AU SOMMAIRE

  • Editorial
  • La formation aux métiers de la santé mentale
  • Un double enjeu : l'identité et le décloisonnement
  • Un moment culturel particulier
  • Soins infirmiers : former à l'évolution
  • Les professions éducatives et la psychiatrie
  • Mieux définir fonctions et actions
  • La formation continue des directeurs d'hôpitaux en santé mentale
  • Laformation des assistants sociaux en psychiatrie
  • Quel avenir pour la formation continues en santé mentale à l'ENSP ?
  • Psychologues, quelle formation ?
  • La santé mentale dans la formation initiale à l'ENSP
  • La diversité des parcours : la fonction infirmière
  • La formation continue, un outil pour préciser la place des aides-soignantes
  • Mettre en oeuvre les politiques et actions en santé mentale
  • L'articulation du sanitaire et du médico-social en psychiatrie

  • LA FORMATION AUX MÉTIERS DE LA SANTÉ MENTALE(1)

    Lors des récents Etats Généraux de la Santé, les critiques des usagers ont été vives ; elles portaient avant tout : sur le manque de transparence et de considération des professionnels à leur égard ; sur le manque de formation de ceux-ci à l'écoute ; sur le défaut de reconnaissance réciproque des professionnels entre eux, ce dernier trait soulignant un cloisonnement préjudiciable à la prise en considération, comme à la prise en charge. Dans ce constat, en forme de contestation, c'est au premier chef la formation qui est mise en cause.

    Le sanitaire et le social, la cité et l'hôpital, l'infirmier et l'éducateur, le médecin généraliste, le spécialiste et le psychologue : le cloisonnement du système de santé est partout dans les structures, dans les modes de fonctionnement, entre les hommes qui se partagent son champ d'activité. Ce qui est vrai du système de santé en général l'est plus encore d'un système de santé mentale qui tente de répondre à des besoins croissants et en rapide évolution auxquels le modèle sectoriel tel qu'il fut conçu il y a quarante ans, doit s'adapter.

    Ce qui aggrave le cloisonnement, c'est le flou qui règne sur les fonctions et la place occupée par chacune des professions, dont l'apprentissage des savoir-faire ne débouche pas toujours sur des compétences bien identifiées : cette situation ne permet pas que s'édifie le sentiment d'identité, préalable à toute intégration réussie dans une entité plus large, - l'équipe de santé mentale.

    Dans ce numéro 18 de PLURIELS , nous donnons la parole aux divers professionnels de la santé mentale qui nous disent ce qu'est pour eux leur formation actuelle et indiquent les voies des nécessaires changements.

    R. Lepoutre

    (1) Médecins exceptés


    UN DOUBLE ENJEU : L'IDENTITÉ ET LE DÉCLOISONNEMENT

    L'identité des professionnels de la santé mentale est mal cernée ; faisant défaut, elle crée incertitude sur soi et malaise parmi les autres. Si les sujets-citoyens, bénéficiaires du système de santé font le constat des dégâts provoqués par le cloisonnement, ceux qui vont devenir les protagonistes actifs du système et vont le faire fonctionner rencontrent ce cloisonnement dès le moment où ils sortent de leur formation initiale, et se retrouvent à pied d'œuvre, sur un territoire à partager avec beaucoup d'autres dont ils ignorent quelles sont les connaissances et les savoir-faire. Le peu d'assurance qu'ils ont tiré de la capacité de leur propre formation à répondre aux besoins exprimés par des techniques adaptées, entraîne crispation et repli sur soi. C'est sur ce point que la formation de la plupart des professionnels de la santé mentale est en défaut : elle ne leur permet pas, le plus souvent, de s'approprier maîtrise de leurs activités qui leur permettrait de devenir compétents dans un métier ad hoc. La tentation est alors forte, pour sortir de cette situation délicate, de « saucissonner » le sujet citoyen - de le découper en tranches pour s'en approprier une.
    Bref, c'est le défaut d'une culture professionnelle spécifique acquise par la formation qui ne permet pas actuellement d'épouser d'autres cultures, insuffisamment spécifiques elles aussi, et de coopérer pour rendre le service global et coordonné auquel les sujets-citoyens de la santé mentale aspirent, et auquel ils ont droit.
    Les réflexions que font les professionnels dans ce numéro de PLURIELS témoignent d'une large prise de conscience de la nécessité de transformer la formation - initiale et continue. Cet éveil est largement provoqué par l'urgence ressentie du décloisonnement du sanitaire et du social, dont témoignent les journées TNH récentes (8 et 9 juin à Paris) : « Mieux articuler le sanitaire et le médico-social en psychiatrie », qui a réuni quelques trois cents de ces professionnels que la considération de la situation conduit à s'engager dans des relations plus fréquentes et plus étroites, afin d'éviter de faire courir à leurs usagers communs les risques de leurs incompréhensions réciproques et de la défense de leur « prés carrés » respectifs. L'obligation d'une plus étroite collaboration les oblige à un plus clair dessein de leurs identités propres pour qu'ils puissent, toutes techniques assumées, occuper dans le champ de la santé une place qui ne sera jamais centrale - celle-ci est occupée par le sujet qui justifie leurs existences - mais trouvera sa pleine efficacité.
    Propédeutique commune ? Formation continue unifiée ? A quel moment situer une formation qui permette une culture partagée ? Avant d'imaginer, comme le font certains, une formation initiale unique et totalitaire de tous les métiers de la santé mentale, en vue d'assurer des tâches complexes, multiples et en changement rapide, il est nécessaire que soit conduite et affirmée la spécificité des diverses compétences : pour que le décloisonnement soit possible, il faut que soient assurées les identités de chacun. *
     
    (1) Organisées par la MNASM et le CNEH



    Editorial

    VERS UNE FORMATION REFONDATRICE DU SYSTEME DE SANTÉ MENTALE

    A la demande de soins des sujets-citoyens de la santé mentale s'ajoute aujourd'hui une exigence de soutien social qui œuvre sur chaque projet de vie. Une telle exigence dans le contexte actuel de déliaison, et de désengagement au profit d'une attitude individualiste, si elle n'est paradoxale qu'en apparence, peut s'avérer redoutable pour les professionnels chargés de lui répondre : elle est lourde en effet d'un risque de dilution où chacun n'aurait plus de rôle fixe et empiéterait sur l'autre dans la confusion générale. Reconnaître ce danger, souvent évoqué par les partisans de l'immobilisme, c'est affirmer l'importance cruciale de la formation aux métiers, dans la double perspective d'obtenir pour chaque professionnel des compétences techniques spécifiques et le pouvoir d'explorer les chemins de collaboration efficaces. A ce prix, mais à ce prix seulement, on peut espérer que puissent répondre demain au projet de soin et au projet de vie, des équipes formées par une double démarche, l'une, déjà engagée, de médicalisation du social qui, bien repérée, peut et doit être maîtrisée ; l'autre, à venir, de socialisation du sanitaire dont les premières ébauches sont perceptibles, mais qui exigera sans doute la création de nouveaux métiers pour combler les lacunes du système actuel.

    C. Bonal


    UN MOMENT CULTUREL PARTICULIER

    Lors des Journées TNH (cf p.12) deux chantiers à ouvrir ont souvent été évoqués en filigrane de leurs interventions par les participants : l'un, pragmatique, faisant état des premières tentatives de réponses concrètes au décloisonnement du sanitaire et du social ; l'autre, plus spéculatif, constitué par un questionnement de fond sur la situation du champ de la santé mentale.
    S'agissant du second chantier, Antoine Lazarus estimait que nous vivons aujourd'hui un moment culturel particulier et épelait, sans vouloir en faire une énumération exhaustive, une série de questions logiquement reliées entre elles et auxquelles ils nous faut répondre par études et réflexions : Un handicap mental est-il un handicap social ? Quand donc un malade mental sort-il de sa maladie ? Y a-t-il pour lui un « extérieur » où il échappe à la psychiatrie ?
    Qu'est-ce que la psychiatrie dans cette perspective ? Et donc, quelle est sa place dans le champ de la santé mentale ? A quel moment un sujet étiqueté, à l'occasion d'une crise exigeant des soins, redevient-il autonome ? Jusqu'où convient-il de l'accompagner ? Quelle est la convenance de cet accompagnement ? Est-elle financière ? D'où le dilemme : soit une prise en charge à deux vitesses selon la fortune ; soit la substitution obligée à des professionnels payés, de soutiens communautaires... etc. etc.
    S'agissant du premier chantier, Marcel Jaeger décrivait trois ordres de début de
    réponses aux nécessités du décloisonnement : d'abord des réseaux regroupant les professionnels du sanitaire et du social et les articulant entre eux, dont il trouvait l'ébauche dans les PRAPS(2) ; ensuite, des formations passerelles et la création d'équivalences ; enfin, les premiers desseins des contours de nouveaux métiers à imaginer pour combler les béances du système actuel, et auxquels former ensuite de nouvelles espèces de professionnels.
    *
     
    (2) Programmes Régionaux d'Accès à la Prévention et aux Soins


    LA FONCTION INFIRMIERE LA DIVERSITÉ DES PARCOURS :

