AU SOMMAIRE
  • La prévention est-elle possible ?
  • La prévention c'est l'accès aux soins ?
  • Comment évaluer vos actions de prévention
  • Le Var

    PRÉVENIR ?

    L'essentiel de ce numéro 5 de "Pluriels" est consacré à ce que pourrait être la prévention dans un système de santé mentale dont le dispositif actuel définit imparfaitement l'objet ("Le dispositif de la prévention", p. 3).

    Il ne s'agit pas seulement de la prévention primaire dont notre débat ("La prévention c'est l'accès aux soins ?", p. 2) dit la difficulté principale : l'ignorance où on en est encore des causes de la maladie mentale, et le flou de ses déterminants sociaux, mais de la prévention tout entière, depuis l'accès aux soins ("Que se passe-t-il en amont de l'activité des psychiatres ?", A. Lazarus, p. 3) jusqu'au suivi des sujets une fois ceux-ci découverts. Ce que dénonce A. Néfussy ("L'attente des patients", ci-dessous) est, à tous les niveaux où la prévention pourrait agir, le défaut d'un système qui serait capable d'organiser l'action des différents acteurs par-delà les clivages qui aujourd'hui se superposent pour brouiller l'efficacité des mesures ponctuelles.

    "Le corps, le système et le milieu tissent entre eux des inséparables" (Édouard Zarifian, p. 2), mais à ces liens entre les déterminants de la maladie ne répond qu'imparfaitement un secteur qui n'a jamais pu triompher de la césure persistante entre le public et le privé et connaît des fortunes diverses dans son articulation avec les travailleurs sociaux et les associations.

    C'est dans un maillage qui mettrait fin aux clivages, qui ferait saisir d'un même mouvement le médical, le sanitaire et le social, et prendrait en compte tout l'individu dans une société aux changements rapides que se situe l'espoir d'un progrès. Il semble que tous les acteurs de la santé mentale en ont conscience. Un déclic manque encore qui exprimerait une volonté commune.

    R. Lepoutre *


    L'ATTENTE DES FAMILLES

    Si la prévention est à trois niveaux : primaire, secondaire et tertiaire, elle est tributaire de l'interactivité des quatre domaines suivants :

    * psychologique,

    * social,

    * scientifique - recherches épidémiologique, clinique, biologique et génétique,

    * philosophique - éthique morale/éducative, les lois et règles.

  • De plus, la prévention ne peut s'appliquer aux malades mentaux seuls qui, déjà, n'acceptent pas leur état, mais à toute la famille et, particulièrement, aux ascendants ou aux conjoints ; je ne retiendrai ici que quelques lignes de force.

    LA DIFFICULTÉ DE COMMUNIQUER VRAI

    Communiquer vrai est difficile car les relations de puissance et d'argent, le paraître et la normalité sont quelques-uns des obstacles créés par notre société. Ces difficultés engendrent des souffrances, donc un comportement de fuite ou d'agression qui est une des causes favorisant les maladies mentales.

    Respecter les autres permet de mieux se respecter soi-même. D'où l'importance de maintenir des relations à échelle humaine dans un climat de confiance et de vérité, particulièrement à l'école et avec les soignants et, en premier lieu, les pédiatres.

    Nous proposons les actions suivantes :

    Prévention primaire : jusqu'à présent, la France n'a jamais eu la volonté politique d'organiser la prévention primaire. C'est tellement vrai que, dans l'ordonnance n° 96346 du 24 avril 1996 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée, il n'y a aucune allusion au rôle de l'hôpital en prévention primaire, alors que cette même ordonnance étend la mission de l'hôpital au social, qui n'est pas sa mission principale et traditionnelle.

    Formation première de tous les acteurs de la société : ils doivent tous recevoir, dans le cadre de leur formation première et de leur profession, un enseignement adapté à leur fonction et en particulier : les pédiatres, les travailleurs sociaux, les infirmiers libéraux et des hôpitaux généraux, les médecins généralistes, les enseignants, etc.

    Politique de recherche : mettre en place une politique de recherche épidémiologique, biologique, génétique ou autres pour déceler la prédisposition à telle ou telle maladie mentale.

    Troubles de l'enfance - Rôle des pédiatres et des soignants : déceler le plus tôt possible les troubles, préparer et informer les parents afin que le deuil nécessaire (ajustement du décalage de l'idéal des parents par rapport à la réalité) intervienne rapidement. Ainsi, la culpabilité sera diminuée, donc leur efficacité dans l'accompagnement du malade sera renforcée.

    Pendant la période de l'adolescence : il y a un besoin de lieux de parole et de rencontre pour ceux qui sont en difficulté ou en marge, afin de permettre le développement de la communication entre enfants, adolescents entre eux, entre adolescents et adultes, et d'établir des repères dans une certaine sérénité et surtout dans l'anonymat. Cela suppose un changement des mentalités dans la cité et dans les quartiers, autrement dit, il s'agit de désamorcer le processus avant que les premiers symptômes n'apparaissent.

    L'éducation pour la santé : l'école devrait être le lieu d'épanouissement des futurs adultes et être le creuset de l'intégration sociale. Compte tenu des exigences économiques et idéologiques actuelles, elle risque de devenir un lieu de rejet de tous ceux qui sont hors de la "norme". Le modèle de l'école est construit sur les apprentissages. Les enseignants ont la connaissance technique mais ne sont pas suffisamment formés à la connaissance éducative. Actuellement, une formation encore insuffisante est donnée grâce aux fonds sociaux.

    La formation des professeurs d'école (IUFM) devrait intégrer une sensibilisation aux problèmes de santé mentale. La collaboration entre les médecins scolaires, les assistantes sociales et les soignants devrait devenir une réalité concrète.

    LA PRÉVENTION SECONDAIRE

    Valoriser le rôle des travailleurs sociaux et augmenter leur nombre. Ils appréhendent mieux les problèmes et essayent d'orienter les adolescents vers les solutions appropriées.

    Modifier radicalement la relation parents/psy. Pouvoir consulter les psy, d'une manière fluide et conviviale, être informé sur la situation, être conseillé avec cette touche de chaleur humaine qui permet de faire accepter les réalités. La pratique des réunions conviviales animées par des psy pour les parents permet de relativiser les problèmes. Elle devrait être généralisée.

    A tous les niveaux, établir un partenariat avec les parents.

    LA PRÉVENTION TERTIAIRE

    Ne pas attendre que le malade psychique atteigne la crise pour l'hospitaliser avec tous les traumatismes que cela engendre. Mettre en place les stratégies d'information et d'approche pour l'amener progressivement à se faire soigner. C'est la conjonction de l'action de tous les partenaires concernés qui donnera des résultats.

    Privilégier le déplacement des équipes de soins à domicile, surtout en période d'urgence.

    Créer des structures et services adaptés aux malades mentaux, suffisamment variés et flexibles pour les accueillir selon leur progression ou leur régression. C'est du ressort du sanitaire aussi bien que du social.

