LíENFANT INCENDIAIRE :
A PROPOS DE DEUX OBSERVATIONS CLINIQUES

 

E.GABSI ; Ch. MAATKI ; M. BEN KHEDER ;

L. BEN AMOR ; M.B. HALAYEM.

 Retour au Sommaire

 

RESUME 

La conduite incendiaire, constitue une des conduites antisociales les plus dangereuses, relativement rare chez líenfant.

En síétayant sur la revue de la littérature et à la lumière des deux observations cliniques díenfants incendiaires suivis en pédopsychiatrie, nous développerons quelques caractéristiques cliniques, tout en soulignant líimportance du contexte psychologique dans lequel surviennent des conduites incendiaires.

 

  1. INTRODUCTION :
  2. Selon BACHELARD líenfant parle du feu, le représente dans ses dessins, líutilise pour son plaisir et sa jouissance mais aussi pour agresser voire síautoagresser.

    Pour MACHT et MACK par contre ; líacte incendiaire répond à des déterminants multiples dans sa signification et dans son association avec des relations humaines importantes passées et présentes.

    Cette conduite incendiaire, nous avons choisi de líillustrer par deux observations cliniques.

  3. OBSERVATIONS CLINIQUES
    1. OBSERVATION N(infinity)1
    2. AMIRA, petite fille âgée de 7 ans, consulte en pédopsychiatrie, accompagnée de sa mère pour : des difficultés scolaires, des conduites antisociales ainsi que des conduites incendiaires.

      Fille unique, Amira vit avec sa mère depuis le divorce de ses parents alors quíelle níétait âgée que de deux mois.

      Le début des troubles remonte à un an au paravent, marqué par une hétéroagréssivité ; essentiellement dirigée vers la mère, et une activité destructrice particulière consistant à découper les habits et à trouer les meubles et les ustensiles ménagers (casseroles, plats) sur cet ensemble, síest greffé des conduites incendiaires itératives et dangereuses, divers matelas, draps et lingeries ont été pris, dévorés, ravagés par le feu, aggravant les conditions socio-économiques déjà précaires de la famille.

      Ces conduites survenant exclusivement en líabsence de la mère est à líorigine díune relation particulière : ou la mère ne quitte plus de regard sa fille, voire la maintient attachée et devient aussi de plus en plus rejetante ; elle nous sollicitera díemblée pour un placement institutionnel.

    3. OBSERVATION N(infinity)2 :

    AHMED âgé de 9 ans, consulte en pédopsychiatrie, accompagné de sa mère pour : difficultés scolaires et conduites antisociales à type de fugues et de conduites incendiaires. Benjamin díune fratrie de deux garçons, Ahmed vit avec sa mère chez la GMM et ce, depuis le refus du père díy déménager. Le début des troubles remonte à environ un an, marqué par une instabilité psychomotrice majeure, une diminution du rendement scolaire, des fugues de plus en plus fréquentes et récemment, líinstallation díune conduite incendiaire, survenant aussi à la maison et en líabsence de la mère. Là aussi, habits, lingerie et rideaux sont, et à maintes reprises les objets privilégies de cette conduite impulsive et culpabilisante puisquíAhmed accourait lui même à chaque fois pour éteindre à sa façon le sinistre hyperprotectrice et autoritaire, la réponse maternelle consistait en des attitudes répressives de plus en plus violente. Effacé, passif et fuyant les conflits conjugaux, le père trouve refuge lui aussi chez sa propre mère loin de ses enfants.

    dans ces deux observations, líexamen psychiatrique retrouve un état dépressif masqué par ces troubles des conduites.

  4. DISCUSSION ET REVUE DE LA LITTERATURE
  5. La revue de la littérature, relève la très forte prédominance masculine chez les enfants incendiaires avec en moyenne une fille pour 15 garçons.

    Selon YARNELL, et contrairement à líadolescent, les enfants de 6 à 9 ans agissent seuls, à la maison et en líabsence des parents ; malgré son caractère dangereux, ce comportement ne constitue pas selon cet auteur le motif essentiel de la consultation pédopsychiatrique, et il est souvent associé à díautres conduites antisociales telles que fugues, mensonges, ainsi quíà des difficultés scolaires qui prennent dans la majorité des cas le devant de la scène.

    Cette donnée, se retrouve dans nos observations et illustre díemblée les difficultés relationnelles intrafamiliales. En effet, concernant le milieu familial, tous les auteurs síaccordent pour souligner son caractère très défavorable.

    KAUFTAN et col, font état chez les æ des parents, díau moins un facteur défavorable, quíil síagisse de séparation, díalcoolisme, de psychose voire même de rivalité.

    VANDERSAL et col ne retrouvent sur 20 observations, aucun père pouvant être considéré comme " adéquat " : síil níest pas totalement absent physiquement, il apparaît au mieux comme distant et totalement désintéressé de líéducation de ses enfants ; les mères par contre, oscillant entre le rejet et líhyperprotection.

    Pour STEWART, seulement 1/3 des 46 enfants étudiés vivent avec leur deux parents ; les autres ayant connu líexpérience de la désunion, de líabondant ou des conflits conjugaux.

    Sur le plan psychiatrique, et dans la majorité des cas, un état dépressif coexiste et demeure masqué par ces conduites pathologiques cíest ainsi que ce passage à líacte semble exprimer líagressivité díenfants vivant des situations instruisantes voire déprimantes.

    Sur le plan psychopathologie, YERNELL signale que ces enfants manifestent un haut niveau díinsécurité et de carence affective ; leur conduite pouvant être considérée comme líexpression directe par le biais du pouvoir magique du feu, de líagressivité par rapport aux adultes perçus comme rejetants ; on signale toujours chez les enfants incendiaires une petite note de culpabilité et díanxiété ; ainsi que la survenue de ces conduites sous tendues par des motifs variés tels que la vengeance, des raisons díordre compensatoire ou même de revendication envers la famille.

    Selon MACHT ET MACK, cette conduite incendiaire procure à ces enfants une excitation sexuelle intense liée à des désirs et à des impulsions destructrices. Aussi, mettre le feu est un phénomène complexe, implique généralement les fonctions intrapsychiques multiples ; il ne síagit pas díun acte isolé et pas seulement díun simple passage à líacte impulsif, mais, líexpression díéléments instinctuels de destruction, díexcitation libidinale et díélaboration fantasmatique.

  6. CONCLUSION :

Et selon líexpression de MACHT et MACK : provoquer un incendie, ne consiste pas seulement à mettre le feu, mais aussi, à déclencher líalarme et à utiliser líincendie comme signal díappel à líaide ./.

 

BIBLIOGRAPHIE

BACHELARD. G La psychanalyse du feu Gallimard 1983.

KAUFMAN. I et col Are evaluation of the psychodynamics of firesetting Am-j orthopsychiat. 1961

MACHT. L ; MACK. J The firesetter syndrome psychiatry 1968

MORON et col Líenfant et le feu. Reflexions médico légales Neuropsychiatrie de líenfant 1986

STEWART M.A et col Children who set fires : the clinical picture and a follow up. Brit. J. Psy 1982

VANDERSALL et col Children who set fires Arch. Gen .Psychiatry 1970

YARNELL. H Firesetting in children .An.J. orthpsychiatry 1940.

Retour au Sommaire