    La question de la formation continue des infirmiers exerçant en santé mentale et de la diversité des parcours n'est pas isolée de la place qu'ils occupent au sein de l'équipe pluridisciplinaire.
    La circulaire du 29 Octobre 1997 définissant les axes prioritaires de formation met en évidence cet aspect, préconisant un axe relatif à l'évolution de la prise en charge des malades et à la nécessaire adaptation du dispositif hospitalier : « Des formations en faveur d'équipes pluridisciplinaires en psychiatrie devront aider les personnels à mieux définir leurs fonctions dans un souci de complémentarité et d'amélioration de la prise en charge des malades...».
    Dans les lignes qui suivent, il est fait référence au « développement de la gestion pré-
    visionnelle des compétences au sein des établissements »
    .
    Il semble aussi important de s'attarder sur ce dernier point, « L'évolution des métiers en santé mentale », dont nous ne pourrons faire l'économie et qui aura certainement une influence majeure sur la qualité des formations.
    Le parcours du professionnel infirmier en psychiatrie tend à se diversifier et nous devons bien évidemment l'étudier au regard de la spécificité et des complémentarités vis à vis des autres champs de compétences présents dans l'équipe pluridisciplinaire. Au moment où les infirmiers sont sollicités pour développer un travail dans la communauté, il paraît fondamental de placer ces questions au centre de la politique de formation.
    L'approche de la formation continue au regard des parcours infirmiers présente l'avantage de situer le professionnel dans une dynamique de progression nous plaçant de fait dans une perspective d'anticipation avec les jeunes professionnels qui intègrent notre discipline aujourd'hui.
    La formation continue est le levier permettant au professionnel infirmier de progresser et de parfaire ses connaissances pour évoluer vers la compétence attendue. La compétence attendue n'est pas toujours clairement annoncée lors de la prise de poste et les nouveaux recrutés sont parfois conduits à exposer les besoins de formation sans que l'encadrement ait pu les guider vers une vision plus globale de la fonction. Le risque est d'aller vers le détail alors que l'essentiel n'est pas acquis. Dans d'autres cas, ils sont inscrits d'emblée dans des actions standards préorganisées sans qu'ils aient eu le temps de percevoir leur domaine d'intervention. Il me parait de fait primordial de situer à chaque fois, avec le professionnel, les pré-requis pour cet exercice quelque soit la spécificité de l'unité de soins.
    C'est au travers d'un accueil « codifié » et d'un encadrement de proximité effectif que ce dialogue doit être introduit. De nombreux établissements travaillent actuellement à la mise en place de démarches qualité allant du recrutement à l'encadrement des premiers mois. Cet encadrement adapté et modulé en fonction des besoins s'inscrit ainsi beaucoup plus dans le transfert de compétences liées au savoir-faire et au savoir être. Nous pouvons sans difficulté imaginer que de telles démarches sont essentielles pour mettre en évidence des besoins de formation cohérents pour le professionnel en harmonie avec le projet de l'unité de soins facilitant l'ancrage nécessaire pour aborder la pratique avec plus d'assurance. La formation pourra alors être initiatrice de plus d'autonomie et de maturité professionnelle.
    Si toutes ces conceptions ne sont pas propres à l'activité en santé mentale ni à la profession d'infirmier, qu'elles en seront les particularités ? En quoi la formation continue doit-elle s'adapter face aux évolutions, qu'il s'agisse du travail en intra-hospitalier ou au sein de la communauté au regard de l'épidémiologie et des programmes de santé publique ?
     
    L'apprentissage sur le terrain : complément de la formation de base et préalable à la formation continue
     
    Je ne reviendrai pas sur la question de certains manques relatifs au programme de santé mentale délivré dans la formation de base infirmière, car ce débat pourrait toucher de la même façon d'autres spécialités. Il faut être plus optimiste et se dire que la polyvalence, les choix professionnels et les motivations en présence, sont des atouts pour faciliter la progression des jeunes infirmiers. Cependant, les premiers apprentissages doivent passer par un exercice en unité de soins. Nos unités de psychiatrie générale sont un terrain très privilégié offrant au professionnel la possibilité de conforter son choix, puis d'aborder la clinique, et de se confronter à la dynamique du projet de soins tout en s'inscrivant dans la durée et la continuité du soin.
    La question de la première affectation en pédopsychiatrie ne doit pas être écartée. Seulement, le cadre doit alors en être fixé. Tous les intersecteurs disposent, au moins, d'hôpitaux de jour où ce travail d'inscription dans la continuité peut être effectif.
    Si l'on souhaite que l'ancrage dans la pratique se réalise, que l'analyse des capacités soit possible, il faut nécessairement insister sur l'affectation au sein d'une équipe intervenant dans le cadre d'une structure et non directement dans des actions au sein de la communauté.
    L'expérience nous montre l'importance de ces premiers mois dans la projection du projet professionnel.
    C'est à ce moment là que pourront être travaillés des objectifs de formation cohérents pour chacun. L'implication de l'encadrement est obligatoirement très forte et nous pouvons aussi prévoir un tutorat qui permet un échange souvent plus spontané dans la pratique quotidienne.
    Ces conditions que je qualifie de « contexte favorable » sont nécessaires pour initier des démarches personnelles et guider les choix de lectures, compléments indispensables et préalables aux formations à venir.
     
    La formation continue inscrite dans le parcours professionnel infirmier
     
    Il faut situer ce parcours non seulement dans le cadre du poste occupé mais plus largement dans le positionnement au sein du service infirmier et plus particulièrement dans la dynamique de travail découlant du Projet de Soins Infirmiers institutionnel. Ces deux aspects, loin de s'opposer, peuvent au contraire, être travaillés dans une articulation harmonieuse.
    La formation continue est un outil privilégié. Je prendrai pour exemple les formations -actions qui se développent de plus en plus dans les hôpitaux. Les démarches qualité dans lesquelles nous nous engageons actuellement doivent impliquer l'ensemble des personnels, sachant que certaines concernent plus particulièrement les infirmiers L'hygiène et l'éducation sanitaire des patients, le champ de l'observation et de la surveillance infirmière dans le cadre de la prescription médicale, du diagnostic infirmier et du rôle propre, de la mise en oeuvre de la démarche de soins, ...
    Ces derniers aspects doivent prendre en compte l'informatisation du dossier du patient. Nous constatons que dans ce domaine, les formations-actions sont mieux adaptées.
    Dans le même temps, l'impact du P.M.S.I. sur la qualité des données infirmières est à envisager.
    L'ensemble de ces projets ne peuvent plus être travaillés uniquement au sein de l'unité ni du service. Ils exigent une politique institutionnelle et l'élaboration de référentiels communs. Les formations réalisées dans cet objectif sont autant d'occasions facilitant l'approfondissement et l'enrichissement des réflexions sur la pratique, l'acquisition de méthodes de travail et d'outils nouveaux.
    On ne peut pas souhaiter développer l'évaluation si les préalables ne sont pas posés. Lorsque les infirmiers sont confrontés à cette question de l'évaluation dans le cadre du projet de soins du patient, ils sont parfois démunis.
    J'ajouterai que les formations facilitent, avec l'acquisition de nouvelles méthodes, le changement progressif des cultures.
     
    Parcours infirmier, santé publique et objectifs de formation
     
    Les formations permettant une meilleure approche de la clinique et des prises en charge plus efficientes sont actuellement très développées dans nos établissements. Souvent très en rapport avec l'épidémiologie, elles s'inscrivent aussi dans le champ de programmes de santé, qu'il s'agisse des problèmes l'adolescence, de la prévention relative au suicide, de l'alcoolisme, de la violence, de la prise en charge des personnes démunies,...
    L'extension des pratiques vers la santé publique doit attirer notre attention, du fait de l'intervention dans la communauté. Il faut se préparer à l'inscription dans les réseaux et notre participation à leur construction. L'accompagnement du psychotique dans la cité, principalement réalisé par les infirmiers exige de la rigueur et suffisamment de souplesse. Peu de formations existent. Il conviendra aussi de prendre en compte le soutien des intervenants si l'on veut qu'ils restent créatifs.
    La formation de base des infirmiers offre un enseignement relatif aux démarches de santé publique mais il reste à réfléchir à la spécificité de l'intervention de santé mentale spécialisée et complémentaire.
    La pédopsychiatrie a facilité cette approche au travers de diverses actions : interventions en P.M.I., dans le milieu scolaire, ... Cependant, nous observons parfois des difficultés à différencier le travail réalisé par les différents professionnels. Est-ce l'habitude de travailler ensemble qui a gommé les compétences spécifiques ? Pourrait-on regretter, à terme, de perdre un peu de ce qui était l'essence même de la pluridisciplinarité ?
    Pourtant, certaines actions relèvent certainement des compétences infirmières propres. Je prendrai pour exemple les prises en charge « mère-bébé » qui, en dehors de la prise en compte des problématiques psychiques, mettent en oeuvre des actions visant plus globalement à l'éducation sanitaire. Il convient de souligner que ce travail d'éducation sanitaire implique une réflexion visant non seulement les comportements sociaux, mais intégrant surtout l'appropriation des problèmes de santé par les populations prises en charge.
    Les projets de formation développés dans ce sens, consolideront l'existant et initieront des actions plus pertinentes, en maintenant la complémentarité souhaitée.
     
    Ethique et formation
     
    La dimension éthique est de plus en plus présente dans le soin ou tout au moins, on en parle plus. Les préoccupations infirmières sont en augmentation du fait des exigences apportées par la législation sur les droits des patients. On ne peut aussi négliger tous les problèmes de notre société autour de la maltraitance, de l'obligation de soins pour les délinquants sexuels ou plus globalement de l'hospitalisation sous contrainte, ...
    Les différents niveaux de responsabilité mieux identifiés par les infirmiers du fait de l'évolution législative soulèvent aussi des questions nouvelles. Comment rendre moins complexes les distorsions entre l'approche théorique et la réalité des pratiques quotidiennes pour que ces dernières ne soient pas posées comme des obstacles au changement. La nécessité du travail sur le positionnement éthique dans les soins doit probablement passer par des formations. Ces dernières devront cependant prendre en compte, en plus des besoins de l'équipe pluridisciplinaire, les particularités liées aux différentes fonctions.
     
    En conclusion
     
    L'accréditation qui est à notre porte, nous a déjà conduits à travailler sur des préalables. Les démarches qualité mises en oeuvre ces dernières années, en font partie. Dans ce domaine, il n'est pas possible de tatonner. Il faut insister fortement sur la qualité des formations à proposer en priorité aux cadres qui se trouvent « en première ligne ». Sur ce point, la formation en institut de cadres de santé doit poser les bases indispensables. De la même façon qu'après la formation infirmière de base, les nouveaux cadres ont à prendre la dimension de leur fonction dans un premier temps. Simultanément, un débat institutionnel doit être instauré au sein de l'équipe d'encadrement pour proposer un projet conciliant besoins et attentes spécifiques liés aux projets de services avec les impératifs liés aux orientations du Projet de Soins Infirmiers et du Projet d'Etablissement.
    Les cadres infirmiers sont de plus en plus engagés dans des missions transversales et les projets de formation continue doivent intégrer les besoins de compétences spécifiques visant à améliorer les niveaux d'expertise souhaités.
    Il serait illusoire d'attendre que les cadres se positionnent en animateurs dans les groupes de travail s'ils ne possèdent pas les outils ou les contenus théoriques requis.