    Apprendre aux parents à prendre la distance adaptée par rapport aux exigences de leurs proches souffrant de maladie mentale. Leur faire accepter des risques calculés pour faciliter à ces derniers le cheminement vers une certaine autonomie. C'est le rôle des soignants et des associations comme l'UNAFAM.

    Améliorer la qualité de l'accueil des lieux de soins.

    Je résumerai la philosophie qui devrait guider chacune de nos actions par cette pensée : "dans la détresse, le sentiment d'être entouré et aimé, par des êtres d'une patience sans limite, apporte la chaleur et la force de la surmonter".

    Albert Néfussy

    Administrateur de l'UNAFAM *


    LA PRÉVENTION EN PSYCHIATRIE EST-ELLE POSSIBLE ?

    La psychiatrie poursuit des efforts réguliers pour être une branche de la médecine comme les autres et pour se donner une aura scientifique.

    La médecine offre un modèle sur lequel la psychiatrie s'efforce d'aligner ses raisonnements, ses méthodes d'évaluation et ses traitements. Les progrès de la médecine l'ont fait devenir curative puis préventive et enfin prédictive avec les outils de la génétique moléculaire. La psychiatrie peut-elle en espérer autant ? J'en doute si elle persiste à se référer exclusivement à la méthode anatomo clinique et à la recherche d'une organicité lésionnelle qui connaissent pourtant légitimement leurs moments de gloire en pathologie somatique. La souffrance psychique implique un psychisme incapable d'une relation adaptée à son environnement. Toute prévention suppose la connaissance de l'appareil psychique, de son développement et des conditions relationnelles extérieures qui peuvent amener une impossibilité à s'adapter aux conflits. La découverte de facteurs organiques vraisemblablement en cause dans certains troubles psychiques, même si leur déterminisme est génétique, ne saurait transformer la pathologie psychiatrique en maladies neurologiques. La prévention nécessitera toujours la prise en compte simultanée de déterminismes multiples où le corps, le psychisme et le milieu tissent entre eux des liens inséparables.

    Édouard Zarifian


    LA PRÉVENTION C'EST L'ACCÈS AUX SOINS ?

    Prévenir un événement pathologique c'est éviter qu'il se produise en supprimant sa ou ses causes. Prédire pour prévenir, c'est aujourd'hui le rêve de toute la médecine : découvrir les signes précurseurs au moment où ils ne présentent d'autres dangers que potentiels et pouvoir les supprimer sans provoquer d'autres dommages. En médecine du corps, ce rêve c'est une intervention génétique conduite in utero grâce à la connaissance de la cartographie du génome et au moyen de modifications des gènes déficients. Toute pathologie serait ainsi éradiquée, toute la pathologie du moins de source entièrement endogène ! En cette époque de Sida et de vache folle, on sait qu'il en est d'autres, nombreuses et redoutables, contre lesquelles la prévention, si on en trouve les moyens, est plus tardive et délicate. Mais en pathologie mentale, où le rôle de la génétique reste indécis, prévenir qu'est-ce que c'est ?

    C'est à cette question de CHRISTIAN BONAL que s'efforce de répondre ce débat qui réunit SERGE KANNAS, ANTOINE LAZARUS, JEAN-JACQUES MOITIÉ et DOMINIQUE PROVOST.

    UNE PRÉDICTION DOUTEUSE

    Pour Serge Kannas, la prévention en santé mentale, ce pourrait être un ensemble d'interventions situées en amont de la pathologie déclarée, qui se montreraient efficaces, soit qu'elles enrayeraient définitivement le développement de la maladie, soit qu'elles fréneraient son cours, soit qu'elles en diminueraient les effets. "Mais voilà en fait ce qu'elle n'est pas parce que nous ignorons les causes de la pathologie mentale ; parce que, s'il existe des hypothèses nombreuses, elles sont concurrentes et non vérifiées. On ignore même les facteurs de risque dont la responsabilité serait scientifiquement avérée." Et Serge Kannas cite comme exemple de cause douteuse la mère de l'enfant schizophrène dont le comportement, selon certaine croyance, agirait sur le bébé et créerait la maladie : "Mais la mère n'est pas seule dans l'entourage de l'enfant et d'autres facteurs sont sans doute à l'œuvre."

    Ce qui veut dire, comme le résume Jean-Jacques Moitié, qu'il n'existe pas en pathologie mentale de facteur causal du type de ceux qui, en médecine du corps, ouvrent sur la vaccination préventive. Pour Dominique Provost, des tentatives de prévention primaire existent cependant, comme les Maisons Vertes, dont l'action lui semble effective. Pour Serge Kannas, les résultats de leurs entreprises restent inappréciées et, dans l'état actuel des choses, leurs bénéfices improuvables.

    LA MALADIE, NON, MAIS LE MAL-ETRE ?

    "La prévention primaire des maladies psychiatriques "classiques", étiquetées en tant que telles, est sans doute aujourd'hui impossible", reconnaît Antoine Lazarus. "Par contre, cette prévention existe si on considère qu'il s'agit de prévenir le mal-être : soit la situation d'un individu vivant dans un cadre social donné qui le fragilise dans son appartenance et dans son identité." Antoine Lazarus pense évidemment à certaines classes sociales mais aussi à certains lieux, à certains moments et situations où des difficultés familiales, économiques, professionnelles, culturelles aussi menacent un individu pauvre ou minoritaire, isolé ou en rupture. "Il s'agit de l'insécurité, de l'exclusion et, plus encore, des réactions qu'elles provoquent. La plus caractéristique peut-être de ces situations est aujourd'hui celle de "jeunes" qui, par leur refus de l'ordre social, font peur aux adultes et aussi aux jeunes ­ les autres et eux-mêmes ­, et qui cessent de faire peur quand on peut les dire "à problème". Seul l'étiquetage rassure ! Mais Serge Kannas doute d'une possibilité de prévention de ces situations : "On peut les décrire, mais ce qu'on désigne alors, on ne peut le plus souvent pas en faire l'épistémologie. On ne peut que combattre la précarité, par exemple celle entraînée par les familles monoparentales qui souffrent dans l'adversité de la pauvreté de leurs moyens de recours. Sur le terrain, insiste-t-il, nous nous trouvons pourvus d'un mélange de croyances et de pratiques. Et il revient sur l'exemple de la mère de l'enfant schizophrène : on croit qu'elle est dangereuse (croyance) et on la sépare de son enfant parce que le premier réflexe en psychiatrie (pratique) reste l'hospitalisation. Or cette pratique, qui répond à cette croyance, est un "pattern" dont les bases cliniques restent souvent incertaines, comme une étude hollandaise le prouve. Elle montre que sur les mêmes signes cliniques, trois équipes recourent à l'hospitalisation dans des proportions fort différentes : de 60 % pour la première à 35 % pour la dernière."

