations et cela d'autant plus que le sujet qui l'a supporté n'aura pas pu trouver une reconnaissance de la violence qu'il a subi. L'écoute des familles, mais aussi des sujets individuels, montre souvent un enchaînement des agressions d'une génération à l'autre avec des modus operandi pouvant croître dans le temps : à une génération le climat est incestuel à celle d'après le recours à l'acte sera pédophile.

L'IMPACT SOMATIQUE DES AGRESSIONS SEXUELLES

La communauté scientifique est non seulement d'accord sur le fait qu'une situation d'agression sexuelle dans l'enfance potentialisera l'impact des traumas futurs, mais les diverses études admettent que seule, ou liée à une situation identique dans l'âge adulte, elle peut générer de surcroît un certain nombre de troubles somatoformes. Parmi ceux-ci on enregistre d'abord ceux accompagnant les symptômes de panique (troubles musculaires, maux de tête, "palpitations" cardiaques), puis viennent des troubles de la sphère urinaire et génitale (dont les douleurs pelviennes pendant les rapports sexuels), certaines maladies de la peau (dont certaines éruptions sans cause identifiée) mais aussi des maladies de la sphère respiratoire (rhinite chronique) (Leserman et col., 1998). Par ailleurs, on retrouve un taux de prévalence d'agressions sexuelles de 14% dans les maladies digestives (Delvaux et col., 1997). Enfin, chez les diabétiques, des crises acédocétosiques répétées par défaut de compliance, peuvent se trouver liées à des situations d'agression sexuelle actuelles ou passées (Brink, 1999) .

LES TROUBLES DU COMPORTEMENT SEXUEL

Lorsqu'une femme présente des difficultés à parvenir à l'orgasme, une baisse d'intérêt pour la sexualité, une lubrification insuffisante ou/et une dyspareunie, on retrouve dans 40% des cas une agression sexuelle au cours de sa vie (Nusbaum et col., 2000)

MST, HIV ET PRISES DE RISQUES SEXUELS

L'agression sexuelle, à quelque moment de l'existence qu'elle se déroule, présente les risques liés à l'acte sexuel lui-même, particulièrement en ce qui concerne les maladies sexuellement transmissibles et le HIV, et cela d'autant plus qu'il y aura eu pénétration. Cependant, l'ensemble des études sont difficile à utiliser tant il est difficile pour elles de parvenir à une réelle quantification du risque (Holmes, 1999). Tout au plus peut on parvenir àune quantification relative du phénomène, dans ce cas l'augmentation des agressions sexuelles sur un enfant fait croître proportionnellement un risque d'apparition d'une MST à l'âge adulte. Ce risque étant plus grand chez les garçons que chez les filles (Hillis et col., 2000) .
Dans le cas du HIV, le tableau est identique, ce sont plus les garçons que les filles agressés sexuellement qui présente le plus de risques de développer ultérieurement le HIV. Là encore les prises de risques au décours de la vie sexuelle sont malheureusement en faveur des sujets masculins, qu'ils soient homo, hétéro ou bi-sexuels (Bensley et col., 2000; Lenderking et col., 1997) /


PARTIE 2. REGARD EPIDEMIOLOGIQUE SUR LES DIFFICULTES LIEES A L’ETUDE DE LA MALTRAITANCE.

Marie CHOQUET

L’épidémiologie vise à

(a) Mesurer l’ampleur des phénomènes de santé (prévalence, incidence) et leur distribution dans une population, selon les principaux facteurs socio-démographiques que sont l’âge, le sexe, le niveau d’éducation, le lieu d’habitat... (épidémiologie descriptive). La mesure d’un phénomène de santé suppose, au préalable, un accord sur la définition et la validation de l’instrument de mesure ;
(b) Mettre en évidence et hiérarchiser les facteurs de risque (ou facteurs de protection) liés aux phénomènes de santé, et ce, à partir d’une comparaison entre population concernée (= cas) et population non concernée (= témoins) (épidémiologie explicative ou étiologique) ;
(c) Mesurer l’effet à court, moyen et long terme des actions de prévention (primaires, secondaires, tertiaires) ou de soins (traitement médicamenteux, psychologique ou social) et ce, en comparant une population « traitée » (=cas) à une population « non traitée ».(=témoins) (épidémiologie évaluative)

A. L’épidémiologie descriptive

Comme les définitions et les circuits de déclaration fondent la fiabilité et la validité des données (et donc des analyses épidémiologiques qui en découlent, comme les mesures de la prévalence, de l’incidence et des facteurs associés), une analyse critique s’impose.

DEFINIR LE CHAMP D’ETUDES OU « QU’EST CE QU’UNE MALTRAITANCE » ?