    Marie-Ange Vuillermet

    Mission Nationale d'Appui en Santé Mentale




    SOINS INFIRMIERS : FORMER À L'ÉVOLUTION

    Peut-on envisager pour le début du 2lème siècle, l'émergence d'une véritable politique de santé publique en France avec une participation active tant au niveau de sa construction que de sa réalisation du « corpus » infirmier ?
    Tous les experts prédicateurs sont d'accord pour affirmer qu'il semble encore un peu tôt pour voir s'installer une organisation de tous les acteurs qui pourraient concourir à l'atteinte d'un seul objectif : améliorer, préserver, et restaurer l'état de santé de la population. L'absence de culture « santé », l'excès de corporatisme, le conservatisme à la française, le manque d'audace ( ... ) sont les quelques prétextes avancés.
    Cependant, parallèlement à la mise en place d'une politique de maîtrise des dépenses de santé, s'installe, de façon inopinée ou non, une véritable démarche de santé publique, prémisse d'une stratégie plus globale. La logique « diagnostic-traitement » et la relation « soignant- soigné » s'effacent progressivement au profit de l'étude de la relation « santé-sociéte ».
    Depuis le milieu des années quatre-vingts, de nombreux exemples tendent à démontrer que le modèle biomédical, descriptif, cloisonné et prescriptif n'est vraiment plus adapté.
    En effet, la nature même des problèmes de santé a changé. Ils sont notamment devenus chroniques, et par conséquent, invalidants pour notre société.
    En réponse à cette nouvelle donne, la qualité, l'efficacité, le consentement, la participation des citoyens, l'efficience, la médecine sociale, 1'adaptation organisationnelle sont considérés comme les éléments fondateurs d'un nouveau modèle.
    Ce dernier ne prendra pas aussi simplement la place sur ce bon vieux modèle biomédical. Au moins, rééquilibrera-t-il, dans un premier temps, le rapport de force entre le soin « médical » et l'action de santé publique pluri et multidisciplinaire.
    Cette démarche inéluctable va amener les différents acteurs à se confronter à des défis économiques, médicaux et sociaux complexes, construisant ainsi la politique de santé publique de demain.
     
    Et la profession d'infirmière dans tout cela ?
     
    Aujourd'hui, au regard de l'évolution de la santé publique et de ses enjeux, cette profession se caractérise plutôt par son absence.
    Ceci contraste avec son action quotidienne à l'interface entre le patient et son environnement, promulguant un travail de collaboration entre les différents acteurs. Par rapport au rôle qu'elle joue dans le système, la profession d'infirmière a de nombreuses clefs de compréhension pour revendiquer à participer mais aussi occuper une position centrale dans une véritable démarche de santé publique.
    Pour expliquer les raisons de ce non engagement, il est facile d'accuser le système et son modèle dominant, de dénoncer les pouvoirs publics, de crier au complot du corps médical, plutôt que de s'organiser autour d'enjeux forts. Cette profession se positionne d'une façon quasi-originelle plutôt comme suiveur et non comme leader. Certes, il y a le poids de l'histoire mais aujourd'hui des opportunités se présentent ou vont se présenter tant à l'hôpital que dans des structures sanitaires et sociales, les réseaux de soins ou encore dans le cadre de l'exercice libéral. Dans le système de demain, qui a besoin d'audace et d'innovation, l'infirmière doit faire émerger de nouvelles façons d'exercer sa profession.
    Ces changements passeront pour les personnes en exercice par une réelle prise de conscience individuelle et collective sur leurs capacités d'être les acteurs mais surtout les auteurs des réformes. Les cadres infirmiers, les syndicats professionnels, les syndicats de salariés, la presse spécialisée, les organisateurs de salons professionnels se doivent de mobiliser autour de ces enjeux. On ne peut pas prétendre faire évoluer cette profession sans réellement « se mouiller ». Les discours corporatistes maintes fois rabâchés autour de l'identité de la démarche de soin infirmier doivent s'estomper au profit d'actes concrets. Ce n'est que dans l'action que se définiront les valeurs communes à cette profession.
    Ces évolutions peuvent aussi passer par la formation professionnelle continue. Il serait temps de proposer de nouvelles voies en lien avec les évolutions de l'environnement, sortant enfin de l'apprentissage technique. Il est de la responsabilité des différents acteurs de demander des moyens supplémentaires et une meilleure articulation entre vie professionnelle et « apprentissage » afin de privilégier des formations longues, diplômantes, en lien avec les évolutions et non spécifiques à la profession.
     
    L'action ne peut pas être limitée qu'aux professionnels
     
    Si la profession d'infirmière veut s'adapter et jouer un rôle dans la mise en place d'une démarche de santé publique, elle doit mieux recruter et mieux former initialement. Mieux recruter, c'est avoir des exigences mais qui ne peuvent être qu'en lien avec l'évolution projetée. Mieux former, c'est permettre d'organiser cette évolution.
    Au regard des enjeux liés à l'évolution de notre système de santé, la forme et le contenu de la formation initiale sont à revoir rapidement. En effet, la pédagogie, vecteur du transfert de connaissances, doit s'adapter au changement. Il semble impensable aujourd'hui d'avoir pour objectif de former des professionnels responsables, compétents, critiques par des méthodes passives de transfert de connaissances. Ne doit-on pas faciliter dans les Ifsi l'apprentissage en groupe, avec d'autres professionnels ? Ne doit-on pas proposer un travail sur ses propres représentations ?
    Concernant le contenu, il faut arrêter le « gavage » en connaissances médicales mais plutôt travailler sur la recherche, sur l'analyse et la critique de l'information nécessaire à la pratique et à la réflexion. C'est d'une méthode dont ont besoin les professionnels. Au-delà d'une connaissance de base, ils pourront se perfectionner au cours de sa vie professionnelle, au gré de changements de services spécialisés, par les livres, par l'intermédiaire de ses pairs et par l'apport d'autres professionnels.
    Concernant le développement d'une logique santé publique dans cette formation initiale, il semblerait pertinent de supprimer ... le module santé publique, qui n'est qu'une description de notre système de santé et de ses acteurs. La santé publique est transversale et repose sur de multiples disciplines telle que la sociologie, l'économie, l'éthique, mais aussi la médecine et l'anatomie.
     
    Affaire à suivre...
     
    Ces quelques remarques ne sont aucunement originales. Elles sont en effet énoncées, débattues et dénoncées individuellement depuis de nombreuses années par un grand nombre d'infirmières de cadre soignants, d'enseignants et même de responsables institutionnels. Ces constats mettent surtout en évidence des capacités d'inhibition collective de la profession d'infirmière devant des enjeux forts. Doit-elle attendre, comme d'autres acteurs, la régulation économique inéluctable de notre système de santé, pour commencer à sortir de cette léthargie pathologique. On se mettrait presque à l'envier !
    Afin de ne pas attendre la deuxième décennie du 2lème siècle pour répéter la même complainte, ne serait-il pas temps d'envisager une réflexion globale sur l'adaptation et l'évolution de cette profession dans ce nouveau contexte qui se dessine ?
    Ne serait-il pas temps d'organiser des « Etats généraux », dont les recommandations et leurs applications seraient bien évidemment évaluées et rendues publiques, seuls gages de réussite ?
    Affaire à suivre ...

    Laurent Cenard


    LES PROFESSIONS ÉDUCATIVES ET LA PSYCHIATRIE

    Les débats toujours présents entre les travailleurs sociaux et les soignants ont des racines anciennes. Ils remontent à la naissance de ce qu'il a été convenu d'appeler le « travail social », à propos de la question de l'assistance sociale et éducative, complémentaire ou antinomique des prises en charge hospitalières. La compréhension de la nature des difficultés des personnes est également différente, selon que l'accent est mis sur l'histoire individuelle et l'organisation de la vie psychique, ou bien sur les effets pathogènes ou thérapeutiques du milieu social, familial, professionnel. Mais ces débats ne doivent pas être caricaturés.
     
    Un ensemble diversifié
     
    * Aides médico-psychologiques : formation en deux ans, pour les personnes qui interviennent auprès d'enfants et d'adultes très dépendants.
    *Moniteurs éducateurs : formation en deux ans, pour les personnes qui interviennent principalement dans des lieux résidentiels, dans et à travers le quotidien.
    * Éducateurs techniques spécialisés : formation en trois ans, pour les personnes déjà qualifiées dans une branche professionnelle et qui acquièrent un complément d'étude dans le registre de l'éducation spécialisée.
    * Educateurs spécialisés : formation pour les personnes intervenant auprès d'enfants ou d'adultes présentant des déficiences, des troubles du comportement et des difficultés d'insertion. La formation se fait sur trois années avec un statut d'étudiant ou en situation d'emploi avec, dans ce cas, la possibilité de l'effectuer sur quatre ans.
    * Éducateurs de jeunes enfants : formation en deux ans. Les EJE ont pour fonction d'aider le développement des enfants de 18 mois à 6 ans inclus, dans le registre de l'éducation pré-scolaire, auprès des enfants ordinaires (par exemple en crèche, halte-garderie) et auprès des enfants privés de leur milieu familial.
     