    Antoine Lazarus rétorque qu'avec l'exemple de la mère de l'enfant schizophrène, Serge Kannas choisit une maladie étiquetée "classique". C'est dans le cadre plus vaste de ce qu'est le mal-être qu'il cherche pour sa part les éventuelles corrélations entre troubles et situations qui les engendrent ou y contribuent, et qui sont des traits de notre société comme : l'affaiblissement de l'autorité paternelle, le divorce facile, la pratique de l'IVG, la mixité précoce, les mauvais traitements à enfant, l'aspiration à un statut social élevé, etc.

    "Sans doute sommes-nous actuellement très loin d'apporter une preuve sans équivoque de ces corrélations : d'une relation causale entre, par exemple, la mixité dès l'enfance et la souffrance morale. Mais la volonté de prévention existe chaque fois qu'est mis en avant et en œuvre le souci de l'autre. C'est là que se décrit une zone de dialogue où, si on ne sait pas très bien ce qu'on prévient, maladie étiquetée ou non, s'opère cependant une fonction sociale de régulation pour et aussi par le bien de l'autre."

    Antoine Lazarus constate là l'existence d'un dispositif (cf. ci-contre le dispositif de la prévention) souvent hétéroclite, fait de bric et de broc, mais qui néanmoins existe dans tous les pays riches. Il s'agit sans doute d'une arme à double tranchant qui peut en effet servir "au bien de l'autre", mais aussi à son étiquetage, à sa classification et donc, éventuellement, à son exclusion ou à sa punition. Pour réduire la peur et les dangers de la peur, on prend le risque d'introduire une plus grande peur et d'autres dangers. Se profilent ici les couples antagonistes : ordre social/maladie mentale ; coercition/liberté.

    LA PRÉVENTION SECONDAIRE C'EST LE DÉPISTAGE PRÉCOCE ?

    Face à cette prévention primaire mal cernable et identifiable, la prévention secondaire, celle qui peut se développer lors de la manifestation des premiers signes médicalement décryptables, c'est le dépistage précoce en vue d'un traitement qui, administré précocement peut ­ on l'espère ­ minimiser le développement de la maladie mentale. "Mais, ajoute Serge Kannas, il n'existe pas de lien organique entre dépistage et traitement."

    Ici se situe, estime Antoine Lazarus, une question éthique lourde de conséquences pratiques : peut-on dépister quand n'existe pas de sanction thérapeutique pour ce qui est dépisté ? La volonté de connaissance des causes, à elle seule, autorise-t-elle la manœuvre de dépistage quand les possibilités thérapeutiques ne suivent pas, ou quand elles servent de manière incertaine quant à leur effet ?

    Poser cette question c'est dire que la prévention ne se légitime jamais que d'un mouvement volontariste. Et dans tout volontarisme, il y a un pari.

    Ce pari, Dominique Provost le voit illustré par les dispensaires d'hygiène mentale et, plus généralement, par le déploiement des secteurs psychiatriques en vue d'obtenir une rapidité d'intervention sur les populations qui en éprouvent le besoin.

    DES PROGRES, MAIS TRES LENTS

    Serge Kannas note, et il n'est pas le seul à le faire, un certain nombre d'effets réels du pari préventif ­ réels même s'il ne s'agit que d'impressions dont l'épidémiologie statistique est malaisée. (Il va de soi qu'on ne peut ainsi prendre en compte toutes les souffrances morales non étiquetées que rencontrent, sans toujours les prendre en charge, les médecins généralistes.) Il note ainsi une raréfaction de toute une série de manifestations pathologiques : les grands états mélancoliques, les grandes périodes délirantes, les délires schizophréniques... Cette raréfaction est-elle due au dépistage et aux interventions précoces, médicamenteuses ou pas ? On l'ignore. Il note par ailleurs une diminution du temps des hospitalisations : alors que les psychotiques passaient naguère ­ avant les psychotropes ­ les neuf dixièmes de leur vie à l'hôpital, ils y passent aujourd'hui, en moyenne, moins de 60 jours par an.

    Ces progrès existeraient donc bien ­ si du moins on pense que les maladies mentales restent quantitativement stables et qu'il n'y a pas de déplacement de symptomatologie. Si donc on ne peut, avec une complète certitude, attribuer ces améliorations au dépistage précoce suivi d'une thérapeutique adaptée, on peut considérer comme probable qu'il existe bien un lien entre ceci et cela, mais...

    * Mais ces pratiques thérapeutiques, qui tendent à réduire les hospitalisations à répétition, ne sont sans doute pas pour rien dans l'augmentation de la demande thérapeutique en ville : elles ont agi sur la sensibilité sociale, que ce soit celle des médecins porteurs d'une offre plus généreuse, ou celle des populations avides d'une régulation de leur mal-être.

    * Mais en pratique, ces progrès ne sont pas sans effets secondaires défavorables : "Il existe une véritable iatrogénie des pratiques psychiatriques actuelles, estiment Serge Kannas, Jean-Jacques Moitié et Dominique Provost. Ces pratiques pêchent tantôt par défaut et tantôt par excès : par défaut quand il s'agit des urgences et quand, à une consultation rapide, ne succède pas une action thérapeutique rapide ­ ce qui laisse souvent le patient échapper aux soins ­ ; par excès quand les psychiatres recourent trop souvent au pattern psychiatrique de l'hospitalisation qui conduit à la séparation d'avec la structure familiale naturelle en faveur de ce système artificiel qu'est l'hôpital. Jean-Jacques Moitié surenchérit et estime que dans certains cas une régression se dessine : "Non seulement le recours au "bunker" de l'hôpital se poursuit, mais les recours aux prises en charge à domicile régressent". Et il insiste sur les déficits préventifs persistants de la PMI et du milieu scolaire.

    Cet aspect moins optimiste de la situation actuelle est aggravé par deux remarques de Dominique Provost : "Il existe en France de très nombreuses zones psychiatriques blanches. On note une diminution de recrutement des psychiatres et des infirmiers..."

    POUR UNE PSYCHIATRIE SOCIALE ?

    Pour Antoine Lazarus, nous en sommes venus aujourd'hui à une situation paradoxale : la santé mentale est sans relation réelle avec l'action psychiatrique des psychiatres qui ne sont pas préoccupés de ce qui se passe dans "la vie ordinaire" ; de ce qui se passe en amont de leur activité médicale, c'est ce qui explique les très rares recherches conduites dans ce domaine, le plus vaste cependant des affections mentales. Aussi, les troubles précoces, par définition mal articulés encore et répondant peu aux définitions classiques, échappent-ils à la compétence psychiatrique. La compétence, d'ailleurs, hors les psychiatres et donc hors le champ psychiatrique étroit, où est-elle ? Elle est peu partagée : nous ne savons pas lire les signes précoces, nous manquons à la fois de vocabulaire pour les dire et de code pour les interpréter. "Des transferts de savoir existants s'imposent entre l'hôpital général, l'école, la famille. Nous manquons de connaissances et de transmissions de connaissances."