La « maltraitance » est un concept particulièrement difficile à définir de façon pragmatique, et donc consensuelle et mesurable. En effet,
- Les actes inclus dans la « maltraitance » peuvent être variés, au regard des définitions peu pragmatiques (voir, par exemple, la définition de Gil, 1970). Mais il est difficile de constituer une seule liste exhaustive d’actes précis, reconnue comme « mesurable » au niveau international, et permanente, tant les situations peuvent être multiples et interprétées différemment dans le temps et l’espace. S’il existe un consensus sur les actes de maltraitance les plus flagrants (qui sont aussi les moins fréquents, comme le viol par exemple), il y a plus de diversité d’interprétation sur les actes de maltraitance moins factuels et plus patents dont on peut raisonnablement penser qu’ils sont aussi assez fréquents (comme l’absence d’écoute ou d’éducation). On peut donc faire l’hypothèse que la grande variabilité des prévalences observées est le fait des actes inclus, plutôt que d’uen réelle différence.
- Certaines définitions, qui devraient permettre de juger l’acte au moment des faits, incluent déjà l’effet de l’acte (« priver la personne de ses droits ou entraver son évolution »). S’il y a consensus sur les actes graves dont l’issue est incontestable (par exemple, privation de nourriture), il n’en est pas de même d’autres actes pour lesquels les séquelles à court ou long terme son moins connus. `Dans ce sens il peut y avoir sur- ou sous-estimation du risque. Il en est ainsi. des « micro-maltraitances » à répétition (par exemple, traiter quotidiennement un enfant d’incapable), en référence à ce que E. Debarbieux appèle les « microviolences », rarement reconnues comme des maltraitances et qui peuvent pourtant avoir des effets à terme aussi néfastes que les maltraitances graves
- La maltraitance est à situer dans son contexte socioculturel, car le seuil tolérance (de la part de la victime et de l’agresseur, comme celui qui le déclare ou qui reçoit la déclaration) peut varier dans le temps, et selon les cultures. Il en est ainsi des « maltraitances passives » comme l’absence d’informations relatives à la sexualité » qui ne sont pas considérées comme des maltraitances dans tous les pays ou tous les milieux culturels. Par ailleurs, dans une même culture, la sensibilisé à certains types de maltraitance qu’à d’autres varie dans le temps, ce qui peut accroître (ou diminuer) artificiellement les statistiques officielles.

MESURER DE LA MALTRAITANCE : COMMENT OPTIMISER LA DECLARATION ?

La déclaration (ou signalement) de la maltraitance est aussi sujette à discussion.
La source d’information.
- Soit la déclaration provient du sujet lui-même et peut être active (le sujet va appeler au secours) ou passive (le sujet va répondre à des questions qu’on lui pose). S’il est raisonnablement d’admettre que les victimes sous-estiment rarement les violences subies, il est probable que bon nombre d’entre eux ne portent jamais plainte par méconnaissance des structures ou des points d’écoute, par incapacité à se montrer comme victime, certaines personnes ont plus de difficultés à déclarer une maltraitance que d’autres. Quant à répondre à des questions, tout dépendra des conditions de passation, la réponse à un questionnaire fermée étant considérée comme plus confidentielle, et donc plus fiable, que la réponse ouverte ou en en face-à-face. Par ailleurs, il ne s’agit pas de confondre le nombre de victimes au nombre de déclarations, car, sans vérification d’identité, il y a risque de « doublons ». Chaque individu ayant appelé plusieurs fois va peser proportionnellement plus dans les mesures de prévalence, mais aussi dans la caractérisation (socio-démographique ou autre) des victimes.
- Soit la déclaration provient des professionnels (acteurs sociaux, éducatifs, médicaux ou paramédicaux, judiciaire), dont la formation est disparate en matière d’identification de la maltraitance. Il est alors hautement probable que l’identification (ou non) de la maltraitance est dépendante de la formation initiale et :ou continue. Les victimes de milieu favorisé sont aussi moins signalées, car les maltraitances n’y sont pas systématiquement recherchées. De tous ces facteurs découle une tendance à la mésestimation du nombre de victimes. Le fait de se baser sur la déclaration de professionnels n’évite pas le contrôle de « doublons » (plusieurs professionnels pouvant signaler la même victime).
L’évolution temporelle de la déclaration. La déclaration peut varier dans le temps, et, à certaines périodes est plus facile qu’à d’autres. Ainsi, l’augmentation (ou la diminution) des signalements (ou de certains types de signalements) ne signifie pas nécessairement l’augmentation (ou la diminution) des actes de maltraitances (ou de certains types de maltraitance). Il peut s’agir seulement d’une meilleure (ou une plus mauvaise) reconnaissance des faits (par exemple, augmentation ou diminution de la vigilance face au phénomène).
La référence temporelle. La question peut concerner la maltraitance durant la vie, durant l’année, durant le mois ou tout autre référence temporelle. Il est clair que les statistiques officielles concernent surtout les maltraitances récentes (donc annuelles quand les statistiques sont publiées annuellement), alors que dans les enquêtes « ad hoc » il peut s’agir de données « vie ».