    Des qualifications séparées aux compétences croisées
    Tout d'abord parce qu'ils traversent les professions sociales et éducatives elles-mêmes : « Deux courants assez différents se sont confrontés dans le champ éducatif et au congrès international des éducateurs de jeunes inadaptés à Rome en 1960. Ils étaient ainsi définis : le courant rééducatif (réinsertion par des moyens culturels et moraux), le courant psychothérapique (orienter le relation éducative afin d'agir profondément sur le psychisme du jeune). Cette présentation est, avec du recul, quelque peu manichéenne. Il est certainement possible de concilier ces deux approches La capacité de produire certains effets n'est, on le sait, l'exclusivité de personne »(1).
    Depuis cette époque, le champ d'intervention des éducateurs spécialisés s'est beaucoup élargi. Leur action recouvre une multitude de formes d'aide aux personnes en difficultés : nés dans le secteur de l'enfance inadaptée, ils sont de plus en plus sollicités ailleurs, en milieu scolaire, en psychiatrie, et ils s'occupent de plus en plus d'adultes, aussi bien des personnes handicapées que des RMIstes, voire des personnes âgées. Dans ces conditions, l'acte éducatif doit être resitué par rapport à d'autres modes d'accompagnement et d'intervention, d'autres actes, notamment pédagogiques et thérapeutiques.
    Par ailleurs, à l'intérieur du champ de l'éducation spécialisée, les nouvelles annexes XXIV(2) rappellent que pour une même population, les projets institutionnels et les projets individualisés, désormais obligatoires, s'inscrivent dans les trois dimensions : éducative, pédagogique, thérapeutique. Ceci justifie l'existence d'équipes pluridisciplinaires, mais ne doit pas être compris de manière restrictive comme l'incarnation systématique par des professionnels différents de chacune de ces dimensions.
    En effet, si nous considérons que la partie se joue ici à trois en termes d'objectifs, chacun des actes mis en oeuvre n'est pas la propriété exclusive de telle ou telle catégorie professionnelle. Ce que nous pourrions résumer par la formulation suivante : trois actes pour trois acteurs souvent, mais aussi trois actes pour un même acteur, dès lors que les identités professionnelles de chacun sont bien définies et que les situations dans lesquelles ils agissent sont en rapport avec ces identités. Si tel n'est pas le cas, nous nous trouvons vite dans une situation du genre de celle décrite par Émilia M, 0. Marty(3) à propos d'un institut médico-éducatif : les conflits de pouvoir entre le personnel éducatif, le directeur et les psychiatres montrent, s'il en était besoin, les méfaits des replis sur les identités professionnelles de chacun. De tels replis ne peuvent que se solder par l'oubli de ce qui fonde l'existence d'une institution : les personnes accueillies.
    D'autre part, par-delà les statuts institués, les « actes » varient en fonction du degré de « plasticité » lié à chaque catégorie professionnelle. Nous savions déjà que l'emploi croissant des éducateurs spécialisés et des aides médico-psychologiques (AMP) dans les services de psychiatrie était lié au souci de répondre au mieux aux besoins des malades, de préparer les conditions de leur autonomie sociale, d'accélérer le tournant de la psychiatrie vers une meilleure articulation avec le secteur social et médico-social. Encore fallait-il qu'à l'inverse, ces mêmes éducateurs spécialisés et aides médico- psychologiques entendent les limites de leur action et acceptent l'aide de la psychiatrie dans leur propre univers. La collaboration de tous ces professionnels implique en effet au quotidien des enjeux de pouvoir, dans une situation plus complexe qu'autrefois où chacun pouvait développer sa propre culture professionnelle, sans se préoccuper particulièrement de celle des autres. On le voit, par exemple, à propos des rapports qui évoluent lentement entre les aides médico- psychologiques et les aides soignantes(4).

    Marcel Jeager
    Directeur de BUC Ressources


    (1) Guy Dréano, Rencontre nationale, discours d'ouverture, in « Educateurs spécialisés et infirmiers », Soins Psychiatrie, n° 112 (numéro spécial), février 1990, p. 6.
    (2) Annexes au décret n° 56-284 du 9 mars 1956 qui régit les conditions d'autorisation des établissements privés, financés par la Sécurité sociale et recevant des enfants et adolescents. Elles ont été réformées par les décrets du 22 avril 1988 et du 27 octobre 1989.
    (3) Émilia M.-O. Marty, Les enfants de l'oubli, Dunod, 1997.
    (4) Voir Philippe Chavaroche, Équipes éducatives et soignantes en maison d'accueil spécialisée, Matrice, 1996.


    MIEUX DÉFINIR FONTIONS ET ACTIONS

    En septembre 1998, la Direction des Hôpitaux, en partenariat avec l'ANFH, a mis en œuvre une action de formation nationale destinée aux équipes pluriprofessionnelles des centres hospitaliers et centres hospitaliers spécialisés intitulée « rôle et fonction de chacun au sein d'une équipe pluridisciplinaire en psychiatrie ».
    Cette formation doit permettre d'appréhender le contexte et l'organisation de la psychiatrie en France ainsi que les différentes démarches et pratiques professionnelles propres à ce domaine. De plus, elle doit contribuer à améliorer la prise en charge globale de la personne malade, tant en intra qu'en extra-hospitalier, dans le cadre de la mise en œuvre de synergies pluriprofessionnelles et de l'utilisation optimisée des outils institutionnels du travail en équipe. Cette formation, innovante quant à son contenu et à son caractère pluriprofessionnel, a déjà été développée dans trois régions où elle a donné lieu à un bilan d'évaluation positif qui souligne l'intérêt des professionnels pour s'impliquer dans de telles démarches et l'utilité de la poursuite d'une telle action.



    LA SANTÉ MENTALE DANS LA FORMATION INITIALE À L'ENSP

    Comment les nouveaux médecins inspecteurs, les inspecteurs des affaires sanitaires et sociales et les directeurs sont-ils formés aux questions de santé mentale ? Pour les deux premiers, leur initiation à cette discipline a lieu au moment de la découverte des politiques publiques, en début de cursus. Après une introduction aux politiques sanitaires et sociales qui porte sur le sens donné à l'action sociale, aux nouveaux modes d'intervention de l'Etat, et aux changements économiques qui s'opèrent sous nos yeux, les principes fondamentaux de santé mentale sont présentés systématiquement au cours d'un atelier qui se déroule sur une semaine, animé par des intervenants-praticiens recrutés aussi bien dans le secteur des services déconcentrés que dans le monde des soignants.
    Munis de ces principes directeurs, les élèves partent en exploration pour un stage d'observation des filières de prise en charge des malades. Au cours de cette séquence, chaque stagiaire de l'ENSP observe les trajectoires de quelques patients, à partir d'informations fournies par les médecins, travailleurs sociaux et directeurs, mais aussi par rencontre avec les usagers des services. Ils analysent ces informations à la lumière des projets des services, en tenant compte de la prise en charge dont les malades ont bénéficié, des différentes phases du traitement apporté, des réussites et des échecs rencontrés. Cette observation est un révélateur du rôle des établissements de soins et de leur apport dans la prise en charge de la maladie, de sa prévention et de la réinsertion du malade. Une monographie, sur un cas jugé exemplaire, est rédigée par le stagiaire. Au retour du stage, une semaine de travail en petits groupes est consacrée à l'analyse comparée des situations locales décrites dans les monographies, mettant en relief les disparités entre régions et la valeur propre à chaque approche observée. Ces différents éléments sont ensuite mis sous forme de synthèse par le groupe d'élèves, qui présentent un rapport synthétique du dispositif légal, des institutions existantes, de l'analyse critique des faits observés, celui-ci fait l'objet d'un débat général en présence d'un « grand nom » de la psychiatrie publique.
    C'est donc un mois complet pour les IASS et deux semaines pour les MISP, plus un stage de deux mois, qui sont consacrés aux politiques publiques, dont fait partie la santé mentale.
    Pour les élèves directeurs d'hôpital, l'approche est différente. C'est pendant l'enseignement de planification sanitaire que la santé mentale est traitée, sous forme de cas pratique à options. En effet, il s'agit d'un des trois thèmes qui sont proposés. Cet atelier qui se déroule sur deux jours, est animé par deux membre de la Mission d'Appui : un psychiatre et un directeur d'hôpital.

    Alain Jourdain




    LA FORMATION DES ASSISTANTS SOCIAUX EN PSYCHIATRIE

    Actuellement, plus de 2 200 assistants de service social travaillent au sein des équipes de secteur psychiatrique. Un tiers d'entre eux interviennent en psychiatrie infanto-juvénile. La grande majorité des autres travaillent en psychiatrie générale, quelques uns en psychiatrie pénitentiaire ou en unité pour malades difficiles.
    Leurs missions s'inscrivent dans celles du corps des assistants socio-éducatifs de la fonction publique hospitalière définies par le décret du 26 Mars 1993 :
    Aider les personnes, les familles ou les groupes qui connaissent des difficultés sociales à retrouver leur autonomie et faciliter leur insertion. Dans le respect des personnes, les assistants socio-éducatifs recherchent les causes qui compromettent leur équilibre psychologique économique ou social. Ils participent à l'élaboration et à la mise en œuvre du projet de l'établissement dont ils relèvent ainsi que les projets sociaux et éducatifs. Ils participent à l'élaboration du rapport d'activité du service socio-éducatif.
    Les assistants de service social ont pour mission de conseiller, d'orienter et de soutenir les personnes accueillies et leurs familles, de les aider dans leurs démarches et d'informer les services dont ils relèvent pour l'instruction d'une mesure d'action sociale. Ils apportent leur concours à toute action susceptible de prévenir les difficultés sociales ou médico- sociales rencontrées par la population ou d'y remédier. Ils assurent dans l'intérêt de ces personnes, la coordination avec d'autres institutions ou services sociaux et médico-sociaux.
    Il faut souligner que lorsqu'il n'existe pas de cadre socio-éducatif assurant l'encadrement des personnels socio-éducatifs d'établissement, les assistants socio-éducatifs (assistants de service social et éducateurs spécialisés) sont placés directement sous l'autorité du directeur.
    La circulaire du 20 Décembre 1993 précise que dans les secteurs psychiatriques, les personnels socio-éducatifs font partie intégrante de l'équipe pluridisciplinaire et contribuent, dans le respect de la déontologie de chacun, au projet thérapeutique.
    L'assistant de service social en psychiatrie développe donc une activité de travail social en milieu sanitaire. Son action s'inscrit dans le cadre général des missions du dispositif public de psychiatrie : prévention, diagnostic, soin, réadaptation, insertion et réinsertion.
    Le métier d'assistant de service social en psychiatrie s'inscrit dans deux principaux régistres d'intervention, celui du métier de la santé et celui du métier du territoire tels qu'ils ont été décrits dans une étude conduite par le CEREQ* en 1994.
     
    Le premier registre d'intervention est celui auprès des individus et des familles confrontées à des ruptures ou des crises. Il donne lieu à différentes démarches : diagnostic, conception et construction d'une réponse réparatrice, négociation de cette réponse avec le sujet et d'autres professionnels, suite et évaluation.
    On retrouve là, par exemple, le diagnostic social de la situation du patient, complémentaire du diagnostic médical et du diagnostic de besoin de soin infirmier. La place particulière de l'action du service social se situe à l'articulation de quatre pôles : le patient, sa famille ou son entourage, l'équipe pluridisciplinaire et la communauté au sens large, regroupant tous les acteurs institutionnels, tous les professionnels, toutes les ressources à mobiliser au sein de la communauté.
     
    Un deuxième registre d'intervention est celui sur des milieux de vie, des organisations ou des territoires dans une perspective de changement ou de développement, donnant lieu à d'autres démarches : analyse d'une organisation ou d'un territoire, conception et construction d'actions de prévention, d'insertion, de réadaptation, d'accompagnement, de développement, négociation avec des partenaires institutionnels ou politiques, mise en œuvre, évaluation.
    On retrouve là l'action du service social en psychiatrie contribuant à l'évaluation des besoins de la population en matière de santé mentale au sein d'un secteur psychiatrique ou d'un département. Il s'agit également du rôle joué par des assistants sociaux dans la conception et la mise en œuvre d'actions répondant à ces besoins, par exemple en matière de prévention, d'accès aux soins, de réadaptation sociale ou professionnelle ou d'insertion, ou dans les domaines de l'éducation, de la formation, du travail, de l'hébergement, de l'accès au logement, etc..., le plus souvent dans le cadre d'un travail de réseau.
    Certains assistants de service social en psychiatrie sont les promoteurs de tels projets ou s'en voient confier leur mise en œuvre.
     