    La clef de toute la situation de la prévention en matière de santé mentale ­ que cette prévention soit primaire, secondaire ou tertiaire ­ c'est d'abord le souci de savoir : mieux définir les buts et les rôles, et d'assigner ainsi une destination aux moyens qui sont là, pour rendre le dispositif opératoire.

    R. L. *


    LE DISPOSITIF DE LA PRÉVENTION

    La distinction ­ prévention primaire (destinée à conditionner le tissu social aux questions de santé mentale) et prévention secondaire (voulant éviter le développement de la maladie et de l'hospitalisation) ­ n'est pas opératoire en psychiatrie.

    Pourtant le législateur permet (art. 711-11 du CSP) à chaque établissement assurant le service public, participant à la lutte contre les maladies mentales et pourvu qu'il soit sectorisé, d'inclure la dimension de prévention de son action.

    La première conséquence est d'évincer de la sphère prévention le service public non sectorisé ainsi que les cliniques privées à but lucratif.

    La deuxième est d'inclure dans les remboursements de la Sécurité Sociale toute action de ce type menée par les établissements définis à l'article 711-11.

    La troisième est de réaffirmer, par la loi de 1991, la possibilité de mettre en œuvre, par des structures hospitalières adaptées, ce type d'action. Ici, ce sont les CMP qui, par l'arrêté du 14 mai 1986, sont reconnus explicitement comme devant organiser des actions de prévention.

    Le cadre général juridique est ainsi tracé, mais le contenu et les mesures d'accompagnement restent essentiellement à la diligence des acteurs locaux.

    Si la volonté des acteurs est bien réelle, une véritable politique, y compris au niveau local, reste à définir.

    Le rôle des équipes de secteur fluctue souvent entre prévention, diagnostic et soins. Les frontières conceptuelles sont floues et, si elles étaient définies, devraient être opérationnelles.

    L'évaluation de ces actions reste difficile aussi bien sur la qualité que sur la quantité.

    Pourtant, ici et là, des actions de sensibilisation, de coordination, de travail en commun avec tous les acteurs de la cité permettent de mieux appréhender la santé mentale.

    C'est par une meilleure définition de son objet, du rôle de chaque acteur institutionnel, de la création future de réseau et de partenariats locaux, que les axes d'une prévention clairement établie pourront être déterminés.


    le département

    du Var

    UN DÉBAT POUR UNE SYNTHÈSE

    Le rapport sur la psychiatrie dans le département du Var a été achevé et remis à ses commanditaires

    dans le courant du mois de septembre 1995. Compte tenu du climat passionnel qui avait précédé la venue

    de la Mission, il était du plus haut intérêt d'évaluer à distance les incidences

    directement ou indirectement générées par cette démarche en matière de relations ou d'organisation.

    C'est dans cet esprit que fut organisée à Toulon, à l'initiative conjointe de la mission nationale et des autorités

    de tutelles régionale et départementale, une réunion de synthèse associant les principaux acteurs

    dans le domaine de la santé mentale.

    L'objet de cette réunion était par nature limité : il ne pouvait être question d'étudier en profondeur

    chacune des propositions de la mission mais seulement d'examiner avec les responsables locaux si les conditions étaient désormais réunies pour une évolution des structures... et des esprits.

    Étaient présents : M. Bonnici et Mme Chantal Borne (Toulon), M. Boyer (Draguignan), Mme Borie (DASS Toulon), M. Calvet (Toulon), M. Chanu (Sécurité Sociale Toulon), M. Carouge (Fréjus), Mme Gaspari (DASS Toulon), M. Genevier (Pierrefeu), M. Lepoutre (Mission Nationale), Mme Malleval (DRASS), M. Morazzani (Pierrefeu), M. Sœur (Mission Nationale).

    Les propos introductifs de Mme Malleval n'ont laissé que peu de place au doute ; elle fit état dès l'abord de sa grande satisfaction devant le premier résultat tangible à savoir la signature le 24 avril 1996 d'un contrat d'objectif entre l'État, l'assurance maladie et les hôpitaux du Var (voir page C).

    Cette première étape est tout à fait remarquable, tout d'abord en raison des délais particulièrement courts d'élaboration du document ­ ce qui montre le volontarisme des cosignataires ­, mais aussi par l'ampleur du dispositif puisqu'en 1996, 15 000 000 F seront consacrés à la mise à niveau de la psychiatrie varoise, effort exceptionnel si l'on considère que la marge de manœuvre régionale, toutes disciplines confondues avoisine 95 000 000 F. Chacun d'ailleurs en était pleinement convaincu et la courtoisie des dialogues était un indicateur fidèle d'un climat de confiance rétabli. L'approche technique de quelques problèmes majeurs qui apparaissaient comme des points critiques permit de constater que ce n'était pas un leurre.

    La psychiatrie à Toulon, secteur fortement déficitaire, venait de bénéficier d'une dotation supplémentaire de 43 postes ainsi répartis :

    * 23 par redéploiement en provenance de Pierrefeu avec prise en charge corrélative des malades des secteurs 1, 2, 3 de Toulon hospitalisés jusque là sous contrainte au CHS ;

    * 10 postes redéployés au sein du CHG de Toulon ;

    * 10 po stes créés.

    La cohérence du dispositif varois de prise en charge des malades sous contrainte s'en trouve donc largement renforcée même si le regroupement des malades des trois secteurs dans une unité unique à Chalucet ne satisfait pas pleinement M. Bonici et le docteur Calvet. Au niveau des inquiétudes liées aux questions sans réponse, le sort réservé aux secteurs 9 et 10 de la Seyne. Certes de nouveaux redéploiements interviendront prochainement mais cela ne saurait couvrir l'ensemble des besoins qui restent globalement assez mal satisfaits dans cette commune littorale à tradition industrielle.

    Tout cela ne saurait ternir les relations entre CHG et CHS qui semblent au beau fixe. M. Morazzani et le docteur Genevier témoignent de l'évolution sans faille du dispositif et du transfert de 23 postes. L'enveloppe budgétaire accompagnant le redéploiement va même au-delà puisqu'elle inclut les frais de gestion de l'unité fermée à Pierrefeu.

    Par ailleurs, des infirmiers de Pierrefeu participent désormais à l'accueil des urgences au CHG de Toulon ce qui montre la volonté de ces deux établissements de tisser des liens étroits pour assurer une meilleure couverture sanitaire du territoire.

    La carte sanitaire ne semble plus poser de problème à quiconque. Le découpage proposé est validé, même s'il suscite quelques réserves du côté de Draguignan. Pour le docteur Boyer tout s'est fait très vite, peut-être parfois trop vite. Dix postes de soignants et trois postes de praticiens ont été créés pour doter le secteur nouveau-né. C'est à la fois beaucoup et pas assez ; trop peu sans doute en raison de l'ampleur des charges nouvelles, trop si l'on évoque les réactions de convoitise gourmande des praticiens des autres disciplines qui jettent un regard envieux sur cette manne. Ce ne saurait toutefois être un obstacle et la création du deuxième secteur rattaché à Draguignan conforte les équipes en donnant une nouvelle dimension à ce pôle sanitaire de l'Est varois.

