Pierre J. Neveu
Neurobiologie Intégrative, INSERM U394, Institut François Magendie, Bordeaux
Le stress se définit comme la réponse globale d’un individu aux demandes de son environnement. L’atteinte du système immunitaire a d’emblée été intégrée à la définition donnée par Selye en 1936. Le critère d’atrophie thymique a été retenu comme l’un des éléments de la triade symptomatique, au même titre que les érosions gastriques et l’hypertrophie surrénalienne.
Il est important de mesurer à quel point le concept de stress a évolué depuis ses origines : au principe d’une « réponse non spécifique de l’organisme », appuyé par son corrélat biologique, l’activation de l’axe corticotrope, s’est progressivement substituée la notion de « phénomène psycho-biologique complexe ». Ce terme désigne un ensemble de changements non spécifiques, étroitement dépendants des conditions de la stimulation (nature, durée, facteurs psychologiques associés) , et des particularités de l’individu auquel ils s’adressent (structure neuropsychologique innée ou acquise au fil de son histoire personnelle). De surcroît, le stress n’a pas la même valeur pour chaque étape de l’existence. Chez l’adulte, le stress est une réponse calée dans le temps, dictée par les lois de l’adaptation qui conduiront, selon les besoins, à la rupture transitoire et/ou au rétablissement de son équilibre. Ceci n’exclut pas que les répercussions du stress chez l’adulte aient, en fonction de son âge et de ses expériences passées, une intensité et une durée variables. En revanche, chez le jeune encore immature, le stress aura une signification très différente dans la mesure où il sera susceptible de modeler de manière définitive les caractéristiques psycho-biologiques de l’individu. On peut donc présumer que ces différents facteurs qui entrent en jeu dans la définition du stress interviendront aussi dans la réponse du système immunitaire. Le système immunitaire est informé, par l’intermédiaire des systèmes nerveux autonome et neuroendocrinien, de stimuli cognitifs, émotifs et physiques normalement intégrés par le cerveau. En retour, le cerveau reçoit des messages immunitaires par l’intermédiaire de neuropeptides hormonaux et de cytokines. La mise en jeu de cette boucle complète de communication entre le cerveau et le système immunitaire n’est probablement pas mise en jeu systématiquement et dépend de l’intensité et de la durée des stimuli. De plus, l’ensemble des données moléculaires concernant les relations cerveau-immunité soulèvent néanmoins deux questions fondamentales : quel sont le rôle physiologique et l’importance relative des différentes molécules pouvant intervenir dans la communication cerveau-immunité ? et à quel niveau, local ou intersystémique ces molécules sont-elles susceptibles d’être actives ?
Les conséquences pathologiques du stress peuvent résulter d’altérations immunitaires. Le stress, via l’induction d’ un « shift Th1-Th2 », aurait des effets délétères, mais parfois bénéfiques, dans l’évolution des maladies infectieuses, autoimmunes, inflammatoires et cancéreuses. Le stress, par ses activités sur les systèmes nerveux sympathique et neuroendocrinien (hypercorticisme, hypothyroïdie), entraîne des altérations biologiques comme une hypercortisolémie, une hyperlipidémie, une hyperglycémie ou une hypertension artérielle qui sont autant de marqueurs qui témoignent d’une prédisposition à de nombreuses pathologies. Une meilleure connaissance des altérations psychobioloques induites par des stress, habituellement répétés ou chroniques, a conduit à l’élaboration du concept d’allostasie ( équilibre précaire par opposition à l’homéostasie) et à la définition d’un syndrome X (ensemble des altérations psychobiologiques présentes chez un individu) devant permettre de mieux prédire, et donc traiter, les effets délétères du stress.
Dernière mise à jour : Dr Jean-Michel Thurin