    Enfin, pour terminer, il faut noter que des assistants de service social accèdent à des fonctions d'encadrement. D'autres participent ou contribuent à des travaux de recherche, dans le domaine de l'épidémiologie, ou dans celui concernant les systèmes de santé et l'évaluation de la qualité des soins, et bien sûr dans le domaine du travail social.
     
    Le métier d'assistant de service social en psychiatrie requiert des compétences variées
     
    La formation initiale permet d'acquérir de bonnes bases en matière d'action sociale, d'économie sociale, d'environnement social, de relations humaines, de santé, de théorie et de pratique de l'intervention en service social. Mais le service social en psychiatrie correspond à un certain degré de spécialisation qui nécessite des compétences et des connaissances qui dépassent celles acquises lors de la formation initiale.
    En effet, de nombreux domaines méritent d'être approfondis par l'assistant de service social qui commence à travailler en psychiatrie. Il s'agit notamment des mécanismes de la psychopathologie, de l'organisation et de la réglementation hospitalière, et de celles du dispositif public de psychiatrie, de l'évolution et de l'utilisation des différents outils et techniques thérapeutiques.
    Le travail en équipe pluridisciplinaire nécessite aussi de développer ses capacités à articuler, coordonner son action avec celle des autres professionnels composant cette équipe. Ce point est en constante évolution et mérite de réguliers repositionnements ou réajustements. Par exemple, la collaboration avec les infirmiers a subi une mutation importante, notamment dans l'extra-hospitalier depuis la fin des années quatre-vingt. Ce point est encore amené à changer dans l'avenir, compte tenu des effets de l'évolution récente de la formation initiale de ce corps professionnel.
    A tout cela s'ajoute bien entendu un besoin de développement continuel des compétences en matière d'action sociale, de travail social, domaines qui connaissent aussi de profondes mutations dans le contexte actuel.
    Ces besoins de formation complémentaire, qu'il s'agisse de favoriser une adaptation à la fonction ou de conférer un certain degré de spécialisation, doivent impérativement être satisfaits.
    La question est de savoir qui doit déterminer les composantes de cette formation. De même, comment permettre aux assistants de service social d'accéder régulièrement aux différentes étapes, en fonction de leurs trajectoires personnelles, des impératifs du service, des priorités du secteur psychiatrique ou de l'établissement hospitalier dans lequel ils exercent leur fonction et de l'évolution des orientations de la politique en matière de santé mentale et d'action sociale.
    A ce stade, il faut souligner la rareté des formations qualifiantes permettant d'accéder à de nouvelles fonctions au sein du dispositif de psychiatrie ou de la fonction publique hospitalière. Dans ce domaine il serait déjà tout à fait urgent de permettre aux cadres socio- éducatifs d'accéder à une formation à l'encadrement, à la méthodologie de projet, à des notions de gestion financière et de droit hospitalier, à la maîtrise des outils informatiques, etc.
     
    Les besoins de formation varient beaucoup d'un assistant de service social à l'autre. Ils dépendent d'une série de variables : histoire personnelle, expériences professionnelles antérieures aux études de service social, expériences d'exercice du travail social dans d'autres domaines que la psychiatrie (Justice, Conseil Général, Sécurité Sociale, protection de l'enfance, autres domaines de la santé, etc ... ), ancienneté dans le travail en psychiatrie.
    Différents canaux sont utilisés pour acquérir de nouvelles compétences ou les consolider
     
    L'exercice du métier est lui-même source de formation. Il s'agit de l'auto- formation générée par l'exercice professionnel du service social, la formation acquise par le travail pluridisciplinaire au sein de l'équipe de psychiatrie (réunions de synthèse, réunions cliniques, supervision, réunions institutionnelles), la formation par les pairs et les partenaires au sein de l'établissement hospitalier, la formation acquise par le travail dans la communauté à l'extérieur du dispositif de psychiatrie.
     
    La formation personnelle hors formation continue : il s'agit de différents cursus universitaires suivis par un nombre non négligeable d'assistants de service social, de la psychanalyse, de la participation à des séminaires, des colloques, qui sont une source précieuse d'ouverture et d'enrichissement, de la participation à l'action syndicale, associative ou politique.
     
    La formation continue joue un rôle capital. Malheureusement, dans la plupart des établissements hospitaliers de psychiatrie, la faiblesse des effectifs du service social réduit le budget disponible pour cette catégorie professionnelle, rendant difficile l'accès aux formations longues. D'autre part, l'absence d'encadrement spécifique dans beaucoup d'établissement hospitaliers spécialisés, influe négativement sur cette question, personne n'étant en mesure de consacrer sérieusement du temps à une évaluation globale de l'ensemble des besoins de formation des agents du service social, et à la prise en compte de ces besoins par les services concernés ou compétents. Dans ce domaine, on peut regretter l'absence trop fréquente du service social dans les débats et les concertations visant à définir les priorités en matière de formation, à l'échelon de l'établissement ou du secteur psychiatrique.
     
    Une politique d'amélioration continue de la prévention et de la prise en charge des troubles de santé mentale, doit prendre en compte ces données.
    La formation initiale des assistants de service social est une formation généraliste qui nécessite des compléments pour l'exercice d'un service social de qualité en psychiatrie.
    Or, comme le souligne en Juillet 1997 le Conseil Economique et Social : le rôle du personnel socio-éducatif va croissant avec la précarisation toujours plus grande des malades dans un environnement qui n'est pas favorable à leur insertion ni à leur réinsertion. (...) Ce personnel, à la charnière entre le sanitaire et le social, joue et jouera plus encore dans l'avenir, un rôle essentiel.

    Jacques Houver

    Cadre Socio-éducatif
    * CEREQ, Centre d'Etude et de Recherche sur les Qualifications - Université de ROUEN




    QUEL AVENIR POUR LA FORMATION CONTINUE EN SANTÉ MENTALE À L'ENSP ?

    Le contrat d'objectif et de moyens signé par l'Ecole Nationale de Santé Publique avec l'Etat en 1998 définit de nouvelles priorités pour l'école : 14 programmes précisant les objectifs. Ils concernent plus particulièrement la rénovation pédagogique centrée sur les stagiaires, une meilleure articulation entre recherche expertise et enseignement, la coopération internationale et notamment européenne, le développement du centre de ressources multimédia, la modernisation de la gestion, mais aussi le développement de la formation continue, « cœur du développement stratégique de l'école » en diversifiant la production pédagogique afin de s'ouvrir à des publics nouveaux.
    L'effort de renouvellement est déjà bien engagé : plus de 200 actions de formation proposées (dont 40% sont nouvelles).
    A cette volonté d'ouverture et de renouvellement s'ajoute une volonté de réactivité : induites par les réformes, les conséquences des réformes en cours, intégrer les mutations économiques et sociales et les problématiques nouvelles que fait parfois surgir l'actualité. Etre réactif ne veut pas dire, pour nous, sacrifier aux modes, mais accompagner les professionnels dans des processus de changement en puisant dans l'expérience, la réflexion et le savoir faire des départements, enseignants, chercheurs et réseaux de professionnels constitués au sein et autour de l'école.
     
    Quelle place peut trouver la santé mentale dans ces orientations ?
    Si on regarde aujourd'hui l'offre de formation continue de l'ENSP, on ne trouve qu'un seul module spécifique concernant la formation au management des politiques régionales et départementales en santé mentale.
    C'est peu ! Pour autant les cadres de santé publique qui œuvrent dans le champ de la santé mentale peuvent trouver des réponses à certains de leurs besoins de formation dans des modules ouverts à un public diversifié, qu'il s'agisse de formation concernant le management des organisations sanitaires et sociales, le management des politiques sanitaires et sociales, l'inspection, l'évaluation, l'action sociale, ou la démarche qualité et accréditation.
    Le débat qui a pu avoir lieu autour de deux alternatives : faut-il développer des formations spécifiques à destination d'une catégorie de professionnels travaillant dans un champ particulier, ou faut-il proposer à ces professionnels de rencontrer d'autres professionnels sur des problématiques plus transversales, doit être dépassé. On ne peut décloisonner les formations et mixer les professionnels de santé, qui constituent le public de l'école que si l'on connaît et reconnaît la spécificité de leur champ professionnel.
    Cela veut dire que l'offre de l'école en santé mentale doit aller vers le développement d'actions de formations à destination des professionnels de ce secteur d'activité dans une perspective de santé publique et dans le domaine du management qui sont des pôles de compétence de l'ENSP mais aussi et surtout vers une meilleure prise en compte des spécificités de la santé mentale, dans les formations accueillant un public plus large. Ainsi, dans les formations que l'ENSP construit actuellement sur la démarche qualité et accréditation, à destination des cadres hospitaliers en partenariat avec l'Association des Anciens Elèves de l'Ecole, l'Agence Nationale d'Accréditation et d'Evaluation en Santé (ANAES) et la Direction des Hôpitaux, formations qui se déroulent dans une quinzaine de régions depuis le début 99, nous n'envisageons pas l'organisation de sessions spécifiques en psychiatrie, mais par contre nous souhaitons pouvoir nous appuyer sur des expérimentations qui ont eu lieu aussi, dans le domaine de la santé mentale, lors du 4ème trimestre 1998.
    De la même façon, les formations concernant la thématique des réseaux doivent être ouvertes, les expériences acquises en santé mentale peuvent être partagées de façon enrichissante avec des professionnels d'autres secteurs de la santé, car le champ de la santé mentale n'est pas clos.
    De par la diversité des cadres qu'elle forme, l'ENSP peut être un lieu privilégié de formation pour aborder les enjeux de l'articulation entre le psychiatrie et d'autres secteurs d'intervention tels que le médico-social.
     