    Il en va de même pour l'hôpital de Fréjus et le docteur Carouge témoigne d'une avancée rapide des travaux : une maison a été achetée en ville, ce qui a permis d'extérioriser l'hôpital de jour et depuis le premier mai les malades hospitalisés sous contrainte sont accueillis dans le nouveau service.

    Globalement, il s'agit donc d'un constat très satisfaisant et Mme Malleval s'en réjouit ainsi que Mme Gasari. Toutes les inquiétudes liées à la rédaction de la carte sanitaire sont désormais levées et des questions essentielles comme les modalités de prise en charge des malades sous contrainte sont en voie de résolution. La couverture sanitaire est nettement améliorée grâce à une redistribution des cartes librement consentie mais aussi ­ et c'est sans doute un point essentiel ­ en raison d'un climat de confiance aujourd'hui restauré.

    Il restait à Mme Malleval à conclure, ce qu'elle fit en rappelant que le calendrier serait respecté et les engagements tenus. Une réunion aura lieu tous les six mois pour faire le point sur les travaux, pointer les difficultés et procéder aux éventuelles corrections et adaptations.

    R. Lepoutre, A. Sœur *


    LA MISSION DANS LE VAR

    (1)Le contexte du Var

    Contexte géodémographique

    Le Var peut être décrit en trois parties fortement différenciées. Le littoral où résident la plupart des Varois et qui est la plus concernée par le tourisme, cette partie s'étend de Toulon-Hyères à Saint-Tropez et Saint-Raphaël. Le moyen Var où l'on constate une croissance de population et qui se dispose autour de deux agglomérations, Brignoles et Draguignan. Le haut Var comprenant le pays du Verdon et de l'Artuby qui forme une zone touristique, peu peuplée et éloignée des grandes villes du département.

    Le Var est encadré par deux métropoles, Nice à l'Est, Marseille à l'Ouest.

    La population de 850 000 habitants, dont les deux-tiers sont sur l'agglomération de Toulon, représente 20 % de la population de la région PACA. Ces habitants comprennent la plus forte proportion de personnes de plus de 60 ans de la région (25 %) et la plus faible part de personnes de 0 à 19 ans (23,8 %). Cette population a le plus fort taux d'accroissement de la région et devrait s'accroître de moitié dans le prochain quart de siècle, notamment du fait des migrations. Celles-ci sont internes à la région, par mouvement de l'intérieur vers le littoral et de Marseille et Nice vers les petits villages Varois, sont nationales notamment par afflux de personnes âgées aisées ou par l'arrivée de personnes défavorisées et sont internationales en provenance de tout le pourtour méditerranéen. Dans le Var, chômage et RMI existent à un taux plus élevé que la moyenne nationale.

    Le contexte sanitaire général du Var

    Avec 226,5 médecins pour 100 000 habitants dans le secteur libéral, le Var est au-dessus de la moyenne nationale mais en dessous de la moyenne régionale (270 pour 100 000). Six centres hospitaliers et un hôpital des armées forment le dispositif public. Cinq secteurs partagent le Var : Toulon-la-Seyne est le plus grand pôle sanitaire et devrait être SAU, les autres sont Hyères, Brignoles, Draguignan, et Fréjus-Saint-Raphaël qui devrait également être SAU. Draguignan devrait contribuer à la prise en charge sanitaire des détenus, Saint-Tropez œuvrer en partenariat avec la clinique privée voisine.

    Le contexte sanitaire en santé mentale du Var

    La psychiatrie libérale, essentiellement centrée sur Toulon est forte de 19 neuropsychiatres, 74 psychiatres, 11 psychiatres pour enfants et adolescents. En para-médical exercent 47 psychologues et 174 orthophonistes.

    Douze secteurs de psychiatrie générale sont rattachés à quatre établissements, Draguignan (1 secteur), Pierrefeu-du-Var (4 secteurs), Saint-Raphaël (2 secteurs), Toulon (5 secteurs). Quatre secteurs de psychiatrie infanto-juvénile sont respectivement répartis sur Toulon (2 secteurs), Pierrefeu (1 secteur) et Fréjus-Saint-Raphaël (1 secteur).

    L'état des lieux en santé mentale Pour les secteurs rattachés à Toulon-la-Seyne

    Chalucet, Font-Pré et la-Seyne sont les trois sites sur lesquels devraient se répartir les hospitalisations des secteurs toulonnais. A ce jour le secteur 83G01 ne dispose toujours pas de lits et fonctionne avec une équipe plus que réduite. Ce secteur souffre fortement de la superficialité de l'intersectorialité, ou de la très faible entraide entre secteurs. Le secteur 83G02 doit développer ses activités en ambulatoire. Le secteur 83G03 est dans des locaux vétustes et inadaptés et doit développer ses activités en ambulatoire. Il en va de même pour les secteurs 83G09 et 83G10. Globalement la psychiatrie générale sur Toulon présente un déficit qualitatif et quantitatif en locaux et lits. Son dispositif alternatif à l'hospitalisation et propre à l'activité ambulatoire reste à développer. Ses équipes doivent être étoffées. Cette base de départ étant à mettre en place, les secteurs toulonnais ne sont pas encore prêts à réaliser certaines actions intersectorielles.

    Pour la psychiatrie infanto-juvénile, gérée par deux secteurs, l'implantation des CMP est insuffisante en nombre et il manque des places d'hospitalisation de jour. L'ouverture vers les adolescents doit être faite.

    Pour les secteurs rattachés à Pierrefeu-du-Var

    Il existe une mauvaise concordance entre les bassins de population et la répartition des secteurs de psychiatrie générale. Cet établissement accueille les patients hospitalisés sous contrainte venant de l'ensemble du département sauf les HDT du secteur de Draguignan, de même pour les patients fortement déficitaires dont le problème majeur est l'incapacité d'insertion sociale. Les structures intersectorielles de cet établissement ne travaillent pas suffisamment en articulation avec les secteurs. Bien qu'un développement des activités hors hospitalisation marquent clairement les progrès réalisés par l'établissement et les équipes de soins, il reste à relocaliser certaines activités. Si un nombre important de structures offre un dispositif de soins de bon niveau il reste que celles-ci gagneraient beaucoup à fonctionner en réseau entre elles et avec certaines structures sociales ou médico-sociales. Une tendance centripète provocant un repli des équipes de secteur sur elles-mêmes, ne permet pas de pleinement valoriser le dispositif de soins mis en place par l'établissement.

    En ce qui concerne la psychiatrie infanto-juvénile, les soins sont répartis sur trois pôles : Hyères, Pierrefeu, Brignoles. Le problème posé par l'étendue géographique du secteur doit trouver des solutions. Ce dispositif de soins montre un savoir-faire de qualité. Il reste à étendre ce dispositif d'une part vers les adolescents, d'autre part vers la petite et toute petite enfance.