B. Epidémiologie analytique

La majorité des études sur les facteurs de risque sont basées sur des enquêtes hospitalières, sociales ou judiciaires, la population « cas » étant alors constituée des victimes institutionnellement prises en charge, dont on suppose qu’il s’agit de personnes les plus atteintes ou les plus fragiles socialement...Ce qui peut introduire un biais d’interprétation dans l’étude des facteurs de risque. Il convient donc de multiplier les études en population générale, qui, en France, font cruellement défaut (l’enquête Enveff ne concerne que les femmes adultes, l’enquête Choquet & Ledoux que les adolescents scolarisés). Par ailleurs, on ne dispose en France d’aucune enquête de suivie sur des victimes non prises en charge.
La majorité des enquêtes se focalisent sur des facteurs de psychiatriques ou sociaux graves. Si cette analyse est bien sûr indispensable, il serait intéressant de mieux rendre compte des symptômes subcliniques et des symptômes psychosociaux (vie quotidienne, loisirs, intégration dans le groupe de pairs, comportement scolaire.. ;) et de l’évolution chronologique des troubles, et ce dns une perspective d’une identification précoce des victimes à risque (et donc de leur prise en charge).

C. Epidémiologie évaluative

Les actions de prévention sont, en principe, basées sur une bonne connaissance de la fréquence des phénomènes et des facteurs de risque. Mais pour bien connaître un phénomène, faut-il poser des questions aux personnes et là on se heurte souvent à des réticences de la part des adultes responsables, en particulier quand il s’agit d’enquête en population générale de jeunes mineurs. En parler dans un questionnaire standardisé serait alors selon eux une façon de « légitimer » l’acte de violence, de raviver des situations douloureuses ou d’augmenter le risque de fausses déclarations. Une réflexion s’impose donc sur le risque induit par une enquête sur les maltraitances en population de jeunes mineurs.
La majorité des actions entreprises sont des séances d’information. On peut penser que, comme dans d’autres domaines de prévention primaire (par exemple la consommation de substances psychoactives) la seule information ne permet pas d’être efficace.


Conclusions des deux experts

- Les différences de prévalences observées entre les études sont probablement plus le fait des différences de définitions, de source d’information et de mode de recueil que de réelles différences. Une analyse critique méthodologique (questions posées, mode de recueil, source d’information) est donc nécessaire avant toute comparaison de prévalence (ou incidence). Une étude de validation s’impose donc et devrait faire l’objet d’une enquête dans plusieurs zones géographiques circonscrites. La confrontation entre les réponses individuelles (enquête en population) et les statistiques officielles (ODAS, SNATEM) permettrait alors d’avoir une meilleure estimation des types de biais (biais de fonctionnement, biais de recueil etc ) introduits et des facteurs (sociaux culturels, personnels) associés à ces biais.
- Les conséquences des maltraitances sexuelles à courte, moyenne, longue et très longue échéance touchent de nombreuses sphères tant psychiques que somatiques qui génèrent, pour l’avenir du sujet, des altérations importantes de "qualité de vie". Même si cet aspect n’a pas été suffisamment exploré (en particulier parmi les victimes qui ne portent pas plainte), il est claire qu’il existe un coût communautaire particulièrement important en terme de santé publique. Coût difficilement chiffrable, compte tenu de la multiplicité des séquelles, mais on sait que plus l'agression sexuelle aura été précoce, longue et violente, plus les visites chez le médecin seront fréquentes sans forcément que la cause en soit révélée. L'accent devra donc être mis sur la possibilité d'offrir au consultant un espace susceptible d'accueillir sa révélation et donc de l'aider à le faire. Là encore il conviendrait que les praticiens soient mieux préparés à utiliser des outils leur permettant de faciliter la parole sur de tels actes.
- Cependant, en ce qui concerne l'impact somatique, la revue des études montre de nombreuses carences dans son évaluation, surtout parce que les études cliniques ne sont que rarement comparatives (questions différentes, manque de groupe témoin..). Reste la question du lien étiologique. La maltraitance est-elle génératrice de la pathologie, facilitatatrice, ou d'une relative innocuité? La nécessité apparaît donc de mener des études permettant de distinguer l'amplitude de cet impact afin de pouvoir aussi en évaluer le coût, en terme de santé publique.

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Dernière mise à jour : dimanche 30 novembre 2003

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