    Comment aller plus loin ?
    Aujourd'hui l'impact de l'ENSP dans le champ de la santé mentale concerne principalement les cadres de directions des hôpitaux et les cadres des services déconcentrés de l'Etat (DDASS-DRASS). L'ENSP entend s'ouvrir aux autres acteurs de santé publique : praticiens hospitaliers, praticiens libéraux, cadres de santé, cadres associatifs. Cette démarche d'ouverture nécessite au préalable une analyse affinée des besoins spécifiques de formations concernant les thématiques, l'approche pédagogique, les conditions d'organisation de la formation pour qu'elle soit adaptée aux attentes et aux contraintes de ces professionnels. L'ENSP accepte d'être partie prenante d'une réflexion avec les professionnels et leurs organisations sur l'identification des besoins spécifiques et sur la construction d'action de formation permettant d'y répondre. *
     

    Contacts : * Jean-Marie Tortuyaux, Responsable de formation continue. Tél. : 02 99 02 27 40. Fax : 02 99 02 26 26.
    E-mail : jdtortuy@ensp.fr * Maryvonne Chevalier, Adjointe au responsable de formation continue. Tél. : 02 99 02 27 46. Fax : 02 99 02 26 26. E-mail : mchevali@ensp.fr




    PSYCHOLOGUES, QUELLE FORMATION ?

    La formation des psychologues appelés à travailler dans le champ de la santé mentale est une question à la fois délicate et difficile qui pourrait donner lieu à de larges développements pour certains,
    à de vives polémiques pour d'autres.
    Nous tenterons donc ici d'être le plus clair et le plus concis possible en nous positionnant dans une perspective progressiste, au risque d'être abrupte.
     
    Que de chemin parcouru depuis la conférence sur « la psychologie
    clinique et la méthode clinique »
    que prononça Daniel Lagache en 1949 devant les membres de 1' « Evolution psychiatrique » !
    A ce jour, les propos du Professeur Loïc Villerbu(1), directeur du Laboratoire de Cliniques Psychologiques de l'Université de Rennes 2 nous semble bien établir la réalité : « La démarche clinique en psychologie a contribué à entretenir une évolution silencieuse des types et des modes d'action des psychologues. Les concepts, les méthodes, les dispositifs, y ont acquis une telle spécificité qu'il est possible de parler des Sciences et Techniques des cliniciens psychologues, se différenciant des modèles issus des pensées expérimentalistes et génétiques ou psychanalytiques ».
    Les choses ainsi posées, le terme de psychologue clinicien, à peu près absent de la littérature psychologique française avant la seconde guerre mondiale est devenu d'un usage courant depuis une quinzaine d'années. Cependant, il serait illusoire de penser que tous ceux qui l'utilisent sont d'accord sur sa signification et il n'est peut-être pas d'expression plus facilement génératrice de malentendus aux lourdes répercussions.
    Aussi la définition suivante nous semble précieuse.
    Psychologie clinique
    Méthode particulière de compréhension des conduites humaines qui vise à déterminer, à la fois, ce qu'il y a d'individuel chez un sujet, considéré comme un être aux prises avec une situation déterminée.
    S'efforçant de comprendre le sens des conduites, elle analyse les conflits de la personne (ou du groupe) et ses essais de résolution.
    La psychologie clinique utilise les renseignements fournis par l'enquête sociale (témoignages recueillis dans l'entourage du sujet), les techniques expérimentales (tests d'intelligence, de caractère, etc.), l'observation du comportement, l'entretien en tête à tête, les données de la biotypologie et celles de la psychanalyse. Ensuite, elle s'efforce d'intégrer tous les éléments recueillis dans une représentation d'ensemble suffisamment cohérente du comportement du sujet, dont elle veut faire apparaître les motivations et la signification profondes(2).
    Ainsi, qui pourrait exercer dans cette branche de la psychologie, si ce n'est un professionnel formé dans ce champ de connaissances spécifiques ?
     
    Le titre de psychologue s'obtient suite à un cursus universitaire BAC+ 5, il est validé par l'obtention d'un Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées (D.E.S.S.). Ce diplôme, lorsqu'il porte sur la psychopathologie, donne accès à l'exercice de cette discipline dans le milieu psychiatrique et plus favorablement dans la fonction publique hospitalière. L'usage du titre est défini par la loi n° 85772 du 27 Juillet 1985 qui stipule que toute forme d'usurpation du titre est passible de poursuites.
    Les psychologues en fonction dans le secteur hospitalier public, et de façon plus élective, dans les intersecteurs psychiatriques publics, sont des professionnels spécialisés, non médecins. « Non médecin », c'est certainement là où, pour la profession, se situe la pierre d'achoppement. Imaginez ! Une profession qui se définirait par rapport à des prérogatives qu'elle n'a pas, c'est-à-dire celles de « non médecin », correspondrait dans les faits à un exercice clinique par défaut mais en référence à celui de la faculté médicale. C'est un lourd tribut car la méthode clinique est issue de la pratique médicale.
    Malgré tout, la psychologie clinique s'est affirmée ces 20 dernières années et a, en quelque sorte, acquis un certain nombre de ses lettres de noblesse, que certaines tendances ou idéologies souhaiteraient s'approprier dans une perspective de « paternité ».
     
    Il s'appelle psychologue clinicien et son histoire, non pas personnelle mais historique, est courte. Anecdote, le premier psychologue est arrivé dans notre hôpital en septembre 1960, au jour d'aujourd'hui, nous sommes 27 dans le même établissement répartis de façon non uniforme dans les différents services adultes et infantiles.
     
    Il s'agît d'abord et avant tout d'une profession jeune qui s'attache au « respect de la personne humaine dans sa dimension psychique »(3). Une profession qui donc, ne veut de mal à personne, mais qui s'attache au respect du « mal » de la personne : le fameux « respect de la place du sujet ». Il se trouve qu'en psychologie clinique on retrouve tous les problèmes délicats de la psychologie en général, dans la mesure où elle porte un regard global sur l'individu.
    Alors se pose donc la question de la formation de ces soignants, en déclinant que les soins peuvent être médicaux certes, mais pas exclusivement, qu'ils peuvent être infirmiers, « maternels primaires » pour reprendre Winnicott, psychologiques enfin. « Mens sana in corpore sano » et « primum non nocere », des formules sans cesse à repenser en fonction des cas, et surtout à reconsidérer dans une dynamique évolutive.
     
    Pour ce qui concerne la formation, il est important de préciser qu'à l'heure de l'Europe, il faut distinguer la France et les autres pays, en particulier anglo-saxons. Ceci pour une raison fort simple, c'est que « chez nous » la psychologie clinique s'est surtout référée à la psychanalyse. A tel point, qu'à certains moments et dans certains lieux, le terme de psychologie clinique a disparu. Volontaire ou pas, inconsciente ou pas, l'idée selon laquelle les psychologues cliniciens devaient nécessairement être des psychanalystes a germé et perdure encore dans certaines tendances. A noter que cette dérive témoigne d'une réelle reconnaissance à la psychanalyse et il est vrai que nous la lui devons bien.
     
    L'appétence pour la psychanalyse s'explique dans la mesure où dans l'humanisation progressive qu'a connu la prise en charge des « malades psychiques » depuis Pinel et la loi de 1838, les deux événements marquants de cette histoire singulière sont l'avènement de la psychanalyse sous l'impulsion de Freud et la découverte des neuroleptiques en 1952.
    Si la médication des neuroleptiques relève de la prescription médicale, la prépondérance plus ou moins affirmée de la psychanalyse pose problème en psychologie clinique. A notre sens, les approches éthologiques, béhavioristes entre autres ne sont pas à exclure.
    La discipline analytique présente aujourd'hui, ce fait est indéniable, c'est un analyste de formation complémentaire qui vous parle, de nombreux intérêts à la fois théoriques et pratiques. Mais il se trouve que dans la perspective du « regard global » sur le sujet, le clinicien qui ne se référerait qu'à, et exclusivement à ce modèle, serait largement démuni, voire inadapté dans sa réponse, face à des phénomènes qu'il ne peut reporter et référer à des processus inconscients ou fantasmatiques.
     
    Il n'est pas outrecuidant d'intégrer, même si cela choque certain, dans les conceptions cliniques, ni les approches cognitives qui se réfèrent aux modes de raisonnement du sujet, ni les conceptions systémiques, mal du « système » en complément du mal de père ou du mal de mère... La question posée est celle de la complémentarité des approches et non celle de l'hégémonie d'une théorie sur les autres.
    Au rang des théories évoquées, il nous semble difficile d'oublier la phénoménologie qui, dans nombre de situations cliniques constitue une théorie du sujet des plus intéressantes, et en tout cas souvent moins mécaniste que certains aspects de la psychanalyse dans ses développements.
    Un vaste chantier pour une discipline très jeune historiquement est ouvert, mais comme « le bébé est une personne », tous les espoirs sont permis. Le sujet n'est plus à considérer comme une somme de « rondelles » séparées correspondant à l'approche arbitraire de différentes disciplines de sciences humaines. Le sujet est à reconsidérer dans sa totalité, dans sa globalité, comme un individu, terme qui étymologiquement signifie indivisible. Le sujet est à repenser dans son intégrité qui ne peut être atteinte que par une approche pluridisciplinaire.
     
    Pour ce qui concerne l'état des lieux de la formation, il ne saurait être question d'un passage obligé sous « les fourches Caudines » d'une idéologie analytique quelconque. Les « non endoctrinés », pourtant issus d'horizons différents, s'accordent à dire que la nécessité d'une formation à la pratique psychologique qui cherche à se libérer de l'acquisition du savoir, de l'accumulation de connaissances, est impérative. La formation est en question sous l'éclairage de l'expérience singulière d'une relation à autrui. Dans ce débat les universitaires disent : « c'est fait », certains : « certes il faut améliorer », de leur côté les étudiants répondent : « ça manque ». Et n'en déplaise aux gens de la faculté c'est un « dialogue de sourds », car les deux positions enseignants/enseignés ne sont pas antithétiques, elles ne sont tout simplement pas sur le même registre.
    L'expérience de la relation à autrui, c'est bien « nommer » le manque de la formation prodiguée. Mais il se trouve que c'est effectivement cette relation à l'autre qui demande nécessairement une participation affective, qui fait autant problème.
    Ce qui est en question c'est cette « participation affective », qu'il faut analyser, dont il faut prendre conscience, pour finalement tenir compte dans sa propre conduite tant au niveau des carences que des excès qu'elle peut comporter.
    C'est sûrement là que la formation du psychologue clinicien en devenir demande le plus d'attention et du coup, pose le plus de problèmes pour des questions largement idéologiques et doctrinales qui relèguent le sujet à une place d'objet.
     
    Une réponse à l'impasse universitaire réside dans le fait simple que cette formation est appelée à se diversifier, et ce, autant que faire se peut, en relation avec la demande professionnelle. Pourquoi former des professionnels qui n'auraient pas de débouchés professionnels ? Est-il bien nécessaire de persévérer dans une logique kafkaienne ?
     