    Pour les secteurs rattachés à Fréjus-Saint-Raphaël

    Les secteurs 83G07 et 83G08, fonctionnant de fait de façon intersectorielle, sont encore en sous-effectif et sous équipés en locaux et lits. Il est souhaitable que se réalise l'extension de leur implantation en ambulatoire et de leur bonne complémentarité avec les soins généraux.

    La psychiatrie infanto-juvénile souffre du saupoudrage de ses moyens insuffisants sur une grande aire géographique. L'accueil, en particulier à temps complet, des adolescents est à développer. Le travail de liaison avec les hôpitaux généraux est à renforcer.

    Pour le secteur rattaché à Draguignan

    Le secteur 83G01, auquel le site annexe de Saint-Pons inadapté à la psychiatrie est rattaché, couvre une grande étendue, assure la psychiatrie de liaison et participe aux urgences. Son équipe médicale nécessite d'être renforcée. La psychiatrie infanto-juvénile est assurée par le secteur rattaché à Fréjus-Saint-Raphaël.

    Les centres hospitaliers généraux et autres établissements de soins

    Hyères, 10 000 hospitalisations par an, 23 000 urgences par an, 70 000 consultations externes par an, est par convention avec Pierrefeu, en liaison avec le secteur 83G05.

    Brignoles, 11 000 urgences par an, hospitalise dans ses lits un certain nombre de patients présentant des troubles mentaux liés à l'alcoolisme et aux suites de tentatives de suicides. Cet établissement est désireux de marquer plus nettement sa coopération avec Pierrefeu en particulier avec un centre de crise et 5 à 10 lits de psychiatrie. Deux secteurs sont concernés intersectoriellement par ce développement.

    Saint-Tropez, des conventions existent avec Fréjus-Saint-Raphaël et Pierrefeu. Quelques patients psychiatriques sont hospitalisés sur place dans des lits de médecine. Des lits psychiatriques caractérisés, notamment pour les personnes âgées sont souhaités par cet établissement.

    La maison de retraite et de cure médicale du Luc, sur 407 lits d'hospice, 120 lits de cure médicale et 50 places de soins infirmiers à domicile, la place des troubles psychiatriques est majeure puisque seulement 7 % des résidents sont clairement indemnes de déficit ou de troubles psychiatriques. Bien que deux psychiatres du secteur 83G06 sont à même de soutenir le travail de cette institution, leur présence est trop insuffisante par rapport à la demande.

    L'hôpital d'instruction des armées Sainte Anne, pratique un accueil de patients présentant des troubles psychiatriques et souhaite participer au service public, en particulier en ce qui concerne les adolescents, les urgences mais aussi la psychiatrie de catastrophe.

    La clinique des Trois-Soliès, établissement privé à but lucratif, dispose de 104 lits. Cet établissement souhaite une coopération et une complémentarité avec le service public.

    Les propositions de la Mission Nationale d'Appui en Santé Mentale

    Principes généraux pour la psychiatrie générale

    * Les hospitalisations sous contrainte doivent être réalisées dans chaque secteur et non plus seulement à Pierrefeu-du-Var.

    * La cartographie des secteurs doit être revue pragmatiquement et sans délais pour mieux desservir les bassins de populations et tenir compte des progressions démographiques.

    * Le centre hospitalier de Pierrefeu, qui dispose d'un savoir-faire incontestable, doit transférer des moyens vers les autres secteurs pour l'accueil et le traitement des hospitalisations sous contrainte. Il doit également, en raison de ses compétences, valoriser celles-ci par une réalisation effective de l'intersectorialité.

    * Toulon et Pierrefeu sont complémentaires, leurs compétences doivent donc être clairement définies pour prévenir des querelles entre fiefs.

    * La zone Est du département est plus tournée vers Nice que vers Toulon. La création d'un second secteur sur Draguignan doit permettre de renforcer cette identité.

    Principes généraux pour la psychiatrie générale infanto-juvénile

    * La psychiatrie infanto-juvénile repose sur un découpage raisonnable. Un secteur supplémentaire provoquerait un effet d'émiettement préjudiciable aux populations bénéficiaires. La pénurie reconnue de ces secteurs doit être rapidement corrigée.

    * Les secteurs toulonnais et celui de Fréjus-Saint-Raphaël souffrent d'une carence évidente en personnels. L'ensemble des secteurs de psychiatrie infanto-juvénile est sous-doté.

    * Un effort rapide doit être consenti pour doter chaque intersecteur de CMP opérationnels en locaux et personnels. Toulon doit renforcer son nombre de places d'hôpitaux de jour. L'accueil et l'hospitalisation des adolescents ne doivent plus se faire à Marseille ou Nice. Un centre de crise doit être mis en place pour eux sur l'agglomération toulonnaise au moins et sur Fréjus-Saint-Raphaël à l'optimum. Les lits pour enfants ne doivent plus être seulement sur Pierrefeu. L'intérêt reconnu de l'accueil familial thérapeutique doit permettre au Var de développer cette pratique.

    * Le partenariat déjà existant doit être développé (maternités, pédiatrie, urgences...).

    Applications des propositions aux divers sites

    En psychiatrie générale

    Fréjus-Saint-Raphaël :

    * accueil et soins psychiatrique au CH de Saint-Tropez ;

    * un CMP à Sainte Maxime ;

    * accueil des HO et HDT au CH de Fréjus-Saint-Raphaël.

    Draguignan :

    * création d'un second secteur ;

    * réorienter la destination et l'usage de Saint-Pons ;

    * coordonner les actions avec Fréjus-Saint-Raphaël pour rechercher les complémentarités.

    Toulon-La-Seyne :

    * coordination du travail des secteurs 83G03 (Toulon) et 83G04 (Pierrefeu) tous deux sur Font-Pré ;

    * complémentarité Pierrefeu-Toulon pour l'alcoologie, les personnes âgées, Sida, toxicomanie...

    * Chalucet, La-Seyne et Font-Pré doivent tous trois adapter leurs locaux et recevoir HO et HDT.

    Pierrefeu-du-Var :

    * n'accueillir que les HO et HDT relevant de leurs secteurs ;

    * développer la collaboration avec Le Luc pour une gérontopsychiatrie départementale ;

    * développer ses pôles d'activités spécifiques en les ouvrant vers les autres établissements ;

    * disposer des lits vers les CHG, et en transformer en places d'alternatives à l'hospitalisation ;

    * transférer environ 60 postes vers les CHG pour l'accueil des HO et HDT.

    En psychiatrie infanto-juvénile

    Fréjus-Saint-Raphaël :

    * augmenter la présence soignante à Sainte Maxime, Saint Tropez, Roquebrune ;

    * créer une antenne à Fayence ;

    * créer un SESSAD et un centre de crise pour adolescents à Saint-Raphaël ;

    * partenariat avec la gynéco-obstétrique et à terme unité mère-enfant.