    Quelle que soit la force conservatrice de la faculté, inhérente d'ailleurs à toute institution, il est certain que les études ne ressembleront pas dans quinze ans à ce qu'elles sont actuellement. Mais la question est ouverte : évolueront-elles passivement sous l'influence et les pressions externes, ou si, au contraire, et tel est notre désir intime, les acteurs de la formation seront capables de s'adapter, en d'autres termes, seront capables d'avoir prise active sur les événements et la réalité socio politique, économique et sociale...
    La diversification de la demande induit une diversification et une spécificité de la réponse. Pourquoi faudrait-il rester immuable sur des positions dogmatiques qui cherchent à figer le sujet comme un « papillon épinglé », alors que tout dans la vie n'est que mutation, transformation, passage... ?
    Il est donc indispensable de diversifier les formations, mais ceci passe par l'indispensable augmentation de la professionnalisation des études. Finalement, c'est la question du partenariat qui est posée mais à un autre niveau.
    Aujourd'hui, dans le champ du soin, ce sont les question complexes de l'interdisciplinarité, de la pluridisciplinarité, mais surtout de l'inter et de la pluri institutionnalité qui sont posées. Le clivage des approches est un temps révolu. Il est de plus en plus nécessaire d'échanger et mieux encore de confronter.
    Finalement tout cela se résume à une simple question : ce que nous n'apprenons pas par le savoir et les connaissances, faut-il absolument l'apprendre par la souffrance ?
    Oui, sans doute - mais il n'empêche que le travail clinique peut ne pas se consacrer exclusivement aux grandes morbidités de la nosographie psychiatrique classique, il a toute sa place auprès d'adolescents en crise, de jeunes enfants en souffrance, d'accidentés de la route, de victimes de catastrophes...
    Il est évident que nous sommes confrontés au constat de l'humanisation progressive de l'homme. Depuis le meurtre du père de la horde primitive, un long chemin a été parcouru. La prohibition de l'inceste, l'abus sexuel sur les enfants, ont connu des avancées notoires tant dans les traitements que dans le rapport à la loi. Bien entendu beaucoup reste à faire.
    Aujourd'hui, se posent les questions de la victimologie, de la criminologie, d'une psychologie clinique de la catastrophe qui, pour ce qui la concerne est peut-être l'apanage de notre culture de fin de millénaire. Mais, médecine, psychiatrie, psychologie, s'inscrivent dans un moment historique donné.
    Ceci étant, le prochain millénaire ne pourra naître que des affres du premier, même si apparemment il prend à contre-pied son prédécesseur.
    « Il est venu le temps des »... psychologues cliniciens qui ne sont plus simplement des « généralistes » de la psyché, car tout le monde ne peut pas tout faire, et les spécialités et les spécialisations n'ont qu'une solution : apprendre à cohabiter et à unir leurs efforts respectifs à seule fin de répondre au mieux à l'interrogation que pose le sujet, à la question qu'il nous pose.

    Patrice Richebœuf

    Psychologue Clinicien(4)
     
    (1) L. Villerbu, Psychologues et psychothérapeutes, L'Harmattan. 1993.
    (2) Dictionnaire de la Psychologie, Références Larousse, Sciences de l'homme, Norbert Sillanny.
    (3) Code de déontologie.
    (4) C.P.E.A. de Beaupré, 53 rue Blaise Pascal, 56000 VANNES.




    LA FORMATION CONTINUE DES DIRECTEURS D'HOPITAUX EN SANTÉ MENTALE

    La formation continue suppose l'imagination des formes d'apprentissage adaptées pour donner à chacun les capacités nécessaires à l'exercice de son métier. Le contexte de la psychiatrie colore certainement un emploi de direction d'un besoin particulier de savoir, de savoir-faire et de savoir-être.
    Pour m'être penché sur l'ingéniérie pédagogique de la formation initiale à l'ENSP, les objectifs professionnels d'un directeur exerçant à temps partiel dans le domaine de la santé mentale, correspondent non seulement à des capacités stratégiques et organisatrices générales introduites dès la formation initiale telles que le savoir-identifier les situations, la résolution de problèmes, le savoir négocier et concerter, planifier et manager par projet, organiser et doter en ressources, évaluer les hommes et les activités... mais aussi des capacités plus particulières au domaine de la santé mentale qui pourraient largement donner matière à quelques semaines de formation en cours d'emploi, avec éventuellement stage et rencontre avec les acteurs du terrain.
     
    Un stage de formation continue d'adaptation à la santé mentale pour insuffler le tonus managérial et maintenir l'imagination du pouvoir
     
    Une dynamique managériale est plus que jamais nécessaire dans une domaine où inertie entraîne fatalement la chronicisation des patients et par voie de conséquence, la culpabilité, le malaise et le risque de « burn-out » des soignants. L'apport du management à la psychiatrie a débuté dès l'individualisation de la fonction directoriale, succédant à celle des anciens médecins-directeurs dans les années 70.
    Le management stratégique en psychiatrie doit permettre de :
    * susciter les innovations : le traitement statistique des fiches patients envisagé comme étude de clientèle préalable à toute demande de projet d'établissement, l'éducation sanitaire comme organe de communication pour positiver l'image de la psychiatrie et créer la compliance des populations, le changement des représentations sociales du trouble mental souvent propagées par les professionnels eux-mêmes à travers des plans de formation les plus audacieux... ;
    * la croissance de l'extra-hospitalier ou de l'inter-sectorialité : avec notamment des unités d'interfaçage pour préparer le milieu familial simultanément aux soins prodigués individuellement à l'un de ses membres, et aussi les unités travaillant sur l'employabilité et l'orientation professionnelle ainsi que la prospection des employeurs pour favoriser le maintien de l'insertion sociale ;
    * les différenciations des structures psychiatriques sociales ou médico-sociales, et le développement de leur complémentarité par un partenariat spécifique pour la mise en adéquation des prises en charge ;
    * le souci de la maîtrise des coûts et la réorientation des ressources humaines, principales en psychiatrie, grâce à une gestion prévisionnelle des emplois et compétences associée aux finalités du projet d'établissement. L'adaptation du système d'information à la desserte du PMSI psychiatrique lorsqu'il sera devenu opérationnel.
     
    Des apports contenus
     
    Dresser la liste des thèmes spécifiques ou livrer un catalogue des connaissances professionnelles incontournables en santé mentale, serait fastidieux si on ne les range en ordre d'élargissement et d'ouverture croissant :
    * autour et depuis l'usager : le statut du malade hospitalisé avec ou sans consentement, les procédures d'admission, les visites légales et la commission des hospitalisations psychiatriques, la protection des droits, le statut des incapables majeurs et la gestion des biens, le handicap et les conséquences du classement COTOREP, l'irresponsabilité pénale et l'hospitalisation des prévenus, les soins psychiatriques aux détenus, les sorties d'essai, les gîtes extérieurs, la représentation des usagers au conseil d'administration...
    * autour des pratiques et des soignants : la nosographie et l'épidémiologie des troubles mentaux, les différents types de psychothérapies, le dossier du patient et la démarche de soin d'une équipe de secteur, les protocoles de mise sous contention, la démarche d'assurance qualité avec les référentiels psychiatriques. Les particularités du statut des psychiatres, leurs actes et expertises propres, celles de psychologues...
    * autour des unités : le règlement intérieur, les centres médico-psychologiques « pivot de secteur », les CATTP, Hôpitaux de jour, l'Accueil Familial Thérapeutique, les structures de la psychiatrie de liaison et de la présence aux urgences, avec lits d'observation, les lits de crise et l'accréditation en psychiatrie ;
    * autour des établissements : la sectorisation psychiatrique, son découpage et ses diverses modalités de rattachement, les modalités de coopération, l'entrouverture des cultures des établissements de santé généraux ou spécialisés ;
    * autour du système sanitaire et social : les objectifs de santé publique proches de la psychiatrie comme la prévention du suicide, de l'alcoolisme et de la toxicomanie, le travail social en psychiatrie et le travail en réseau avec les structures de travail protégé (CAT) et les Centres d'Hébergement et de Réinsertion Sociale, le Service d'Accompagnement et de Réinsertion Social, la différenciation et l'individualisation de prise en charge socio-éducative en Maison d'Accueil Spécialisé.
     
    Le développement de l'attitude « réseau »
     
    Les objectifs de la formation continue sont au moins doubles puisqu'ils devraient répondre à la fois au souci minimum de donner les bases à celui qui découvre ce domaine, par les apports de contenu, et intégrer ces contenus sous des formes appropriées, à des exercices pédagogiques visant à préparer selon sa personnalité aux nouveaux savoir-être et savoir-faire exigés de la période que traverse actuellement l'organisation du dispositif psychiatrique. La discipline psychiatrique devient de plus en plus transversale, et est de ce fait, particulièrement sensible au développement de la coopération et de la communauté entre établissements.
    * Préparer les directeurs à des modifications des attitudes ou des comportements différents de ceux hérités de l'ancienne vision managériale. L'ouverture de la psychiatrie sur le champ hospitalier et sur le champ social amène le besoin de participer, mais aussi de structurer et de gérer tout ou partie de nombreux réseaux. La stratégie plutôt concurrentielle doit se faire davantage stratégie d'alliance, ou plus exactement « éco-stratégie », préservant les besoins d'identité et d'appartenance tout en intégrant la connaissance des projets et la conjonction de l'action avec ses partenaires.
    * Savoir rédiger collectivement, et agir par la communication et la contractualisation revient à savoir « co-écrire » les nouveaux supports de la coopération et de la mise en synergie : article concernant la santé mentale et le recours au dispositif dans la charte constitutive de communauté, charte de filière de soin, charte constitutive de réseau, règlement intérieur des unités d'un syndicat inter-hospitalier principalement dédié à la santé mentale et remplaçant éventuellement le CHS...
    Trente ans après 68, année des révoltes estudiantines mais aussi de la séparation de la neurologie et de la psychiatrie, la formation continue n'est-elle pas l'occasion de maintenir la créativité juridique et l'imagination au pouvoir ?