    Pierrefeu-du-Var :

    * regrouper à Hyères CMP et hôpital de jour (Gien), classe thérapeutique à Hyères ;

    * agrandir le CMP de Solliès-Pont ;

    * collaboration psychiatrie générale et infanto-juvénile pour une unité pour adolescents.


    CONTRAT D'OBJECTIFS

    VISANT À LA MISE EN ŒUVRE DU PLAN

    DE RESTRUCTURATION PROPOSÉ PAR LA MNASM (RÉSUMÉ)

    Ce contrat associe le directeur régional des Affaires sanitaires et sociales de la Région Provence, Alpes, Côte-d'Azur et le directeur départemental des Affaires sanitaires et sociales du Var, l'assurance maladie représentée par le directeur de la Caisse régionale d'assurance maladie et le médecin-chef de l'échelon régional du Contrôle médical, les centres hospitaliers de Fréjus-Saint-Raphaël, de Draguignan, de Toulon-la-Seyne, de Pierrefeu du Var.

    Article I. - PRÉAMBULE

    Établi dans le cadre de l'article L-712-4 de la loi du 31 juillet 1991. Il vise à garantir à la population varoise une psychiatrie accessible à tous grâce à des services de proximité permettant à chacun d'être traité dans la structure adaptée la plus proche de son domicile. Il s'inscrit pleinement dans les conclusions du rapport de la Mission nationale d'appui en santé mentale portant sur le département du Var et fixe les actions à mettre en œuvre par les signataires. Il est pluriannuel et se décompose en sous-objectifs annuels s'imposant à chacun des partenaires. Le calendrier de réalisation de ces objectifs prioritaires est prévu sur trois ans.

    Art. II. - LES ACTIONS DEVANT ETRE MISES EN ŒUVRE

    En 1996, les actions portant sur la psychiatrie générale :

    * Prise en charge de 25 malades hospitalisés au CHS de Pierrefeu par chaque secteur rattaché aux CH de Fréjus et Draguignan et par trois des secteurs rattachés au CHI de Toulon (au CHS, fermeture d'une unité au moins de 25 lits).

    * Ouverture de l'unité fermée de l'hôpital Chalucet à Toulon.

    * Renforcement de l'accueil des urgences psychiatriques au CHI de Toulon grâce à la participation aux tours de garde de l'équipe du secteur rattaché à Pierrefeu.

    * Aménagement de locaux nécessaires à l'hospitalisation et renforcement de l'équipe du secteur de Toulon ne disposant jusqu'à maintenant que d'un PH et de 7 personnels.

    * Aménagement des locaux nécessaires au fonctionnement d'une unité d'hospitalisation sous contrainte de dix lits au CHI de Fréjus.

    * Aménagement des locaux nécessaires à l'accueil des hospitalisations d'office à Draguignan et recherche d'une solution pour le transfert des malades de Saint Pons sur Draguignan.

    * Lancement d'une étude départementale en matière d'alcoologie.

    Pour la psychiatrie infanto-juvénile :

    * Renforcement de l'équipe de secteur de Fréjus pour permettre le développement des structures alternatives à l'hospitalisation.

    * Installation d'une antenne de CMP à Fayence.

    * Renforcement de l'équipe médicale d'un des secteurs de Toulon.

    En 1997, pour la psychiatrie infanto-juvénile :

    * Renforcement des moyens des deux secteurs toulonnais.

    * Mise en place d'un médecin chargé de la mise en place du centre de crise pour adolescents.

    * Développement des structures extra-hospitalières dépendant du CHS de Pierrefeu du Var.

    Pour la psychiatrie générale :

    * Renforcement des équipes de secteur toulonnais leur permettant de prendre en charge l'ensemble des hospitalisations relevant de leur secteur.

    * Renforcement des équipes de secteur permettant le développement de structures extra-hospitalières sur le golfe de Saint Tropez.

    * Fermeture d'une deuxième unité au moins de 25 lits au CHS de Pierrefeu et restructuration du CHS de Pierrefeu conformément aux recommandations du rapport.

    * Recherche d'une solution pour le transfert des malades de Saint Pons sur Draguignan.

    En 1998, pour la psychiatrie générale :

    Au CHI de Toulon : installation de deux secteurs sur le site de la Seyne et aménagement des locaux destinés au service d'accueil des urgences ainsi que ceux du secteur d'hospitalisation de l'hôpital Font-Pré.

    CH de Draguignan : aménagement du nouveau bâtiment et développement des structures extra-hospitalières.

    CHS de Pierrefeu : poursuite de la restructuration engagée et étude des possibilités de redéploiement pour l'unité d'hospitalisation pour adolescents.

    Pour la psychiatrie infanto-juvénile :

    CHI de Toulon : installation du centre de crise pour adolescents.

    CHS de Pierrefeu : étude des moyens disponibles pour une unité d'hospitalisation pour adolescents. A défaut de moyens disponibles sur le CHS, révision éventuelle du lieu d'implantation de cette unité en fonction des besoins qui auront pu être mis en évidence dans le cadre du schéma régional.

    Art. III. - LES MOYENS DEVANT PERMETTRE LA MISE EN PLACE DE CES ACTIONS

    Conformément aux directives du rapport établi par la MNASM auquel l'ensemble des acteurs ont souscrit, les moyens seront soit redéployés, soit affectés, afin de mettre en œuvre le schéma précédemment décrit.

    En ce qui concerne les emplois, la valorisation uniforme des postes créés ou redéployés est effectuée selon les modalités suivantes :

    * Postes non médicaux : 250 000 F par poste.

    * Postes médicaux : 550 000 F pour un PH ou deux assistants spécialistes.

    Ce niveau de valorisation permet de façon forfaitaire de tenir compte de l'ensemble des frais de fonctionnement afférents aux structures créées et d'aménagement.

    Art. IV. - MISE EN PLACE DU SUIVI MÉDICO-ADMINISTRATIF

    Un comité de suivi des objectifs du contrat sera créé, composé des représentants de l'État, des organismes d'assurance maladie et des responsables des établissements (directeurs et présidents de CME). Une évaluation régulière de la mise en œuvre portera sur :

    * les modalités de prise en charge (plus particulièrement l'évolution de la répartition et du nombre des hospitalisations sous contraintes, accueil des malades en urgence) ;

    * l'évolution des structures de prise en charge des malades et leur activité en fonction des moyens attribués ;

    * toute analyse complémentaire notamment des populations prises en charge qui pourrait être décidée par le comité de suivi.

    Cette évaluation tiendra compte également des éléments du rapport annuel de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques.

    Ce comité de suivi se réunira deux fois par an : en début de chaque année, pour faire le bilan des réalisations de l'année précédente et en septembre pour préparer les actions à engager l'année suivante.

    LES ANNEXES

    En annexe, on relève les dates des actions à mettre en œuvre en 1996 ainsi que les moyens et leur origine prévus. La date de mise en œuvre des actions prévues en 1997 et 1998 seront décidées dans le cadre du comité de suivi.