    Serge Adam


    LA FORMATION CONTINUE, UN OUTIL POUR PRÉCISER LA PLACE DES AIDES-SOIGNANTES

    Si la question de la fonction des aides-soignantes dans les unités de psychiatrie générale n'est pas élucidée partout, il apparaît souvent que les affectations ont été trop partielles, n'assurant pas une continuité réelle de présence, et certainement aussi trop peu accompagnée sur le terrain.
    Lorsque ces deux conditions ont fait l'objet d'un positionnement institutionnel et plus particulièrement dans les objectifs du Service de Soins Infirmiers, la coordination du travail infirmiers/aides-soignants présente un intérêt pour la prise en charge des patients dans les actes de la vie quotidienne et dans l'amélioration du confort du patient et de l'hygiène.
    Deux niveaux sont à envisager pour les projets de formation.
    * Le travail de l'aide-soignant inscrit dans le projet de soins du patient et décliné dans des actions précises qui seront programmées, évaluées et réajustées au sein de l'équipe (grille d'autonomie-dépendance, plan de soins, guide, etc...).
    La notion de « binôme » professionnel est un potentiel à exploiter. Dans ce cadre, les aides-soignantes acquièrent des connaissances spécifiques pour la prise en charge des patients psychotiques. En effet, c'est plus souvent
    auprès de ces patients qu'un accompagnement dans les actes de la vie quotidienne peut être programmé autour d'objectifs centrés sur la recherche d'autonomie.
    * Le travail relatif à l'amélioration du confort du patient et de l'hygiène de l'environnement proche s'inscrit tout à fait dans le cadre des démarches qualité prenant appui sur des protocoles.
    Le traitement des besoins de formation doit faire l'objet d'une démarche intégrée en prenant en compte les contenus théoriques nécessaires et les savoir-
    faire :
    - l'apport de connaissances théoriques spécifiques à l'exercice en psychiatrie : l'objectif est de faciliter l'approche des comportements difficiles par des apports sur la psycho-pathologie, de comprendre le sens des actions mises en œuvre dans le cadre des projets de soins et d'adapter les attitudes ;
    - le développement des formations-actions avec un accompagnement sur le terrain : ces dernières visent à l'amélioration des pratiques relatives à l'hygiène plus particulièrement et au respect des procédures liées aux circuits, qu'il s'agisse de l'alimentation, du linge ou des déchets. De telles démarches facilitent aussi l'élaboration des référenciels institutionnels qui sont des outils précieux pour améliorer l'accueil des nouveau agents et plus couramment, l'encadrement des stagiaires.
    La formation continue des aides-soignantes envisagée selon ces approches est sans doute un moyen qui permettra de clarifier les rôles de chacun, de façon plus pertinente pour développer l'opérationnalité des aides-soignantes au sein de l'équipe infirmière.
    M.A.V.


    METTRE EN ŒUVRE LES POLITIQUES ET ACTIONS EN SANTÉ MENTALE
    Ces journées de formation organisées par l'ENSP avec la collaboration de la MNASM, se tiendront du 28 au 30 septembre 1999, au siège de l'ENSP, avenue du Professeur Léon Bernard, 34043 Rennes Cedex.
    Tél. : 02 99 02 28 50 ou 53, où les inscriptions sont ouvertes.
     
    * Mardi 28 septembre *
    10h : Accueil des participants, présentation du programme, Christian Bonal, Alain Jourdain.
    Evolution des idées et des approches
    thérapeutiques et psychiatriques
    10h-11h15 : Evaluation des idées en santé mentale et conséquences sur l'organisation des dispositifs de prise en charge, Dr Bernard Odier, Chef de service, Centre Philippe Paumelle, Paris.
    11h15-12h30 : Santé mentale et santé publique, Pr Parquet, Haut Comité de la Santé Publique.
    Les populations et les usagers des services de la santé mentale
    14h-16h : Table ronde.
    La santé mentale et l'exclusion sociale, Dr Piel, Psychiatre, Centre hospitalier Paul Giraud, Villejuif.
    Les adolescents : un public qui demande des réponses spécifiques, Dr Bourcier, Psychiatre, Hôpital Esquirol, Saint-Maurice.
    L'urgence psychiatrique : conditions d'une réponse adaptée, Dr S. Kannas, Psychiatre, Mission Nationale d'Appui en Santé Mentale.
    La place du secteur médico-social dans la prise en charge des maladies mentales, D. Brandéo, Directeur d'Etablissement.
    16h15-17h30 : Point de vue des usagers et débat général. Nouveaux besoins, nouvelles approches en santé mentale.
     
    * Mercredi 29 septembre *
    La politique régionale de santé mentale : les SROS et les Agences.
    9h-10h : La SROS psychiatrique en Aquitaine, Dr Bernard, MIR, Drass d'Aquitaine.
    10h15-11h15 : Politique régionale de santé mentale et projets d'établissements, Mme E. Beau, Chargée de Mission, ARH d'Ile-de-France.
    11h15-12h15 : Débat. Intérêts et limites d'une politique régionale de santé mentale.
    Outils de connaissance des soins et de la population : le PMSI et les études transversales
    14h-15h30 : Le point sur le PMSI en santé mentale, Magali Rineau, Mission PMSI, Direction des Hôpitaux.
    15h30-17h30 : Méthode d'analyse de l'offre de soins, l'expérience de la Mission d'Appui en Santé Mentale, Dr G. Massé, Mission Nationale d'Appui en Santé Mentale.
    L'évaluation et l'accréditation, outils du management des services
    9h-10h15 : L'accréditation : état des lieux, ANAES.
    10h30-11h45 : L'évaluation en santé mentale, Dr Terra, ANAES.
    11h45-12h30 : Débat sur les pratiques des participants.
    La mise en œuvre du changement : contrats d'objectifs et de moyens, projets d'établissement
    12h30-14h45 : Les principes des contrats d'objectifs et de moyens, Mr M. Maas, ARH Pays de la Loire.
    15h-16h30 : Conduite du projet d'établissement en psychiatrie, Mr J.M. Lasserre, Directeur de l'Hôpital de Basseins.
    16h30-17h : Evaluation de la session.



    DERNIERE HEURE
    Colloque des 8 et 9 juin organisé conjointement par la MNASM et par le CNEH
     

    L'ARTICULATION DU SANITAIRE ET DU MÉDICO-SOCIAL EN PSYCHIATRIE

    Une œuvre en devenir
    Le colloque des 8 et 9 juin 1999, organisé conjointement par la MNASM et par le CNEH, a réuni au NOVOTEL - Porte de Bagnolet à Paris, environ 300 personnes (directeurs d'établissements hospitaliers, d'établissements sociaux et médico- sociaux, médecins, infirmiers et cadres infirmiers, travailleurs sociaux, cadres administratifs des services centraux et déconcentrés du Ministère, ARH et organismes de sécurité sociale, associations...).
    Les ordonnances d'avril 1996 comme les premières orientations de la réforme de la Loi de 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales, insistent sur la nécessité du décloisonnement des champs sanitaire et médico-social et l'adaptation de l'offre aux besoins des hospitalisés au long cours en milieu psychiatrique.
    20 à 40 % des hospitalisés le seraient sans nécessité et, en bonne logique, relèvent de structures d'encadrement et d'accompagnement qui additionnent aux soins un projet de vie. Comment créer ces structures ? Comment faire passer ces personnes d'une situation figée de chronicisation à un renouveau dynamique de leur individualité ?
    Les deux journées du colloque ont proposé une série de réponses à ces questions.
    Une prise en charge mieux adaptée pour ces malades mentaux s'inscrit dans une stratégie qui vise de nouvelles pratiques et exige une démarche méthodologique.
     
    a) Les nouvelles pratiques
    Elles sont la condition sine qua non au décloisonnement ; elles passent d'abord par la psychiatrie de liaison et par un élargissement des actions du sanitaire, ce qui ne peut être mis en œuvre que par une dynamique constante et souple, entretenue par les personnels. A ce prix, la transformation des capacités, en lits et la création de structures alternatives à l'hospitalisation ne répondront plus à une seule logique financière mais à des besoins. Dans le même esprit, les établissements médico-sociaux cessent d'ignorer - par principe comme il arrive parfois - le besoin de soins psychiatriques de leurs résidents, sans lesquels bien des actions éducatives restent lettre morte. Pour les personnels, il s'agit d'apprendre à vivre ensemble pour un objectif commun qui raccorde le sanitaire axé sur le soin et le médico-social sur un projet de vie et conduit à une prise en charge globale de la personne. Cet apprentissage passe par une diversification des formations, en vue d'assurer les compétences de chacun par l'émergence de nouveaux métiers et par une articulation des savoir-faire.
     
    b) Une démarche méthodologique
    Les nouvelles pratiques ne vont pas de soi et engendrent des résistances. La démarche essentielle qui consiste à décider quelles sont les personnes qui relèvent du sanitaire, du médico-social et du social, nécessite un travail en réseau diversifié (privé, public, associatif) dont chacun des spécialistes partage avec les autres son savoir et contribue à l'élaboration d'une culture commune.
     
    La mise en œuvre du projet d'établissement médico-social
    Les dispositifs réglementaires et juridiques permettent la mise en œuvre de telles structures répondant au nécessaire décloisonnement. Les projets et leurs réalisations passent par plusieurs phases :
    * l'élaboration de projets médicaux, de soins et de vie portée par une équipe motivée autour du sujet-citoyen dont elle prend la charge, une dynamique de ces projets attentive à l'évolution de la personne, ce qui oblige à une adaptation permanente ;
    * un dispositif intersectoriel et de réseau ;
    * une remise en question des savoir-faire et des compétences, ce qui ne va pas sans la création d'outils de formation (initiale et continue) ni, sans un appel à la pluridisciplinarité ;
    * une organisation de l'administration elle-même, qui conjugue la connaissance des textes administratifs, l'étude des besoins des personnes et des personnels, l'élaboration des dossiers CROSS, l'organisation du cadre de vie, etc.
     
    Un questionnaire
    Les réponses à ce questionnaire, adressées par la MNASM à 330 établissements, indiquent que plus de 60 projets de création de MAS, FDT, CAT et Foyers de vie sont actuellement programmés pour la période 2000-2001. Ce chiffre peut s'additionner à la cinquantaine de structures déjà existantes.

    C. Rousset




    Pluriels

  • La Lettre de la Mission Nationale d'Appui à la Santé Mentale - Directeur de la publication : G. Massé - Comité de rédaction : G. Massé * Comité de rédaction : C. Bonal - E. Graindorge - S. Kannas - R. Lepoutre - J.-P. Mariani - C. Martin Le Ray - G. Massé - J.-C. Mie

  • "Pluriels", 74 bis, avenue Edison, 75013 Paris - N° de téléphone : 01.45.85.73.63 - N° de télécopie : 01.45.85.99.11.