    En annexe sont également décrites les modalités concernant le fonctionnement en moyens et personnels pour ce qui concerne :

    * au CHI de Toulon la prise en charge de l'ensemble des malades par les équipes de secteur dont ils relèvent et l'accueil des urgences psychiatriques ;

    * au CHI Fréjus-Saint-Raphaël les données nouvelles pour la psychiatrie générale et infanto-juvénile ;

    * au CH de Draguignan la prise en charge des placements d'office des deux secteurs dracénois (deuxième secteur créé) ;

    * au CH de Pierrefeu, l'organisation du transfert des patients hospitalisés sous contrainte relevant des autres secteurs que ceux de l'établissement, les redéploiements de personnels, le renforcement des urgences psychiatriques à l'hôpital Font-Pré.

    La révision du projet et du programme d'établissement des quatre centres hospitaliers compte tenu des recommandations du rapport de la MNASM devaient être déposés dans la période du 1er avril au 30 mai 1996.


    LE POINT DE VUE DE LA MISSION

    L'exemple varois appelle un commentaire. Une lecture rapide pourrait laisser penser qu'il suffise de faire appel à la mission d'appui pour obtenir des moyens supplémentaires. Lors de la quasi totalité des interventions de la mission sur le terrain, il apparaît que pour la plupart des acteurs, la demande de moyens précède le débat de fond, quand elle n'est pas à l'origine de l'appel fait à ses services.

    Pourtant notre approche s'inscrit avant tout dans une démarche de santé publique qui vise à rechercher une meilleure réponse à la demande d'un département replacé dans son contexte régional (la région constitue et deviendra encore davantage le niveau de cohérence).

    Il serait présomptueux de croire qu'on puisse résoudre, en si peu de temps, une situation complexe née de blocages qui s'est forgée au fil des années. En revanche, faire admettre le principe d'une recomposition du dispositif en fonction des bassins de population, des principales sources de demandes et à partir des grandes orientations nationales, obtenir un compromis représente une étape importante d'un processus qui devra se poursuivre et s'affiner. Ce résultat, qui se traduit souvent par des déplacements d'équipements, voire des transferts de responsabilité peut être accompagné de moyens financiers. Cela dépend des possibilités départementales et régionales mais aussi et surtout, de l'effort consenti par tous les acteurs. L'absence de moyens est certes un handicap, mais il ne peut être considéré comme rédhibitoire. Bien des améliorations sont obtenues par des évolutions internes, déjà connues mais qui nécessitent l'intervention d'un tiers pour être formalisées. Dans le Var, les moyens ont accompagné le rééquilibrage. Il convient cependant de les rapprocher des efforts importants acceptés par les établissements afin de faire évoluer la psychiatrie de ce département. C'est sans doute ce que les tutelles ont voulu soutenir.


    CHENRI LACHAUSSÉE, nouveau président de l'UNAFAM. Le conseil d'administration de l'UNAFAM (Union nationale des amis et familles de malades mentaux) a élu un nouveau bureau national dont le président est Henri Lachaussée. Il succède à Geneviève Laroque, élue en 1993, qui ne souhaitait pas renouveler son mandat.

    Danièle Mauduit, vice-présidente ; Pierre Roussel, trésorier, et Albert Néfussy, secrétaire général, complètent ce bureau.

    Cette nouvelle équipe entend poursuivre les actions de l'UNAFAM dont l'objectif principal reste la défense des intérêts matériels et moraux des malades et de leurs familles.

    L'UNAFAM envisage également le développement d'actions de prévention des troubles psychiques. Rappelons que le prochain congrès annuel de l'UNAFAM se tiendra à Lille les 22 et 23 novembre 1996 sur le thème "Prévention, accompagnement, recherche".


    VOUS DEMANDEZ "PLURIELS". "Pluriels" rencontre un véritable écho et nous en sommes très satisfaits. A chaque parution, nous recevons un grand nombre de demandes pour que nous assurions son envoi. Voici comment actuellement est pratiquée la livraison de "Pluriels". En plus de l'envoi qui en est fait aux DASS et aux DRASS, "Pluriels" est posté dans trois directions : les présidents de CME, les directeurs d'établissements et les infirmiers généraux. Chacun de ces destinataires reçoit un nombre d'exemplaires en relation avec l'importance de son service afin qu'il les distribue autour de lui. Nous les interrogeons actuellement afin d'ajuster ce nombre à leurs besoins.

    C'est donc à partir de ces trois directions que nous prévoyons d'augmenter notre diffusion. Nos finances ­ la pauvreté de nos finances ­, ne nous permettent pas ­ hélas ­ de faire plus... du moins pour le moment.

    A l'occasion de cette mise au point, nous vous rappelons que "Pluriels" vous est ouvert et que nous publirons les informations, propositions et réflexions que vous voudrez bien nous adresser... à condition d'une certaine concision dans l'expression.


    dernière heure

    COMMENT ÉVALUER VOS ACTIONS DE PRÉVENTION ?

    * Avec combien de médecins généralistes ou spécialistes le secteur est-il en relation régulière ?

    * Combien de médecins généralistes ou spécialistes viennent régulièrement voir leurs patients lors d'une hospitalisation à temps complet ?

    * Combien de médecins généralistes ou spécialistes avez-vous reçus dans votre CMP depuis six mois ?

    * Avec combien de maisons de retraite ou de longs séjours pour personnes âgées avez-vous passé des conventions ?

    * Avec combien d'écoles ou de lycées avez-vous mis en place une approche de la problématique de l'adolescence ?

    * Avec combien d'écoles ou de lycées avez-vous mis en place une approche de la problématique de la toxicomanie ?

    * Avec combien d'institutions publiques ou privées, professionnelles ou scolaires, avez-vous mis en place une approche de la problématique de l'alcoolisme ?

    G. Wagennar *


    Circulaire du 14 mars 1990 : Constitution d'un groupe de travail

    La circulaire du 14 mars 1990 a-t-elle provoqué ou accompagné les évolutions souhaitées par ses auteurs ?

    Est-elle toujours d'actualité et conserve-t-elle aujourd'hui la même pertinence dans un contexte juridique et social profondément remanié ?

    Telles sont les questions que la D.G.S. et la D.H. se posent aujourd'hui en demandant à la Mission Nationale d'Appui en Santé Mentale d'établir un bilan succinct de la mise en œuvre de cette circulaire.

    A cet effet, un groupe de travail interdisciplinaire a été constitué. Il lui appartiendra d'ici à la fin de l'année de consulter largement les divers acteurs et partenaires de la santé mentale.

    Pluriels

  • La Lettre de la Mission Nationale d'Appui à la Santé Mentale - Directeur de la publication : G. Massé - Comité de rédaction : C. Bonal - M. Clémente - J. Collet - S. Kannas - L. Lefèvre - R. Lepoutre - J.-P. Mariani - F. Pétoin.

  • "Pluriels", 74 bis, avenue Edison, 75013 Paris - N° de téléphone : 01.45.85.73.63 - N° de télécopie : 01.45.85.99.11.